Montréal : Ville de savoir (enseignement supérieur)

Chronique de Paul Journet dans La Presse au sujet de l’augmentation des frais de scolarité dans les universités anglophones

La pente n’a pas changé


PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE
L’Université McGill

Paul Journet
LA PRESSE

À en juger par l’indignation dans le reste du pays, l’enseignement supérieur en anglais serait menacé au Québec. Les établissements de la minorité anglophone agoniseraient sous les assauts du gouvernement caquiste.

Publié à 1h22 Mis à jour à 5h00

Pourtant, les chiffres disent autre chose.

Les universités ont raison de critiquer des aspects controversés et parfois contradictoires de la nouvelle politique caquiste – j’y reviendrai samedi. Mais avant d’analyser ce problème, replaçons les choses dans leur contexte.

Au primaire et au secondaire, le réseau anglophone est fragile. Les inscriptions y ont diminué de 18 % dans les 15 dernières années. Et la loi 40, contestée devant les tribunaux, éliminerait ses commissions scolaires.

Au cégep et à l’université, toutefois, ses établissements sont en excellente santé.

Commençons par le cégep. La communauté anglophone compte pour 8 % de la population. Les cégeps dans sa langue accueillent plus de 17 % des élèves.

Ce pourcentage est en hausse constante. Depuis les années 1990, la majorité de la croissance des effectifs s’est faite dans le réseau anglophone. Il serait encore plus fréquenté si deux des plus grands cégeps au Québec, Dawson et John Abbott, ne devaient pas refuser autant de candidats à cause de leur manque de places.

La demande y est forte. La majorité des jeunes qui les fréquentent sont désormais francophones ou allophones. Ils auront ensuite davantage tendance à étudier à l’université en anglais. Et ensuite, à travailler dans cette langue.

Les universités McGill et Concordia profitent de cette pente qui mène à elles. Cela accentue leur avantage, surtout pour McGill.

Historiquement, elle a toujours été en position de force. Elle récolte le fruit de son travail académique et philanthropique. Mais elle bénéficie également d’un cercle vertueux, où ses riches diplômés deviennent donateurs, ce qui hausse son budget et sa capacité d’attirer les meilleurs professeurs et les bourses de recherche, et ainsi de suite.

Sur le plan des investissements, les établissements supérieurs anglophones ne sont pas à plaindre. Québec finance actuellement 17 projets immobiliers qui totalisent 2,17 milliards. La majorité de l’argent (1,23 milliard) ira à McGill et à Concordia, en bonne partie grâce au projet sur l’ancien site de l’hôpital Royal Victoria. Avec le quart des étudiants, elles récoltent ainsi 56 % des investissements.

À ces atouts, il faut ajouter celui du recrutement à l’international. Le nombre d’inscrits étrangers a presque triplé depuis 20 ans. Les universités anglophones en profitent davantage, parce qu’elles ont déployé plus d’efforts dans le passé, et aussi car elles misent sur un plus grand bassin de candidats fortunés. En 2018, elles récoltaient ainsi pas moins de 47 % des droits de scolarité venant de l’étranger.

Puis, à la fin de 2018, il y a eu un virage majeur. À la suite d’un lobbying de McGill et d’autres, le gouvernement Couillard a déréglementé les étudiants étrangers. Les universités leur facturent le prix qu’elles souhaitent et elles gardent tout l’argent. Elles ne doivent plus le partager avec les autres établissements. Cette décision a été prise en coulisses, sans débat.

Dans les trois dernières années, McGill, Concordia et Bishop ont empoché 70 % de ces revenus. Les établissements francophones rattrapent lentement leur retard grâce à leurs récents efforts accrus en recrutement à l’étranger. Reste que leur bassin d’étudiants – notamment en Afrique francophone – est de façon générale moins fortuné et peuplé que celui de l’Asie du Sud-Est, où les diplômes en anglais sont convoités.

Nos établissements anglophones ne vendent pas seulement un diplôme. Ils offrent aussi une voie facilitée vers la résidence permanente canadienne. Après avoir obtenu un diplôme en anglais, leurs clients reçoivent un permis de travail ouvert d’une durée de trois ans. Au terme de ces sept années, où ils n’ont pas besoin de maîtriser le français, ils peuvent ensuite se rendre vers les autres provinces pour compléter leur dossier et y devenir ultimement citoyens canadiens.

