Quartier Namur-Hippodrome

Arrêtons de tourner en rond à Blue Bonnets

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Le terrain de l’ancien hippodrome de Montréal


Stéphanie Grammond
Stéphanie Grammond La Presse

La saga de l’ancien hippodrome Blue Bonnets est le triste symbole de l’immobilisme de nos élus face à la crise du logement.

Publié à 5h00

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Imaginez, ça fait quatorze ans que ça dure. Quatorze ans que les chevaux ont fait leur dernier tour de piste. Et il n’y a toujours pas l’ombre d’un édifice sur ce terrain qui est pourtant l’emplacement par excellence pour densifier la ville intelligemment.

Gérald Tremblay, Denis Coderre, Valérie Plante… les maires ont passé, mais le terrain reste vide, alors qu’on pourrait y construire quelque 6000 unités.

L’espace est aussi grand que 60 terrains de football. Il est situé en plein cœur de la métropole, à deux pas du métro Namur. Il n’est pas contaminé, une véritable rareté. Et il appartient à la Ville, donc aucun propriétaire ne peut freiner son développement.

Alors franchement, la lenteur dans ce dossier commence à devenir ridicule. Elle témoigne de l’incapacité des différents ordres de gouvernement de s’entendre avec le privé pour construire.

Il est vrai que le développement du site pose un grand défi, puisqu’il n’y a aucune infrastructure. Pas de réseau de distribution d’eau, pas d’égout, pas d’électricité. La facture pourrait atteindre 800 millions de dollars, ce qui ne compte même pas les coûts des travaux routiers pour désenclaver le site, notamment le raccordement du boulevard Cavendish qui est un impératif.

Or, la Ville de Montréal, qui a déjà des dettes plein les bras, n’a pas les moyens de payer cette facture, même si le développement se fait par phases. Et les promoteurs non plus, surtout qu’on leur demande de bâtir du logement social, abordable et vert pour créer un écoquartier exemplaire.

Ces objectifs sont fort louables. Mais pour les entrepreneurs privés, encore faut-il qu’il y ait une logique financière. Sinon, on se retrouve dans un cul-de-sac, comme on le voit actuellement.

Un premier appel d’offres visant la construction d’un projet contenant 60 % de condos abordables n’a pas suscité la moindre soumission de la part du privé, nous apprenait le collègue André Dubuc mardi1.

Mais la Ville avait mis la barre tellement haute – prix élevé demandé, nombreux critères à respecter – qu’on se demande si elle voulait vraiment vendre ou si elle cherchait seulement à éviter que Québec reprenne le terrain en vertu de l’entente de 2017 qui lui donnait cinq ans pour transmettre un échéancier de développement.

Chose certaine, il était bien difficile pour des promoteurs d’acheter un petit morceau du terrain sans avoir une idée d’ensemble du plan de développement. Où seront les rues, les espaces verts, la densité prévue ? La Ville promet que ces éléments seront dévoilés dans le plan directeur qu’elle soumettra en 2023. Ce ne sera pas trop tôt !

Car pendant ce temps, les Montréalais ont du mal à se trouver un toit. Avec un taux d’inoccupation au plancher, le loyer moyen d’un appartement de deux chambres a grimpé de 14,5 % en 2022, pour les unités qui ont accueilli de nouveaux locataires, selon de récentes données de la SCHL.

Il n’y a pas de secret, il faut bâtir. Et pas juste un peu. D’ici 2030, il faudrait doubler le rythme des mises en chantier et bâtir 620 000 logements de plus, estime la SCHL.

Pour éviter l’étalement urbain nocif pour l’environnement, il faut miser sur la densification urbaine, un principe que l’équipe éditoriale de La Presse a maintes fois défendu.

Mais on n’y arrivera pas sans une meilleure concertation entre les ordres de gouvernement dont les programmes sont complètement dépareillés. Comment voulez-vous que les constructeurs s’y retrouvent quand personne n’a la même définition d’un logement abordable ?

