Transport en commun - Discussion générale

Les mendiants des transports en commun

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Nos sociétés de transport collectif font face à une crise de déficit majeur puisque leurs revenus stagnent, alors que leurs dépenses augmentent. Il faut revoir la stratégie de financement des transports en commun, selon notre éditorialiste.


Philippe Mercure
Philippe Mercure La Presse

Il y avait des chèques pour tout le monde et sa sœur dans la plus récente mise à jour économique du ministre des Finances, Eric Girard.

Publié à 5h00

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Mais un groupe n’a pas obtenu de bouée de sauvetage : les sociétés de transports en commun. Pourtant, ça presse. La Société de transport de Montréal (STM) se dirige vers un trou de 78 millions l’an prochain. Sur un budget de 1,7 milliard, ce n’est pas immense. Mais c’est assez pour faire planer le spectre d’une diminution de services.

La même situation se répète partout dans la province. En tout, le manque à gagner est évalué à 560 millions. Encore une fois, le chiffre peut paraître gros. Mais rappelons que Québec vient de faire pleuvoir 3,5 milliards en chèques sur les Québécois, dont plusieurs n’en ont aucunement besoin. Et qu’il devrait accorder dès 2023 des baisses d’impôt totalisant 7,4 milliards sur quatre ans.

Gouverner, c’est faire des choix. Ceux-là sont hautement contestables.

Les déficits qui frappent actuellement les sociétés de transport collectif ont deux causes. La première est structurelle. Les dépenses augmentent avec l’inflation, l’agrandissement des réseaux et le vieillissement des infrastructures. Mais les revenus, eux, stagnent. Des sources comme la taxe sur l’essence, par exemple, ne sont pas indexées.

Lisez notre éditorial à ce sujet

Depuis 2016, des experts préviennent qu’on s’en va dans le mur avec le financement des transports en commun. Puis la pandémie est arrivée, faisant chuter l’achalandage et donc les revenus. Le mur, on a foncé dedans.

Depuis, la circulation automobile est revenue à ses niveaux prépandémiques, mais pas la fréquentation des transports collectifs (une preuve, par ailleurs, que le télétravail n’a pas amélioré notre bilan environnemental).

Avec moins d’usagers à desservir, il est normal que les sociétés de transport revoient leur offre de service. Mais l’exercice est terriblement risqué. Un service réduit risque d’attirer moins d’usagers, diminuant les revenus et entraînant des coupes supplémentaires. C’est cette spirale vers le bas qu’il faut absolument éviter.

Au-delà d’une aide d’urgence de plus en plus pressante, c’est donc toute la stratégie de financement des sociétés de transport qui doit être revue.

Où aller chercher l’argent ? Les possibilités sont multiples.

D’abord, des fonds pour les transports en commun, il en existe. Le hic : ils sont souvent destinés au développement des infrastructures et non aux opérations courantes.

Pour les gouvernements des ordres supérieurs, il est évidemment plus sexy d’inaugurer de nouveaux trains en coupant des rubans que de payer l’essence des autobus. Mais sans miner pour autant la nécessaire expansion des réseaux, un rééquilibrage est souhaitable.

L’autre poche dans laquelle on devrait piger, c’est celle des automobilistes, en tout cas là où il existe du transport collectif. D’abord parce que les transports en commun servent directement la cause des automobilistes en réduisant la congestion. Ensuite parce que l’objectif ultime est de diminuer l’usage de la voiture. Pour ça, il faut des mesures dissuasives.

La Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), par exemple, calcule que la part des automobilistes dans le financement du transport collectif a chuté de 8 % à 5 % entre 2001 et aujourd’hui. En décembre 2019, elle a proposé une hausse des immatriculations pour compenser. On lui a répondu que la Société de l’assurance automobile du Québec ne pouvait l’appliquer à cause de la refonte de son système informatique. Trois ans plus tard, elle attend toujours. C’est ridicule.

Il faudra finalement que les villes cessent de tirer dans leurs propres buts. Dans le contexte actuel, la décision de la Ville de Montréal d’offrir la gratuité du transport collectif aux 65 ans et plus à compter de juillet prochain est mal avisée. Voilà qui privera la STM de 40 millions par année, alors que bien des aînés peuvent très bien payer leur billet de métro.

À l’heure où l’on tente de combattre les changements climatiques et de densifier nos villes, on ne peut pas laisser les sociétés de transport collectif jouer aux mendiants pour boucler leur budget.

