Résumé
Congestion pour la rentrée « On est de retour à l’avant-pandémie »
PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE
L’an dernier, le niveau oscillait autour de 95 % du seuil prépandémique. Mais depuis quelques mois, tous les voyants pointent vers un retour aux niveaux de 2019.
Ce n’est pas votre imagination : la congestion automobile est nettement plus forte cette année pour la rentrée. Dans certains secteurs, l’achalandage des routes du Grand Montréal dépasse même le niveau prépandémique, soulignent des observateurs.
Publié à 0h59 Mis à jour à 5h00
Henri Ouellette-Vézina La Presse
Ce qu’il faut savoir
- La rentrée provoque une congestion semblable, voire supérieure, au niveau prépandémique.
- Sur le terrain, la multiplication des chantiers ajoute à l’inconfort de nombreux automobilistes.
- Montréal évoque des semaines difficiles en vue, mais promet de s’ajuster en continu.
« Tous ceux et celles qui sont souvent sur la route le constatent : on est définitivement de retour à l’avant-pandémie, surtout dans la région de Montréal », affirme sans détour le PDG de l’Association du camionnage du Québec (ACQ), Marc Cadieux.
Au début de la pandémie, l’achalandage des routes du Grand Montréal avait chuté du cinquième. Et son effet avait duré. Encore l’an dernier, le niveau oscillait autour de 95 % du seuil prépandémique. Mais depuis quelques mois, tous les voyants pointent vers un retour aux niveaux de 2019.
Les données de circulation les plus récentes du ministère des Transports remontent à avril. Il est donc impossible de chiffrer avec précision la congestion.
On sait toutefois qu’au mois de mai 2024, le nombre moyen de Canadiens se rendant au travail sur une base régulière était de 16,5 millions par jour, un bond de 585 000 par rapport à mai 2023.
D’après les données de Statistique Canada, il s’agit déjà d’une nette tendance à la hausse après les creux de 2020 et 2021. Des 16,5 millions de personnes sur la route, plus de 80 % utilisent la voiture comme mode de transport. Et elles sont majoritairement seules à bord.
Encore et toujours, les chantiers
Au quotidien, la multiplication des chantiers sur des axes névralgiques « complique la situation », note Marc Cadieux. « Il y en a partout, des travaux. Et maintenant, les fermetures se font partout, même le soir et la nuit. Tous les déplacements prennent donc plus de temps, les coûts d’exploitation augmentent et les heures de service se restreignent de plus en plus », soutient-il.
À la Ville de Montréal, on reconnaît que le problème est réel : les niveaux de congestion sont présentement très élevés « Ça va finir par se stabiliser comme chaque année, mais les prochaines semaines risquent d’être difficiles », dit le porte-parole administratif de la métropole, Philippe Sabourin.
Près du pont Jacques-Cartier, le chantier du boulevard De Maisonneuve, entre les axes Parthenais et De Lorimier, « nous fait très mal actuellement », reconnaît M. Sabourin. « Ce sont des travaux pour doubler le volume d’égout sous Maisonneuve, et il y a urgence d’agir dans ce secteur en raison des inondations. On aurait aimé le faire avant pour protéger les accès au pont, mais la rupture de canalisation et le geyser géant sur René-Lévesque ont chamboulé nos plans », explique-t-il.
La Ville assure faire son maximum au centre-ville ; un récent blitz de surveillance a permis de démobiliser neuf chantiers, sur un total de 108 ayant fait l’objet d’une visite, le 29 août. Au total, plus de 400 mètres carrés de voie de circulation ont ainsi été libérés.
« L’équilibre entre travaux et mobilité est fragile, on le sait, mais tout est fait pour le préserver au maximum, assure le porte-parole. Et la bonne nouvelle, c’est qu’on n’a jamais eu autant d’alternatives à l’auto. »
Les interventions municipales ont toutefois leurs limites, indique Philippe Sabourin. « On aurait beau augmenter le nombre de voies sur Papineau, la réalité, c’est qu’on est sur une île et que Jacques-Cartier reste un pont urbain, non autoroutier. Il va toujours y avoir un goulot d’étranglement. »
Loin d’être fini
Au ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD), la porte-parole Sarah Bensadoun observe également une surcharge. « On n’est plus dans la période pandémique. On est quasiment revenus à ce qu’on avait avant. Mais en même temps, ça dépend des traversées. Ce n’est pas pareil partout », note-t-elle.
L’expert en planification des transports à l’Université de Montréal Pierre Barrieau remarque ainsi que « le trafic est vraiment plus élevé qu’en 2019, surtout en pointe, dans certains coins ». Pour lui, « l’ouverture des antennes nord et ouest du REM aurait beaucoup aidé ».
« C’est dommage que ça ait été reporté à 2025, parce qu’on aurait déchargé beaucoup de voitures, surtout au centre. »
Le pronostic de Pierre Barrieau pour l’avenir ? « La congestion va continuer d’empirer, et surtout, ça va croître d’abord et avant tout là où il y aura zéro investissement en transport collectif. »
À l’ACQ, Marc Cadieux se demande si le projet Royalmount – qui ouvre en grande pompe ce jeudi – « viendra affecter encore davantage la circulation ».
« Pour l’instant, ça reste spéculatif, mais il faut être réaliste : c’est certain que la convergence de plus d’automobilistes et de livraisons vers ce site va avoir un impact, malgré les mesures de mitigation prévues », déclare-t-il.
Quant au télétravail, des données nous confirmeront bientôt son incidence sur l’achalandage routier en chiffres, surtout les lundis et vendredis, qu’on sait être les journées où les gens restent souvent chez eux. Une première étude sera réalisée cet automne à l’échelle nationale.