Cela exerce une pression sur le français. On dénombre actuellement quelque 80 000 étudiants étrangers et 20 000 Canadiens des autres provinces inscrits en enseignement supérieur. À l’université, ces étrangers et Canadiens fréquentent respectivement à plus de 40 % et de 80 % les établissements anglos.

Ils enrichissent notre vie universitaire. Ce sont aussi d’excellents candidats pour devenir des immigrants permanents – les autres pays se battent d’ailleurs pour les attirer. Toutefois, leur francisation est laborieuse.

Par exemple, Statistique Canada rapporte que 47 % des allophones qui ont terminé leurs études supérieures en anglais travaillent principalement en anglais au Québec, contre seulement 7 % de ceux ayant étudié en français. Pas moins de 23 % des francophones ayant étudié en anglais adopteront aussi cette langue au boulot.

C’est parce que le marché du travail les y encourage. Et pour les allophones, c’est aussi parce que leur établissement ne les a pas incités à apprendre adéquatement le français. Ceux qui le parlent le maîtrisent parfois moins bien que l’anglais – leur bilinguisme asymétrique les incite à préférer l’anglais.

Voilà le portrait d’ensemble. Il y a donc deux enjeux : la fragilisation du français et le déséquilibre entre les établissements qui a été aggravé par la déréglementation libérale.

Pour les régler, il serait bête de viser un égalitarisme revanchard qui nivellerait par le bas.

Quand McGill se démarque à l’international, toute l’économie du Québec en profite. Le ministre des Finances, Eric Girard, l’a lui-même reconnu quand il s’est récemment désolé que l’Université de Toronto la devance désormais. Car la concurrence n’est pas seulement entre les établissements québécois. Elle est aussi entre le Québec et le reste du monde.

Reste qu’on pourrait faire mieux pour protéger le français et pour aider les établissements francophones afin de rétablir un minimum d’équité, sans nuire à la petite Université Bishop’s, en Estrie.

C’est ce rééquilibrage que visait le gouvernement caquiste. Hélas, il me semble avoir raté la cible, surtout avec sa mesure visant les étudiants des autres provinces canadiennes. J’y reviendrai samedi.


Le Devoir a fait un comparatif des frais de scolarité

La hausse des droits de scolarité des étudiants canadiens et étrangers, qu’est-ce que ça change?


Marie-France Coallier, archives Le Devoir
Le gouvernement Legault augmentera drastiquement l’automne prochain les droits de scolarité des étudiants canadiens et imposera un tarif plancher de 20 000 $ par année aux étudiants étrangers.

Anne-Marie Provost
20 octobre 2023
Éducation

Le gouvernement Legault augmentera drastiquement l’automne prochain les droits de scolarité des étudiants canadiens et imposera un tarif plancher de 20 000 $ par année aux étudiants étrangers. La mesure suscite une forte opposition du côté des universités anglophones, qui craignent qu’elle ne décourage cette clientèle de venir s’instruire au Québec. Qui exactement est concerné par cette réforme ? Et qu’implique-t-elle ? Explications.

Qui est touché par cette mesure ?

Tous les étudiants du reste du Canada ou de l’étranger qui étudient au premier cycle dans une université québécoise (au certificat ou au baccalauréat, par exemple) sont touchés. Ceux qui étudient au deuxième cycle professionnel et qui n’écrivent donc pas de mémoire — en administration des affaires (MBA) ou en orthophonie, notamment — le sont aussi.

Il y a toutefois quelques exceptions. Ainsi, les étudiants de France et de Belgique, qui paient moins cher que les autres étudiants étrangers en vertu d’ententes internationales, ne sont pas concernés par cette réforme. C’est aussi le cas des étudiants à la maîtrise et au doctorat (deuxième et troisième cycles universitaires). Les étudiants canadiens ou étrangers déjà inscrits dans un programme d’étude ne verront pas non plus de différence dans leurs droits de scolarité.

