REM 2 (Est de Montréal) - Projet annulé

REM de l’Est En attendant la troisième version


ILLUSTRATION JULIEN LAUZON, FOURNIE PAR CDPQ-INFRA | Illustration de la sortie de terre du REM de l’Est, boulevard René-Lévesque, à Montréal

Il faut saluer la volonté du gouvernement de favoriser le développement de l’est de Montréal en implantant un nouveau transport structurant. Ne perdons pas de vue que les importants investissements faciliteront l’accès au centre-ville et, surtout, serviront de colonne vertébrale de la transformation des secteurs desservis pour en faire de véritables quartiers de proximité où l’on peut résider, travailler, s’approvisionner à quelques pas de chez soi.

La Presse | 15 mars 2022 | Publié à 10h00

JEAN-MARC FOURNIER, PRÉSIDENT-DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’INSTITUT DE DÉVELOPPEMENT URBAIN

En plus d’un projet économique, le transport structurant est un outil fondamental de lutte contre les émissions de GES. Il doit permettre de créer des espaces de vie inclusifs et multi-usages qui réduisent les déplacements et offrent une solution de rechange attrayante à l’auto lorsqu’on doit aller d’un quartier à l’autre.

L’acceptabilité sociale du projet ne se limite pas à la structure elle-même du mode de transport, mais surtout à sa capacité de transformer la trame urbaine dans le sens d’un projet de densification attractif. En ce sens, la troisième version du projet devra s’appuyer sur la proposition de développement de l’est de Montréal pour les prochaines générations.

D’abord, parce que le choix du mode de transport et son tracé doivent correspondre aux besoins de l’avenir, il faut donc avoir une idée de ce qui est souhaité pour l’Est. Aussi, parce qu’accepter un REM, c’est accepter une vision de développement. Il faudra éviter de répéter la situation vécue à Pointe-Claire où, malgré un indice de densité bien inférieur aux objectifs inscrits au Plan métropolitain d’aménagement et de développement de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), la Ville semble vouloir contredire l’objectif de densification accompagnant le REM et limiter le développement résidentiel.

Il faut reconnaître que la deuxième version du REM 2.0 est grandement améliorée. Les formes amincies et arrondies des structures aériennes, la préoccupation pour l’intégration urbaine des stations et un premier effort sous-terrain dans une portion du tracé au centre-ville témoignent d’une réelle écoute.

Comme l’indique le comité d’experts du gouvernement du Québec, le REM doit favoriser une trame urbaine accueillante et, à ce titre, il reste du travail à faire. Au-delà de l’intégration des stations dans le paysage urbain, c’est le corridor lui-même qui doit être analysé en fonction du développement de quartiers attractifs.

Cela dit, malgré tous les efforts, le choix d’une structure aérienne en milieu urbain entraînera toujours une empreinte paysagère importante.

Considérant sa marge de manœuvre financière et le poids du budget dévolu aux routes, le gouvernement a voulu exclure ce projet de son périmètre comptable. Cette décision explique qu’il ne procède pas par appel de projets et qu’il se tourne vers CPDQ Infra qui n’a qu’un seul produit à offrir : un REM. En procédant ainsi, le choix du mode de transport précède l’analyse des besoins futurs et limite les options de tracé en raison des contraintes du train léger.

Même si le processus est inversé, rien n’empêche l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), dont c’est la responsabilité, de nous renseigner sur les besoins de mobilité en fonction du développement urbain anticipé. Sur la base de cette prévision, l’agence pourra donner un avis sur le mode de transport et le tracé optimal. Compte tenu de l’inversion de démarches qu’entraîne le choix du gouvernement, l’analyse indépendante de l’ARTM est de la première importance pour crédibiliser le choix retenu à la fin de l’exercice de consultation. En procédant à cet exercice, l’ARTM recommandera les options assurant la meilleure intégration du nouveau service au réseau actuel du métro. Cela nous permettra de vérifier notamment s’il existe une solution de rechange au passage surélevé dans le boulevard René-Lévesque.

