Il semble qu’il y a de l’argent pour reconfigurer une autoroute…
C’Est une bonne nouvelle de vouloir réduire la largeur de l’autoroute… mais peut-on mettre de l’argent dans le transport collectif à Québec avant?
Autoroute Dufferin-Montmorency Un concours pour régler la « bêtise du siècle »
PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE
L’autoroute Dufferin-Montmorency longe le fleuve Saint-Laurent dans l’est de la capitale.
(Québec) L’ancien ministre péquiste Marcel Léger avait qualifié la construction d’une autoroute de six voies sur les berges du Saint-Laurent à Québec en 1978 de « bêtise du siècle » qui privait les citoyens de l’accès au fleuve.
Publié à 13h26
GABRIEL BÉLAND
LA PRESSE
Quarante-cinq ans plus tard, le gouvernement Legault annonce le lancement d’un concours international pour repenser ce secteur de la capitale. Il se montre même ouvert à l’idée de réduire la largeur de l’autoroute Dufferin-Montmorency.
« C’est un engagement ferme de redonner le fleuve aux citoyens », a lancé vendredi le ministre de la Capitale-Nationale, Jonatan Julien.
PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE
Le ministre responsable de la Capitale-Nationale, Jonatan Julie, entouré du député de Montmorency, Jean-François Simard (à gauche), et du maire de Québec, Bruno Marchand.
Le concours international sera lancé dès la semaine prochaine pour la requalification d’une bande de terre prise entre le fleuve et l’autoroute sur 8 km, de la Baie de Beauport jusqu’au parc de la Chute-Montmorency.
Un jury d’experts va sélectionner trois lauréats en avril prochain. Puis, la population sera consultée sur les trois scénarios. Le président du jury est le paysagiste Bertrand Vignal, de la firme française BASE. C’est cette firme qui a notamment remporté le mandat de réaménager la rive droite du Rhône à Lyon, où une autoroute doit être réduite.
Par le passé, les élus de la CAQ s’étaient montrés timides quant à une transformation de Dufferin-Montmorency en boulevard urbain, comme le demandent unanimement les élus du conseil municipal de Québec.
Mais vendredi, ils ont ouvert la porte à un réaménagement de l’autoroute, et notamment à ce qu’elle passe de six à quatre voies. Actuellement, l’autoroute est conçue pour accueillir plus de 90 000 voitures par jour. Elle en reçoit dans ce secteur de Beauport tout au plus 30 000 par jour, et 18 000 à certains endroits.
« Dans le passé, […] on n’était peut-être pas assez prêts à l’éventualité de transformer ce boulevard en autre chose. Si on est ici aujourd’hui, c’est qu’on est prêts à le faire », a dit le ministre Julien.
Ce projet, présenté comme la phase 4 de la promenade Samuel-de-Champlain, a les mêmes objectifs que ce qui a été réalisé dans l’ouest de la capitale : redonner accès au fleuve aux citoyens, et faire une promenade linéaire pour le vélo et la marche.
Marchand en retrait
Le député caquiste de Montmorency ne cachait pas sa joie. « La plus belle annonce dans ma vie de député jusqu’à maintenant, c’est l’annonce de la phase 4 », a laissé tomber Jean-François Simard.
À sa gauche, le maire de Québec n’affichait pas le même sourire. Bruno Marchand s’est réjoui de l’annonce. Mais elle survient à l’issue d’une semaine particulièrement difficile au cours de laquelle ce même gouvernement l’a dépossédé de son projet de tramway, le remettant entre les mains de la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Il a d’ailleurs refusé de répondre à toute question à ce sujet. « Toutes les questions liées à ce projet-là vont être redirigées vers le ministre, a-t-il dit. Vous aurez beau m’en poser cinquante dans les prochains mois, je n’y répondrai pas. C’est une décision du gouvernement, il prend le ballon, ils vont répondre. »
Peut-on croire la CAQ quand elle annonce des projets pour Québec, vu leurs hésitations dans les dossiers du tramway et du troisième lien ? « Je sens l’engagement sincère du ministre et sa volonté d’aller de l’avant » avec le réaménagement des berges à l’est, s’est contenté de répondre le maire.
Le chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville s’est réjoui du lancement de ce concours, lui qui réclame depuis longtemps que l’autoroute devienne un boulevard urbain. Mais Claude Villeneuve n’a pu s’empêcher de remarquer que le maire semblait ébranlé.
« C’est sûr que c’est humiliant pour le maire et à travers ça pour tous les citoyens de Québec, la séquence. Ce qu’on vit, de se faire retirer le projet, c’est un très dur coup pour tout le monde. Ce n’est pas la fête pour Québec », a lancé M. Villeneuve.
« J’essaye de m’imaginer Jean-Paul L’Allier, Andrée Boucher ou Régis Labeaume se mettre dans cette situation-là, mais je n’y crois pas », a-t-il ajouté.
La CAQ cherche des « idées » pour la phase 4 de la promenade Champlain

La construction de l’autoroute Dufferin-Montmorency, dans les années 1970, a privé les citoyens de Beauport de leur accès au fleuve Saint-Laurent.
PHOTO : RADIO-CANADA
Érik Chouinard
Publié à 12 h 31 HNEMis à jour à 14 h 00 HNE
Le lancement du concours d’idéation pour la phase 4 de la promenade Samuel-De Champlain laisse planer une promenade continue et une transformation de tout l’accès au fleuve à partir de Beauport, ouvrant aussi la porte à un boulevard urbain sur Dufferin-Montmorency. Malgré l’ambition que promet le gouvernement du Québec, il laisse tout de même planer un doute sur la possibilité de réduire la capacité routière.
Après une grosse semaine d’actualité, le maire de Québec, Bruno Marchand, et le ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, Jonatan Julien, étaient de nouveau réunis pour annoncer le lancement du concours. Ils étaient accompagnés du député de Montmorency, Jean-François Simard et des deux architectes Jérôme Lapierre et Jacques White qui préparent la documentation et les paramètres du concours.

