Environnement et transition écologique

Les incendies de forêt ont généré un record d’émissions de carbone

PHOTO PLANET LABS PBC

« Les émissions liées aux incendies de forêt dans les zones boréales atteignent habituellement leur pic fin juillet ou début août et le total devrait donc continuer à augmenter pendant quelques semaines », prévient Mark Parrington, scientifique du Service de surveillance de l’atmosphère de Copernicus.

(Paris) Les émissions de carbone générées par les incendies au Canada ont atteint des niveaux inédits et représentaient déjà à fin juillet plus du double du précédent record annuel de 2014, selon les données de l’observatoire européen Copernicus publiées jeudi.

Publié à 6h39

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Agence France-Presse

« Actuellement, les émissions totales des incendies de forêt au Canada se situent à environ 290 mégatonnes ( de carbone ), alors que le précédent record enregistré en 2014 était de 138 mégatonnes », indique Copernicus dans un bulletin.

Le chiffre pour 2023 ne reflète pour l’instant que les émissions depuis le début de l’année et même pour l’essentiel depuis début mai, quand les feux ont commencé à ravager le pays, alors que la saison des incendies de forêt n’est pas encore terminée.

« Nous avons surveillé les émissions des feux à travers le Canada sur les trois mois depuis le début mai et sur cette période elles ont continué à augmenter de manière quasi continue à un niveau qui est déjà considérablement plus haut que les précédentes émissions répertoriées dans notre base de données pour une année entière dans ce pays », a souligné Mark Parrington, scientifique du Service de surveillance de l’atmosphère de Copernicus. Les données remontent à début 2003.

« Les émissions liées aux incendies de forêt dans les zones boréales atteignent habituellement leur pic fin juillet ou début août et le total devrait donc continuer à augmenter pendant quelques semaines », prévient-il.

Le Canada, qui en raison de sa situation géographique se réchauffe plus vite que le reste de la planète, est confronté ces dernières années à des évènements météorologiques extrêmes dont l’intensité et la fréquence sont accrues par le changement climatique.

PHOTO HANDOUT, AGENCE FRANCE-PRESSE

Dans cette photo fournie par le British Columbia Wildfire Service, on voit l’incendie de forêt d’Horsethief Creek.

Au 30 juillet, le pays était ravagé par plus de 990 incendies, dont 613 jugés hors de contrôle. À cette date, plus de 12 millions d’hectares ont déjà brûlé cette année, un total bien supérieur à tout ce que le pays a déjà connu.

Quand les carapaces de crustacés viennent à la rescousse de l’énergie

PHOTO MOHAMMED ABED, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Une batterie nouveau genre à base de carapaces de crabes et de zinc serait 100 % biodégradable et recyclable, une avancée très importante qui pourrait changer la donne dans le milieu automobile.

Les tonnes de déchets que nous produisons chaque année ont relativement diminué au cours des dernières années, mais pourrions-nous en générer encore moins ? Est-ce que les industries pourraient trouver certaines solutions pour faire en sorte que les matériaux de nos voitures soient moins dommageables pour l’environnement ?

Mis à jour à 11h45

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Bertrand Godin
Bertrand Godin Collaboration spéciale

Sur cette question, l’évolution dans le domaine des batteries pour les véhicules automobiles est un bel exemple. On constate en effet que de nombreux procédés se développent continuellement au sein de cette industrie qui met tous les efforts en matière d’écoresponsabilité pour poursuivre l’amélioration sur cette voie.

À tout le moins, on peut dire que les chercheurs et les fabricants se cassent la tête pour trouver des solutions qui seront écologiquement viables pour les voitures de demain et pour s’assurer que les composants de ces véhicules ne se retrouvent pas ultimement dans les lieux d’enfouissement.

C’est pourquoi une batterie nouveau genre à base de carapaces de crabes et de zinc est si bien accueillie puisqu’elle serait 100 % biodégradable et recyclable, une avancée très importante qui pourrait changer la donne dans le milieu automobile, mais aussi dans le milieu énergétique en général.

À titre d’exemple, cette batterie, sans danger et respectueuse de l’environnement, pourrait être rechargée au minimum 1000 fois, ce qui la rendrait idéale pour stocker de l’énergie éolienne ou de l’énergie solaire pour le bien des réseaux électriques.

Chercheurs au travail

Ce sont des chercheurs de l’Université du Maryland et de l’Université de Houston qui se sont penchés sur le projet, avec l’ambition justement de développer une batterie plus durable qui permettrait de générer moins de déchets dans les lieux d’enfouissement.

Ils ont commencé par étudier la chimie des batteries zinc métal, que les différents scientifiques mettent au point depuis des années pour le stockage de l’énergie sur les réseaux électriques.

D’une part, le zinc qui se trouve à l’intérieur de la croûte terrestre est beaucoup plus abondant que le lithium peut l’être. D’autre part, les batteries ioniques au zinc sont moins coûteuses à produire que les batteries au lithium, donc financièrement plus accessibles pour les consommateurs.

Il faut savoir que les batteries dites traditionnelles sont constituées d’anodes de zinc, c’est-à-dire de cathodes d’oxyde métallique et d’électrolytes à base d’eau. Le tout génère un dépôt irrégulier de zinc sur la surface des électrodes, ce qui rend ces batteries parfois dangereuses. Et quant à la durée de vie de celles-ci, on peut assurément dire qu’elle est courte.

Ces chercheurs ont donc créé un nouvel électrolyte en gel biodégradable composé de chitosane, une protéine dérivée de la chitine, qui est l’un des composants principaux de la carapace d’insectes et de crustacés, que l’on pense aux crabes, aux homards et aux crevettes. Utiliser les rebuts alimentaires, voilà qui est tout de même fabuleux comme procédé !

En combinant le gel biodégradable de chitine et le zinc, les chercheurs ont créé une sorte de membrane constituée d’un autre gel, solide cette fois, qui serait utilisé comme électrolyte dans la batterie.

Ils ont donc utilisé du zinc pour l’anode, l’électrode positive de la batterie, comme c’est habituellement le cas sur d’autres types de batteries d’utilisation quotidienne. Sauf que les chercheurs ont remplacé la cathode classique, qui est l’électrode à partir de laquelle le courant sort, par une cathode en matière organique entièrement biodégradable.

Selon les informations fournies par l’équipe de recherche, cette batterie aurait maintenu un rendement de charge de 99,7 % sur plus de 1000 cycles de recharge lorsqu’elle fonctionnait à haute densité de courant. C’est tout à fait étonnant comme premiers résultats.

Hautement écoresponsables

De plus, les deux tiers de ces batteries seraient biodégradables, ce qui les rendrait hautement écoresponsables. Il apparaît que l’électrolyte de chitosane, une substance dérivée de la chitine, composant principal de la carapace des insectes et des crustacés, qui est le matériau cathodique, se biodégraderait dans le sol en quelques mois à peine. Pour ce qui est du zinc restant dans les batteries, il serait complètement recyclé aussi de son côté, car plusieurs industries le recyclent déjà depuis un bon moment.