L’autre acteur incontournable, c’est la Ville de Montréal. En effet, pour que l’ARTM puisse considérer les besoins futurs, Montréal doit déposer une vision de développement. Il ne peut y avoir de REM sans cette proposition de Montréal. Au-delà des esquisses illustrant le REM lui-même, ce qu’il faut établir et imager, c’est le développement urbain attendu de la réalisation de ce projet. La Ville doit faire connaître sa vision de densification et évaluer, même sommairement, les nouveaux services publics, les actions de requalification foncière et l’aménagement urbain de type parc, pistes cyclables et piétonnes qui y seront nécessaires.

À ce titre, notons que la proposition de transport actif sous le REM ne doit pas faire oublier l’essentiel : pour bâtir un quartier de proximité, il faut implanter les voies cyclables et piétonnes non pas pour passer d’une station à l’autre, mais pour relier le domicile et le travail à la station. Dans le contexte où Montréal n’a déjà pas les ressources financières pour aménager les corridors de transports actifs vers la station, il serait contreproductif de lui imposer de payer pour celui qui relie les stations. Le financement par Québec de l’aménagement urbain et de la requalification foncière constitue une condition essentielle à la réalisation du projet et ses engagements à cette fin devraient faire partie de la troisième version du projet.

Nous souhaitons que la prochaine version du REM puisse inclure les réponses à ces questions et à ces considérations. Si d’aventure l’option du REM n’était pas retenue, les travaux de l’ARTM et de la Ville de Montréal serviront néanmoins de base pour que Québec lance un appel à projets pour un autre mode de transport. La volonté de Québec de développer l’est de Montréal pourra toujours se réaliser, cette fois en l’incluant au périmètre comptable.

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En réponse à l’éditorial de Stéphanie Grammond:

Réactions à « L’architecture du REM vous déplaît ? Attendez de voir sa facture ! »


IMAGE FOURNIE PAR CDPQ INFRA | Structure du REM vue du boulevard René-Lévesque, au centre-ville

Vous avez été nombreux à commenter l’éditorial de Stéphanie Grammond « L’architecture du REM vous déplaît ? Attendez de voir sa facture ! », publié le dimanche 13 mars dans le cahier Contexte. Voici un aperçu des courriels reçus.

La Presse | 15 mars 2022 | Publié à 11h00

Lisez l’éditorial de Stéphanie Grammond

Une attitude irrationnelle

Vous avez bien raison de souligner que, sans une connaissance précise des coûts incluant ceux des aménagements paysagers, on ne peut pas accepter raisonnablement ce projet. Ce serait une attitude totalement irrationnelle. Les images d’ambiance qu’on nous montre n’ont rien à voir avec de réelles simulations visuelles. Ces images ne servent justement qu’à ça : donner une impression de quiétude et d’espaces ouverts joliment organisés. Or, il n’en sera rien. Il faut exiger que CDPQ Infra produise de véritables simulations visuelles prises à partir de photos nous montrant la réalité telle qu’elle est, sans aucun artifice, d’autant qu’ils ne s’occuperont pas des aménagements au périmètre du REM, comme ses représentants l’admettent ouvertement.

Pierre Vaillancourt, Longueuil

Mal foutu

Ce projet est tellement mal foutu qu’il faut renvoyer CDPQ Infra faire ses devoirs. Qu’est-ce qui donne le droit à la Caisse de détruire notre environnement urbain et de cannibaliser notre réseau de transport collectif ? L’ARTM doit être le maître d’œuvre de la planification et du développement du réseau de transport collectif. Si le projet du REM de l’Est ne constitue pas une valeur ajoutée à coût raisonnable, il faut l’abandonner.

Ginette Lamontagne

De réussite à fiasco

Ce qui s’annonçait comme une belle réussite au départ s’achemine de plus en plus vers un fiasco économique. Allô, y a-t-il quelqu’un à bord pour intervenir avant qu’il ne soit trop tard ?

Roger Gagnon

Vive l’action !

Mme Grammond, vous ne chiffrez pas le coût de l’inaction. Parle parle, jase jase… au Québec, on est les champions dans cette sphère. Personnellement, j’aime mieux quelque chose d’imparfait qui ne fait pas l’unanimité, mais qui est livré plutôt que quelque chose qui, de toute façon, sera imparfait et qui ne fera jamais l’unanimité, et qui ne sera jamais livré en raison des chicanes de clocher des supposés experts. Vive l’action.

