New York méconnaissable
1/5
Les images sont stupéfiantes.
Le mardi 9 janvier 2024, un an avant l’arrivée de la taxe sur la congestion, 3,3 millions de personnes ont pris le métro à New York. Un an plus tard, le mardi 7 janvier 2025, au troisième jour d’application du péage, 3,7 millions de personnes l’ont pris. Une hausse de 400 000 usagers.
Layla Law-Gisiko note qu’encourager les gens à se tourner vers le transport collectif était l’un des objectifs du projet. « Il y a un effet immédiat visible par tous. Mais j’appelle à la prudence. Il faut donner du temps au programme pour en mesurer l’impact. »
Ce qui est indéniable, dit-elle, c’est que le système a commencé à faire entrer davantage de fonds dans les caisses de la MTA, qui estime pouvoir récolter de 500 à 800 millions US (de 700 millions à 1,1 milliard CAN) par année grâce à cette mesure.
« C’est essentiel pour offrir de meilleurs services à encore plus de gens », dit Mme Law-Gisiko.
« Ceux qui paient y gagnent »
Tout le monde déteste la congestion automobile.
Pourtant, les solutions sont connues : New York n’est que la plus récente ville à les avoir mises en application, signale Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal…
PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE
Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal
Londres, Stockholm, Singapour et maintenant New York… Ces villes ont toutes trouvé que les bénéfices de taxer la congestion surpassaient les coûts. Une taxe ou un paiement, de manière générale, a des effets positifs sur la circulation.
Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal
Une solution pour Montréal ?
PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE
La moitié des véhicules responsables de la congestion dans la métropole proviennent de l’île de Montréal.
Après New York, Montréal ?
Publié à 5 h 00

[
Nicolas Bérubé La Presse
](La Presse | Nicolas Bérubé)
Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal, note qu’il a périodiquement été question à Montréal d’imposer une taxe de congestion sur les ponts.
Mais le problème avec cette approche, dit-il, c’est que 50 % des véhicules qui génèrent de la congestion viennent de l’île de Montréal.
On peut viser les ponts, mais on ne touche pas tout le monde.
Jean-Philippe Meloche, professeur à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal
M. Meloche note que la zone qui s’étend du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), à l’ouest, à la rue Berri, à l’est, et du mont Royal, au nord, jusqu’au fleuve, au sud, pourrait hypothétiquement servir de base pour une tarification dans la métropole.
PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE
Le mont Royal pourrait servir de limite nord à une zone de tarification qui viserait le centre-ville.
« Et ça n’aurait pas besoin d’être bien compliqué comme technologie, dit-il. On pourrait faire un système de paiement sur l’honneur avec contrôle aléatoire. Par exemple, les automobilistes auraient l’obligation de déclarer leur présence sur le territoire, ils pourraient avoir 24 heures pour le faire, et paieraient, disons, 20 $. Puis, il y a quelques caméras qui font des repérages aléatoires de plaques, et si la personne contrôlée n’a pas déclaré sa présence dans les 24 heures, elle reçoit un constat d’infraction de 500 $. Ça ne nécessite pas d’infrastructures lourdes. Ça peut être assez simple. » …
Qu’en pensent des Montréalais ?
PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE
L’idée de faire payer les automobilistes pour accéder au centre-ville ne fait pas l’unanimité chez les Montréalais interrogés par notre journaliste.
Serait-ce souhaitable de tarifer l’accès automobile quotidien au centre-ville afin de réduire la congestion routière ? Nous avons interrogé plusieurs personnes au centre-ville de Montréal.
Publié à 5 h 00