Il sera donc intéressant de suivre de près comment cette technologie évoluera et de voir si elle trouvera un chemin vers nos voitures dans un avenir rapproché.

Le procédé de fabrication avec les carapaces de crabes est d’autant plus prometteur que, pour l’instant, bon nombre d’usines et d’entreprises de transformation alimentaire de crustacés déposeraient les carapaces aux ordures ou au compost.

Avec l’utilisation de ces carapaces, tout le monde en sortirait gagnant, sans compter que les batteries deviendraient de plus en plus écoresponsables et plus durables. Combiner le bien-être de la planète et la nécessité d’améliorer encore la durée de vie des batteries dans les véhicules automobiles semble une avenue bien heureuse.

Si c’était une ancienne sablière, ça veut dire que les dépots meubles sont du sable, dans lequel les contaminants migrent très facilement pour contaminer la nappe phréatique. En fait, c’est très semblable à la catastrophe des lagunes de Mercier.

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Tant qu’on donnera des amendes totalement ridicules aux entreprises fautives et que l’on n’obligera pas ces dernières à réparer leurs dégâts environnementaux. Ces abus continueront parce que les entreprises font de gros profits à contourner les lois et sont souvent associées au crime organisé. Tandis que le Ministère de l’Environnement n’en a souvent que le nom et tout cela est loin d’être une première. Ce qui fait que c’est clairement scandaleux. :-1:t2:

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La métamorphose verte de l’ancienne mine Lac d’amiante à Thetford Mines

La nature reprend sa place sur le site de la dernière mine en activité dans la région, fermée en 2012.

Un lac au milieu d'un ancien site minier avec beaucoup de verdure.

L’ancienne mine Lac d’amiante ou Black Lake est située sur le territoire de Thetford Mines et de Saint-Joseph-de-Coleraine.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

Publié à 5 h 48 HAE

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L’ancienne mine Lac d’amiante située dans la région de Thetford Mines vit une véritable métamorphose verte depuis sa fermeture, il y a un peu plus de 10 ans. La végétation s’est installée tranquillement sur le sol aride des haldes de résidus miniers. Un travail de longue haleine pour l’entreprise Viridis Environnement.

Sur le plus haut plateau des haldes entourant l’ancienne mine, la vue est imprenable sur ce site où jadis fourmillaient bon nombre de travailleurs de l’industrie de l’amiante dans la région. Ici, on peut voir l’envergure du projet débuté en 2011, explique Isabelle Fréchette, agronome et gestionnaire de projets pour Viridis Environnement.

Il y a seulement cinq ans, ça n’avait pas l’air de ça […] Je pense qu’on a la recette gagnante.

Une citation de Isabelle Fréchette, agronome et gestionnaire de projets pour Viridis Environnement

  • Trois hommes de dos regardent un paysage minier, très gris à perte de vue.

  • Vue sur les travaux de revégétalisation de la mine Lac d’amiante en mai 2017.

Photo : Courtoisie: Viridis Environnement

  • Une pelle mécanique travaille au loin sur un sol recouvert de gravier.

  • Aperçu des travaux de revégétalisation en septembre 2020.

Photo : Courtoisie: Viridis Environnement

  • Un site minier vide.

  • En l’espace d’un an seulement, ce secteur a été revégétalisé.

Photo : Courtoisie: Viridis Environnement

  • Un site minire avec beaucoup de verdure

  • L’étendue du site de l’ancienne mine Lac d’amiante revégétalisé sur environ 215 hectares depuis 2011.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

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L’étendue du site de l’ancienne mine Lac d’amiante revégétalisé sur environ 215 hectares depuis 2011.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

L’étendue du site de l’ancienne mine Lac d’amiante revégétalisé sur environ 215 hectares depuis 2011.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

Rien ne poussait ici. Pour arriver à changer la donne, l’entreprise a créé un technosol riche en calcium pour contrer l’effet nocif du magnésium des résidus. C’est un mélange de biosolides papetiers, de traitement des eaux usées, ça peut être de la cendre de la boue de chaux, pour pouvoir implanter des végétaux et des arbres.

La revégétalisation du site depuis 2011 en chiffres

  • 215 hectares revégétalisés
  • 10 000 arbres plantés
  • 300 000 tonnes de matières résiduelles fertilisantes (MRF) revalorisées approximativement
  • 100 000 tonnes de sols faiblement contaminés revalorisés approximativement*
  • 10 000 camions sont venus décharger des technosols et du compost

*Plage A-B conformes à l’Annexe I du règlement sur la protection et la réhabilitation des terrains (RPRT) de Québec.

  • De la terre dans un main.

  • Isabelle Fréchette prend une poignée du technosol conçu par Viridis Environnement.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

  • Une femme avec un dossard jaune devant une petite forêt le long d'un chemin de gravier.

  • Isabelle Fréchette est agronome et gestionnaire de projets pour Viridis Environnement.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

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Isabelle Fréchette est agronome et gestionnaire de projets pour Viridis Environnement.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

Isabelle Fréchette prend une poignée du technosol conçu par Viridis Environnement.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

Les arbres plantés il y a quatre ans font maintenant plus de quatre mètres. On a des fleurs qui s’implantent naturellement, des arbres indigènes aussi, note Isabelle Fréchette.

L’entreprise travaille avec le programme fédéral 2 milliards d’arbres qui appuie de nouveaux projets de plantation. Depuis 2019, un compost créé avec un partenaire est aussi intégré au sol pour reverdir différentes zones de la mine.

De la végétation. En avant des fleurs mauves, à l'arrière, des arbres.

Il y a quatre ans, des arbres ont été plantés dans ce secteur avec une équipe de chercheurs.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

L’érosion et ses effets

Viridis Environnement a débuté son travail de revégétalisation par les plateaux des haldes sur lesquels il est plus facile d’intervenir, note Sébastien Hue, directeur Recherche et Technologies. Mais leur principal défi demeure l’érosion de ces montagnes de résidus miniers.

L’érosion est très présente dans ces pentes-là, ce qui amène beaucoup de sédiments dans les différents cours d’eau qui bordent la mine. Grâce à la revégétalisation sur les plateaux, le ruissellement est moins important. Mais le prochain défi, c’est les pentes.

Une pente d'une halde de résidus miniers.

Les pentes des haldes sont très abruptes, compliquant le travail de revégétalisation.

Photo : Radio-Canada / Philippe Grenier

Près de deux ans après le rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur l’amiante et ses résidus, Québec a dévoilé en juin 2022 (Nouvelle fenêtre) son plan d’action pour la gestion des résidus miniers amiantés avoisinant les anciens sites miniers.