La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a précisé que les étudiants canadiens de l’extérieur du Québec qui souhaitent étudier en français seront exemptés de cette hausse, mais le détail de la mesure n’est pas encore connu.

Combien d’étudiants sont concernés ?

Selon des données du ministère de l’Enseignement supérieur du Québec, 14 340 étudiants venant d’ailleurs au Canada étaient inscrits dans une université québécoise en 2021, principalement dans des établissements d’enseignement anglophones. Quelque 47 860 étudiants étrangers s’instruisaient quant à eux dans les universités francophones ou anglophones du Québec.

En 2021, environ 80 % des étudiants du réseau universitaire provenaient du Québec, contre 4,7 % pour le reste du Canada et 16 % de l’étranger.

Combien paient les étudiants de l’extérieur du Québec en ce moment ? Qu’est-ce qui changera pour eux ?

Sur son site Web, l’Université de Montréal estime que la facture est de 5071,73 $ par trimestre pour un étudiant canadien inscrit au premier cycle à temps plein ; elle serait donc d’un peu plus de 10 000 $ pour une année d’étude. Du côté de l’Université Concordia, il en coûte 8992 $ par année à un étudiant canadien provenant de l’extérieur du Québec, peu importe la discipline.

Pour les étudiants internationaux, dont les frais avaient été déréglementés, cela varie d’une université à l’autre — et d’un programme à l’autre. À Concordia, il en coûte en moyenne autour de 25 000 $ par an à un étudiant étranger.

Québec fixera dorénavant des tarifs planchers aux étudiants canadiens et aux étudiants internationaux, et les universités conserveront le droit de facturer des montants discrétionnaires. Les étudiants canadiens paieront ainsi l’équivalent de ce que leur formation coûte au gouvernement, c’est-à-dire 17 000 $ par année — ce qui représente un bond appréciable de leurs droits de scolarité. Les étudiants internationaux seront quant à eux facturés un prix plancher de 20 000 $.

Le gouvernement du Québec empochera une partie de l’argent récupéré par cette réforme afin de le réinvestir dans le réseau universitaire francophone.

Combien paie un Québécois qui étudie ailleurs au Canada ?

La réponse varie d’une université et d’un programme à l’autre, a constaté Le Devoir.

À l’Université de Toronto, par exemple, les droits de scolarité facturés aux Ontariens et aux autres Canadiens diffèrent. Quelqu’un qui entame un baccalauréat au sein de la Faculté des arts et des sciences paiera 6590 $ par an s’il est originaire d’une autre province, tandis qu’un étudiant ontarien paiera 6100 $.

À l’Université de la Colombie-Britannique (UBC), par contre, tout étudiant canadien, qu’il soit originaire de la province ou non, déboursera les mêmes droits de scolarité, qui varient de 5800 $ à 9400 $ par année selon le programme de premier cycle concerné.

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D’un autre côté il y a l’exemption des frais supplémentaires pour les futurs étudiants canadiens non-québécois dans les universités francophones. Les recteurs des UQ semblent convaincus que cette mesure est garanti et misent beaucoup là-dessus — en plus de la péréquation provenant spécifiquement des étudiants étrangers — pour améliorer leur santé financière. Par contre je ne trouve pas de confirmation du provincial à ce sujet, outre qu’ils considèrent l’idée.

Qu’en pensez-vous? D’un coté le gouvernement de la CAQ communique vouloir barrer la horde étrangère, anglicisante et « voleuse » de diplômes, mais lui garderai la porte ouverte pour les UQ et les universités francophones? Le MES et le MLF semblent avoir un problème d’orientations.

Si jamais il y a effondrement d’inscription dans les établissements anglophones, le vase communicant d’effectif et de fonds ne se matérialisera simplement pas. S’il y a afflux d’inscriptions dans les établissements francophones, il se pourrait par exemple que les candidats québécois francophones aient à composer avec davantage de compétition, ou que les bureaux de soutien linguistiques n’arrivent plus à répondre aux besoins des étudiants.

Plus que le temps passe, que les voix s’élèvent, le moins convaincu je suis que la mouture actuelle sera mise en place. Les recteurs de l’UdM, de USherbrooke, de Laval, et de HEC & Polytechnique ont même publié une lettre ouverte dans La Presse dénonçant la mesure aujourd’hui.