Marc-André Gervais

Une chose à la fois…

Il faut aussi souligner les coûts d’aménagements que les villes et municipalités devront assumer pour réduire les effets du REM sur l’environnement visuel et sonore. Il faudra d’abord réparer les nombreuses fractures causées par le REM de l’Ouest pour diminuer la pollution sonore, cacher ou intégrer les énormes structures laides de ce train. Comme, par exemple, la voie qui passe en plein milieu de la paisible et belle ville de Mont-Royal. Qui va payer pour ériger un mur végétal afin de cacher ces amas de fils et atténuer la pollution sonore causée par cette horreur ? Je pense qu’avant d’aller de l’avant avec une phase deux du REM, il faut subventionner les municipalités où passe le REM de l’Ouest pour faire en sorte de l’intégrer et de corriger les torts qu’il cause. Ensuite, il faut faire une étude sérieuse pour évaluer si un REM de l’Est est bien nécessaire en ce moment, car il est loin d’être acquis que la clientèle sera au rendez-vous vu le télétravail qui devient de plus en plus la norme.

Jacques Bournival

D’autres options ?

Dans le cadre du projet du REM, pourquoi ne parle-t-on jamais du prolongement du métro comme une option viable ?

Édouard Archer

Attendez

D’abord, que les autorités de Montréal et de Québec attendent un peu pour voir si le REM de l’Ouest est un succès, s’il est achalandé, s’il incite vraiment à prendre le transport public et si son utilité fait oublier sa laideur ! Et là on pourra décider en connaissance de cause. Ma proposition ? Voir si on peut augmenter la capacité et la fréquence de la ligne verte, et y connecter un transport rapide allant vers Montréal-Nord. Et finir de prolonger la ligne bleue.

Bernard Terreault

Contestation systématique

De toute évidence, chaque fois qu’il est question d’un projet dans l’est de Montréal (où la gauche règne), la contestation s’invite toujours, peu importe ce qui est proposé, à part évidemment les pistes cyclables et les logements sociaux. Pendant ce temps, dans l’ouest, le tout prend forme et j’ai déjà hâte de ne plus avoir à prendre l’auto ou le taxi pour me rendre à l’aéroport. Nous vivons dans une province où j’ai souvent l’impression qu’on carbure à la manifestation, à la contestation. Je vous rappelle que même le métro, à l’époque, avait soulevé la désapprobation.

Marc-André Sabourin

Coûteuse mascarade

D’accord avec votre analyse. Et j’ajoute que les maquettes nous présentent un portrait complètement irréaliste, en maquillant le paysage. Qui ira se promener sur René-Lévesque ? Il n’y a aucun commerce, café, restaurant, c’est une rue d’édifices impersonnels. Peu de journalistes parlent de cette supercherie pour nous vendre le beau REM. Cela fait penser au square Viger, après sa démolition et la construction de la 720, où on a installé un genre de parc pour faire oublier le béton, des installations pour les enfants… personne n’a fréquenté ce lieu sauf des gens en situation d’itinérance. Et on continue cette mascarade à coup de design coûteux.

Normand Bissonnette

Le REM de l’Est, un projet formidable

D’abord quelques faits : le métro est saturé. Allonger les lignes orange et verte n’est plus possible, car elles atteignent le maximum de leurs capacités. Les solutions simplistes d’arrêter le REM à Honoré-Beaugrand ou à Radisson ne tiennent malheureusement pas la route.

La ligne rose était une bonne solution pour soulager l’orange et la verte. Le service rapide par bus (SRB) sur Pie-IX, lui aussi, est construit pour cette raison. D’ailleurs, ce SRB va empirer la saturation de la ligne verte, car il amène de la clientèle à la station de métro Pie-IX.

Pour l’est de la ville, une ligne parallèle est absolument nécessaire. Le trajet du REM de l’Est est parfait pour soulager l’orange et la verte et, contrairement à ce qui est véhiculé, il y aura une connexion avec le métro à la station L’Assomption.

Pour ce qui est du boulevard René-Lévesque, il y a des bureaux, des condos aux fenêtres fermées et des véhicules polluants. Je me demande ce que l’on va défigurer. Je ne connais personne qui amène ses enfants faire une promenade sur René-Lévesque. Le projet tel que présenté ne peut que changer la donne.