Par courriel, le ministère de l’Environnement du Québec ((MELCCFP) écrit qu’un plan d’échantillonnage des lacs et des cours d’eau des bassins versants des rivières Bécancour et Nicolet Sud-Ouest a été élaboré et les activités d’échantillonnage ont commencé en avril 2023. Les premiers résultats sont attendus pour la fin de 2024. Des échantillonnages qui comprennent l’analyse des fibres d’amiante dans l’eau et dans les sédiments.

Viridis Environnement compte reproduire leur modèle de revégétalisation sur le site de l’ancienne mine National, située à quelques kilomètres de là. Les travaux vont débuter cette année.

À lire :

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« On en voit encore beaucoup trop »

PHOTO GETTY IMAGES

Ces derniers mois, les inspecteurs du Service de l’environnement de la Ville de Montréal ont constaté des « non-conformités » à 1151 reprises. Seuls neuf avis d’infraction ont été remis.

Malgré leurs efforts, les grandes chaînes de restauration peinent toujours à se soumettre au règlement de la Ville de Montréal interdisant certains articles à usage unique. Pailles, ustensiles ou verres de plastique prohibés figuraient toujours au menu de la quasi-totalité des adresses visitées par La Presse à la fin du mois de juillet. L’Association Restauration Québec appelle à la patience : « la conformité s’en vient ».

Publié à 5h00

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Charles-Éric Blais-Poulin
Charles-Éric Blais-Poulin Équipe d’enquête, La Presse

Le règlement de l’administration Plante, adopté en septembre 2021, prévoyait une période de grâce de 18 mois, notamment pour permettre aux commerçants et restaurateurs d’écouler leurs stocks et d’implanter des solutions de rechange. La nouvelle réglementation est entrée en vigueur le 28 mars dernier.

Près de cinq mois plus tard, les 32 inspecteurs du Service de l’environnement ont constaté des « non-conformités » à 1151 reprises, selon des chiffres transmis à La Presse par la Ville de Montréal. Seuls neuf avis d’infraction ont été remis.

« Les inspections du Service de l’environnement ont commencé dès la prise d’effet du règlement, le 28 mars 2023, avec une approche progressive, explique la relationniste Kim Nantais, par courriel. Aucune pénalité n’est appliquée lors de la première visite pour tenir compte des enjeux d’adaptation pour les établissements concernés, sachant que plusieurs établissements ont encore des stocks à écouler. »

Cela fait pourtant presque deux ans que les quelque 8400 restaurants et commerces alimentaires de Montréal sont au fait de leurs nouvelles obligations. Sur la quinzaine de restaurants de grandes chaînes alimentaires visités par La Presse à Montréal, tous sauf deux – un Tim Hortons et un A&W – auraient pu être mis à l’amende par les inspecteurs.

Devant notre récolte de polymères, Karel Ménard, directeur général du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets (FCQGED), fronce les sourcils. « Le règlement est en vigueur depuis plus de quatre mois, et il était connu à l’avance, dit-il. C’est peut-être normal d’avoir un peu de stock, mais on en voit encore beaucoup trop. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Karel Ménard, directeur général du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets

Derrière les comptoirs de succursales McDonald’s, Burger King, Second Cup, Jugo Juice, Bubble Tea Shop et Starbucks, plusieurs boissons froides ou glacées étaient encore servies dans des verres en plastique polypropylène (no 5), en contravention avec le règlement. Seuls un restaurant Tim Hortons et un comptoir Van Houtte servaient la totalité de leurs boissons dans des verres conformes.

Des efforts ont toutefois été faits par l’ensemble des chaînes énumérées ci-dessus : les ustensiles en bois ou en papier pressé et les pailles en carton respectaient la réglementation.

A contrario, des restaurants Subway, PFK, Sushi Shop, Cultures, Souvlaki Bar, Copper Branch et Thaï Express distribuaient par défaut au moins un ustensile de plastique lors de notre passage. Les entreprises de restauration peuvent fournir des fourchettes, cuillères et fourchettes en plastique no 5, mais uniquement sur demande et pour un repas à emporter.

Les ustensiles de plastique étaient eux-mêmes habillés de pellicule de plastique lors de notre visite dans un Sushi Shop, un Pok Pok et un PFK. Dans un Subway du centre-ville, des ustensiles de plastique côtoyaient des ustensiles compostables en bois. Tous étaient emballés individuellement dans un sachet de… plastique.

Honnêtement, je ne comprends pas les gens qui mettent ça sur le marché. C’est d’un ridicule absolu. C’est le genre d’emballage en plastique qui va se retrouver dans l’environnement parce que c’est petit, que ça vole au vent.

Karel Ménard, du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets

Une paille blanche en polypropylène nous a aussi été fournie dans un Subway. À Montréal, toutes les pailles en plastique sont prohibées, sans exception. Celle offerte par Second Cup, dans une formule plastique qualifiée de « biodégradable », contrevenait tout autant à la réglementation municipale.

Il faut faire attention aux « fausses bonnes idées » aux allures d’« écoblanchiment », avertit Karel Ménard, du FCQGED. Certains articles interdits que nous lui avons présentés, comme des ustensiles et des verres, affichent par exemple un pictogramme de recyclage. « Le ruban de Möbius [le fameux symbole des matériaux récupérables], ce n’est pas normé, explique-t-il. Je ne sais pas pourquoi ils en mettent un, parce que ces articles sont rejetés par les centres de tri, qui acceptent les contenants, les imprimés et les emballages, point. De la vaisselle, qui est souvent souillée, contaminée ou trop petite, ça ne va pas dans le bac de récupération. »

En matière de surconsommation, M. Ménard en a d’ailleurs plus contre les « articles à usage unique » que contre le « plastique », un matériau durable et peu coûteux s’il est utilisé à bon escient. « Si des ustensiles en bambou importés de Chine se retrouvent à la poubelle, tu fais juste déplacer le problème. »

Ce qui est interdit, peu importe le type de plastique :

  • Les verres
  • Les tasses
  • Les ustensiles pour consommation sur place
  • Les pailles
  • Les bâtonnets

Ce qui est autorisé, sauf pour le plastique polystyrène (no 6) ou « biodégradable » :

  • Les assiettes
  • Les contenants
  • Les couvercles
  • Les barquettes (le polystyrène peut être utilisé pour la viande et le poisson)
  • Les ustensiles pour commandes à emporter ou livraison, sur demande

La réglementation ne vise pas :

  • Les organismes à but non lucratif d’aide alimentaire
  • Les établissements qui offrent uniquement un service de livraison à domicile
  • Les aliments préemballés à l’extérieur de l’établissement
  • Les tasses, verres et contenants de carton enduits de plastique

Source : Ville de Montréal

« Une question de temps »

Selon Martin Vézina, vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’Association Restauration Québec, la réponse à nos observations est « simple » : « On permet aux exploitants d’écouler leur stock actuel, dit-il. Il y en a qui en ont beaucoup. D’autres sont liés avec un franchiseur qui n’a pas encore établi d’alternative. »

C’est une question de temps avant « que la transition se fasse et que l’industrie se conforme », assure-t-il. Est-ce possible que des restaurateurs aient pris soin de commander une grande quantité de couverts en plastique avant l’entrée en vigueur du règlement montréalais ? « Je ne pourrais pas vous dire ; ça dépend de chaque exploitant. »

Du côté du Groupe MTY, franchiseur qui possède notamment Sushi Shop, Bubble Tea Shop, Cultures, Thaï Express et Jugo Juice, le président-directeur général Éric Lefebvre indique que la Ville de Montréal accepte les « produits de plastiques réutilisables » utilisés par ses restaurants. « Il faut donc être vigilant avant de juger les produits seulement en fonction de la matière qui les compose », écrit-il dans un courriel à La Presse.