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En savoir plus

Je suis content de lire que je ne suis pas le seul à trouver que d’apporter la gratuité aux aînés est mal avisé et contre-productif. C’était l’argument le plus fort contre la hausse du financement de la part de la ministre Guilbeault. Qu’est-ce qui empêcherait la STM de donner la gratuité aux étudiants après une autre ronde de financement? L’administration Plante devrait se concentrer à améliorer le service plutôt que de le rendre gratuit.

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À Sherbrooke, les étudiants de l’université ont accès gratuitement à l’autobus, mais en contrepartie, il y a une entente de financement avec l’université. Donc oui, la gratuité c’est possible, mais il faut aller chercher le financement à quelque part.

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Je ne comprends vraiment pas le rapport entre cette mesure de la ville et le manque systémique de la STM. Les 40 millions ou quel que soit le coût de la mesure seront clairement payés par la ville, au fond une autre forme de bien-être social. . Cela n’a donc aucune incidence sur leur financement. Le seul argument pour dire que c’est mal choisi serait de dire que la Ville devrait utiliser cet argent pour combler les lacunes dans le financement des STM cette année. Mais comment cela va-t-il fonctionner ? La ville ne devrait pas utiliser son budget déjà grevé pour régler à elle seule un problème de financement structurel qui va atteindre des sommes astronomiques dans les années à venir. Ce n’est pas durable et permet aux autres paliers de gouvernement de ne rien faire et de dire qu’on s’en occupe déjà.

le financement viendra de la ville. Et je ne suis vraiment pas biaisé envers l’administration Plante ici. Laval le fait déjà depuis 7 ans et cela n’a pas affecté négativement la STL.

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Petite anecdote. Il y a quelques années membres de la Fédération des associations étudiantes de l’université de Montréal (FAECUM) l’avaient mandaté de négocier une entente de gratuité scolaire avec la STM. Après quelques années de négociation, la fédération a présenté les termes négociés avec la STM. Tous les membres des associations membres (donc, l’ensemble des membres, formule Rand oblige), auraient à verser une cotisation obligation au fond de transport collectif qui leur donnerait, en retour, droit au transport en commun dans l’ensemble du réseau de la STM. Malheureusement, la population étudiante avait changée à ce moment-là et les étudiants qui ne prenaient pas les TEC pour se rendre en cours s’opposaient à la contribution obligatoire. La proposition a éventuellement été rejeté en assemblée générale.

Selon le budget 2023 de la ville (en page 14), elle ne paiera que 24M$ à l’ARTM pour couvrir les 40M$ que coûtera la gratuité pour les aîné(e)s en zone A. J’imagine qu’il faudra attendre le dévoilement du budget 2023 de l’ARTM pour voir comment elle comble combler les 16M$ restants.

:thinking::thinking: peut-être que le budget sera révisé l’année prochaine en fonction du nombre d’usagers ? Je soutiens le principe du service subventionné pour les aînées (comme le fait Laval) mais seulement si la ville paie bien sûr. Mais ne payer qu’une partie réduit essentiellement le financement de ~ 16 millions…

Who said I couldn’t be critical of the administration :sweat_smile: je pense toujours que ce serait pas une bonne idée de combler des lacunes budgétaires récurrentes par contre. . . l’ARTM doit être restructurée.

Question pour vous tous. Certains défenseurs du tramway disent que le rayon d’attractivité à pied est quasiment le même qu’une station de métro (800m vs 1000m). Est-ce-vrai parce que généralement ce que je lis est plus de 500m pour un tramway et 1000m pour un métro.

Walkshed and attractiveness depends on so many things, is not all about the mode. And honestly those values ​​tend to be a bit liberal both tram and metro. The issues is that for a tram, typically the same parameters that should improve walkability and attractiveness, do tend to significantly degrade performance at other levels. Great thing with a metro, is that high performance do tend to be consistent between systems.

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Ça dépend de bien des facteurs. À l’université, ce qu’on nous disait c’est que dès qu’on à une infrastructure «dure» comme un arrêt de tram ou une station de métro, l’attractivité à pied tourne autour de 10 minutes à pied (typiquement 800m, mais dans certains cas 1000m). Après, ça dépend du niveau de service et de l’aménagement de la chaussée et si le milieu est attractif pour la marche.