On parle de fracture urbaine. Je suis d’accord. Mais pas celle que l’on pense. Pour les gens de l’est, se faire promettre des projets qui n’aboutissent jamais, se faire entasser comme des sardines dans un métro saturé, se faire polluer l’air de nos enfants, pendant des décennies, dans tous les quartiers qui longent la rue Notre-Dame, se faire dire que ça prend encore et encore d’autres études, voilà ce que j’appelle une fracture urbaine.

On ne parle pas assez du formidable côté positif de ce projet, de son côté structurant et prometteur. Il faut penser aux travailleurs, aux étudiants et aux personnes âgées qui pourront se rendre en 30 minutes au centre-ville, dans les bureaux, les centres hospitaliers, les universités, les cégeps et les musées. Sans oublier le quartier chinois, le quartier gai, le Quartier des spectacles, la rue Sainte-Catherine, le Vieux-Montréal, le mont Royal, etc.

Aucun projet ne fera l’unanimité, mais le projet du REM de l’Est est extraordinaire pour toute la région de Montréal.

Michel Fraser, citoyen de Pointe-aux-Trembles, Montréal

Quel étrange commentaire. C’est une emprise sur talus, murs de soutènement, et viaduc, qui selon la logique des opposants de la ligne B, est un “fracture” inacceptable dans le nord de l’île. Ça révèle vos biais plutôt qu’une sincère préoccupation d’analyse des besoins.

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Une minute vous me parlez du mode choisi pour la ligne, et maintenant vous doutez de ma sincérité en me parlant de l’intégration urbaine de la ligne? Ce sont deux paramètres complètement différents qui n’ont pas vraiment de lien entre eux. C’est votre amalgame qui est étrange.

Arrêtez de poser des jugements sur les motivations des utilisateurs de ce forum. On est tous de bonne foi ici, et je ne me prends pas assez au sérieux pour prétendre avoir la science infuse sur ce sujet :stuck_out_tongue:

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WHAT?! Et moi qui citait constamment le forum dans des rapports!!! :sleepy: :dotted_line_face:

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Le REM a une meilleure fiabilité et une plus grande rapidité qu’un tramway ou tram-train dans le traffic.

Probablement aussi un petit « edge » au niveau des embarquements/débarquements à cause des portes et la fluidité dans les rames.

La fréquence théorique aux 90 secondes du REM est probablement infaisable avec un tramway. Sinon on arrive à des situations qu’on voit dans les bus, pris dans le traffic, où tu attends 5-10 minutes à l’arrêt pour finalement en voir passer 3 en même temps qui étaient tous pris aux mêmes lumières ou obstacles. (Certainement moins prononcé avec un tram que ces situations extrêmes j’en conviens)

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Le cout d’exploitation du REM est aussi moins élevé. Il peut donc offrir plus de service durant les heures moins achalandées.

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Le principal facteur que je vois qui puisse indiquer un changement des habitudes de déplacements du secteur est que l’est de Montréal est maintenant l’une des régions les plus abordables d’une ville en pleine crise du logement. J’ose espérer que le déblocage de la mobilité du secteur aide quelque peu à ralentir la croissance les banlieues de 2ème et 3ème couronnes, beaucoup moins propices aux déplacements quotidiens en TEC.

Personnellement, je pense que le REM gagne beaucoup à créer une jonction en saute mouton pour mettre les déplacements directs de branche en branche. Quand à l’ARTM et Exo, ils devraient mettre en place un plan itératif de mise à niveau de la ligne Mascouche pour réduire les conflits d’horaires avec le CN et permettre de passer plus de trains en journée. Le potentiel est là, mais gaspillé tel qu’il en est.

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Une lettre d’opinion du président de l’Ordre des architectes du Québec

Le REM doit viser l’exemplarité globale


Illustration: CDPQ Infra L’architecture, ce n’est pas l’art de maquiller en vitesse des incohérences, une fois des décisions prises, rapporte l’auteur.