PHOTO DENIS GERMAIN, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Éric Lefebvre, PDG du Groupe MTY

Ces plastiques sont généralement constitués de polypropylène (no 5) et résistent à 100 cycles de lave-vaisselle, selon la définition du gouvernement du Canada, qui interdira la vente de certains articles de plastique à usage unique comme les ustensiles et les pailles à partir du 20 décembre prochain.

« Notre interprétation est que le règlement de la Ville est aligné avec le fédéral dans ce cas puisque la règle vise tout article qui est destiné à n’être utilisé qu’une seule fois ou pour une courte période de temps avant d’être jeté ou recyclé », plaide M. Lefebvre, qui recommande néanmoins à ses franchisés d’utiliser d’autres matières, « comme les ustensiles en bois ».

Est-ce que les inspecteurs de la Ville de Montréal font la même interprétation du règlement que MTY ? « La réglementation fédérale encadre les propriétés techniques de l’article, alors que la réglementation municipale encadre l’utilisation de l’article », explique la relationniste Camille Bégin.

En gros, il faut se demander si les ustensiles en plastique no 5 résistants au lave-vaisselle distribués par les restaurateurs atterrissent généralement dans une poubelle ou dans un bac de recyclage ou s’ils sont rapportés et réutilisés par les consommateurs.

La Presse a trouvé quelques pistes de réponse dans les cabarets qui reposaient sur les îlots de tri des restaurants et des aires de restauration.

Jusqu’à 4000 $

Les contrevenants au Règlement interdisant la distribution de certains articles à usage unique risquent une amende de 200 $ à 1000 $ pour une première infraction, et de 300 $ à 2000 $ pour une récidive. Les entreprises, elles, s’exposent à une pénalité de 400 $ à 2000 $ pour une faute initiale, puis de 500 $ à 4000 $ si elles ne se conforment pas.

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Biodiversité Réensauvager le monde

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Autrefois cultivées, les îles aux Castors et du Mitan, près de Berthier, sont en cours de réensauvagement. Déjà, la biodiversité du secteur est plus riche.

La perte du sauvage est telle sur Terre que la protection des écosystèmes encore intacts ne suffira pas à mettre un terme à l’effondrement de la biodiversité. Pour y arriver, il faudra aussi restaurer 30 % des milieux déjà dégradés d’ici 2030, ont convenu les 196 pays signataires du Cadre mondial de la biodiversité. Au Québec, les efforts de restauration progressent. Mais jusqu’à quel point peut-on réensauvager le monde ? Visite et discussion.

Publié à 1h43 Mis à jour à 5h00

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Simon Chabot
Simon Chabot La Presse

Le retour de la nature

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Du soya et du maïs poussaient ici jusqu’en 2020. Depuis, les îles aux Castors et du Mitan ont été réensauvagées.

Les deux bottes de caoutchouc bien plantées dans le sol boueux, le biologiste Alexandre Nicole cache mal sa fierté au milieu de la prairie qui fleurit dans l’île du Mitan, au cœur du Saint-Laurent, en amont du lac Saint-Pierre. « C’est un terrain de jeu incroyable », dit celui qui travaille ici à temps partiel depuis 10 ans.

Rien n’y paraît, sinon peut-être une grange ou deux dans le paysage, mais jusqu’en 2020, des agriculteurs faisaient encore pousser du maïs et du soya sur ces terres. Or, dans le cadre d’une opération pour rétablir la population de perchaudes du lac Saint-Pierre, victimes notamment des pesticides utilisés pour les grandes cultures, la Société de conservation, d’interprétation et de recherche de Berthier et ses îles (SCIRBI) s’est donné pour mission de réensauvager les îles du Mitan et aux Castors.

Depuis, 102 hectares de terres riches, inondées annuellement, sont devenus des prairies. Une renaturalisation dont les premiers effets ont semblé presque instantanés.

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Un jeune pygargue à tête blanche. Les oiseaux de proie sont plus nombreux dans les îles aux Castors et du Mitan depuis que les cultures ont cédé la place à des prairies.

Dès les étés suivant les semis de plantes variées, dont des graminées et du trèfle, la SCIRBI a observé sur place des nids de sarcelles à ailes bleues et de goglus des prés, une espèce menacée. Les populations d’insectes et de rongeurs ont aussi explosé. Des oiseaux de proie ont suivi. Ce jour-là, un jeune pygargue à tête blanche viendra d’ailleurs narguer en plein ciel un urubu à tête rouge.

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Le complexe industrialo-portuaire de Sorel-Tracy, sur la rive sud du Saint-Laurent, est tout près du site en cours de restauration par la SCIRBI.

« C’est encourageant, ça vaut la peine », se réjouit Alexandre Nicole, pour qui la plaine du Saint-Laurent est l’un « des plus beaux jardins du monde ». Un jardin riche en biodiversité malheureusement un peu trop exploité, ajoute-t-il, devant les cheminées des usines de Sorel-Tracy qui barrent l’horizon.

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Un jeune érable pousse dans les îles de Berthier. En 2050, une forêt devrait attirer ici des espèces d’oiseaux qui ne fréquentent plus les îles depuis leur déboisement à des fins de culture.

Pour accroître la biodiversité des îles, la SCIRBI a aussi planté plus de 30 000 arbres sur une vingtaine d’hectares. Le but : relier les rares lisières boisées pour attirer des espèces d’oiseaux forestiers, comme la grive des bois ou le cardinal à poitrine rose. Une démarche dont le succès se révélera à mesure que pousseront les arbres.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Des sentiers pédestres quadrillent les îles aux Castors et du Mitan. Ils restent accessibles malgré les travaux de restauration.

Quant à la perchaude, qui pond ses œufs le long des tiges d’herbes ou d’arbustes pendant la crue printanière, elle n’a pas encore montré de signes robustes de rétablissement.

« Il y a des choses qui sont plus rapides, d’autres qui prennent du temps », conclut le biologiste.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Le biologiste Alexandre Nicole dans une prairie des îles de Berthier

On ne peut pas rétablir tous les liens qui mettent des millénaires à se former dans un écosystème du jour au lendemain.

