Résumé
Radars photo Des contraventions à la tonne pour la rentrée
PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE
Les radars près du pont-tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, côté Montréal, ont été particulièrement payants, produisant 1,9 million de dollars au total.
La surveillance accrue des chantiers au moyen de radars photo a entraîné un record de contraventions sur les routes en cette rentrée automnale. Près de 50 000 conducteurs ont été mis à l’amende en septembre, pour un total qui frôle les 12 millions de dollars.
Publié à 1h17 Mis à jour à 5h00


Henri Ouellette-Vézina La Presse

Ce qu’il faut savoir
- Le nombre d’automobilistes épinglés par les radars photo atteint de nouveaux sommets depuis quelques semaines.
- Des appareils situés sur des chantiers pèsent lourd dans la balance.
- Certains réclament une forte multiplication de leur nombre, comme en Europe.
« Ça démontre clairement que les radars font leur travail, mais d’abord, ça veut dire que les gens doivent ralentir, surtout dans les zones de travaux », commente en entrevue l’ancien policier André Durocher, maintenant directeur des relations avec la communauté et la sécurité routière chez CAA-Québec.
« Trop souvent, encore, on voit des comportements tellement dangereux », poursuit-il.
Le sommet de contraventions tient beaucoup à la multiplication des radars dans les zones de chantier. À lui seul, l’appareil installé en bordure de l’autoroute 520, où la vitesse a été réduite à 50 km/h durant les travaux, a fait remettre pour 1,7 million de dollars en contraventions.
Au deuxième rang des radars les plus lucratifs du Québec : celui mis en place sur le chantier de l’autoroute 20 à Sainte-Julie, qui a rapporté 1,6 million.
Dans l’est de Montréal, la surveillance dans le chantier du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine, où la vitesse a été réduite à 50 km/h, a aussi rapporté gros. L’appareil en direction sud a produit pour 1,1 million de dollars en amendes, et celui en direction nord, pour 800 000 $.

Au total, ces quatre appareils implantés dans la région métropolitaine représentent la moitié des contraventions fournies au Québec par des systèmes de radars photo en septembre.
Des amendes de plus en plus salées
La valeur moyenne des amendes, qui a nettement augmenté depuis l’été dernier, explique également la hausse des sommes récoltées. La contravention moyenne des radars mobiles est passée de 209 $ en juin à 339 $ en septembre. Cette augmentation pourrait s’expliquer par une concentration des appareils le long des chantiers. Dans ces zones, la valeur des constats est doublée.
La facture des contraventions générées par d’autres types d’appareils a aussi augmenté. La contravention moyenne pour les radars aux feux rouges a bondi de 201 $ à 316 $ durant la même période. Les radars fixes ont également vu leur valeur augmenter, passant de 108 $ en juin à 140 $ en septembre.

Un moyen de dissuasion
Pour Sandrine Cabana-Degani, directrice générale de Piétons Québec, « tout cela démontre que trop de gens ne respectent pas les limites de vitesse ». « Les radars photo, quand ils sont vraiment répandus, ont un fort impact de prévention. Malheureusement, avec ce qui est prévu par Québec en ce moment, ce ne sera pas suffisant pour donner cette impression que peu importe où on roule, on peut se faire prendre », dit-elle.
En juillet 2023, le ministère des Transports et de la Mobilité durable avait publié un appel d’intérêt pour s’équiper de 250 radars photo pour l’ensemble du Québec. Pour le moment, on en compte un peu plus d’une cinquantaine dans la province, dont certains sont fixes et d’autres mobiles.
La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, répète depuis un moment qu’elle souhaite augmenter leur nombre, voire diversifier le type de radars. À elle seule, la Ville de Montréal en veut toutefois beaucoup plus, et réclame au gouvernement 300 radars photo, étant donné la densité de population, le nombre de voitures et le nombre d’écoles qu’on y trouve.
La mairesse Valérie Plante, qui milite depuis un moment pour la multiplication de cet outil « extrêmement efficace » en matière de sécurité routière, n’avait pas caché sa déception face aux engagements de Québec.
Par écrit, son cabinet fait valoir que ces chiffres « illustrent une hausse inquiétante des infractions routières, notamment des excès de vitesse ». « Cette recrudescence des comportements délinquants a des conséquences directes sur le nombre de collisions et de décès sur nos routes », s’inquiète l’attachée de presse Béatrice Saulnier-Yelle.
Pour sa part, Mme Cabana-Degani rappelle que l’exemple de la France est très parlant. L’Hexagone compte à ce jour environ 1 radar pour 10 000 véhicules, pendant qu’au Québec, ce chiffre tourne plutôt autour d’un pour 28 000 voitures, selon un récent rapport de son organisme.
« Ils ont vu une réduction d’environ 40 % des décès sur la route dans les six premières années où ils ont mis en place des radars photo de façon massive. On pourrait tout à fait avoir le même effet ici avec des actions similaires », affirme-t-elle.
Même son de cloche du côté d’André Durocher, qui rappelle toutefois qu’un radar photo « doit d’abord avoir un réel objectif ». « Ça ne peut pas juste être de remplir les coffres du gouvernement année après année. Il faut surtout les mettre dans des secteurs accidentogènes où on veut réellement réduire la vitesse. C’est la seule façon d’assurer une acceptabilité sociale dans les municipalités », juge-t-il.