REM : Québec paierait 3 fois l’investissement de la Caisse, selon une étude
La facture de la première phase du Réseau express métropolitain totaliserait près de 9 milliards de dollars en y incluant les contributions de tous les partenaires, selon l’Institut de recherche en économie contemporaine.
La facture officielle de la première phase du Réseau express métropolitain s’élèverait à 6,5 milliards de dollars.
PHOTO : RADIO-CANADA / JEAN-CLAUDE TALIANA
Mathieu Dion
à 4 h 00
En marge des séances d’information sur le Réseau express métropolitain de l’Est cette semaine, l’Institut de recherche en économie contemporaine (IREC) publie un regard inédit sur la facture réelle de la première phase. L’État québécois rembourserait plus de trois fois l’investissement de la Caisse de dépôt et placement du Québec sur la durée de l’entente de 99 ans.
L’auteur du rapport, Michel Beaulé, a fait carrière dans la fonction publique québécoise, aux ministères des Affaires municipales et des Transports notamment.
Selon l’entente signée en 2018, le gouvernement devrait bon an mal an verser une contribution annuelle de 238 millions de dollars à l’Autorité régionale de transport métropolitain. Ce montant, qui correspond à 85 % du coût additionnel lié à la mise en service, servira ensuite à l’exploitation du REM et à générer un rendement de 8 % à la Caisse.
Normalement, cette somme, ça paye l’investissement de CDPQ Infra, fait remarquer Florence Junca-Adenot à la lumière de l’étude. La professeure à l’UQAM et directrice du Forum URBA 2015 soutient que, dans un projet normal, au bout de 20 à 25 ans, l’autoroute ou le métro est payé et on récupère une marge pour financer d’autres projets d’infrastructures.
L’étude postule que le montant de 238 millions de dollars dépasse de 10 à 20 millions de dollars le coût annuel de remboursement d’emprunts que le gouvernement aurait effectué en l’absence de la contribution de CDPQ Infra, soit 3,18 milliards de dollars, pendant une vingtaine d’années.
Compte tenu que c’est pour la durée de 99 ans, explique Mme Junca-Adenot, on va payer au fond trois fois ce qu’on paierait une seule fois en empruntant sur les marchés publics pour financer un prolongement d’autoroute, un entretien majeur ou un prolongement de métro.
« Réseau Express Métropolitain : Un autre regard sur son financement »(Nouvelle fenêtre), une étude de l’IRECInstitut de recherche en économie contemporaine
Une contribution appelée à augmenter?
Ce déficit lié à la mise en service du REM était en plus basé sur des prévisions d’achalandage estimées avant la pandémie. Le président de la Caisse, Charles Emond, nous apprenait récemment que l’arrivée du télétravail pourrait réduire l’achalandage de 10 %.
Il n’y a rien dans les simulations démontrant quel achalandage il faudrait avoir sur le réseau pour arriver à ce qu’il n’y ait plus de déficit.
**Une citation de :**Florence Junca-Adenot, professeure associée au Département d’études urbaines et touristiques de l’UQAM et directrice du Forum URBA 2015
L’IRECInstitut de recherche en économie contemporaine rappelle, cela dit, que CDPQ Infra assume les risques liés à la maîtrise des coûts de conception-construction et des coûts d’exploitation et le risque lié à l’achalandage du REM étant donné que sa rémunération pour le financement du projet est basée sur l’achalandage.
Un ensemble de contributions évaluées à 9 milliards de dollars
Si la facture du REM de l’Ouest a été révisée à 6,5 milliards de dollars fin 2019, l’étude de l’IRECInstitut de recherche en économie contemporaine calcule qu’elle est maintenant dans les faits de 8,96 milliards de dollars en tenant compte des contributions de l’ensemble des partenaires.
Par exemple, les 600 millions de dollars pour bâtir la station à l’Aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau ne sont pas compris dans la facture officielle. Il en va de même pour les 338 millions en infrastructures électriques d’Hydro-Québec ou les 800 millions de dollars du gouvernement canadien pour les deux voies centrales du pont Samuel-de-Champlain sur lesquelles circuleront les trains du REM.
Il y a une directive du Conseil du Trésor exigeant que les projets publics présentent tous les coûts qui permettent de réaliser le projet, souligne pourtant Florence Junca-Adenot.
On vient de situer 9 milliards de dollars, mais ça va sans doute être dépassé parce que le projet n’est pas terminé.
**Une citation de :**Florence Junca-Adenot
Dans ce contexte, le coût officiel de 10 milliards de dollars pour le REM de l’Est serait largement sous-estimé. Déjà, le quotidien La Presse révélait la semaine dernière que les aménagements périphériques au projet pourraient s’élever jusqu’à 800 millions de dollars pour la Ville de Montréal.
Aux dires de Mme Junca-Adenot, le montage financier pour cette seconde phase pourrait aussi être une occasion pour mieux équilibrer les contributions récurrentes annuelles du gouvernement du Québec.