Terrains de la Molson Le projet immobilier compromis
PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE
Le trio Sélection-Montoni-Fonds de solidarité FTQ a finalisé l’achat des terrains du brasseur en juin 2019 pour 126 millions. Le consortium veut y construire de 400 à 5000 logements dans le cadre d’un projet mixte qui comprend le maintien du siège social de Molson, l’aménagement d’un supermarché et la conservation de l’horloge Molson.
Le consortium propriétaire des terrains de la brasserie Molson à l’est du Vieux-Montréal remet en question l’entente de développement qu’il a signée avec la Ville de Montréal à la suite de l’adoption du nouveau programme d’urbanisme qui limite les constructions en hauteur dans le secteur.
Publié le 30 juin 2021 à 5h00
André Dubuc La Presse
« Nous sommes déçus du PPU [programme particulier d’urbanisme] », confie à La Presse Mylène Dupéré, vice-président aux affaires publiques de Groupe Sélection, un des membres du consortium propriétaire du site de la brasserie Molson. « Les hauteurs ne sont pas ce à quoi on s’attendait. La capacité d’accueil qui en résulte ne nous permet pas de réaliser la vision que nous avions développée en fonction de l’entente signée en juin 2019 avec la Ville de Montréal. »
Ce point de vue n’est pas partagé par la Ville. « La densité prévue dans l’entente conclue en 2019 a bel et bien été confirmée dans la version finale du PPU des Faubourgs », fait-elle savoir à La Presse dans un courriel. Elle garde toutefois les canaux de communication ouverts. « L’arrondissement va poursuivre son travail avec le promoteur pour permettre le développement d’un projet qui pourra entrer dans les paramètres de l’entente, de plein droit ou par un processus de projet particulier. Une rencontre avec l’administration était prévue ce lundi et a dû être replanifiée en raison d’un conflit d’horaire. Cette rencontre se tiendra rapidement », écrit Marilyne Laroche Corbeil, relationniste de la Ville.
En vertu de l’entente de gré à gré de 2019, Groupe Sélection et Montoni s’engageaient à céder à la Ville de Montréal 20 % de la superficie du site de 1,16 million de pieds carrés pour l’aménagement d’un parc et d’une promenade fluviale aux frais de la Ville, d’une école et d’autres usages communautaires. Il était aussi question de faire construire 200 logements sociaux par la Société d’habitation et de développement de Montréal.
De 400 à 5000 logements
Le trio Sélection-Montoni-Fonds de solidarité FTQ a finalisé l’achat des terrains du brasseur en juin 2019 pour 126 millions. Molson Coors termine la construction de sa nouvelle brasserie dans l’arrondissement de Saint-Hubert, à Longueuil.
Le consortium veut y construire de 400 à 5000 logements dans le cadre d’un projet mixte qui comprend le maintien du siège social de Molson, l’aménagement d’un supermarché et la conservation de l’horloge Molson.
Depuis sa signature, cette entente a souvent été citée par l’administration de la mairesse Valérie Plante comme un exemple de sa vision en matière de développement urbain. « Nous nous sommes aussi assuré que le développement de nouveaux quartiers à Montréal serait bien ancré dans le XXIe siècle. L’entente que nous avons conclue pour l’aménagement des terrains de la brasserie Molson en [est] la preuve tangible », écrivait-elle dans une lettre ouverte à La Presse parue en novembre 2019.
La Ville de Montréal a adopté le PPU des Faubourgs le 10 juin dernier. Les Faubourgs couvrent un territoire au sud-est du centre-ville, de part et d’autre du pont Jacques-Cartier. Il comprend trois vastes terrains qui seront prochainement mis en valeur : le site de l’ancienne tour de Radio-Canada, la vieille brasserie Molson et la porte Sainte-Marie, tout juste à l’est du pont.
Par rapport à la version soumise à la consultation publique, la zone de hauteur de 80 mètres a été abaissée à 65 mètres en réponse à une recommandation de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM).
Pour des constructions résidentielles, il faut compter environ trois mètres par étage. Donc, 65 mètres donnent entre 20 et 23 étages et 80 mètres, entre 25 et 28 étages. Dominant le quartier, la tour de Radio-Canada a une hauteur de 100 mètres.
Un article paru mardi dans La Presse indiquait que l’OCPM s’est appuyé sur des avis dépassés de l’Ordre des architectes pour recommander la baisse des hauteurs dans le secteur. L’Ordre s’est dit surpris de voir le rapport de l’Office de mars 2021 citer son ancien mémoire, lequel avait été formellement désavoué 15 mois plus tôt. L’OCPM a reconnu son erreur mardi, mais n’entend pas modifier son rapport pour autant parce que, selon lui, au moins cinq organismes entendus en audition partagent sa position sur les hauteurs.
« La hauteur est vue comme une chose dangereuse »
« La hauteur est vue par la Ville comme une chose dangereuse », dit Daniel Arbour, vice-président, grands projets, au Groupe Mach, qui construit le Quartier des lumières sur le site de l’ancienne tour de Radio-Canada, un projet aux vocations plurielles comprenant la construction à terme de près de 3000 logements.
« La hauteur, poursuit M. Arbour, c’est essentiel si on veut faire une ville qui respire, qui a des espaces verts et qui a de la lumière sur les rues. [Avec le PPU], on ne change pas la densité selon le COS [nombre de pieds carrés que l’on peut construire sur un terrain donné], mais on limite les hauteurs. On se ramasse avec des gros pâtés de maisons qui occupent l’ensemble du terrain. Il n’y a plus d’espaces verts. On est évidemment contre la décision d’abaisser les hauteurs qui a été prise, mais il faut vivre avec. »
Au début de juin, l’arrondissement de Ville-Marie et la Ville ont d’ailleurs conclu une entente avec le Groupe Mach pour le développement de 482 logements sociaux et 245 logements abordables sur l’ancien site de Radio-Canada. Le nouveau PPU ne vient rien changer à cette entente, assure M. Arbour.
Ce dernier en a aussi contre la décision de la Ville de réduire la superficie des planchers des étages se trouvant au-dessus du basilaire de 30 mètres de haut. Selon le Groupe Mach, cette décision aura un impact à la hausse sur le prix des unités. « Plus on réduit la taille des planchers, plus le coût de construction monte par pied carré construit. »
Il a été impossible de parler au Groupe Prével, propriétaire du terrain de la porte Sainte-Marie.
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