Dans le cas de Blue Bonnets, une meilleure concertation permettrait un partage du financement des infrastructures avec Québec et Ottawa. Ce genre de partenariat pour revitaliser des quartiers s’est vu partout en Europe et aux États-Unis, que ce soit à Hambourg, Édimbourg, Dublin ou Washington.

Pourquoi pas à Blue Bonnets ? Il est plus que temps qu’on arrête de tourner en rond.

7 « J'aime »

:1st_place_medal:

the simplest explanation of an event or observation is the preferred explanation.

law of parsimony (Occam’s razor)

L’explication alternative serait l’incompétence pure et crasse…

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C’est la première fois je crois que je vois le montant de l’aménagement. À 800 millions de dollars, c’est effectivement un investissement d’une grande importance.

Par comparaison, le PPU de Griffintown a un budget de 310 M$ (ça prendra probablement plus) pour refaire les infrastructures + aménagement des parcs, mais les rues étaient existantes, contrairement au site de l’hippodrome.

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Ce genre de réplique est emblématique de ce dont je parlais.

Je n’ai vu aucune critique vis-à-vis la ville qui gère ce dossier. Toujours la faute aux promoteurs, à la situation économique, qui d’ailleurs ne semble pas affecté la construction et l’immobilier dans d’autres grande villes canadiennes.

La réalité est que cette administration a un biais et une attitude très claire qui n’est pas propice au développement. Elle met les bâtons dans les roues dans tous les projets d’immobilier et d’infrastructure qu’elle gère et dans lesquels elle est impliquée (Hippodrome, Îlot voyageur sud, REM de l’Est, Stade au Bridge/Bonaventure).

C’est une incompétence totale.

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Je crois qu’on ne s’est pas compris sur le propos de ma réponse. Je pointe plusieurs problématiques potentielles de l’approche de l’administration dans ce dossier que l’on peut débattre. C’est une invitation à prendre le temps de préciser et d’expliquer ton opinion dans ce dossier.

Chercher les raisons d’un échec que j’admets sans aucun problème n’est pas de l’aveuglement, ou un accord tacite de la situation. Je crois simplement que la problématique mérite qu’on en parle en profondeur.

Tu es libre de participer ou non, mais je crois qu’il est déplacé de me reprocher de chercher plus loin que “ils sont incompétents”. Il y a des problématiques plus complexes que cela.

Et personne sur le forum ne mérite de se faire accuser d’aveuglement volontaire, qu’on soit en accord ou non. C’est inutilement réducteur, surtout face à la qualité des interventions.

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Il y a certes une part d’incompétence a plusieurs niveaux en matiere de logement, vu les problèmes qu’on vit aujourd’hui. Mais L’administration actuelle n’est vraiment pas seule a blâmer, les précédentes aussi, en plus du fédéral et du provincial. Ce sont des enjeux qui se construisent sur le très long terme.

Reste que sur le plan des priorités, il est vrai que Projet Montréal a moins d’affinités avec le laisser-aller qui autrefois profitait largement aux promoteurs privés. Mais ça, ce nest pas de l’incompétence, même si vous n’êtes pas en accord avec eux; c’est un choix politique et une orientation connue, pour laquelle les citoyens ont voté en toute connaissance de cause d’ailleurs. Et élus deux fois, avec majorité claire, ce programme. Il n’y a pas de mystère là.

Ce n’est pas parce qu’on est en désaccord avec un système de valeur différent du notre que ceux qui le partagent sont incompétents ou imbéciles. Ce n’est qu’une autre lecture de la société, une autre vision et d’autres idées, d’autres priorités.

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Pour moi, c’est le principal problème. On demande à des promoteurs privés de mettre de l’argent dans un projet pour lequel on ne connaît rien.

Et en plus de ne rien connaître, le peu qu’on voit ou entend est déprimant d’incompétence et de mauvaise gestion, peu importe à qui la faute.

Motivez-nous quelqu’un!
Parlez-nous d’une vision, faites-nous rêver, montrer des images, soyons ambitieux!

C’est sûrement l’exemple le plus (sur)utilisé, mais Malmo reste un bon exemple.
On a construit une tour, dessinée par un des meilleurs architectes, précisément pour donner une personnalité, un repère, une fierté, une identité, une appartenance.