L’autre enjeu qui est pertinent dans ce débat est l’effet structurant sur les abords de la station. Plusieurs études de cas tendent à démontré que le tram à un impact positif plus important sur les abords de stations, car les gens voient l’environnement immédiat, tandis que pour le métro, l’interface avec la rue n’est pas toujours évident. Disons qu’on a plusieurs cas de stations assez mal-connectées avec leur environnements immédiats à Montréal pour dire qu’il y a quand même un peu de véracité dans cette affirmation.

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Transport collectif Guilbault ouverte à une révision du financement


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La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, reconnaît que le manque à gagner dans les finances des sociétés de transport collectif – qui risque d’atteindre les 900 millions d’ici cinq ans – appelle à un changement des pratiques. Sans s’engager à mener une refonte du financement, elle avoue toutefois que le modèle actuel devra changer.

12 décembre 2022 | Publié à 11h52 | HENRI OUELLETTE-VÉZINA | LA PRESSE

« Effectivement, à long terme, on ne peut pas fonctionner comme ça d’année en année avec des aides d’urgence à la dernière minute. Je pense qu’il faut avoir une réflexion sereine et intelligente là-dessus. Je pense que chacun doit faire sa part aussi, quand on parle de certaines décisions qui sont prises », a-t-elle plaidé lundi, lors d’une conférence de presse portant sur le lancement des travaux d’agrandissement au garage de la Société de transport de Laval (STL).

La semaine dernière, La Presse révélait que le manque à gagner causé par la pandémie dans les finances des sociétés de transport en commun risque d’atteindre les 900 millions d’ici cinq ans. « On n’a plus le choix : il faut trouver des solutions. Ça prend un cadre financier solide pour les cinq prochaines années », a tonné le président de l’Association du transport urbain du Québec (ATUQ), Marc Denault.

Cet organisme, qui représente la quasi-totalité des sociétés de transport au Québec, évalue à 560 millions le trou budgétaire des sociétés de transport l’an prochain. Si rien n’est fait, ce chiffre bondira à 650 millions en 2024. Puis, le trou budgétaire atteindrait 800 millions en 2025, 860 millions en 2026 et 900 millions en 2027.

En conférence lundi, le maire de Laval Stéphane Boyer a d’ailleurs clairement évoqué que « le transport en commun vit des moments difficiles ». « On a défis de financement des couts d’opération. C’est un défi qu’on doit relever, qu’on a le devoir de relever », a-t-il dit, appelant à « repenser la façon dont on développe » les villes. M. Boyer a aussi évoqué l’urgence de « trouver des façons pour mieux déplacer les gens avec l’infrastructure existante ».

En privé d’abord

La ministre Guilbault plaide toutefois que les discussions pour trouver des solutions à la problématique doivent d’abord avoir lieu « en privé ».

« On ne peut pas être en catastrophe à chaque fin d’année quand les municipalités déposent leur budget, que chacun aille dans les médias pour dire qu’ils manquent d’argent, que moi, de mon côté, je réponde dans les médias. Il faut à un moment donné prendre le problème à bras le corps et le réfléchir ensemble », a-t-elle soutenu, en soutenant que le gouvernement et son équipe sont « très conscients du problème ».

Mme Guilbault doit justement rencontrer des représentants de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) ce lundi. Le financement du transport collectif « fera partie des discussions », a-t-elle précisé.

« On doit travailler avec les grandes villes. […] C’est sûr que la pandémie a eu des contrecoups. C’est en train de revenir, mais ce n’est pas revenu partout. Il y a des endroits où c’est plus rapide que d’autres », a aussi fait valoir la ministre, rappelant que Québec a déjà offert 1,4 milliard en aides d’urgence aux sociétés de transport durant la pandémie.

« Il faut quand même rappeler aussi que c’est de la gestion municipale. Ce n’est pas à moi de venir dire à un maire comment gérer sa société de transport, encore moins un directeur de société de transport comment gérer sa convention collective », a-t-elle conclu à ce sujet.

certains trams sont associés à plutôt, autrement ça sous-entend une causalité du mode, ou alors que cette relation s’applique uniformément au mode quel que soit les paramètres du système. L’effet structurant serait surtout un question d’investissements dans l’aménagement environnant, et non une conséquence du mode choisi.

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Peut-on arrêter de faire l’autruche et tenter de résoudre le problème structurel du financement des transports? Pour la très grande majorité des titres sous forme de question, la réponse est non. Celle-ci ne fait probablement pas partie des exceptions.