Je comprend bien l’argument politique dans tout ça, mais quand c’est rendu que ceux que tu prétend vouloir aider s’opposent à la mesure proposée, c’est bien difficile de voir comment le gouvernement peut justifier la mettre en place…

À voir!

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Essentiellement l’approche de la CAQ châtre certaines institutions sans garantir la santé globale de l’écosystème universitaire québécois. Les besoins financiers des UQ ne sont pas plus assumés et assurés par l’état québécois. Je pense que le plan Déry ne subira pas ou très peu de modifications, car il plaira beaucoup à l’électorat que la CAQ souhaite conserver, alors que ceux qui s’y opposent le plus ont un poids politique beaucoup plus faible.

Effectivement. Le mot clé ici est écosystème. Prenez, par exemple, l’expertise en IA que Montréal tente de développer. Les universités peuvent partager des ressources. Tenter de mettre à genoux McGill et Concordia ne peut en aucun cas aider l’Université de Montréal. Cela mine tout simplement un système dont le développement a nécessité des années et des milliards de dollars. Si la ville de Montréal ne reste pas au sommet de cette danse délicate, alors le travail et l’argent se déplaceront tout simplement vers Toronto, Boston ou San Francisco (toutes des villes très attractives). En faire une question de langue est une stupidité au-delà des mots. Les universités anglophones peuvent faire davantage pour aider étudiants de l’extérieur de la province qui ont choisi Montréal pour étudier et vivre–des gens comme moi, en passant–à apprendre le français et à contribuer pleinement à la société québécoise. L’approche de la CAQ est tellement mal pensée.

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La clé est là selon moi. Il fait que les universités anglophones en fassent plus que le gouvernement en demande et démontrent qu’ils ont à cœur le fait français au Québec. Après tout, ce ne sont pas des entreprises privées mais plutôt des hauts lieux de savoir alors c’est l’endroit idéal pour apprendre une langue.

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Tout à fait d’accord. Je crois qu’elles augmenteraient leur attractivité en intégrant l’apprentissage du français à leur offre de façon plus claire. Pour un ontarien, albertain ou américain, venir à McGill devrait être non seulement une opportunité d’avoir un excellent parcours et diplôme, mais aussi une immersion francophone (optionnelle) qu’ils n’auront jamais à Toronto, Boston ou ailleurs.

Et c’est assez simple:

  • Mieux présenter et valoriser l’offre de cours de français (avec et sans crédits, par exemple cours du soir)
  • Créer une distinction spéciale (“Honor+”) pour ceux qui auraient des bonnes notes ET qui auraient démontré une bonne maîtrise du français (HEC fait quelque chose de similaire, ça s’appelle Mercure)
  • Mieux soutenir les organisations de la vie étudiante francophone
  • Mieux présenter et simplifier l’accès aux crédits dans les autres universités (“prends ton cours X à l’UdeM)
  • Faire des double diplômes exemple McGill-UdeM, Bishop-Sherbrooke
  • Il pourrait même y avoir un incitatif financier… si tu fais un “échange” d’un semestre ailleurs au QC tu as une bourse. Donc tu es à Concordia et tu pars 6 mois à l’UQAR par exemple, ou Sherbrooke, ou ULaval)

Enfin, juste quelques options simples.

Et oui, 100% dissocier ça du financement SVP!

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Droits de scolarité pour les étudiants d’ailleurs au Canada Le patron de la BMO inquiet pour l’économie du Québec

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

La crainte de la BMO est de voir une hausse des droits de scolarité décourager des étudiants de venir s’instruire dans les universités anglophones du Québec – les plus touchées par la mesure – et de surcroît dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre.

La hausse des droits de scolarité pour les étudiants venant de l’extérieur du Québec inquiète le patron de la Banque de Montréal, mais le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, se range derrière la décision du gouvernement.

Publié à 3h00 Mis à jour à 6h00

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Richard Dufour
RICHARD DUFOURLA PRESSE


Tommy Chouinard
TOMMY CHOUINARDLA PRESSE

« C’est une initiative qui amoindrit la force du secteur universitaire au Québec et amoindrit l’économie du Québec », affirme Grégoire Baillargeon, président de BMO Groupe financier pour le Québec.

