PHOTO MICHEL PINAULT, FOURNIE PAR L’ARRONDISSEMENT DE VILLE-MARIE
Le parc Médéric-Martin dans le quartier Sainte-Marie, dans l’arrondissement de Ville-Marie
Investir en priorité là où les besoins sont les plus criants : voilà l’engagement que prend l’administration montréalaise, grâce à un nouvel outil permettant d’évaluer l’état de défavorisation des quartiers de la métropole, pour rétablir l’« équité » sur le territoire.
Publié à 16h02 Isabelle Ducas LA PRESSE
« Pendant plusieurs années, il y a des quartiers qui n’ont pas eu, pour toutes sortes de raisons historiques, l’amour et l’attention qu’ils auraient dû recevoir, ce qui a laissé des marques profondes sur le territoire », a souligné la présidente du comité exécutif, Dominique Ollivier, vendredi, lors d’une conférence de presse organisée pour expliquer la nouvelle approche qu’entend adopter la Ville pour prendre ses décisions.
Les iniquités entre quartiers sont observées dans plusieurs sphères, que ce soit les îlots de chaleur, le manque d’espace verts, l’accès restreint au transport en commun ou le manque d’infrastructures de sport et de loisirs, a mentionné Mme Ollivier.
« Mais notre ambition est d’offrir la même qualité de vie et les mêmes services à tous les Montréalais, quel que soit leur quartier », a-t-elle assuré.
C’est ce que devrait permettre l’approche « Quartiers inclusifs et résilients (QIR) », espère l’administration.
L’indice d’équité des milieux de vie développé par la Ville mesure les vulnérabilités économiques, sociales et environnementales, en plus d’évaluer la sécurité urbaine, les ressources de proximité et l’accès aux activités culturelles, sportives et de loisirs.
Une carte interactive a notamment été créée pour identifier les quartiers les plus vulnérables.
« Concrètement, ça pourrait mener à la réalisation d’une place publique, l’aménagement d’un parc ou d’une aire de jeu, la sécurisation d’une intersection, un projet de verdissement, l’amélioration de la sécurité urbaine ou la sécurité alimentaire, ou même la prévention des discriminations », détaille Mme Ollivier.
Pour commencer, cette approche sera adoptée dans trois quartiers dans le cadre d’un projet-pilote : le nord-est de Montréal-Nord, le quartier Sainte-Marie, dans Ville-Marie, et le quartier Saint-Pierre à Lachine, des secteurs identifiés comme étant moins propices à une bonne qualité de vie.
Dans chacun de ces quartiers, on consultera les organismes communautaires locaux, assure la Ville, qui veut implanter une approche « allant du bas vers le haut ».
« Nous allons mettre à contribution la société civile dans le développement de nouveaux milieux de vie pour éviter la gentrification de ces quartiers en transformation et le déplacement forcé de populations vulnérables », indique-t-on.
« Si on veut faire des gains de santé, il faut travailler sur des mesures ciblées pour réduire les écarts et les inégalités », souligne la directrice de la santé publique de Montréal, Mylène Drouin, qui se réjouit de l’initiative de la Ville.
Montreal unveils plan to address neighbourhood inequities
“This approach will allow people to say, this is what we want,” says Dominique Ollivier, from the City of Montreal, as the Plante administration unveiled its new approach to improve quality of life in vulnerable neighbourhoods. Swidda Rassy reports.
Saint-Michel est un quartier qui subit des transformations importantes depuis le tournant des années 2000. La réhabilitation de la carrière Miron, en grande partie occupée aujourd’hui par le magnifique parc Frédéric-Back, ainsi que la création de la Citée des arts du cirque, sont au cœur d’une dynamique de revitalisation qui se poursuit encore aujourd’hui, sous différents aspects, notamment du côté de la mobilité et de la transition écologique.
Place au « Quartier des arts du cirque »
Composée de l’École nationale de cirque, du siège social international du Cirque du Soleil et de La TOHU, seul diffuseur spécialisé en cirque en Amérique du Nord, la Cité des arts du cirque rassemble ainsi une très grande partie des forces vives du milieu circassien québécois, de la formation à la diffusion, en passant par la production.