Pierre Corriveau
Président de l’Ordre des architectes du Québec
16 mars 2022
LIBRE OPINION

CDPQ Infra a publié la semaine dernière des images de son projet de REM de l’Est. D’emblée, il faut reconnaître le travail effectué au cours de la dernière année pour améliorer le projet. En fonction des paramètres fixés, CDPQ a livré une vision du projet qui fait état d’efforts louables pour intégrer une structure aérienne à la trame urbaine de Montréal.

Les ébauches ne manquent pas de mettre en valeur tout ce qui pourrait rendre cette structure massive acceptable aux yeux des citoyens : une promenade, des aménagements verdoyants, du mobilier urbain moderne, des pistes cyclables. Le problème, c’est que ces ébauches illustrent un projet complet et intégré, alors que CDPQ délègue le financement et la réalisation des éléments qui pourraient le rendre acceptable à d’autres parties prenantes qui n’ont pas de siège à la table.

Le comité d’experts sur l’architecture et l’intégration souligne dans son rapport — dont on peut saluer la qualité des recommandations — l’importance de définir le mode de gouvernance afin « qu’on puisse garantir à la population la réalisation de l’ensemble des concepts et aménagements proposés, non seulement pour l’infrastructure de transport elle-même, mais aussi pour les aménagements urbains tout au long du tracé ».

Sans les mesures de mitigation que sont les aménagements proposés, on revient à l’évocation initiale de piliers bétonnés — peu importe qu’ils soient effilés, blancs, dansants ou pas —, qui s’élèvent et se répliquent sur plus de 24 kilomètres et qui créent une réelle fracture urbaine. Il apparaît donc indispensable que tous les coûts relatifs à ces aménagements, aussi nécessaires qu’alléchants, soient inclus dans le projet pour que l’on puisse juger de celui-ci dans son ensemble.

Connaître toutes les implications d’un scénario permet de le comparer, en toute transparence et de manière éclairée, à d’autres scénarios éventuellement moins préjudiciables sur les plans urbanistique, paysager, humain et socio-économique.

Architecture et esthétisme

Le dossier du REM est révélateur d’un autre problème : l’incompréhension répandue de ce en quoi consiste véritablement la qualité architecturale. Bien plus qu’une affirmation esthétique, cette qualité doit être le fruit d’une démarche créative qui permet de concilier les besoins des utilisateurs, la fonctionnalité, la durabilité et la beauté, tout en offrant une valeur ajoutée à la collectivité.

On le répète parce qu’il le faut : l’architecture, ce n’est pas l’art de maquiller en vitesse des incohérences, une fois des décisions prises, pour qu’un problème qu’on a créé de toutes pièces puisse paraître un pis-aller acceptable. L’architecture repose sur l’intelligence globale d’un projet.

L’essence de cette démarche doit être comprise et encouragée par l’ensemble des parties prenantes : ici, cela inclut CDPQ Infra, mais aussi la Ville de Montréal et les citoyens. Cela implique aussi tout naturellement le gouvernement du Québec. Il faut pouvoir compter sur le fait que les projets qui bénéficient d’un appui de l’État — comme le REM — dépassent l’objectif de la simple rentabilité pour viser l’exemplarité globale.

Cette exemplarité est d’autant plus importante si l’on considère que le REM semble vouloir se reproduire sur le territoire métropolitain. Elle nous appelle à réfléchir à ce qu’il y a de mieux pour Montréal et pour le Québec. Nous devons vouloir être fiers de notre réussite plutôt que de chercher la solution qui obtiendra, à l’arraché et par crainte de voir le projet abandonné, la seule note de passage au test de l’acceptabilité sociale.

Prenons encore un peu de ce temps qu’il faut pour bien faire. Les regrets ne sont jamais agréables.

Et une de Gérard Beaudet dans La Presse

CPDQ Infra et la concurrence… à sens unique


PHOTO FOURNIE PAR CDPQ INFRA
« Le REM [proposé] dessert très mal certains des plus importants pôles d’activités de l’Est montréalais et laisse en plan plusieurs résidants, notamment ceux de Rivière-des-Prairies », déplore l’auteur.

Les recherches sur la mobilité et le transport montrent que les cocktails de modes − marche, vélo, auto privée, auto-partage, taxi, autobus, train léger et métro – et la variété des trajets constituent la meilleure solution aux besoins des habitants des grandes villes et des métropoles, et la meilleure stratégie pour induire des transferts modaux vers le transport collectif.