« La force de notre réseau universitaire permet d’attirer et de retenir des talents de partout dans le monde. C’est cet avantage concurrentiel qu’il faut préserver. »

La crainte est de voir une hausse des droits de scolarité décourager des étudiants de venir s’instruire dans les universités anglophones du Québec – les plus touchées par la mesure – et de surcroît dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Grégoire Baillargeon, président de BMO Groupe financier pour le Québec

Québec a annoncé il y a deux semaines son intention d’instaurer de nouvelles mesures pour l’automne prochain, notamment une majoration des droits de scolarité pour les étudiants en provenance d’une autre province canadienne. Leurs droits de scolarité passeront de près de 9000 $ à 17 000 $ par année – ce qui permettrait de récupérer environ 110 millions par an selon le gouvernement, pourvu que le nombre d’étudiants ne diminue pas. La cagnotte sera redistribuée aux universités francophones.

Le gouvernement a signalé la semaine dernière qu’il envisage d’exempter de la hausse des droits les Canadiens qui viennent fréquenter une université francophone. D’ailleurs, l’augmentation ne devait toucher que ceux qui fréquentent les universités anglophones, disait-on au gouvernement peu de temps avant l’annonce officielle.

De leur côté, les étudiants étrangers devront payer un tarif minimum de 20 000 $, montant sur lequel le gouvernement fera une ponction d’environ 3000 $ pour assurer une équité entre les établissements francophones et anglophones. Les tarifs avaient été déréglementés sous le gouvernement Couillard, ce qui a permis depuis aux universités d’imposer le montant de leur choix et de conserver la cagnotte – une demande de longue date de McGill.

Protéger le français

L’initiative du gouvernement Legault s’inscrit dans un plan d’action visant à protéger le français.

« On est très sensible comme organisation à l’ensemble des actifs du Québec et de Montréal dans le monde », dit Grégoire Baillargeon en entrevue. « On considère qu’être un pôle universitaire de renommée mondiale est un actif extraordinaire pour le Québec. Le choix de société d’avoir ce pôle universitaire est très important et on doit se poser la question comme société à savoir comment on veut utiliser cet actif. »

Il demande au gouvernement Legault d’entamer une conversation avec l’ensemble du secteur universitaire.

Si Grégoire Baillargeon concède qu’il faut en faire davantage pour protéger le français au Québec, il souligne que des initiatives importantes en cours de déploiement pourraient faire une différence considérable dans la francisation des étudiants qui viennent de l’extérieur du Québec.

Il fait notamment référence au projet d’investissement de 50 millions pour la promotion du français que l’Université McGill a suspendu la semaine dernière en réaction à la décision du gouvernement de presque doubler les droits de scolarité annuels pour les étudiants de l’extérieur de la province. Comme La Presse l’a écrit le 13 octobre, l’université a annulé l’annonce de son plan prévue le 11 octobre en apprenant que le gouvernement s’apprêtait à rendre publique sa décision ; les cartons d’invitation avaient même été envoyés.

« On devrait célébrer ce type d’initiative venant d’une université anglophone », dit Grégoire Baillargeon, en ajoutant qu’il y a un consensus fort de l’ensemble des dirigeants d’entreprise à Montréal et même de partout au Québec dans ce dossier.

Son avis fait écho à celui du président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. La semaine dernière, Michel Leblanc était cité dans le Montreal Gazette, affirmant que les entreprises montréalaises craignent que de nombreux étudiants hors Québec décident maintenant de regarder ailleurs pour faire leurs études.

Le ministre de l’Économie et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, considère que la décision du gouvernement a du sens. « Je pense que c’est logique que les étudiants du Canada qui viennent étudier au Québec paient le prix du service », a-t-il dit lors d’une mêlée de presse mercredi à Québec.

À 17 000 $, les droits de scolarité imposés aux étudiants des autres provinces vont correspondre à ce que leur formation coûte à l’État québécois, avait expliqué la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry.

Pierre Fitzgibbon a également plaidé que « la plupart » des étudiants d’autres provinces qui fréquentent Bishop’s « s’en vont et ne restent pas ici » après leur formation.