Actuellement, l’arrondissement de Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension, de concert avec le gouvernement du Québec et quelques partenaires du milieu, planche sur la transformation de la Cité des arts du cirque en Quartier des arts du cirque : « On débute ce chantier, cette réflexion, dans le but d’attirer de nouveaux joueurs dans ce secteur », affirme Laurence Lavigne Lalonde, mairesse de l’arrondissement de VSP. Plus précisément, on élabore différents scénarios qui pourraient développer considérablement le cadre bâti et les espaces existants pour donner une seconde impulsion à ce secteur stratégique. Un plan directeur est d’ailleurs en préparation dit-on du côté de la Ville. « Le Quartier des arts du cirque devient ainsi la pierre angulaire permettant de fédérer les forces vives du milieu, de se doter d’outils d’intervention et de déployer une identité territoriale attractive pour consolider un pôle d’excellence mondial et, à travers une stratégie d’acquisition immobilière concertée, de participer à la revitalisation de tout un quartier », déclare Laurence Lavigne Lalonde.
Pour Thierno Souleymane Diallo, commissaire au développement économique de l’arrondissement, le projet de Quartier des arts du cirque jouerait un rôle important dans le développement économique du territoire : « Le Quartier des arts du cirque se positionne comme une destination culturelle et éco-responsable de premier choix qui devrait attirer encore plus de visiteurs qu’aujourd’hui. En plus de renforcer le dynamisme de l’économie locale en générant plus d’emplois locaux, cet écosystème culturel, social et économique animera de belle façon le quotidien des résidents de Saint-Michel, des visiteurs, et des employés qui travaillent en ces lieux. La Cité des arts du cirque est déjà exceptionnelle, mais le projet de Quartier des arts du cirque promet encore davantage. »
Laurence Lavigne Lalonde, mairesse de l’arrondissement de VSP en compagnie de Thierno Souleymane Diallo, commissaire au développement économique de l’arrondissement (photo courtoisie)
Soulignons que plusieurs organisations et entreprises situées à Saint-Michel favorisent l’employabilité locale, et que cet objectif est toujours au cœur du développement du pôle circassien. La TOHU, par exemple, recrute le plus possible de jeunes des écoles à proximité, qui viennent souvent travailler au bistro durant la saison estivale, et à la billetterie ou l’accueil le week-end ou les soirs d’événements. Cela fait partie de sa mission.
PPU Jarry et pôles d’emplois
Soulignons que le Quartier des arts du cirque s’inscrit également dans le Programme particulier d’urbanisme de la rue Jarry Est, déposé en 2015. Des orientations avaient alors été définies afin de stimuler les différents secteurs de cette artère commerciale de 1,9 km qui traverse le quartier Saint-Michel. « On a vraiment la volonté de revitaliser la rue Jarry, de venir créer de l’habitation, du logement social, du logement abordable et d’améliorer la trame commerciale », soutient la mairesse de VSP. Parmi les objectifs visés par l’arrondissement, on désire particulièrement consolider des pôles d’emplois et créer de la mixité en termes d’usage avec des bâtiments résidentiels et commerciaux. Des initiatives ont déjà vu le jour : 550 logements ont été construits durant les cinq dernières années dans ce secteur. L’administration municipale travaillerait aussi actuellement sur deux projets de logements sociaux ou abordables qui devraient voir le jour bientôt.
La TOHU, dans le quartier Saint-Michel (photo Facebook de l’organisme)
Le PPU Jarry est un chantier très important aux yeux de Laurence Lavigne Lalonde : « On veut vraiment accélérer le pas. On est justement en discussion avec différents partenaires internes à la Ville de Montréal pour organiser les prochaines étapes, en s’assurant d’avoir les ressources humaines et financières nécessaires pour réellement concrétiser plusieurs aspects du PPU. Jusqu’à maintenant, l’arrondissement ne disposait pas des ressources nécessaires pour l’activerpleinement. »
Selon Mme Lavigne Lalonde, l’arrondissement travaillerait en parallèle en ce moment avec PME MTL Centre-Est pour déposer une première stratégie conjointe de développement économique local axée sur la stimulation des pôles d’emplois de VSP. « On en a identifié huit. Du côté de Saint-Michel, on a le Quartier des arts du cirque qui constitue un pôle d’emplois très intéressant. On a aussi le parc industriel, autour de la 17e avenue. On pense qu’il y a un vrai potentiel de consolidation et de développement dans ces deux secteurs », avance la mairesse. Les équipes de l’arrondissement sont notamment en train de dresser un portrait de leurs ressources afin de pouvoir proposer une carte de visite intéressante aux entreprises qui chercheraient de la main-d’œuvre locale.