Le ministre et le maire était assis côte à côte pendant l’annonce.
PHOTO : RADIO-CANADA
La poussière n’était visiblement pas encore retombée entre le maire et le ministre depuis l’annonce de l’abandon du projet de tramway de la Ville par le gouvernement. Le maire Marchand a refusé de répondre aux questions sur le sujet, les renvoyant systématiquement à Jonatan Julien.
Inspiré par le succès de la phase 3, les intervenants présents appellent à l’audace et à l’ouverture, mais comme c’est un concours d’idées, il n’y aura pas nécessairement de plan définitif retenu à la fin du processus.
Au terme du concours international, les trois projets retenus par le jury seront présentés à la population au printemps 2024. Le concept final pourrait réunir des éléments de chacun d’entre eux.

La très populaire plage de la phase 3 de la promenade Samuel-De Champlain a été inaugurée cet été.
PHOTO : RADIO-CANADA / ERIK CHOUINARD
L’incertitude du boulevard urbain et du 3e lien
L’un des 4 axes d’interventions du concours intitulé (re)questionnement de l’axe de transit dans son aménagement actuel se penchent justement sur l’avenir de l’autoroute Dufferin Montmorency.
La question de la requalification de l’artère en boulevard urbain reste entre autres encore en suspens. Jonatan Julien a refusé de trop s’avancer sur le sujet de la réduction de la capacité routière sur l’artère de six à quatre voies.
Il y a des critères dans le concours et quand on dit aux gens d’être audacieux et ambitieux, c’est dans cette perspective là qu’on le lance, naturellement on doit regarder la capacité, mais ce n’est pas une limitation qu’on observe en ce moment, répond-il.

Les battures de Beauport sont prisonnières de l’autoroute Dufferin-Montmorency et d’installations industrielles sur la quasi-totalité de la circonscription de Jean-Lesage
PHOTO : RADIO-CANADA / DAVID RÉMILLARD
Le ministre insiste sur l’ouverture qu’il laisse pour évaluer les options. Il mentionne aussi que c’est pour cette raison qu’une personne du ministère des Transports et de la Mobilité durable est dans le jury. Je ne lancerais pas ce concours si je ne présumais pas qu’on est prêt à faire ce pas-là. On a bien observé qu’en maintenant la situation actuelle sur le boulevard, au mieux on avait des percées visuelles et ce n’est pas ce qu’on souhaite, avance-t-il.
La perspective d’un troisième lien autoroutier qui débouche dans le secteur n’est pas pour autant écartée malgré les questionnements sur les capacités routières de l’artère. C’est une question hypothétique, un peut se faire avec ou sans l’autre, se contente d’affirmer Jonatan Julien.

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Dans les premiers plans du gouvernement pour le troisième lien, le tunnel devait être relié à l’autoroute Dufferin-Montmorency en passant par le cap.
PHOTO : GOUVERNEMENT DU QUÉBEC*
L’incertitude inquiète le député solidaire de Jean-Lesage, Sol Zanetti, même s’il est heureux de voir des progrès dans le dossier. C’est clair pour moi qu’on ne peut pas redonner accès au fleuve sans un boulevard urbain, souligne-t-il par écrit.
L’aspect plus certain de la promenade semble être la volonté de redonner l’accès au fleuve et au littoral ainsi que le développement de la mobilité active. Ça pour moi c’est la vraie trame à laquelle tout le reste doit s’attacher, confirme le ministre.
Annonce décalée
L’annonce devait initialement avoir lieu le 6 octobre, quelques jours après l’élection partielle dans Jean-Talon, mais elle avait été annulée. La porte-parole du ministre responsable de la Capitale-Nationale insistait sur le fait que ce report n’est pas une conséquence du retour du troisième lien dans l’actualité.
La dernière fois, ça a été retardé pour cause d’agenda. On a été très clair là-dessus. On est prêt depuis le début du mois d’octobre à faire cette annonce-là, plaide Jonatan Julien.
Les équipes multidisciplinaires qui souhaitent participer au concours pourront déposer leur proposition entre le 16 novembre et le 25 février. Les citoyens sont invités à faire des propositions et poser leurs questions sur le site web de la Commission de la capitale nationale du Québec.

La Commission de la capitale nationale du Québec avait mandaté une firme d’architecture pour qu’elle présente des concepts de ce que pourrait ressembler le littoral aménagé dans le secteur de Beauport (photo d’archives).
PHOTO : LEMAY ARCHITECTURE
Le jury est composé de sept membres, dont un représentant de la Table citoyenne Littoral Est et est présidé par Bertrand Vignal, un urbaniste et architecte paysagiste de l’agence Base en France. L’implication d’un membre citoyen est quelque chose de relativement rare en concours, souligne l’architecte, Jérôme Lapierre.
La phase 4 de la promenade Samuel-De Champlain doit s’étendre sur 8 km de la baie de Beauport, dans le secteur d’Estimauville, jusqu’au quartier des Chutes-Montmorency.
En plus des questionnements sur Dufferin Montmorency, trois autres axes prioritaires ont été identifiés : la valorisation et accessibilité continue du littoral, la connexion des quartiers avoisinants au fleuve ainsi que la conservation et mise en valeur des milieux naturels.
Le concours est ouvert à des participations Les équipes présentant des propositions doivent être composées d’au moins un designer urbain ou un urbaniste, un architecte et un expert en environnement et développement durable.