Publié à 12h00
GÉRARD BEAUDETURBANISTE ÉMÉRITE, PROFESSEUR TITULAIRE À L’ÉCOLE D’URBANISME ET D’ARCHITECTURE DE PAYSAGE, UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

Pendant longtemps, les déplacements de la plupart des usagers du transport collectif traduisaient la forte prépondérance du centre-ville. D’où la configuration radiale des infrastructures construites entre le milieu du XIXe siècle et les années 1960, qu’il s’agisse du train de banlieue, du tramway ou du métro. L’émergence de sous-centres et les nouveaux patrons de distribution de l’emploi ont rendu cette configuration moins pertinente.

Si les réseaux hérités de cette époque restent utiles, ils sont loin de répondre de manière entièrement satisfaisante à l’évolution des besoins. C’est pourquoi il est nécessaire de proposer des solutions de rechange.

C’est l’argument qu’invoquent plusieurs défenseurs du REM de l’Est pour justifier la concurrence que favorisent son tracé en Y et son prolongement jusqu’au centre-ville. Cet argument est-il recevable ? Pour répondre à la question, il faut d’abord s’arrêter au terme concurrence. Le Robert en donne la définition suivante : rivalité entre plusieurs personnes, plusieurs forces poursuivant un même but et rapport entre producteurs, commerçants qui se disputent une clientèle. C’est précisément ce dont il s’agit ici.

CPDQ Infra entend, aux dires même de ses responsables mais en des termes plus politiquement corrects, cannibaliser les autres composantes du système à son profit, au détriment de leur achalandage et des finances des organismes responsables, en l’occurrence la Société de transport de Montréal (lignes verte et bleue du métro, SRB Pie-IX) et d’EXO (train de l’Est).

Or, cette concurrence est d’emblée déloyale.

La loi qui a permis la création de CPDQ Infra précise en effet que l’organisme peut exiger des gestionnaires des autres composantes du système de transport collectif un rabattement de leurs usagers sur ses stations. En revanche, la loi permet à CPDQ Infra d’obtenir des compensations pour toute forme de concurrence qui lui serait livrée. C’est ainsi, par exemple, qu’aucun transporteur de la Rive-Sud ne peut emprunter le pont Samuel-De Champlain pour se rendre au centre-ville, alors que le Réseau de transport de Longueuil et EXO doivent rabattre leurs circuits sur les stations du REM, peu importe que cette obligation ne soit pas optimale pour nombre d’usagers. Non seulement la concurrence trouve-t-elle ici sa pleine acceptation, mais elle est au surplus déloyale en raison des règles établies par la loi adoptée par le gouvernement Couillard.

En fait, les défenseurs du REM confondent, sciemment ou non, concurrence et complémentarité.

Contrairement à la concurrence, qui est une aberration en matière de transport collectif, la complémentarité vise à composer de manière optimale avec la grande diversité des besoins des usagers, en offrant des trajets alternatifs et une variété de modes adaptée à des besoins et des attentes qui peuvent être d’une grande complexité. Subordonnés à un modèle d’affaires, le tracé et le mode – un train léger aérien pour une grande partie du tracé – promus par CPDQ Infra sans analyse préalable sérieuse – l’organisme reconnaît ne pas planifier le transport collectif − contreviennent totalement à ce principe.

Certains n’hésitent pas, malgré tout, à justifier cette concurrence en faisant valoir que pour plusieurs usagers, celle-ci se traduira en une économie de temps appréciable. C’est oublier que les enquêtes origine-destination révèlent que seulement 13 % des déplacements des résidants de l’Est ont pour destination le centre-ville.

Pourquoi alors investir tant d’argent pour ajouter un corridor radial, si ce n’est pour étirer le parcours − extrêmement rentable pour CPDQ Infra – de ces usagers ?

Mais, défendre sur ce terrain la concurrence, c’est surtout occulter le fait que le REM dessert très mal certains des plus importants pôles d’activités de l’Est montréalais et laisse en plan plusieurs résidants, notamment ceux de Rivière-des-Prairies.

