Mai 2023 : le patron de Twitter promet que les fausses allégations de fraude électorale « seront corrigées » sur sa plateforme qui n’a pas encore changé de nom. Quand un journaliste de CNBC lui demande une garantie ferme, il répond : « Oh oui ! À 100 %. »
Août 2024 : Elon Musk est accusé de renier ses promesses et d’utiliser son énorme influence pour aider Donald Trump, candidat présidentiel du Parti républicain, auquel il a donné son appui le jour de la tentative d’assassinat dont il a fait l’objet et qu’il doit interviewer ce lundi soir.
Influence qu’il n’exerce pas seulement sur son site, qui fait la part belle aux fausses allégations, aux théories complotistes et aux propos haineux, mais également dans les États clés de l’élection présidentielle de 2024.
La question est de savoir si cette influence aura un effet sur le vote de novembre prochain aux États-Unis, de même que sur le climat social ou politique de son pays d’adoption avant et après le scrutin américain.
Désinformation sur X (la suite)
Résumé
Décryptage Comment Elon Musk influence la présidentielle
PHOTO JULIA NIKHINSON, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS
Elon Musk au Capitole, à Washington, où il assistait en tant qu’invité au discours du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, le 24 juillet.
(New York) Novembre 2022 : Elon Musk annonce une nouvelle ère sur Twitter, dont il s’est porté acquéreur un mois plus tôt. « Twitter 2.0 sera beaucoup plus efficace, transparent et impartial », tweete-t-il après avoir accusé le réseau social d’avoir « interféré dans les élections ».
Publié à 1h15 Mis à jour à 5h00
Richard Hétu Collaboration spéciale
Mai 2023 : le patron de Twitter promet que les fausses allégations de fraude électorale « seront corrigées » sur sa plateforme qui n’a pas encore changé de nom. Quand un journaliste de CNBC lui demande une garantie ferme, il répond : « Oh oui ! À 100 %. »
Août 2024 : Elon Musk est accusé de renier ses promesses et d’utiliser son énorme influence pour aider Donald Trump, candidat présidentiel du Parti républicain, auquel il a donné son appui le jour de la tentative d’assassinat dont il a fait l’objet et qu’il doit interviewer ce lundi soir.
Influence qu’il n’exerce pas seulement sur son site, qui fait la part belle aux fausses allégations, aux théories complotistes et aux propos haineux, mais également dans les États clés de l’élection présidentielle de 2024.
La question est de savoir si cette influence aura un effet sur le vote de novembre prochain aux États-Unis, de même que sur le climat social ou politique de son pays d’adoption avant et après le scrutin américain.
Désinformation sur X
Elon Musk et son réseau social, connu depuis juillet 2023 sous le nom de X, sont déjà montrés du doigt pour la désinformation qui a contribué aux violences récentes de l’extrême droite au Royaume-Uni. Dans une vidéo diffusée sur X, l’influenceur Andrew Tate a notamment affirmé faussement que le suspect de l’attaque au couteau de Southport qui a tué trois fillettes et blessé huit autres enfants était un « migrant sans papiers » qui était « arrivé sur un bateau ».
« La guerre civile est inévitable », a renchéri Elon Musk sur X, commentaire dénoncé par un porte-parole du premier ministre britannique Keir Starmer.
Aux États-Unis, l’immigration irrégulière fait également partie des obsessions d’Elon Musk. Ce dernier a fait sienne la théorie du complot selon laquelle Joe Biden a aboli les frontières pour assurer de nouveaux électeurs au Parti démocrate.
« La stratégie de Biden est très simple : 1. faire entrer autant d’illégaux que possible dans le pays ; 2. les légaliser pour créer une majorité permanente – un État à parti unique », a-t-il écrit en février dernier à ses abonnés, dont le nombre dépasse aujourd’hui 193 millions.
Elon Musk est aussi friand de théories du complot sur le processus électoral. Quand il ne relaie pas lui-même des informations erronées, son réseau social refuse de corriger les allégations fausses ou trompeuses sur le sujet.
Ainsi, en mai 2023, une analyse réalisée par la société de veille médiatique Zignal Labs pour le compte de l’Associated Press a mis en évidence les 10 tweets les plus largement partagés et traitant d’une « élection truquée » au cours des cinq jours qui ont suivi une assemblée publique de Donald Trump diffusée sur CNN.
Or, même si la plateforme de Musk dispose d’un système permettant aux utilisateurs d’ajouter un contexte aux messages trompeurs, les 10 messages, qui ont recueilli collectivement plus de 43 000 retweets, n’étaient accompagnés d’aucune note de ce type.
Une étude plus récente réalisée par le Centre contre la haine en ligne a recensé 50 publications sur les élections américaines relayées par Elon Musk sur X et identifiées par des spécialistes de la désinformation comme étant trompeuses ou fausses.
Publications qui ont généré plus de 1,2 milliard de vues, selon l’ONG.
L’influence d’Elon Musk se fait également ressentir dans les États clés. La semaine dernière, la secrétaire d’État du Michigan, Jocelyn Benson, a ouvert une enquête sur les actions d’un comité d’action politique appelé America PAC et financé par l’entrepreneur milliardaire.
Selon la chaîne CNBC, America PAC a créé un site ostensiblement destiné à l’inscription de nouveaux électeurs. Or, si l’utilisateur se trouve dans un État clé comme le Michigan ou la Géorgie, il n’est pas dirigé vers le site de son État où il peut s’inscrire. Il est plutôt invité à fournir plusieurs données personnelles qui pourraient être utilisées par la suite pour le microcibler avec des pubs électorales.
« Chaque citoyen devrait savoir exactement comment ses informations personnelles sont utilisées par les comités d’action politique, en particulier si une entité prétend aider les gens à s’inscrire sur les listes électorales du Michigan ou de tout autre État », a déclaré une porte-parole de la secrétaire d’État du Michigan.
Durant la même semaine, cinq secrétaires d’État, dont celle du Michigan, ont également demandé à Elon Musk de corriger Grok, le robot de conversation de X.
Le chatbot de X est accusé d’avoir diffusé de fausses informations sur les dates limites de dépôt des bulletins de vote dans les États, peu après que Joe Biden s’est retiré de la course à la Maison-Blanche.
Comme sur tous les sujets mentionnés ci-dessus, X n’a pas répondu à cette accusation.
« Examiner » les résultats de l’élection
Mais Elon Musk a échangé récemment quelques courriels avec un journaliste du magazine The Atlantic sur la question de savoir s’il acceptera les résultats de l’élection présidentielle de 2024. Ses deux phrases commencent par des « si ».
« S’il existe des questions relatives à l’intégrité des élections, elles doivent faire l’objet d’une enquête en bonne et due forme et ne doivent pas être rejetées d’emblée ou remises en question de manière déraisonnable. Si, après examen des résultats de l’élection, il s’avère que Kamala a gagné, cette victoire doit être reconnue et non contestée », a-t-il écrit.
Le patron de X a cessé abruptement de répondre aux questions de son correspondant, qui voulait également lui demander ce qu’il pensait de l’élection présidentielle de 2020 et ce qu’il entendait par un « examen des résultats de l’élection ».
Quelques jours plus tard, en relayant sur X une vidéo plus que douteuse montrant des soi-disant « non-citoyens » admettant être inscrits sur les listes électorales de Géorgie, il a écrit : « Extrêmement troublant ! »