Autre perspective de la revitalisation de la rue Jarry projetée dans le quartier Saint-Michel (image courtoisie Ville de Montréal)
Vers une mobilité plus fluide
La mobilité représente un autre véritable enjeu pour l’arrondissement et ce particulièrement dans le quartier Saint-Michel : « On travaille en ce moment sur la création d’un lien piéton-cyclable pour relier les deux tronçons de Jean-Rivard», informe d’emblée la mairesse lorsqu’on aborde le sujet. Ce projet a comme finalité de joindre le quartier résidentiel vers le secteur davantage industriel, qui constitue un pôle d’emplois important. Cet aménagement pourrait faire économiser 30 minutes aux citoyens sur leur temps de trajet. « On sait qu’une grande partie de la population se déplace à pied dans ce secteur, dont des jeunes qui doivent parfois marcher une heure pour aller à l’école », précise Laurence Lavigne Lalonde. Les équipes de l’arrondissement attendent les résultats d’une étude récemment menée afin de confirmer la faisabilité de ce projet et d’élaborer les plans d’action qui suivront.
L’accessibilité et la sécurité piétonnière représentent également de véritables défis sur la rue Jarry. « Il existe certains secteurs où il n’y a même pas de trottoir, près de La TOHU notamment », déplore la mairesse. L’un des principaux axes du PPU Jarry est donc sans surprise d’améliorer la mobilité et la sécurité des piétons dans ce secteur. L’idée est ici de refaire éventuellement complètement la voie publique. « On en est à l’étape de conception seulement. On attend d’avoir des plans et des devis pour avoir quelque chose de plus concret à présenter », précise Thierno Souleymane Diallo. La réfection de la rue Jarry est prévue pour 2025.
L’arrondissement a également lancé, dans chacun de ses quartiers, des planifications au niveau de l’apaisement de la circulation (pour le secteur centre, le plan sera présenté en novembre). Les objectifs d’un tel plan, qui débutera un peu partout sur le territoire à la mi-octobre, sont de favoriser la tranquillité et la qualité de vie des résidents, d’améliorer la sécurité piétonne et cycliste, de diminuer la circulation de transit, et de limiter la vitesse des automobilistes. VSP offre la possibilité aux résidents de faire part de leurs idées et impressions dans ce projet. Cette démarche a été faite dans Parc-Extension l’an dernier, elle est actuellement en cours à Villeray, et le sondage destiné aux résidents du quartier Saint-Michel devrait être annoncé au courant de l’automne. « Les gens pourront nous donner des informations que nous pourrons compiler et qu’on insérera dans un plan d’action. On y proposera de nouveaux dos d’ânes ou l’inversion des sens de certaines rues pour calmer le transit, par exemple », exprime la mairesse.
Finalement, le prolongement de la ligne bleue, dont les travaux préparatoires sont en cours, contribuera également à améliorer de façon considérable les déplacements des Michelois.es. Pour rappel, ce projet prévoit l’ajout de cinq stations sur une distance de 6 kilomètres, depuis la station Saint-Michel jusqu’à l’arrondissement d’Anjou. Elles seront situées aux intersections Pie-IX, Viau, Lacordaire, Langelier et boulevard des Galeries d’Anjou, en majeure partie le long de l’axe Jean-Talon. La mise en service des cinq stations est prévue pour 2029, selon les dernières informations.
Vers un quartier plus vert
En plus de la mobilité, la transition écologique occupe une place centrale dans les réflexions et les visées de l’administration de VSP : « La transition écologique est vraiment au coeur de notre action », confirme sans équivoque Thierno Souleymane Diallo. .