Mais voici un exercice de correction de modèle d’affaire

Présentement:

Une des bonnes pratiques des organisations est de ne jamais avoir de découpage égal des droits (ex: 50/50 ou dans ce cas-ci, 1/3-1/3-1/3): il faut une majorité (ex: 49-51), sinon les décisions tourneront en rond éternellement parce que personne n’a de pouvoir décisionnel. C’est la faute de tout le monde donc personne ne peut être blâmé.

Bref, la cible devrait être pour ARTM-Muni-Prov 60-20-20 ou idéalement 80-10-10.

Or comment passer de 33% (qu’elle n’arrive même pas à financer) au double et plus? Utiliser des leviers qui font partie des actifs mais qui ne sont pas exploités parce que ce n’est pas dans nos activités (Note: Tous les montants sont indexés à l’inflation).

  • Captation foncière autour des stations de mode lourd (métro, station de train de banlieue)
    • 10$/pi2 sur tout travaux majeur (de delà d’une certaine balise, genre 500k$)
    • 0.1$/pi2 sur la valeur foncière d’un terrain développé et exploité. Bref, une taxe foncière annuelle.
    • 0.5$/pi2 sur la valeur foncière d’un terrain non-développé ou non-exploité. Pour les smarts qui dorment sur leurs terrains vagues ou terrains abandonnées. À ne pas confondre avec les résidences non-habités.
    • Les taux ci-dessus s’appliquent sur un rayon de 500m autour d’une station de métro.
      • Mi-taux sur les prochains 500m suivantes.
      • Mi-taux sur les taux ci-dessus pour les réseaux de trains de banlieue.
      • Pas de chevauchement (ie: une propriété n’est pas double-taxé si à proximité de 2 stations)
    • Il faut grand-périser l’existant pour les citoyens
      • L’application des frais se fera sur les propriétés résidentielles qui ne sont pas en location que lors de la vente ou des travaux de celles-ci.
  • Développement et exploitation de tous les terrains exploitables autour des stations
    • Commerciaux et résidentielles

Bien sûr, pour que tout cela fonctionne sans qu’elle ait les bâtons dans les roues, il lui faut des pouvoirs associés. Je pense notamment à la densification et aux maires qui aiment jouer aux NIMBY. Quelque-chose du genre:

  • Le territoire autour d’une station à droit à une densification de 10% de la plus haute densité du territoire dans un rayon de 500m autour d’une station, et 5% de plus haute densité pour le prochain 500m.

Mon dilemme présentement c’est que je ne sais pas estimer de chiffres pour ces sources de revenus additionnelles.

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Pas en désaccord avec ce que tu dis, mais en même temps, l’aménagement environnant est aménagé/développé en fonction des infrastructures publiques présentes. Ce qui revient un peu à la question de la poule ou de l’œuf.

Mais oui on peut nuancer que ce ne sont pas tous les trams qui on cet impact-là. Le streetcar de Toronto en est un bon exemple. Mais en même temps, c’est un mauvais exemple de ce que ce mode peu accomplir en général.

Reste que le métro (en général) n’a pas le même facteur de développement de l’environnement immédiat (ex: littéralement toutes les stations de la ligne-verte en dehors du centre-ville).

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Une analyse dans Le Devoir sur la répartition des services de transports collectifs et actifs sur l’île de Montréal (Cliquez sur l’article pour voir les cartes interactives)

Texte complet

Transport collectif: les enfants pauvres de la mobilité


Photo: Jacques Nadeau Le Devoir
«Le territoire qu’il faut parcourir pour accéder à notre mode de transport ne nous confronte pas tous aux mêmes dangers», explique Florence Paulhiac Scherrer.

Florence Sara G. Ferraris
12 décembre 2016
Transports / Urbanisme

De Saint-Michel à Pointe-aux-Trembles, en passant par Parc-Extension et le Plateau-Mont-Royal, les Montréalais sont-ils égaux dans leurs choix de transport ? Une analyse du Devoir montre que les inégalités socio-économiques jouent un rôle important dans l’accès aux transports collectifs et actifs.

Plus dépendants des transports collectifs en raison de leur réalité financière, les Montréalais vivant dans les quartiers les plus défavorisés de l’île sont pourtant ceux qui y ont le moins accès. Et si dans certains cas, comme dans les secteurs plus excentrés, c’est parce que les infrastructures sont insuffisantes, dans d’autres ce sont plutôt les conditions d’accès aux réseaux — tant physiques que temporelles — qui posent un épineux problème.

