Résumé
Groupe Désourdy lance un premier centre de tri unique au Québec
Par Jean-François Guillet, La Voix de l’Est
7 mars 2025 à 13h35|
Mis à jour le7 mars 2025 à 16h31
Louis Désourdy et son équipe mettent la touche finale au chantier du gigantesque centre de tri établi à Bromont. (Stéphane Champagne/La Voix de l’Est)
Louis Désourdy est fébrile. Avec raison, car le grand patron de Groupe Désourdy boucle quatre ans de travail acharné avec le lancement officiel des opérations d’un centre de tri unique, à Bromont en Estrie, qu’il souhaite implanter dans toutes les régions du Québec.
«C’est incroyable tout ce qu’on a accompli. On est vraiment fiers. Je ne suis pas du genre à me vanter, mais notre concept est révolutionnaire. Et je veux que ça fasse des petits partout», confie le dynamique homme d’affaires en arpentant le vaste centre de 52 000 pieds carrés, nommé Écotri Désourdy, où l’on prévoit détourner annuellement de l’enfouissement 40 000 tonnes de résidus de construction, rénovation et démolition (CRD).
Un des aspects qui rend le projet unique tient au fait que toutes les matières qui transitent par le centre de tri sont à l’intérieur. «Il n’y a pas d’odeurs, pas de contamination et très peu de bruit. Et ça rend nos opérations encore plus efficaces», résume Louis Désourdy.
On s’apprête à lancer les opérations d’Écotri Désourdy. (Stéphane Champagne, La Voix de l’Est)
«Ça n’a pas d’allure ce qu’on retrouve dans les sites d’enfouissement», dit-il pour justifier sa démarche.
Le PDG croit vraiment que «chaque geste peut faire une différence» pour réduire l’empreinte environnementale de son entreprise.
En ce sens, il a notamment ajouté dans sa flotte de machinerie des équipements lourds à motorisation électrique.
En ce qui concerne le budget du projet de centre de tri, estimé initialement à 7,5 millions de dollars, il a plus que doublé, s’élevant à près de 17,5 millions.
Louis Désourdy lors de l’inauguration officielle, vendredi après-midi (Catherine Trudeau/La Voix de l’Est)
Recyc-Québec contribue à la hauteur de 1,5 million. Le reste du financement manquant, soit 11,8 millions, provient à parts égales d’Investissement Québec et de Desjardins, a-t-on appris vendredi, lors du lancement officiel.
«C’est capital ce que tu fais Louis pour le recyclage de ces matières et pour l’environnement», a souligné à cette occasion Isabelle Charest, députée de Brome-Missisquoi et ministre responsable du Sport, du Loisir et du Plein air.
À la source
Avant de se lancer dans le projet de centre de tri à grand déploiement, dévoilé par La Voix de l’Est il y a presque quatre ans jour pour jour, Louis Désourdy a décidé de travailler en amont.
Un des gros problèmes des rebuts CRD est leur contamination, car ils se retrouvent dans un même conteneur sur les chantiers, souligne-t-il.
Le visionnaire homme d’affaires a eu l’idée d’amorcer le tri à la source, en fournissant des bacs métalliques spécifiques conçus par l’entreprise Durabac.
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Un projet pilote a donc eu lieu en Estrie, au cours duquel on a recueilli des données de juin 2022 à janvier 2023. Et on a obtenu de probants résultats.
Au total, 14 entreprises ont participé à l’initiative, déployée sur 29 chantiers, soit 24 résidentiels, deux commerciaux et trois industriels. Au cours de cette période, près de 75 % des résidus CRD, soit environ 387 tonnes, ont été revalorisés ou détournés de l’enfouissement.
Parmi les matières récupérées, notons le plastique, différents types de bois, le carton et le papier, les métaux, le gypse puis les agrégats.
«Quand les conteneurs arrivent au centre de tri, l’efficacité est maximale et les matériaux qu’on récupère sont de grande qualité. On a des débouchés pour presque tout. On envoie une très petite quantité de [résidus] vers les sites d’enfouissement», mentionne-t-il.
On estime que les équipements à la fine pointe de la ligne de triage permettront de traiter 25 tonnes de matières par heure. (Stéphane Champagne/La Voix de l’Est)
Une signalisation innovante dotée d’un code QR et présente sur les bacs aide les travailleurs à bien trier les matières.
Recyc-Québec élargira cette innovation de Désourdy à l’échelle de la province, a précisé vendredi Emmanuelle Géhin, présidente-directrice générale de l’organisme référence en gestion des matières résiduelles.
On estime que les 18 employés de la ligne de triage, sur un total de 22 dans l’ensemble du centre, pourront traiter 25 tonnes de matière par heure. On estime que près de 85 % des résidus CRD auront une seconde vie.
À titre d’exemple, à sa sortie de la ligne de triage, le bois est en grande partie broyé dans une immense déchiqueteuse sur place. La matière est ensuite réacheminée vers des entreprises qui la revalorisent.
Espace de réemploi
On parle beaucoup des chaînes d’économie circulaire depuis quelques années. Il s’agit d’un «système de production, d’échange et de consommation visant à optimiser l’utilisation des ressources à toutes les étapes du cycle de vie d’un bien ou d’un service», peut-on lire sur le site de Recyc-Québec.
Louis Désourdy croit tellement à ce concept qu’il l’a intégré dans toutes les sphères du projet de centre de tri. En ce sens, un espace entièrement dédié au réemploi de matériaux y a été aménagé.
«Dès que les conteneurs arrivent, on sépare les matériaux qui peuvent être réutilisés des autres qui s’en vont vers la ligne de triage», explique Louis Désourdy.
On voit ici une partie de l’espace de réemploi au sein du centre de tri. (Stéphane Champagne/La Voix de l’Est)
On parle ici de planches de bois, de tuyaux de plastique, de portes. Bref, tout ce qui peut avoir une seconde vie. Cette portion du centre de tri sera ouverte au public, qui pourra venir s’y approvisionner à moindre coût.
Les citoyens qui voudraient venir porter des matériaux réutilisables doivent d’abord contacter le centre de tri, spécifie Louis Désourdy.
Autre valeur ajoutée au projet, le centre de tri embauchera une partie de ses effectifs via l’organisme d’inclusion sociale Pleins Rayons. Ceux-ci s’occuperont notamment de préparer les matériaux pour la revente.
Le modèle de centre de tri est si prometteur que Louis Désourdy dit être en pourparlers pour l’implanter, sous forme de franchises, dans deux autres régions au Québec. «Et c’est juste le début, dit-il. Il y a beaucoup d’intérêt pour notre concept.»
— Avec Jérôme Savary