Alexandre Nicole, biologiste

Le temps d’agir

La biodiversité, soit « la diversité au sein des espèces, entre les espèces et des écosystèmes », est « essentielle au bien-être de l’homme et à la santé de la planète », lit-on dans le Cadre mondial de la biodiversité⁠1, adopté à Montréal en décembre dernier. L’humanité dépend de la biodiversité pour son alimentation, ses médicaments, son énergie, la pureté de l’air et de l’eau, rappelle le document. Or, constatent les 196 pays signataires du Cadre, la biodiversité « décline plus rapidement que jamais ».

« Si aucune mesure n’est prise, annonce le texte, on assistera à une nouvelle accélération du taux mondial d’extinction des espèces, qui est déjà au moins dix à cent fois plus élevé que la moyenne des dix derniers millions d’années. »

Le Cadre mondial de la biodiversité commande des actions urgentes. D’ici 2030, au moins 30 % des zones terrestres, aquatiques, côtières et marines du monde doivent être « effectivement conservées ». Mais il reste trop peu d’écosystèmes intacts. Pour renverser l’effondrement de la biodiversité, au moins 30 % des écosystèmes déjà dégradés doivent faire « l’objet d’une restauration effective », stipule le Cadre.

« Le rétablissement de la biodiversité ne peut pas reposer uniquement sur la conservation », confirme James Snider, vice-président du département science, savoir et innovation pour la branche canadienne du Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada). « Il est trop tard pour cela. »

Même si les deux gouvernements ont salué l’adoption du Cadre mondial de la biodiversité, ni Ottawa ni Québec n’ont pour l’instant précisé quels milieux seront restaurés d’ici 2030.

Par courriel, Environnement et Changement climatique Canada affirme procéder à des travaux pour les identifier, de même que les types d’actions qui seront menés. Le Ministère rappelle aussi l’engagement de restaurer 19 millions d’hectares dans le cadre du défi de Bonn, pris par le gouvernement fédéral pendant la COP15, à Montréal.

À l’occasion de cette même conférence, Québec avait annoncé la création de son Plan nature 2030, doté de 650 millions de dollars sur sept ans. « Ce nouvel outil stratégique [est] présentement en cours de rédaction », nous a fait savoir par écrit une porte-parole du ministère de l’Environnement. Des consultations sont encore prévues, notamment auprès des communautés autochtones et du milieu de la recherche.

Des connaissances en croissance

Bonne nouvelle : les connaissances en matière de restauration d’écosystèmes progressent rapidement.

« Quand j’ai commencé en 1991, personne ne savait comment réintroduire des mousses de sphaigne dans des tourbières, se souvient Line Rochefort, professeure du département de phytologie de l’Université Laval. Mes premières expériences au Lac-Saint-Jean ont été des échecs complets. Ce n’était pas drôle. »

Les tourbières occupent à peine 3 ou 4 % de la surface de la planète, surtout dans les régions boréales (le Canada abrite le tiers d’entre elles). Or, elles emmagasinent 600 gigatonnes de carbone, ce qui en fait l’écosystème terrestre le plus efficace à cet égard.

PHOTO YAN DOUBLET, ARCHIVES LE SOLEIL

Line Rochefort, professeure et chercheuse du département de phytologie de l’Université Laval

Avant, on disait tout le temps que le Brésil était responsable de la biodiversité du monde avec l’Amazonie. Mais moi, je pense qu’avec ses tourbières, le Canada est responsable de la séquestration du carbone pour la planète.

Line Rochefort, professeure du département de phytologie de l’Université Laval

Line Rochefort a appris de ses erreurs. Elle est même devenue une sommité mondiale de la restauration des tourbières. « Maintenant, dit-elle, deux ou trois ans après une intervention, une tourbière va recommencer à filtrer l’eau et à servir d’habitat pour une multitude d’espèces », dont des orchidées et des libellules.

Certes, une épaisse couche de tourbe mettra des milliers d’années à se former à nouveau, mais l’écosystème retrouve vite sa fonction de puits de carbone, « ce qui est notre but principal », précise Mme Rochefort.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Les tourbières emmagasinent 600 gigatonnes de carbone, ce qui en fait l’écosystème terrestre le plus efficace à cet égard.

Bien sûr, les capacités de restauration dépendent toujours du degré de dégradation. Pour les tourbières, par exemple, certains procédés d’extraction avec des eaux salines dans les mines à ciel ouvert sont fatals pour l’écosystème.

Or, même quand tout va bien, la nature réserve parfois de mauvaises surprises.

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Dans les îles de Berthier, le retour en masse des rongeurs et des cerfs a été mortel pour nombre de chênes, d’érables, de noyers et de micocouliers fraîchement plantés… qui ont servi de nourriture aux nouveaux insulaires. Quelques milliers de jeunes saules ont aussi été tués par une inondation majeure suivie d’une sécheresse en 2020.

Recréer la nature, c’est un gros contrat, reconnaît Alexandre Nicole.

1. Lisez le Cadre mondial de la biodiversité⁠

-86 %

La population de femelles reproductrices de perchaude du lac Saint-Pierre a chuté de 86 % entre 1986 et 2003, passant de 4,4 millions à 600 000. L’adoption d’un moratoire complet sur la pêche de cette espèce en 2012 n’a pas suffi à rétablir cette population. Le moratoire a été reconduit en 2017.

Source : Société de conservation, d’interprétation et de recherche de Berthier et ses îles

1 million

À l’heure actuelle, environ 1 million d’espèces d’animaux ou de plantes – soit une sur quatre – sont menacées d’extinction sur Terre.

Source : Cadre mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal

Juste assez sauvage

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Même si elles gardent des traces d’activités humaines, les îles aux Castors et du Mitan sont devenues, grâce à leur réensauvagement, des habitats pour de nouvelles espèces.

Si les biologistes savent mieux s’y prendre pour donner un coup de pouce à la nature grâce à des projets pilotes et de recherche en restauration, jusqu’ici, ces travaux ont été trop rares, croit Louise Gratton, présidente du C.A. de Nature Québec.

Beaucoup d’écosystèmes protégés ou restaurés restent trop isolés pour soutenir la biodiversité, précise la cofondatrice de Corridor appalachien, un organisme qui souhaite notamment augmenter la connectivité entre les milieux naturels de l’extrême sud du Québec.

« Dans certaines MRC de la Montérégie [comme celle de Roussillon, autour de Châteauguay, par exemple], à peine 8 % des milieux forestiers sont encore intacts. Il faudrait pourtant préserver entre 50 et 60 % de tous les milieux pour que les systèmes qui entretiennent la vie sur Terre se maintiennent », dit-elle en citant une étude publiée le printemps dernier dans Nature 1.

Nul doute que le réensauvagement du monde à plus grande échelle est crucial, donc, mais à quel point est-il possible ?