« Concernant le domaine public, on plante beaucoup d’arbres et on continuera à le faire, mais parfois on est limité en termes de possibilités sur ces terrains. Mais en ce qui concerne le domaine privé, il y a un énorme potentiel de verdissement », souligne Laurence Lavigne Lalonde. Justement, au printemps 2023, VSP a fait plusieurs modifications réglementaires pour faciliter la transition écologique, notamment dans le domaine privé. Les nouveaux bâtiments peuvent désormais occuper seulement 85 % de la superficie de leur terrain. De plus, les deux tiers de l’espace non bâti doivent être verdis. « Il y a quelques temps, les entreprises auraient pu faire une belle cour asphaltée pour leurs camions. Avec la nouvelle réglementation, elles sont obligées de planter des arbres, d’avoir des endroits où capter les eaux de pluie ou d’avoir différentes strates végétales », spécifie la mairesse. Ces mesures ont pour but notamment de lutter contre les îlots de chaleur, une véritable problématique pour l’arrondissement. Dans ce cadre, par exemple, l’entreprise Beleron a accepté d’ajouter prochainement 50 arbres dans le parc industriel Pie IX. Postes Canada, située au 8530 8e Avenue, en ajoutera également 25 sur son terrain. L’arrondissement souhaite évidemment que plusieurs autres entreprises suivront.
La nouvelle réglementation incite également certains bâtiments à avoir un toit en partie végétalisé. Si une entreprise souhaite s’agrandir par exemple, à partir d’une certaine superficie, elle sera obligée de verdir une partie de son toit. « On ne leur demande pas d’avoir un verdissement avec des serres ou de la culture mais au moins un verdissement qui favorise les colonisateurs et qui participe à réduire les îlots de chaleur » , ajoute Mme Lavigne Lalonde.
L’arrondissement a également fait un autre changement réglementaire récemment, passé quelque peu inaperçu celui-là, mais pertinent dans un pôle industriel, affirme l’administration en place. VSP autorise ainsi dorénavant la mutualisation des espaces de stationnement. Avant, deux entreprises côte à côte avaient l’obligation de répondre aux exigences de stationnement individuellement alors qu’à présent, elles peuvent le faire ensemble. Par exemple, elles peuvent s’allier pour verdir leur terrain de stationnement. À terme, cette nouvelle initiative a pour but d’avoir le moins possible de grands espaces de stationnements asphaltés, qui favorisent évidemment les îlots de chaleur.
J’aime bien l’idée des pôles. Dans ce cas-ci, c’est autour du cirque et je trouve que c’est assez original. Si on ajoute à cela le parc Frédéric-Back, davantage de densité et une rue commerciale plus agréable alors on pourrait se retrouver avec un nouveau quartier intéressant.
Je ne sais pas si vous avez entendu parler cette semaine aux nouvelle de voisins d’un CPE à Outremont qui intente une poursuite pour limiter les heures où les enfants peuvent jouer dehors
Il y en a même un qui a mis une caméra pour filmer les enfants et les éducatrices dans la cour…
Wow! Je serai toujours surprise de la stupidité et de l’égocentrisme des gens. Hey là, filmer des enfants dans la cours (ne me justifié pas ça avec l’argument de l’angle de la caméra svp!) et mesurer les décibels des crient des enfants… Je suis abasourdie!!! Mais quand même ça fait peur penser que des gens peuvent arriver a ça pour “protéger” leur quiétude. Mais franchement si j’étais un des parents de ces enfants, j’aurai sûrement enlever mon enfant de ce CPE.
Mr Montpetit and the other neighbours are straight up antisocial, villainous even, and I’m going to say NIMBYS even if some folks here hate the term. It’s the same kind of people who will say that things like “Children should be seen and not heard. Or better still, not seen and not heard.”
Juste quand ça devient un terme fourre-tout pour critiquer des opinions adverses sans discernement.
Le terme ne doit pas remplacer la compréhension des raisons pourquoi certains s’opposent à des projets, et ne doit pas non plus remplacer les arguments contre ces raisons. Ça ne fait pas des débats très intéressants sinon, et le développement urbain est une chose complexe, avec son lot d’avantages, de problèmes et où l’acceptatibilté sociale joue un rôle, pour le meilleur comme pour le pire!
Cependant, il y a des cas évidents d’abus, et le terme s’applique. Je crois que le bruit des enfants, la chose la plus naturelle du monde, rentre facilement dans cette catégorie. Il y a des nuisances relatives et normales de la vie en société. Un enfant qui profite de jeux normaux d’une garderie est pas mal là-dedans à mon avis. Ça prendrait une négligence importante de la garderie pour que celle-ci soit une vraie nuisance, et non simplement une absence de silence, silence qui n’est pas garanti à longueur de journée.
J’adore justement me promener dans les rues du Plateau lors des récréations, ça rend heureux entendre des enfants heureux. Ce n’est pas pour rien, je pense, que plusieurs chanson du premier album d’Harmonium débutent par des bruits de cours d’écoles.