Aussi est-il permis de se demander si, quand des citoyens n’ont accès qu’à une offre extrêmement lacunaire de transport collectif, il est légitime de souhaiter améliorer le sort de ceux qui sont déjà passablement bien desservis. Surtout quand cette amélioration compromet financièrement la possibilité de planifier et de proposer une bonification d’une offre équitable pour tous. On aimerait bien que les défenseurs du REM s’expliquent là-dessus aussi.

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Moi je me demande pourquoi l’ARTM n’en a pas profiter pour proposer une alternative.

Je serait curieux de savoir ce que l’ARTM aurait proposé avec seulement 72 cents/pass-km pour construire et opérer la patente? (Ou même 80 cents).

Personnellement je souhaite que la CDPQ trouve une porte de sortie et passe à un autre projet. (Les 20% d’opposants occupent 80% des médias)

Et qu’ont offre à l’ARTM exactement le même financement (72+ cents, $ d’HQ etc) que celui offert à la CDPQ.

Et bien sûr, que les risques et les dépassements de coûts soient ENTIÈREMENT à la charge de Montréal. Ils pourront alors se payer une patente à $1B/km s’ils le veulent.

Un gouvernement favorable coute que coute, c’est pas mal une bonne porte de sortie je dirais…

Les coûts d’opération du REM viennent de la poche de l’ARTM, justement. Si on en faisant un projet gouvernemental, un montage financier classique aurait plus de sens que de venir enrouler les coûts de construction dans les frais d’opération et de financer la construction au privé à cause des taux d’intérêt plus faibles du gouvernement.

C’est vrai dans l’importe quel projet que les critiques vont occuper plus de place que les louanges. Mais je crois que c’est réducteur de venir placer les gens dans une dichotomie opposant-supporter: une bonne partie des critiques à la fois sur la place publique et ici sur le forum visent en fait à amener des améliorations au projet plutôt que d’essayer de le torpiller.

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Et Québec remboursera l’ARTM 85% de ces 72 cents.
Alors pour être équitable, Québec ne devrait alors fournir que 61.2 cents à l’ARTM :wink:

Ce 85% est passablement généreux de Québec en passant (comparé à la subvention provinciale actuelle pour l’opération des bus, métro et trains)

Dans La Presse+ de ce matin, dans la section « portfolio », un publi-reportage complet sur la… RATP dev, qui vante sa capacité à concevoir et gérer des projets de transports partout dans le monde.

Ça sent les intentions de participer aux appels d’offres du REM ça. :slight_smile:

http://plus.lapresse.ca/screens/11caef70-0a2e-4a39-9218-48529e833b04__7C___0.html?utm_content=ulink&utm_source=lpp&utm_medium=referral&utm_campaign=internal+share

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Il semble qu’il avait une rencontre d’information ce soir, en personne et non en virtuel

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La différence c’est que pour l’ARTM, le gouvenement devrait payer l’entièreté de la facture plus l’intérêt. Et si l’opération n’est pas profitable, le gouvernement va finir par payer plus pour compenser les pertes. En fait, on paye un premium à CDPQ pour se débarasser du risque. Ça encourage aussi CDPQ à garder les prix de constructions modérés, ce que le gouvernement a souvent du mal à faire, et à augmenter le nombre de passagers sur le réseau.

D’une certaine façon je préfèrerais pareil que l’ARTM opère le réseau. Je me dis que si le projet est réellement profitable (Ce que la CDPQ mise dessus) ça serait mieux de payer le service de la dette que le 8% du CDPQ. Dans les deux cas l’argent reste au Québecois.

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Ceci prend prémisse que l’ARTM arrive à opérer le réseau de manière aussi ou plus efficace que la CDPQi. Ici aussi on paie pour se départir du risque.

Hâte de voir s’il y aura un contraste évident entre l’opération du REM vs le métro ou le train de banlieue. Salubrité, pannes, interruptions, etc. Le train de l’Est était un désastre à ses débuts et je priais qu’il n’y a pas de problème de signalisation à chaque matin, ou que le train du soir n’était pas annulé avec un arrangez vous avec la STM.