D’emblée, un constat s’impose : effacer complètement les traces de l’activité humaine est utopique. La pollution a déjà atteint l’Antarctique, un continent pourtant inhabité.

En 2020, par exemple, une carotte de glace prélevée là-bas contenait 96 particules de microplastiques provenant de 14 types de polymères⁠2.

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« On a vraiment modifié tous les écosystèmes, se désole Louise Gratton. Les polluants perpétuels [les perfluorés] et les microplastiques, on est pris avec, ils vont rester là. Et on commence à peine à mesurer leur impact. »

Viser un retour à l’état sauvage absolu ressemble donc à une fausse bonne idée. D’ailleurs, comment déterminer cet état pour un écosystème dans un monde qui change constamment ? Aussi, un milieu qui retrouverait ses conditions d’il y a 100 ans serait-il encore viable avec le réchauffement climatique ?

Mais rien de tout ça ne justifie l’inaction. Malgré la pollution, beaucoup d’écosystèmes continuent de fonctionner, souligne la consultante en environnement active depuis plus de 40 ans.

Vu l’état de la planète, la priorité devrait donc être de redonner leurs fonctions au plus grand nombre d’écosystèmes possible, juge Louise Gratton. De manière qu’ils créent à nouveau de la biodiversité en remplissant leurs rôles dans la filtration de l’eau, la pollinisation, la production de nourriture et de ressources, la régulation du climat, etc. Bref, qu’ils redeviennent juste assez sauvages.

Voilà un objectif beaucoup plus réaliste. « Je suis assez confiante, on peut y arriver, observe-t-elle. Bien sûr, il y a une part d’incertitude, mais il faut vivre avec. On n’a pas le loisir de ne pas essayer. »

Attention, toutefois, prévient Louise Gratton, de miser sur des succès de restauration pour s’autoriser la destruction de milieux à peu près intacts, sous prétexte qu’ils seront recréés ailleurs.

« Là, ça ne marche pas. Il faut un peu d’humilité par rapport à ce qu’on peut faire », lance-t-elle.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Louise Gratton, présidente du C.A. de Nature Québec et cofondatrice de Corridor appalachien

On n’a pas encore prouvé qu’on était capables de restaurer des milieux pour qu’ils aient vraiment toutes les fonctionnalités d’un écosystème.

Louise Gratton, présidente du C.A. de Nature Québec

Une tâche qui reste colossale

Mais alors, par où commencer ? Dans ses cibles, le Cadre Kunming-Montréal insiste sur la protection et la restauration de « zones d’une grande importance en matière de biodiversité ». Une forêt tempérée abrite davantage de vie qu’une région polaire, par exemple.

IMAGE FOURNIE PAR WWF-CANADA

Au Canada, sans surprise, c’est dans le sud du pays que se trouvent les milieux les plus riches. Les efforts de restauration devraient donc s’y concentrer, conclut une étude publiée le printemps dernier dans la revue Conservation Science and Practice 3.

Le biologiste James Snider, de la section canadienne du Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada), a cosigné l’étude. Malgré l’agriculture intensive très répandue dans les basses terres du Saint-Laurent, il y voit de belles occasions de restauration. Selon l’étude, c’est même une des régions du pays où les efforts de restauration donneraient les meilleurs résultats.

PHOTO FOURNIE PAR WWF-CANADA

James Snider, vice-président du département science, savoir et innovation pour la section canadienne du Fonds mondial pour la nature (WWF-Canada)

Avec des bandes riveraines où poussent arbres, arbustes et autres plantes pérennes, « les agriculteurs peuvent adopter des pratiques de gestion bénéfiques pour l’environnement, la qualité de l’eau, les oiseaux et d’autres espèces », dit-il. Certaines terres moins productives pourraient aussi être reboisées afin de créer de nouveaux habitats.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Même là où se pratique une agriculture intensive, des bandes riveraines élargies ont un impact positif sur la biodiversité. Elles servent notamment d’habitat pour des oiseaux insectivores dont la présence peut réduire le recours à certains pesticides.

Au Québec, la Commission de protection des terres agricoles mène d’ailleurs actuellement une réflexion sur l’avenir des terres arables. Louise Gratton espère que l’exercice mènera à la création de davantage d’espaces plus naturels dans les zones cultivées, « parce qu’il est démontré qu’ils procurent des bénéfices à l’agriculture ». En attirant plus d’oiseaux insectivores grâce à des bandes riveraines élargies, certains agriculteurs ont par exemple eu besoin de moins de produits chimiques pour protéger leurs récoltes.

Comme dans la plupart des endroits habités du monde, la restauration s’annonce néanmoins difficile dans le sud du Québec. « Il est important que nous soyons de plus en plus conscients de l’ampleur de la tâche qui nous attend. Si le Canada est sérieux quand il promet de restaurer 30 % des écosystèmes, on parle de millions d’hectares », prévient James Snider.

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, ARCHIVES LA PRESSE

La forêt ancienne de la Réserve écologique de la Forêt-la-Blanche, en Outaouais. Ce type d’écosystème, avec tous ses microhabitats et ses couches de végétation, prend des centaines d’années à s’établir.

Restaurer, faut-il le rappeler, c’est cher, ça prend beaucoup d’espace et, surtout, du temps. Une forêt ancienne avec tous ses microhabitats et ses couches de végétation, on peut la couper en quelques heures, mais « elle prend 300 ou 400 ans à revenir », rappelle Louise Gratton.

À condition qu’un incendie de forêt ne vienne pas tout anéantir avant que l’écosystème soit assez résilient pour se rétablir de lui-même…

Restaurer 30 % des écosystèmes dégradés d’ici 2030, c’est plus ou moins réalisable, admet Mme Gratton. Mais ce genre de cibles concrètes a le mérite de nous atteler à la tâche, ajoute celle qui, loin d’être découragée, se dit inspirée par le fait d’entreprendre des actions qui auront des effets dans un avenir souvent éloigné.

« Peu importe où s’en va la planète, l’idée, c’est d’avoir une vision qui va au-delà de notre propre vie, dit-elle. Ça, ça me donne espoir. »

1. Lisez « Sept des huit limites planétaires franchies »

2. Lisez « Des microplastiques découverts dans les glaces de l’Antarctique »

3. Consultez l’étude Prioritizing ecological restoration of converted lands in Canada by spatially integrating organic carbon storage and biodiversity benefits (en anglais)

50 millions d’hectares

Environ 50 millions d’hectares de terre, soit à peu près la moitié de la taille de l’Ontario, ont été convertis aux fins d’utilisation humaine (terres agricoles, routes, barrages, etc.) au Canada.

Source : WWF-Canada

3,9 millions d’hectares

Une étude publiée en avril dans Conservation Science and Practice a identifié jusqu’à 3,9 millions d’hectares de terres converties où la restauration potentielle serait optimale, tant pour la biodiversité que pour le climat. Ces terres se trouvent surtout dans le sud de l’Ontario, du Québec et du Manitoba.

