Cette perspective que les réalisations des élus ne plaît pas à la majorité, élections après élections, est quand même étrange. Ces gens sont élus. Et ensuite réélus. C’est sain et normal d’avoir des préférences et des irritants (qu’on aime l’administration ou non d’ailleurs, elle n’est pas parfaite), mais en bout de ligne, les interventions sont plutôt des bonifications pour d’autres et les gens votent pour.
Le Plateau a arrêté de perdre population et familles avec enfants quand ces irritants sont arrivés avec Ferrandez. C’est mon avis personnel, mais je ne crois pas que la plupart des gens qui vont considérer la ville pour s’y installer cherchent une place de stationnement plus que tout au monde. Ils cherchent un milieu de vie. La voiture est parfois une part de ce milieu de vie, mais la nature de la ville fait qu’il est facile de sacrifier tout le reste pour simplifier juste un tout petit peu son utilisation (souvent plus pour les visiteurs que les résidents).
La situation ne serait même pas mieux pour les automobilistes sans ces irritants. On aurait juste plus de voitures dans un espace aussi restraint (prouvé par les parts modals et les enquêtes origine-destination), plutôt que de d’avoir rendu les alternatives agréables et plus populaires.
Spécifiquement pour le stationnement, notre vignette coûte 167$ par année. Le même usage, le même espace pour la même fonction, coûte 200$ par mois en location dans notre édifice. La ville offre ce service à une fraction du coût du privé, justement pour que ce soit accessible « si ton style de vie n’est pas comme celui qu’on veut voir en ville, si tu as une jeune famille, une famille en région ». Est-ce que ça devrait être gratuit? Alors que 50% de mes voisins n’ont littéralement pas le droit d’utiliser le stationnement sur rue parce qu’ils ne possèdent pas une voiture? Parce que c’est eux qui payerait le 167$ si c’était pas moi. C’est un minimum d’équité fiscale pour un service extrêmement coûteux. Ce prix, c’est grosso-modo 1-2% du coût d’une voiture au Québec. Encore une fois, la voiture elle-même est le plus gros irritant nuisant à elle-même, pas un facteur imposé par la ville.
Et c’est tout un service. La voiture chez nous sert pour un travail avec un horaire atypique, revient souvent stationner en pleine journée dans un secteur d’emplois sous pression dans le Mile-End. Toujours de la place sans problème à notre coin de rue. Jamais à tourner en rond. Un irritant? Plutôt que d’avoir juste… Zéro place, assurée?
La vignette, c’est de payer pour un service qu’on utilise, ce qui est la base de notre société. On échange de la monnaie contre des biens et services. Dans notre système, c’est la gratuité (une subvention payée par tous) qui est l’exception absolue, et qu’on doit justifier pour des raisons sociales, des valeurs communes.
La vignette est aussi le seul véritable contrôle d’offre et de demande sur la place de la voiture dans un quartier résidentiel. La banlieue répond à cela en créant une offre excédentaire énorme. Les problèmes de société de cette façon de faire sont immensément pires. Le seul attrait est une facilité d’utilisation si on entretient une dépendance totale à son véhicule. La ville préfère réduire cette dépendance à la base et offrir les gens des alternatives aussi viables. On a vu que ça a fonctionné dans un quartier qui le fait depuis longtemps. Pis ça fait 4 fois qu’on vote pour ça avec des pourcentages qu’on retrouve plus souvent dans des républiques de banane aux élections truqués.