Il a avancé que les Québécois qui vont étudier ailleurs au pays « paient un prix qui n’est pas subventionné » par la province.

Rappelons que dans les plus récentes règles budgétaires concernant les universités, le gouvernement justifiait ainsi le tarif jusqu’ici fixé à 9000 $ : « Depuis le trimestre d’automne 1997, les étudiants canadiens et les résidents permanents du Canada qui ne sont pas résidents du Québec paient des droits de scolarité globalement comparables à ceux en vigueur dans les universités ailleurs au Canada. »

Bon point. Ça voudrait dire qu’on tombe à un nouveau niveau de cynisme politique assez toxique, si le gouvernement prend des décisions en sachant qu’elles seront néfastes dans leur ensemble, que pour récupérer un poignée de votes.

Encore là, en politique Québécoise, tapper sur Montréal a toujours la cote!

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There is a protest against the increase in tuition for new students, at 13h, Dorchester Square. I’m curious what the turnout will be because it doesn’t affect current students generally

Few hundred not more

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Damn j’ai oublié d’y aller.

McGill partage l’évaluation des impacts financier de la hausse des frais hors-Québec sur l’université:

  • Chute total des revenus annuels du à la baisse d’étudiants entre $60M et $164M
  • Certaines facultés seraient en voie de fermer, dont l’École de Musique Schulich qui compte 40% d’étudiants hors-Québec.
  • Coupures d’emplois entre 650 et 700 postes
  • Mise sur glace de certains projets d’infrastructure; les coûts d’emprunts de l’université ont déjà été augmenté par les banques suite à l’annonce du gouvernement.
  • Fermeture de certaines équipes sportives

Si le gouvernement pensait vraiment que le seul impact de cette décision allait être la perte de quelques étudiants, ils se sont royalement trompés.

Communiqué ci-bas:

Aux membres de la communauté mcgilloise,

Depuis que le gouvernement du Québec a annoncé le nouveau modèle de tarification pour les étudiants hors Québec le 13 octobre dernier, nous nous employons à analyser les répercussions potentielles de ces changements sur le financement et la fréquentation des universités, plus particulièrement du point de vue de l’Université McGill. Voici ce que révèle notre analyse préliminaire.

Si le gouvernement met en œuvre les changements proposés – qui feront passer de 8 992 $ à environ 17 000 $ les droits de scolarité des étudiant(e)s canadien(ne)s venant d’une autre province et qui modifieront le modèle de financement des universités, puisque Québec récupérera une plus grande part des droits de scolarité de l’effectif étudiant international – les conséquences pour l’Université McGill seront très importantes. Il n’y a qu’à penser à la chute du nombre d’étudiant(e)s inscrit(e)s, à la perte importante de revenus, aux conséquences dévastatrices sur certaines facultés et à l’interruption ou à la réévaluation de certains projets d’infrastructure d’envergure.

Plus important encore, les changements annoncés par le gouvernement du Québec sont une menace à la culture même de l’Université McGill, puisqu’ils auront pour effet de modifier la composition de notre population étudiante et l’expérience de celle-ci sur nos campus.

Avant d’entrer dans les détails, je tenais à vous assurer que l’Université McGill demeure résolue à collaborer avec le gouvernement du Québec afin de trouver des solutions plus efficaces qui permettront à ce dernier d’atteindre ses objectifs, soit de promouvoir et de protéger la langue française tout en consolidant le réseau universitaire provincial.

Voici quelques-unes des principales conséquences qu’auront les changements annoncés sur l’Université McGill :

Le nombre d’inscriptions à l’Université McGill chutera : Nombre d’étudiant(e)s canadien(ne)s non-résidents du Québec (CNRQ) ne viendront vraisemblablement pas étudier à l’Université McGill étant donné que les droits de scolarité exigés en 2024 pour des programmes comparables y seront nettement plus élevés que dans d’autres universités canadiennes. Nous travaillons à élargir notre clientèle provenant du Québec et d’autres pays du monde pour combler le manque à gagner. Selon nos estimations les plus optimistes, tout au plus 80 % des places laissées vacantes par les étudiant(e)s d’ailleurs au Canada seront ainsi revendiquées, et cette proportion ne dépasserait pas 20 % dans le pire des scénarios, d’où une diminution nette de l’effectif étudiant mcgillois.