Source : WWF-Canada

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Planète bleue, idées vertes Recycler des montagnes de frigos

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

L’usine PureSphera récupère toutes les parties des frigos hors d’usage.

Des montagnes de déchets s’accumulent chaque année au Québec après la traditionnelle période des grands déménagements. Dans nombre de foyers, c’est l’occasion d’acheter des électroménagers flambant neufs. Souvent des frigos.

Publié à 1h01 Mis à jour à 6h00

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Sara Champagne
Sara Champagne La Presse

(Bécancour) Contrairement à la croyance populaire, les fixatifs pour les cheveux des années 1980 ne sont pas les seuls grands coupables du trou dans la couche d’ozone. En catimini, les frigos jouent un rôle destructeur encore plus grand. Surtout les plus anciens. On peut les reconnaître facilement à leur couleur beige, jaune, verte, parfois avec du faux bois. Ils sont bourrés de chlorofluorocarbures (CFC).

Les CFC sont aujourd’hui bannis, mais les frigos contiennent encore des gaz fragilisant la couche d’ozone. Notamment du fréon, le nom commercial d’un gaz réfrigérant, et d’autres halocarbures : fluor, carbone, hydrogène, même du chlore. Près de Trois-Rivières, dans le parc industriel de l’ancienne centrale nucléaire de Gentilly, une usine unique en son genre en Amérique du Nord, PureSphera, a entrepris de recycler les réfrigérateurs.

Il faut absolument arrêter une fois pour toutes de broyer les réfrigérateurs chez des ferrailleurs. En écrasant la mousse isolante, les gaz nocifs s’échappent dans l’atmosphère.

Mathieu Filion, ingénieur et directeur de l’exploitation de PureSphera

La première chose qui frappe en arrivant à l’usine est la montagne de frigos, de congélateurs. Des centaines, empilés les uns sur les autres, de tous les modèles. Du plus récent, en inox, avec des tablettes numériques intégrées dans la porte, au plus vieux, jauni par les années. Il y a aussi quantités de frigos commerciaux – Häagen-Dazs, Nestlé, Red Bull, Heineken, pour ne nommer que ceux-là. Tous devront être soumis à cinq grandes étapes avant d’avoir une deuxième vie.

Débarquement

Quand un réfrigérateur arrive dans la zone de débarquement, il est déjà identifié par un code-barre pour en assurer la traçabilité. On s’affaire à noter le type de réfrigérant et l’isolation (mousse de polyuréthane ou laine minérale) qu’il contient. À cette étape, tiroirs, plastique, verre et ampoules sont enlevés. Un soin particulier est accordé au retrait des interrupteurs au mercure.

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M. Filion affirme que près de 100 000 frigos passeront par son usine cette année. Un nombre en constante augmentation depuis l’entrée en vigueur, en 2022, de la réglementation sur les écofrais liés aux électroménagers neufs. À l’image des consignes sur les bouteilles, les écofrais financent la collecte et le recyclage des électroménagers. Pour un réfrigérateur standard, un congélateur ou un cellier, le montant est de 30 $.

Le nombre d’appareils récupérés à son usine ne représente qu’un quart des frigos en fin de vie, selon lui. Le reste ira à la poubelle. Chez des ferrailleurs.

« Les écofrais, c’est le principe du pollueur-payeur, dit-il. En ce moment, par exemple, on parle beaucoup des pailles en plastique. Ce que les gens ne réalisent peut-être pas, c’est qu’un frigo représente à lui seul l’équivalent d’au moins 25 000 pailles. Sans compter les gaz. »

La deuxième étape à l’usine consiste à procéder à la vidange des halocarbures. À l’aide d’un bras hydraulique, les appareils sont positionnés un à un, afin de vider leur circuit de refroidissement et leur compresseur. Un système d’aspiration permet d’extraire le gaz et l’huile.

M. Filion montre du doigt une série de bonbonnes ressemblant à s’y méprendre à celles servant à alimenter nos grils extérieurs au propane. Sauf qu’elles sont gigantesques. Elles servent à stocker les gaz. À ce jour, PureSphera est la seule entreprise au pays à capter les halocarbures dans la mousse isolante et la première au Québec à vendre des crédits compensatoires sur le marché du carbone en réduisant les effets des plus vieux appareils.

Broyage

À la troisième étape, c’est le broyeur. Les carcasses des frigos sont broyées sous aspiration pour prévenir des fuites toxiques. Des générateurs d’azote remplaçant l’oxygène servent à éviter les explosions. Un savant système de fraction sépare l’acier du fer, de l’aluminium ou du cuivre. La mousse sera ensuite transportée vers un genre de silo pour en faire une poudre très fine.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

L’usine PureSphera récupère toutes les parties d’un frigo qui est hors d’usage.

Métaux, absorbants industriels, résine ; la matière ainsi récupérée est entièrement revalorisée, affirme M. Filion. Les gaz excédentaires sont détruits de façon sûre.

« Je dirais qu’on récupère 97,8 % des frigos. » Les restes sont des résidus alimentaires, des cartons ou encore des cheveux entremêlés dans le grillage arrière ou sous les appareils.

Chez PureSphera, on pousse plus loin la récupération en commençant à offrir aux particuliers des pièces pour réparer les frigos. Les tiroirs, bacs, tablettes, paniers et accessoires de portes en bon état sont offerts à bas prix aux gens qui veulent « réparer au lieu de jeter ». M. Filion estime qu’il reste beaucoup de chemin à parcourir pour instaurer une mentalité de « citoyens réparateurs au Québec ». À ce chapitre, dit-il, les Européens sont beaucoup plus en avance que nous.

En savoir plus

  • 76,5 kg
    C’est la quantité de plastiques, métaux et verre contenue en moyenne dans un réfrigérateur.

Source : PureSphera

Au Téléjournal 22h

Changements climatiques : un été de météo extrême

L’été 2023 est celui de la météo extrême, autant au Canada qu’ailleurs dans le monde. Les conséquences des changements climatiques, dont on parle depuis des années, se font désormais sentir.

Retour sur les événements météo extrêmes avec Jean-Philippe Hughes

La crise climatique a fait flamber les forêts du Québec cet été

Alexandre Shields
22 août 2023
Environnement

Le réchauffement climatique provoqué par l’activité humaine a créé les conditions idéales pour déclencher et alimenter les feux de forêt qui ont frappé le Québec cette année, conclut une nouvelle analyse publiée ce mardi par le réseau scientifique Attribution du climat mondial (WWA). Notre incapacité à limiter la hausse des températures risque d’ailleurs de provoquer une multiplication d’incendies majeurs dans les années à venir.