Inégalités économiques

Plus une zone est foncée, plus elle est défavorisée. Passez votre curseur sur la carte pour plus de détails.

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Proximité de l’ensemble des transports en commun

Plus une zone est foncée, plus elle est proche d’un moyen de transport en commun. Passez votre curseur sur la carte pour plus de détails.
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« Nous ne sommes pas tous égaux dans notre mobilité, insiste Florence Paulhiac Scherrer, titulaire de la Chaire In.SITU à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal. Et c’est le cas même pour ceux qui ont accès au transport de masse. Prenez, par exemple, un résidant du Plateau en comparaison à quelqu’un qui vit dans Hochelaga. Ils ont tous deux accès à une ligne de métro, mais ils ne sont pas confrontés aux mêmes réalités territoriales. Celui qui habite dans Hochelaga a plus de chance d’avoir à traverser une large artère, par exemple, pour se rendre à l’édicule le plus proche. »

Idem dans Verdun ou dans les quartiers du Sud-Ouest, où ce sont les barrières physiques, comme les tracés de chemin de fer, qui minent les parcours des résidents. Et ces dichotomies sont encore plus criantes dans les quartiers excentrés, comme Saint-Michel ou Montréal-Nord, où les distances s’allongent et où le flux automobile s’intensifie. C’est d’ailleurs dans ces quartiers que le nombre d’accidents est le plus élevé. « Le territoire qu’il faut parcourir pour accéder à notre mode de transport ne nous confronte pas tous aux mêmes dangers, ajoute la professeure. Certains sont plus vulnérables que d’autres, en raison des choix résidentiels — ou des non-choix, car ce n’en est pas toujours un — qu’ils ont faits. »

Accessibilité illusoire ?

Bon an mal an, Montréal fait pourtant bonne figure dans les palmarès internationaux en matière de transport. De fait, un rapide coup d’oeil à la carte du métro et du réseau d’autobus de la Société de transport de Montréal permet de constater que leurs ramifications s’étendent jusque dans les quartiers les plus reculés de l’île, permettant à pratiquement tout le monde de se déplacer. Du moins en théorie.

Proximité du métro

Plus une zone est foncée, plus elle est proche du réseau de métro. Passez votre curseur sur la carte pour plus de détails.

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C’est sans compter le fait que le gros des infrastructures de transport a été pensé pour faciliter un accès rapide vers le centre de la métropole. « Le problème, c’est quand on veut aller ailleurs, avance Ahmed El-Geneidy, coordonnateur de la concentration du transport à l’École d’urbanisme de l’Université McGill. Depuis quelques années, les pôles d’emplois se sont multipliés, mais le transport n’a pas suivi. Alors, oui, peut-être que les gens ont accès à une ligne d’autobus, mais elle ne les amène pas où ils veulent, quand ils veulent. »

Beaucoup d’emplois qui demandent peu de qualifications ne se trouvent pas au centre-ville, note Sébastien Lord, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture du paysage de l’Université de Montréal (UdeM). C’est le cas, entre autres, des quelques usines qui résistent à l’épreuve du temps. « Essayez donc de vous rendre dans Saint-Laurent à partir de Montréal-Nord en autobus. Pire, essayez de le faire en milieu d’après-midi parce que votre quart de travail est la nuit ! Les services de transport répondent aux besoins des navetteurs, c’est-à-dire ceux qui travaillent de 9 à 5. L’offre est donc très importante aux heures de pointe du matin et du soir, mais se raréfie considérablement en dehors de ces pics d’achalandage. Ça complique beaucoup la vie de ceux qui ont des horaires atypiques. »

Proximité du réseau d’autobus

Plus une zone est foncée, plus elle est proche du réseau d’autobus. Passez votre curseur sur la carte pour plus de détails.