[
Nicolas Bérubé La Presse
](La Presse | Nicolas Bérubé)
Si l’idée ne fait pas l’unanimité, prioriser le confort des déplacements en transports en commun plutôt que l’accès en automobile l’emporte dans l’esprit des personnes que nous avons rencontrées.
« Chaque jour, je viens travailler au centre-ville avec le SRB [service rapide par bus] Pie-IX, et je dois dire que c’est génial », dit Natalie Gendron, rencontrée sur l’avenue McGill College.
Mme Gendron note que les déplacements en autobus avant étaient « terribles », car ils étaient souvent immobilisés dans le trafic automobile. « Maintenant, on dépasse toutes les voitures. J’ai toujours une place assise le matin. C’est vraiment bien. J’aimerais seulement qu’ils augmentent la fréquence des autobus le soir, car c’est très populaire, il y a beaucoup de monde », dit-elle.
L’idée d’imposer un tarif aux automobilistes qui veulent accéder au centre-ville mérite d’être explorée, dit-elle.
Si ça peut faire diminuer la pollution de l’air, si ça peut aider à faire diminuer les bouchons et à mieux financer les transports en commun, je serais pour.
Natalie Gendron
Pour Nicole Malette, une résidante de l’arrondissement de LaSalle rencontrée rue Sainte-Catherine, l’accès au centre-ville se fait en métro ou en autobus.
« Je n’ai pas d’auto, dit-elle. Et même si j’en avais une, je ne viendrais pas au centre-ville avec. En autobus et en métro, ça va très bien et on n’a pas à se poser la question du stationnement. »
Elle dit être « mitigée » quant à l’idée d’une taxe sur la congestion. « C’est bien si ça réduit le trafic et finance les transports en commun, mais en même temps, les gens doivent déjà payer pour leur stationnement, donc ils devraient payer deux fois, alors j’hésite », dit-elle.
Amine Nakhle, qui habite dans le Vieux-Montréal, dit prendre rarement sa voiture pour se rendre au centre-ville. « La plupart du temps, je suis piéton », dit-il.
Il est contre l’idée d’une tarification de la congestion.
Je crois que le trafic est surtout causé par les chantiers. Sur un pâté de maisons, tu peux avoir trois chantiers. Et tous les chantiers ne sont pas actifs, ils restent là des mois…
La congestion tarifée dans le monde
PHOTO JOHN SIBLEY, ARCHIVES REUTERS
Depuis plus de 20 ans, les automobilistes de la capitale britannique doivent composer avec une zone de tarification de la congestion.
Certaines villes ont mis en place des systèmes de tarification de la congestion afin d’améliorer les déplacements et de promouvoir les modes de transport plus durables. Voici comment elles s’y sont prises.
Publié à 5 h 00

[
Nicolas Bérubé La Presse
](La Presse | Nicolas Bérubé)
Londres
Le centre de Londres est régi depuis 2003 par une zone de tarification de la congestion. Les automobilistes doivent débourser 15 livres (27 $ CAN) par jour pour y accéder. La congestion a diminué initialement, mais les taxis et les véhicules de livraison, qui ne sont pas soumis aux mêmes règles, ont exacerbé le problème de la congestion depuis.
Stockholm
PHOTO JONATHAN NACKSTRAND, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES
Les cyclistes côtoient les automobilistes dans le centre de Stockholm.
Depuis 2006, une taxe s’applique aux véhicules qui entrent dans le centre-ville de Stockholm ou en sortent via des points de contrôle automatisés. Les tarifs varient en fonction de l’heure de passage, mais ne peuvent pas dépasser 12 euros (18 $ CAN) pour la journée. Une baisse de la congestion et une hausse de la qualité de l’air ont été observées après la mise en place du système, qui fêtera ses 20 ans l’an prochain.
Singapour
PHOTO CAROLINE CHIA, ARCHIVES REUTERS
À Singapour, les tarifs sont établis selon l’heure et la congestion observée.
Singapour est l’un des pionniers en la matière : le premier système de tarification de la congestion y a été implanté en 1975, avant de passer au format électronique en 1998. Singapour utilise une tarification dynamique en fonction de l’heure et du niveau de congestion.
New York
PHOTO BRYAN ANSELM, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES
Les automobilistes doivent payer environ 13 $ CAN pour entrer dans le sud de Manhattan durant la journée.
Un mois après la mise en place de la taxe sur la congestion, 1 million de véhicules en moins sont entrés dans le sud de Manhattan, selon l’Autorité de transport métropolitain (MTA). Les automobilistes doivent payer 9 $ (environ 13 $ CAN) pour entrer dans le sud de Manhattan durant la journée. Des réductions du temps de déplacement ont été relevées dès la première semaine après la mise en place du système. « Les temps de trajet ont diminué de 10 à 30 % en moyenne », a déclaré le mois dernier Juliette Michaelson, chef adjointe de la MTA.
300 zones à faibles émissions (ZFE)
PHOTO REMO CASILLI, ARCHIVES REUTERS
La Piazza Pia, à Rome, est réservée aux piétons.
En Europe, environ 300 zones à faibles émissions (low emission zones en anglais) ont été implantées ces dernières années, notamment en France, en Allemagne, en Italie, en Espagne et aux Pays-Bas. Situées dans les quartiers centraux, ces zones sont interdites d’accès à certains véhicules en fonction de l’année de leur construction, ce qui bloque les vieux véhicules qui polluent davantage. Un système de vignette est habituellement mis en place pour identifier les véhicules pouvant être admis dans la ZFE.