Une scène du film À Saint-Henri le cinq septembre
PHOTO : ONF
PUBLIÉ LE 15 DÉCEMBRE 2023
En 1962, l’Office national du film (ONF) a produit le documentaire À Saint-Henri le cinq septembre. L’historien Harold Bérubé rappelle l’importance de ce portrait d’un quartier ouvrier de Montréal en pleine Révolution tranquille.
Réalisé par l’écrivain Hubert Aquin, ce film réunit certains des plus grands noms du cinéma québécois, soit Michel Brault, Claude Fournier, Claude Jutra, Jacques Godbout et Fernand Dansereau. En tant que producteur, celui-ci souhaite « faire entrer le quartier ouvrier dans un cinéma québécois ».
Le tournage a lieu le jour de la rentrée scolaire, très tôt à l’aube, et il se termine très tard la nuit. « Il y a l’américanisation de la vie dans les quartiers populaires. […] On voit ce mélange de beauté [avec la] pauvreté, qui est quand même assez frappante », affirme l’historien.
Claude Jutra commence le montage du film, et Jacques Godbout et Monique Fortier complètent le montage. « C’est Godbout qui nous offre, en quelque sorte, le fil conducteur à travers sa narration », rappelle Harold Bérubé. Les créateurs du film observent les gens du quartier plutôt que de leur laisser la parole.
En près de 40 minutes, ce film nous permet de saisir la transformation rapide de la société au début des années 1960.
Près de 50 ans plus tard, la cinéaste Shannon Walsh a un peu refait le même exercice avec le film À St-Henri, le 26 août. « C’est une démarche assez similaire. Il y a aussi cette recherche du direct, de la vérité. L’absence de la narration est quand même frappante, fait observer Harold Bérubé. Le quartier a significativement changé, […] de 1962 à 2011. »
Les deux films sont disponibles sur le site Web de l’ONF
Un collage de photo montrant l’Ouest de l’île de Montréal en 1962 (j’ai fait l’assemblage avec des photos d’archives trouvables sur le site de la ville de Montréal) On peut y voir comment DDO, Pierrefonds et Roxboro se sont tous développés en même temps et tous autour de Des Sources et Gouin.
Et ici des photos de 1942 d’un peu partout sur l’île. J’aurais aimé faire l’ensemble de Montréal en une image, mais mon PC n’est pas assez puissant pour ça malheureusement. J’ai simplement utilisé Photoshop et les photos de la ville pour faire cela. C’est très simple et assez rapide.
Dans le sujet de la place publique du vieux Saint-Jean, on parlait des vieux quartiers dans les autres villes de la région. Voici quelques images tirées de Street View de ces secteurs. Il n’y a pas qu’à Montréal qu’on retrouve de vieux quartiers denses et urbains. De l’urbanité, il y en a partout, pas besoin d’être dans une grande ville. Malheureusement, les centres des villes satellites de Montréal ont été dévitalisés, leur potentiel est vraiment sous-utilisé et il s’agit encore aujourd’hui de quartiers plus défavorisés, à l’image des villes de l’Upstate New-York, seulement ,en bien, bien moins pire.
Un reportage au Téléjournal sur les commerces de proximité
Tisser des liens grâce aux commerces de proximité
À l’heure où les commerces de quartier font de plus en plus place à des méga entrepôts de toutes sortes, « l’expérience client », comme le disent les spécialistes du marketing, en prend souvent pour son rhume.
Heureusement, il y a des exceptions. C’est le cas sur l’avenue du Mont-Royal, en plein cœur du Plateau, à Montréal, où les amateurs de couture peuvent trouver tout ce qu’ils désirent et même plus.
La gentrification s’accélère à Verdun, à un point tel que les loyers commerciaux de la rue Wellington ont rejoint ceux du Plateau-Mont-Royal et que les loyers résidentiels s’en approchent de plus en plus.
« Je ne sais pas quoi faire », lance la tatoueuse Erika Doyon dans son local de la rue Verdun, à environ 400 mètres de l’artère principale du quartier.