Les revenus annuels provenant des inscriptions s’effondreront : Notre analyse indique que la perte de revenus associés aux droits de scolarité sera de l’ordre de 42 à 94 millions de dollars par année, dont 24,5 millions de dollars uniquement en droits de scolarité d’étudiant(e)s de l’étranger. En ce qui concerne les étudiant(e)s CRNQ, les répercussions financières des changements annoncés seront en fonction de nombreux facteurs, mais on estime que cette clientèle diminuera de 20 à 80 %, ce qui se traduira par une perte annuelle de revenus allant de 17,6 à 69,8 millions de dollars.

Certaines facultés ne compteront plus aucun(e) étudiant(e) d’ailleurs au Canada, et ne pourront rien y faire : Le coup sera particulièrement dur pour l’École de musique Schulich, dont la population étudiante au premier cycle provient à près de 40 % de l’extérieur du Québec. Les nouveaux droits de scolarité, perçus comme prohibitifs, seront vraisemblablement un frein au renouvellement de la clientèle, ce qui mettra en péril l’avenir de l’École. La Faculté des sciences de l’agriculture et de l’environnement, la Faculté des sciences de l’éducation et les programmes interfacultaires de baccalauréat ès arts ou ès sciences seront aussi grandement pénalisés.

Des mesures visant à préserver la stabilité financière de l’Université McGill devront être prises : Étant donné les turbulences financières engendrées par les changements annoncés aux droits de scolarité, il faudra prendre des mesures, notamment geler l’embauche, possiblement réduire de 650 à 700 le nombre d’emplois, reporter des dépenses prévues et procéder à d’autres réductions des dépenses non liées à la rémunération. Il va sans dire que nous mettrons tout en œuvre pour conserver le plus d’emplois possible.

La réalisation de grands projets d’infrastructure sera compromise : La perte de revenus anticipée réduira notre capacité d’emprunt et de remboursement de la dette. De plus, le coût d’emprunt pour financer les projets d’infrastructure augmentera. De ce fait, l’Université pourrait être contrainte de reporter certains d’entre eux. Déjà, les banques ont haussé le taux d’intérêt à court terme imposé à l’Université à la suite de l’annonce gouvernementale.

Les équipes universitaires seront grandement touchées : Il nous faudra peut-être dissoudre ou amputer certaines équipes des Redbirds et des Martlets, étant donné que le tiers de nos étudiant(e)s-athlètes viennent de l’extérieur.

Aujourd’hui plus que jamais, le Québec doit pouvoir compter sur un réseau universitaire dynamique. Chaque université se distingue par son apport à la société, son identité et son rôle dans l’édification de notre province. Pour assurer l’essor de l’économie, maintenir notre niveau de vie, déjà fort enviable, promouvoir la langue française et protéger notre culture, il faut que les assises de toutes nos universités soient solides.

Pour attirer des talents et des investissements au Québec, exercer une influence à l’échelle mondiale et garantir un avenir prometteur aux générations futures, on se doit de disposer d’un réseau universitaire de grande qualité. Il faut donc y injecter des sommes additionnelles plutôt que d’implanter des mesures qui ne font que rebrasser les cartes. Pierre Fortin, professeur émérite de sciences économiques à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), estime que les universités québécoises accusent un retard financier de 1,4 milliard de dollars par rapport à leurs pendants ailleurs au pays.

Ici comme partout dans le monde, l’Université McGill est reconnue pour la qualité de son enseignement et de ses recherches : une tradition d’excellence qui se perpétue encore aujourd’hui. Cette réputation enviable repose sur une communauté aussi extraordinaire que diversifiée – population étudiante, corps professoral, personnel administratif et de soutien – l’image même de l’Université McGill.

L’incertitude qui a marqué ces dernières semaines ne fait que renforcer ma détermination à faire en sorte que l’Université McGill demeure l’une des meilleures au monde, une terre d’accueil pour les meilleurs étudiant(e)s du Québec, du reste du Canada et des quatre coins du monde.