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Ainsi, les problèmes d’accessibilité sont multifactoriels, précise Florence Paulhiac Scherrer, qui s’intéresse à ces questions depuis déjà quelques années. « Et c’est clair qu’une partie du problème est que, quand vient le temps de poser un diagnostic, on a tendance à ne pas prendre en compte ces réalités particulières. On regarde la carte, on compare le prix des tickets et on se dit que tout va bien. Or, les services ne sont bien souvent pas adaptés aux besoins réels des populations les plus démunies. »

Question de priorité

Proximité du réseau de Bixi

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Dans des quartiers où les problèmes se multiplient rapidement, les transports arrivent bien souvent tout en bas de la liste des priorités, bien loin derrière l’éducation et la création d’emplois. Ce sont d’ailleurs ces dernières qui sont le plus souvent ciblées par les pouvoirs publics comme facteur de changement pour lutter contre la pauvreté. Pourtant, de plus en plus d’études montrent que l’impact des investissements fait dans ces deux domaines est moindre s’ils ne sont pas couplés à d’importantes améliorations de l’offre de transport, ne serait-ce que parce que cela facilite l’accès aux écoles et aux lieux de travail.

Proximité du réseau cyclable

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Plus encore, l’accessibilité aux réseaux de transport est rarement prise en compte par les ménages au moment d’un déménagement ou d’un changement d’emploi, souligne Sébastien Lord, qui est également membre de l’Observatoire de la mobilité durable. « La mobilité quotidienne n’est pas vraiment une variable qui est prise en considération. On ne se questionne ni sur sa facilité ni sur son coût. C’est un peu comme si, ultimement, on acceptait toujours de se rabattre sur la voiture. » À l’échelle des ménages, la mise en place de réseaux alternatifs adéquats permettrait pourtant, à terme, aux gens de délaisser leur automobile — ou, du moins, la seconde — et, ainsi, de faire de grosses économies.

De façon plus globale, la bonification des solutions de remplacement à l’auto solo peut avoir une multitude d’impacts qui dépassent largement la mobilité des individus — diminution des problèmes de santé liés à la pollution de l’air, réduction de la quantité d’accidents, amélioration de l’environnement sonore, etc. « Améliorer l’offre de transports alternatifs peut très certainement avoir un impact sur la qualité urbaine en général, ajoute le professeur. On ne s’en rend pas toujours compte au quotidien, mais notre rapport à l’espace, à la ville, change considérablement selon le mode de transport qu’on choisit. Mais encore faut-il avoir le luxe de le choisir ! »

DONNÉES ET MÉTHODOLOGIE

Le Devoir amorce cette semaine une nouvelle série sur l’équité et la mobilité. Les données utilisées dans le cadre de cet article ont été fournies par Local Logic, une entreprise d’analyse géospatiale pour les entreprises basées en Amérique du Nord qui oeuvre avec des sources de données ouvertes des différents ordres de gouvernement, tant municipaux, provinciaux que fédéral, des images satellitaires, ou privées.

Le développement des cartes a été réalisé conjointement avec le groupe PolyData de Polytechnique Montréal.

La carte de proximité des transports tient compte des réseaux de métro et d’autobus, des infrastructures cyclables et des stations de Bixi. Les mesures d’accessibilité fournies par Local Logic sont normalisées en (Z)-scores, une unité qui détermine à quel point l’accessibilité des quartiers considérés comme défavorisés s’écarte de la moyenne montréalaise. Le niveau de défavorisation a été déterminé en fonction du revenu médian des ménages, du taux de diplomation post-secondaire et du taux de minorités visibles.

Image: Le Devoir avec Local Logic

Image: Le Devoir avec Local Logic

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A ta liste, il faudrait ajouter une taxe pour les grands espaces de stationnements extérieur qui prennent beaucoup d’espace autour de la station. Traverser un grand stationnement, ce n’est pas ce qu’il y a de plus intéressant pour un usager des transports en commun. Développer ces espaces contribue à augmenter l’utilisation de la station, et donc, la rentabilité du système.

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Est-ce qu’il y a des études a ce sujet? Quand je fais des calculs, je n’arrive pas à cette conclusion. J’aimerais voir où mes calculs et hypothèses sont erronées.

Si ces grands espaces appartiennent à l’agence de transport, elle devrait être normalement motivée à la développer pour accroître la rentabilité.

Si ce n’est pas le cas il y a anguille sous roche. Que ce soit le management ou le modèle d’affaire.

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Sur des petit déplacement le tramway est plus attractif: accessible au niveau du sol donc pas de temps perdu a descendre des marche (Exemple Lucien l’allier) , plus agréable a utiliser (on peut voir dehors par les fenêtres, embarquement rapide et facile en poussette par exemple). Sur des longue distances le tramway deviens moins attractif a cause de la faible vitesse moyenne.
c’est pour c’a que le tramway reste a mon avis un bon complément au métro, exemple sur l’axe du parc, ou la rue de la commune.

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