Gabby et Leia, ses bullys américains, dorment dans un coin de son atelier chaleureux, nommé Studio Artease. Elle croit toutefois qu’il lui faudra quitter les lieux à l’automne, car elle se doute que son propriétaire voudra augmenter substantiellement son loyer. Sa voisine, qui a le même propriétaire, a renouvelé son bail pour cinq ans avec une augmentation d’environ 25 % de son loyer.
« L’an passé, c’était la fin de mon bail de cinq ans. J’ai beaucoup regardé ailleurs dans le quartier et je ne trouvais rien, mais rien, qui avait du bon sens. C’est des prix de fou », a lancé celle qui a pu finalement renouveler son bail jusqu’à octobre prochain.
Elle souligne également que le local qu’elle occupait jusqu’en 2018 dans la rue Wellington est présentement affiché à louer à 6800 $ plus taxes par mois, alors qu’elle payait à l’époque 5000 $ par mois taxes incluses. Il s’agit de l’emplacement occupé par le restaurant Kwizinn, qui déménagera sous peu dans le Vieux-Montréal.
Sur la plateforme immobilière Centris, plusieurs locaux commerciaux de la rue Wellington ou près de celle-ci sont affichés à des prix semblables à ceux des rues marchandes du Plateau-Mont-Royal, comme l’avenue du Mont-Royal et la rue Saint-Denis, soit entre 30 $ et 45 $ le pied carré par année avant taxes.
« Effectivement, on est en train de voir que les taux au pied carré sont en train de rattraper, sinon dépasser, les taux sur le Plateau », rapporte Julien Marois, directeur et chef de l’exploitation de la firme de courtage immobilier NAI Terramont Commercial. D’autres artères, comme l’avenue Laurier ou celles du centre-ville, sont encore toujours plus chères.
L’engouement pour Verdun, de plus en plus prisé par les résidents aisés de même que par les touristes, est notamment en cause. M. Marois souligne également qu’il y a beaucoup plus de rues et d’immeubles commerciaux sur le Plateau-Mont-Royal qu’à Verdun. La dynamique de l’offre et de la demande joue donc en défaveur des commerçants locataires de la rue Wellington.
Remplacés par des chaînes
Beaucoup de commerçants craignent de parler publiquement de leur loyer, de crainte d’envenimer leurs relations avec leur propriétaire. Il faut dire qu’aucune règle n’encadre les hausses de loyers commerciaux et que rien n’empêche un propriétaire d’expulser un locataire à l’échéance de son bail. Un détaillant de la rue Wellington a toutefois confié au Devoir, avec frustration, que, selon son plus récent bail, son loyer aura doublé dans cinq ans par rapport à l’an dernier.
La propriétaire de la fromagerie Copette&Cie, Cristel Henssen, n’a pas besoin de renégocier son bail avant deux ans. Elle est toutefois attristée par la fermeture de commerces qui étaient établis sur la rue Wellington depuis des années. Elle estime que tout « a dégénéré » lorsque le magazine Time Out a élu l’artère comme étant « la plus cool au monde », en 2022. « Avant, on était tous des commerçants résidents du quartier. Mais là, les chaînes s’installent, et ce n’est pas la même ambiance », se désole celle qui a établi son commerce il y a une quinzaine d’années. Un PFK a notamment poussé à l’intersection de la rue de l’Église.
Julien Marois explique que les chaînes établies sont considérées par les propriétaires comme des « locataires de qualité » puisqu’elles ont les reins plus solides et qu’elles ont plus de facilité à obtenir du financement. Les franchises sont plus stables que les restaurants indépendants, qui ont tendance à ouvrir et à fermer fréquemment. « Quand le franchisé signe un bail, il y a souvent des garanties du franchiseur », précise-t-il.
Résidents en pleurs
Du côté des loyers résidentiels, la dernière enquête du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, parue en juin 2023, fait le constat que les prix affichés sur Kijiji à Verdun et dans le Sud-Ouest frôlent ceux du Plateau-Mont-Royal. Les prix des studios et des trois et demi seraient même plus élevés, alors que les plus grands appartements seraient un peu plus chers dans le Plateau.
Cette inflation ne semble d’ailleurs pas être en voie de s’amoindrir. Le Comité d’action des citoyennes et citoyens de Verdun (CACV) dit constater plus que jamais, en cette période de renouvellement des baux, des hausses abusives de la part de propriétaires résidentiels.