Au lieu de commencer par vendre un petit terrain pour construire une immeuble quelconque, peut-être qu’on devrait vendre un terrain au coeur du projet, bien dans l’axe, bien visible, et permettre 120 mètres, ou même plus, avec la seule et unique condition de donner le mandat à un architecte reconnu internationalement. La vente de ce terrain (et les taxes ensuite générées) aiderait à financer une partie des infrastructures, et potentiellement réduire le prix des autres terrains et rendre réaliste la construction de logments abordables.

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J’imagine qu’il y a un juste milieu intéressant entre les restrictions majeures actuellement imposées pour ce secteur et le free-for-all qu’avait été Griffintown, laissé au mains des spéculateurs et promoteurs.

Ce que j’imagine c’est un quartier de type TOD, au minimum 40% abordable + 20% locatif à loyer modique, un pourcentage d’espace vert minimum et des immeubles à l’architectures respectables. Ensuite, faite ce que vous voulez, mais aucune dérogation à ces conditions.

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J’ai eu la chance de visiter dans le détail ce nouveau quartier de Malmö en Suède lors d’une escale à Copenhague. Aucun doute que la tour résidentielle Turning Torso confère à ce quartier un attrait indéniable et une personnalité unique au monde.

Je continue de penser qu’en matière de développement immobilier il faut être capable de frapper l’imagination des gens et susciter des émotions fortes par la construction d’un (ou plusieurs) édifice phare à l’architecture irréprochable, surtout quand on s’éloigne du centre de la ville.

Il y a bien sûr bien d’autres critères à considérer dont l’accessibilité et la mobilité, les services etc. Mais la fierté est un moteur puissant durable qui peut influencer grandement la demande, accélérer la réalisation d’un projet donné et augmenter sa rentabilité à long terme.

C’est à mon avis ce qui manque le plus à Montréal, on est trop conservateur par manque d’audace. On croule sous le générique et aucun grand projet de quartier résidentiel actuellement en construction, n’a de véritable impact visuel qui le distinguerait avantageusement des autres, ou serait vraiment de classe mondiale, au point de susciter l’admiration autant au national qu’à l’international. :grimacing:

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peut etre une idée ridicule mais je serait curieux de voir ce qui ce passerait si on coupait le terrain en quatre, les vendre à quattre promoteur différent et leur donner le mandat de créer un super-block moderne style ville 15 minute. Ca pourrait etre une façon interressante de voir des différente idées d’habitation urbaines modernes et bien sur on pourrait mêtre les restriction de logement abordables habituelles etc.

idk just a thought i had.

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En quatre c’est beaucoup trop grand!
Un projet comme ça devrait être réparti en au moins 10 promoteurs différents minimum.

Aussi, peu importe le nombre de promoteurs, il faut une vision d’ensemble forte et complète. Si chacun test des trucs, on aura pas la masse critique pour qu’aucun des tests ne fonctionne. Et l’effet général risque un peu d’être pizza all dressed, alors qu’on devrait viser une certaine unité.

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On peut très bien qualifier cette administration comme incompétente et imbecile car elle ne livre pas. Non seulement elle n’atteint pas ses cibles de logements et de logements abordables, elle échoue d’une manière catastrophique de faire avancer quoi que ce soi.

On peut avoir des orientations et faire des choix politiques mais quand ceux-ci ne marchent pas, on les critiquent et on doit repenser ses choix.

Et d’ailleurs, le taux de participation des deux dernières élections étaient 42% et 38%, très loi d’une majorité claire comme vous le prétendez.

Un dernier point. J’avoue que le fédéral et le provincial a un rôle majeur à jouer dans la construction de logement abordable. Mais dans ce dossier en particulier, cette administration gère, puis elle fait fuir des partenaires au lieu des les rassembler. Et votre réponse toujours met le blâme principal ailleurs que cette administration.

EDIT: Quelqu’un peut m’expliquer comment et pourquoi ce post a été signale? Qui a été personnellement vise par ce post? J’aimerais vraiment que l’on me l’explique. J’étais en train de répliquer au message précèdent, qui a utilisé le même langage.