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On peut naturellement s’attendre à ce que le REM soit plus fiable que les services existants peu importe la compétence de l’opérateur, puisque

  • Le REM est doté de portes pallières aux stations
  • Le matériel roulant est neuf
  • L’entassement à bord des trains sera moins important que dans le métro (réduit les chances de malaise passager)
  • Comparé aux trains de banlieue, le REM a une séparation de grade et le droit exclusif sur l’entièreté du parcours

Mais la présence de segments extérieurs joue aussi en défaveur. Reste en effet à voir comment le tout va se dérouler en pratique.

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Échéancier repoussé pour le REM de l’Est

ILLUSTRATION FOURNIE PAR CDPQ INFRA

La dernière mouture du REM de l’Est, présentée la semaine dernière

(Québec) L’échéancier du Réseau express métropolitain (REM) de l’Est est repoussé, a appris La Presse. L’étude et les audiences publiques du BAPE n’auront pas lieu ce printemps comme prévu. La Caisse de dépôt et placement du Québec refuse d’aller plus loin sans une position claire de la Ville de Montréal au sujet de la nouvelle mouture de son projet de 10 milliards.

Publié à 5h00

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Tommy Chouinard

Tommy Chouinard La Presse

« Pour passer à la prochaine étape, il est nécessaire d’avoir l’alignement de l’ensemble des parties prenantes. Nous ne souhaitons pas déposer au BAPE [Bureau d’audiences publiques sur l’environnement] un projet qui ne bénéficie pas de l’alignement requis des parties prenantes au projet », affirme Jean-Vincent Lacroix, directeur des communications de CDPQ Infra, filiale de la Caisse responsable du projet.

Il ajoute que « les audiences publiques du BAPE ne peuvent se tenir sans qu’un mécanisme de fonctionnement clair entre les différentes parties prenantes soit établi ».

Comme l’examen du BAPE ne peut plus se tenir ce printemps, tout l’échéancier du REM de l’Est est chamboulé. Il ne pourra y avoir de mise en chantier à la mi-2023, ni de mise en service en 2029.

La semaine dernière, après 15 mois de travail et une vague de critiques, CDPQ Infra a présenté une nouvelle mouture de son projet. Elle dit répondre ainsi à 80 % des éléments soulevés dans un rapport d’étape assez critique d’un comité d’experts chargé d’assurer l’intégration architecturale et urbaine du REM de l’Est.

CDPQ Infra déplore que la Ville de Montréal n’ait pas exprimé une position claire au sujet de son projet « grandement amélioré ».

« Encore du travail à faire »

Le 9 mars, la mairesse Valérie Plante a déclaré qu’il y avait « encore du travail à faire » et des « améliorations à apporter », sans donner de précisions. Elle a qualifié de « rapport d’étape » la nouvelle mouture du projet et a réitéré sa préférence pour un train qui circulerait sous terre au centre-ville.

Le projet révisé de CDPQ Infra prévoit d’imposants aménagements le long des structures, comme des pistes cyclables et des places publiques. Elle compte sur la Ville et le gouvernement pour les payer.

La Ville chiffre à 1 milliard la facture totale des travaux d’aménagement aux abords du REM. Valérie Plante a promis d’investir 500 millions. Le gouvernement Legault s’est dit prêt à mettre sur la table des « sommes importantes », mais aucune entente n’a été conclue à ce jour.

Valérie Plante a rappelé la semaine dernière sa demande pour la création d’un comité mixte avec la Caisse, une « condition gagnante » pour que le projet reçoive son appui.

« On veut être autour de la table pour participer encore plus activement à l’évaluation des coûts. L’expertise de CDPQ Infra, c’est le train. Celle de la Ville, c’est l’aménagement », a-t-elle dit.

Le mois dernier, le premier ministre François Legault a proposé de créer un « groupe de travail » réunissant la Ville, le gouvernement et CDPQ Infra pour « discuter des améliorations possibles au tracé actuel et du projet dans son ensemble », mais cette suggestion n’a apparemment pas eu de suite.

CDPQ Infra a déjà fait savoir que le REM de l’Est serait abandonné sans un appui clair de la Ville et de l’Autorité régionale de transport métropolitain, qui a produit un avis dévastateur sur le projet.
https://www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/2022-03-17/echeancier-repousse-pour-le-rem-de-l-est.php

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