« Je viens de voir un avis d’augmentation de 150 $ et je ne suis même plus étonnée. J’ai même vu des propriétaires qui ont essayé de doubler le loyer », rapporte Lyn O’Donnell, intervenante sociale et organisatrice communautaire pour le CACV, qui aide les locataires à faire valoir leurs droits.
Cette dernière est préoccupée par la situation. « C’est inquiétant surtout pour les familles, les personnes âgées, les personnes sans statut, les personnes plus vulnérables. J’ai souvent des gens dans mon bureau qui pleurent ou qui ont fait des tentatives de suicide parce qu’ils ne voient pas comment de se sortir de ça », a raconté Mme O’Donnell, qui presse le gouvernement de mettre en place un contrôle des loyers.
L’intervenante estime que l’offre commerciale change pour « des commerces chics, plus modernes, pas nécessairement abordables pour tous les gens du quartier ». Cela n’est toutefois qu’un symptôme des changements démographiques engendrés par la hausse des loyers, croit-elle.
Un phénomène qui se répète
Ce qui se passe dans Verdun est semblable à ce qui s’est passé sur le Plateau-Mont-Royal à partir des années 1970, estime Hélène Bélanger, professeure au Département d’études urbaines et touristiques de l’UQAM. Selon elle, les phénomènes de remplacements commerciaux et populationnels se nourrissent les uns les autres. Les résidents aux moyens modestes sont tranquillement remplacés par des citoyens plus éduqués en quête de loyers abordables dans un quartier sympathique.
« Selon mes premières observations, lors de cette première phase de la gentrification commerciale, des commerçants du quartier vont ouvrir des boutiques à la mode pour ces nouveaux résidents », indique Mme Bélanger.
La nouvelle offre commerciale contribue à l’attrait de ce quartier. Mme Bélanger constate qu’il y a actuellement une accélération de cette transformation étant donné la crise du logement qui sévit à Montréal. « Énormément de propriétaires y voient une source de profit rapide. On s’organise de façon plus ou moins honnête pour évincer des locataires et augmenter les loyers », dit celle qui est aussi membre du Collectif de recherche et d’action sur l’habitat.
Les loyers commerciaux continuent aussi d’augmenter, au point qu’un jour, ce sont presque uniquement les grandes chaînes qui ont les moyens de les payer. Il y a alors un risque d’homogénéisation de l’offre.
L’expert en immobilier Julien Marois estime que cette effervescence commerciale va s’étaler inévitablement au-delà de la rue Wellington, comme sur celle où se trouve Erika Doyon. Plusieurs entrepreneurs en quête de loyers plus modestes quittent d’ailleurs déjà la rue Wellington pour des rues adjacentes. Or, l’achalandage de la populaire artère ne profite pas toujours aux commerçants des autres rues. « L’été dernier, c’était si tranquille que nous avons dû partir une campagne GoFundMe », raconte Robyn Stroll, propriétaire de Thésaurus Thérrarium, un salon de thé qui se veut inclusif et communautaire. « Les gens restaient sur Wellington, qui faisait l’objet de beaucoup de marketing et qui était piétonnisée. Ils ne venaient pas jusqu’ici. »
Au point où cela en est, Hélène Bélanger perçoit même que la transformation s’apprête à déborder de Verdun pour toucher des quartiers adjacents, comme LaSalle. La tatoueuse Erika Doyon, elle, craint de devoir déménager son entreprise hors du quartier où elle habite depuis plus de vingt ans. Ses revenus d’entreprise sont présentement bas, parce que les produits coûtent plus cher, alors que la clientèle limite ses dépenses, échaudée par le coût élevé de la vie. Elle souligne que son budget personnel est également très serré : « Mon loyer chez nous vient d’augmenter de 60 $ par mois. »
Malheureusement c’est l’offre et la demande qui prend le dessus quand un quartier gagne en popularité. Ainsi la bonne publicité dans les médias nationaux comme internationaux, est un couteau à double tranchant dont l’action est très difficile à contraindre. Pour les commerces les augmentations ne sont pas réglementées et frappent durement l’écosystème commercial original. Pour les logements, sans des mesures politiques de contrôle des prix, la population locale devient très vulnérable face à une marée d’augmentations qui nourrit le cercle vicieux d’embourgeoisement.
Ce sont donc les plus pauvres qui encaissent le choc, obligés de quitter un quartier avec tous les inconvénients qui détruisent le tissu social souvent établi depuis des générations.