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Les gouvernements n’ont pas besoin d’une majorité de l’ensemble de la population non participante pour avoir un mandat. Ce n’est pas ainsi que fonctionne notre démocratie. Ces résultats électoraux sont aussi légitimes que toutes les élections qui les ont précédés. Si les gens ne veulent pas participer, c’est leur libre choix.

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Le point de Victoire était que Valérie Plante n’a pas la ‘‘majorité claire’’ des Montréalais, non pas si les résultats étaient légitimes ou non.

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C’était sous-entendu. Mon point était qu’elle avait une majorité d’électeurs participants. Si les gens ne veulent pas participer, cela ne diminue en rien la légitimité du mandat.

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Je ne peux qu’être d’accord avec cette opinion assez bien détaillée de la situation quasi catastrophique de la situation du logement en ville. Et de plus, j’apprécie la pression que cette journaliste semble vouloir mettre en soulignant l’énoncé de la SCHL

Je veux bien croire que la ville n’a pas l’argent nécessaire pour construire tout ce qu’on a besoin en terme de logement social et abordable mais à un moment donné ca devient une question de priorité. Oui, Ottawa et Québec ont surement un grand rôle à jouer dans ce dossier et il faut les presser mais la cille a un budget de plusieurs milliards de dollars et elle pourrait être plus pro-active dans le développement de l’habitation. Sur certains dossiers, la ville va de l’avant et ne demande pas d’argent aux paliers supérieur alors j’aimerais bien qu’elle puisse le faire un peu pour le projet de l’Hippodrome.

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En terme de transport au quartier, demande la ville les contributions pour construire les édicules supplémentaires à la station Namur, pour accéder à l’ouest de l’autoroute?

Le budget de fonctionnement de la ville est difficile compressible. Ce serait des dépenses supplémentaires en immobilisation plutôt. Imaginons que la ville investisse pour la construction de 500 unités par année, ce serait aux alentours de 200 millions de dollars par année (si la ville subventionne le coût d’environ 400 000$ par porte elle-même). Cela augmenterait les dépense d’immobilisation d’environ 10%.

Donc, 10% plus d’emprunts, 10% de coupes sur le reste du PDI, ou un mélange des deux.

Est-ce que ça pourrait être une priorité? Je trouve la proposition très intéressante. Mais sont coût est assez massif, ça serait une priorité dans le vrai sens du terme, avec sacrifice. 70% du PDI en ce moment sont pour maintenir les actifs, ça aussi je considère cela difficilement compressible.

Il y a le problème du précédent à légitimer le retrait du financement du logement social et le mettre à charge de la ville, sans aucun revenu supplémentaire. Point de vue politique, c’est un gros obstacle je crois. Les villes sont déjà sous-financé pour leurs propres responsabilités.


J’ai pris 500 unités, parce que ça me semble relativement réaliste. Si on voulait atteindre un objectif de 20% des constructions neuves à Montréal, ce serait 2000 unités (il y a eu environ 10 000 nouveaux logements lancés en 2022). L’équivalent de presque la moitié du PDI actuel.

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C’est sur que ca serait une grosse dépense et je suis bien conscient que la ville est limitée dans ses ressources financières comme ton énoncé le mentionne bien. Mais je me demande toujours si ca ne serait pas possible, étant donné l’urgence de la situation, actuelle, de réorienter une partie des sommes dédiées à d’autres postes budgétaires, comme les infrastructures, par exemple.

Autrement dit, selon ton calcul de 200 millions, la ville pourrait dépenser 200 millions en moins pour les infrastructures pendant quelques années et mettre ce montant pour du logement sociale. Et espérer que les autres paliers de gouvernements prennent le relais éventuellement. Est-ce que cela serait faisable?

Je sais que cette ‘‘proposition’’ semble simpliste et provient de quelqu’un qui ne connait pas vraiment comment l’appareil municipal fonctionne mais j’essaie juste de voir comment la ville peut trouver de l’argent et ne pas constamment attendre après Québec ou Ottawa, ce qui devient frustrant à la longue.