Cordiales salutations,

Deep Saini
Principal et vice-chancelier
Université McGill

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McGill soutient que la hausse des droits menace sa célèbre École de musique Schulich

L'École de musique Schulich, avec une statue de la reine Victoria en avant-plan.
La cohorte du premier cycle de l’École de musique Schulich provient à près de 40 % de l’extérieur du Québec, dit l’Université McGill.
PHOTO : PHOTO FOURNIE PAR L’UNIVERSITÉ MCGILL

La Presse canadienne
Publié à 14 h 09 HAE

L’Université McGill affirme que la hausse de 8000 $ des droits de scolarité pour les étudiants de l’extérieur de la province menace notamment l’avenir de la célèbre École de musique Schulich.

Le principal et vice-chancelier de McGill, Deep Saini, a déclaré jeudi que les inscriptions d’étudiants canadiens hors Québec pourraient chuter de 20 à 80 % après l’entrée en vigueur des nouveaux droits de scolarité de 17 000 $ pour les établissements anglophones, l’automne prochain.

Il estime qu’une telle perte serait dévastatrice pour l’école Schulich, dont la population étudiante au premier cycle provient à près de 40 % de l’extérieur du Québec.

M. Saini évoque également la possibilité de réductions dans les équipes sportives universitaires, dont le tiers des membres proviennent d’ailleurs au Canada.

Des pertes de 42 à 94 millions

McGill estime que l’augmentation des droits de scolarité ainsi que les nouveaux droits liés à l’inscription des étudiants étrangers la priveront de 42 à 94 millions de dollars de revenus chaque année.

M. Saini prédit aussi des suppressions d’emplois par centaines et la suspension de grands projets d’infrastructure.

Le gouvernement de François Legault plaide que la majorité de ceux qui viennent étudier dans une université anglophone au Québec, en bénéficiant de tarifs avantageux, quittent ensuite la province.

Le gouvernement affirme qu’il doit doubler les droits de scolarité pour les étudiants hors Québec dans un établissement anglophone afin de protéger le français, en réduisant le nombre d’anglophones à Montréal.

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Est ce que le tarif pour étudiants hors province va être doublé seulement dans les établissements anglophone? Je ne comprends pas vraiment leur affaire.

Legault baisse dans les sondages, c’est le temps d’improviser une loi qui casse du sucre sur un groupe de personne pour remonter.

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J’espère vraiment que le gouvernement va aller de l’avant avec cette offre. Gagnant-gagnant-gagnant!

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Ça m’étonnerai. Il y a très peu de plus-value politique pour la CAQ à prendre de telles orientations. Le statut quo pose toujours problème pour la santé financière des établissements francophones, et c’était naïf de la part des établissements anglophones de jouer le jeu de la CAQ qui a exploité cette situation pour en faire un enjeu identitaire.

Le noeud du problème qu’est le financement des établissements d’enseignement supérieur — les UQ en particulier — reste entier. Bien que les mesures de la CAQ ne sont certainement pas convaincantes comme solution, peut-être même délétère pour tout l’écosystème universitaire québécois, les universités anglophones ont tout à perdre à se dérober de cette discussion en ce concentrant sur celui de la francisation (très honorable, mais, n’en déplaise à certains jusqu’au-boutiste, les “hordes” d’étudiants anglos n’étaient jamais un véritable danger pour le français au Québec). Une action que pourrait prendre McGill par exemple serait de léguer des programmes “payants” aux UQ présentement offerts en extension (médecine par exemple), permettant à ces plus petites universités d’amplifier leur rayonnement et leur attractivité.

Mais bon, si on continue sur la question de la francisation en établissements anglophones, les propositions semblent sensibles et réalistes dans les structures actuelles. Pour des cours de francisation, les programmes anglophones ont habituellement plus de cours libres au choix de l’étudiant, donc il y a déjà une flexibilité pour ajouter peut-être 12 crédits par, imaginons, une “concentration” obligatoire en Études Francophones, sans allonger ou contraindre les études. Le point de discorde, si par surprise il y a réceptivité du côté de la CAQ, serait sûrement que le gouvernement souhaiterait avoir une large part de contrôle sur ces cours.

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