« Nous n’avions jamais vu ça : des températures qui ont battu des records mois après mois, depuis le mois de mai, de très faibles taux d’humidité relative, des précipitations anormalement basses et une fonte très rapide de la neige, surtout dans la forêt boréale. Toutes les conditions étaient réunies pour des feux historiques », résume Philippe Gachon, professeur au Département de géographie de l’UQAM et coauteur de cette étude signée par 17 experts provenant du Canada, du Royaume-Uni et des Pays-Bas.

Cette tempête parfaite porte d’ailleurs la signature de la crise climatique, soulèvent les chercheurs. « Le réchauffement augmente considérablement l’inflammabilité du combustible disponible pour les incendies de forêt, ce qui signifie qu’une simple étincelle, quelle qu’en soit la source, peut rapidement se transformer en un véritable brasier », souligne Yan Boulanger, coauteur de l’analyse et chercheur à Ressources naturelles Canada.

L’augmentation continue des températures a déjà multiplié par deux le risque de créer les conditions météorologiques propices à l’émergence des feux de forêt extrêmes survenus au Québec entre mai et juillet, concluent les experts dans leur étude publiée en anglais et intitulée Climate change more than doubled the likelihood of extreme fire weather conditions in Eastern Canada.

Qui plus est, non seulement ces conditions chaudes et sèches sont plus « intenses », mais elles ont sept fois plus de risques de demeurer élevées tout au long de la saison des incendies, ajoute le document. Celui-ci découle d’une analyse de l’indice forêt-météo, une mesure qui combine la température, la vitesse du vent, l’humidité et les précipitations pour estimer le risque de feux de forêt.

Le pire est à venir

La saison 2023 des feux de forêt au Canada a été la plus dévastatrice jamais enregistrée dans le pays, avec plus de 15 millions d’hectares déjà brûlés, soit près du double du record de 1989, qui était de 7,6 millions d’hectares. Au Québec, en date du 22 août, 5,3 millions d’hectares de territoire ont été frappés par un total de 660 incendies.

En plus des décès et des dizaines de milliers d’évacués, ces feux ont provoqué une sérieuse dégradation de la qualité de l’air dans plusieurs régions du Canada et des États-Unis. Ils ont aussi libéré plus d’un milliard de tonnes de CO2, selon une évaluation de Ressources naturelles Canada. C’est plus que le total annuel des émissions nationales (670 millions de tonnes en 2021).

C’est sans compter les impacts économiques importants pour plusieurs régions, notamment celles qui dépendent de l’industrie forestière.

Or, le pire est à venir, préviennent les chercheurs. « Dans les prochaines années, les températures vont continuer d’augmenter et les conditions propices aux incendies vont devenir encore plus sévères et plus fréquentes », fait valoir Yan Boulanger. Résultat : les années de feux dévastateurs, avec leurs impacts humains, environnementaux et économiques, risquent de survenir de plus en plus souvent.

Les superficies brûlées annuellement pourraient quant à elles être multipliées par deux, voire par quatre au cours des prochaines décennies, selon M. Boulanger. Une analyse fédérale indique que ce genre de scénario risque de se produire même en cas de réduction « rapide » des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

L’Abitibi-Témiscamingue, la Baie-James et le nord du Saguenay–Lac-Saint-Jean seront les régions les plus touchées. Mais la Côte-Nord, la Mauricie, la Gaspésie et même les Laurentides ne seront pas épargnées.

Communautés vulnérables

Philippe Gachon redoute donc une baisse de la capacité des forêts à se régénérer, puisque certaines espèces peuvent prendre quelques dizaines d’années avant de pouvoir produire les graines nécessaires à la reproduction. Ces mêmes forêts, en brûlant, vont perdre leur capacité de séquestrer du carbone, en plus de miner, voire d’annuler les efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Les communautés qui vivent au plus près des zones vulnérables aux incendies, notamment plusieurs Premières Nations, risquent aussi d’en subir les impacts. Pour le président et chef de la direction de la Croix-Rouge canadienne, Conrad Sauvé, il est donc urgent de se préparer. « La saison des incendies actuelle a été la plus destructrice jamais enregistrée. Étant donné que nous savons que le risque de feux de forêt augmentera dans les années à venir, la Croix-Rouge continuera à mettre l’accent sur le renforcement des capacités et de la résilience des communautés au Canada. »

Les auteurs de l’analyse publiée ce mardi insistent en outre sur l’urgence de s’attaquer à la crise climatique avec beaucoup d’ambition. Le réchauffement planétaire avoisine aujourd’hui 1,1 °C, par rapport à l’ère préindustrielle. Or, les engagements pris par les pays signataires de l’Accord de Paris nous conduisent actuellement vers un dérèglement du climat qui risque d’atteindre 2,5 °C au cours des prochaines décennies. Dans le cas du Québec et du Canada, le rythme de réchauffement est deux à trois fois plus rapide, selon les régions.

« Tant que nous ne cesserons pas de brûler des combustibles fossiles, le nombre d’incendies de forêt continuera d’augmenter, brûlant des zones plus vastes pendant des périodes plus longues », conclut Friederike Otto, professeure titulaire à l’Institut de recherche Grantham sur le changement climatique et l’environnement, au Imperial College de Londres, et coautrice de l’étude.

Des centaines de millions de litres d’eaux usées déversées dans le fleuve à Québec

Le fleuve Saint-Laurent vu de l'île d'Orléans.

Le fleuve Saint-Laurent vu de l’île d’Orléans (Photo d’archives)

Photo : Radio-Canada / David Rémillard

Publié hier à 17 h 54 HAE

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Les fortes pluies de l’été 2023 ont forcé la Ville de Québec à déverser des centaines de millions de litres d’eaux d’égout dans le fleuve Saint-Laurent. Un rejet massif qui préoccupe des experts et des défenseurs des plans d’eau.

À Québec, comme dans d’autres villes, les égouts acheminent les eaux usées vers les stations d’épuration, où les liquides souillés subissent un processus de décontamination.

Lorsque le volume d’eau qui entre dans le réseau est trop élevé – dans les périodes de fortes pluies, par exemple –, les autorités n’ont d’autre choix que de déverser les eaux sales dans l’environnement.

C’est ce qui s’est produit du 9 au 16 juillet, selon une demande d’accès à l’information rendue publique par la Ville de Québec. Le service de traitement des eaux de la Municipalité a dû rejeter 759 595 m3 d’eaux usées de son système d’égouts dans le fleuve, l’équivalent de 300 piscines de dimension olympique.

Ces chiffres sont fort probablement sous-estimés, car la Ville ne dispose pas de capteurs à tous ses emplacements de surverse.

Lors de la même période, plus d’un milliard de litres d’eaux partiellement décontaminées ont également dû être rejetés dans l’environnement.

Ces eaux partiellement traitées sont mélangées à l’effluent final des stations d’épuration et sont rejetées au diffuseur à environ 50 mètres de profondeur au centre du fleuve Saint-Laurent, précise Jean-Pascal Lavoie, porte-parole de la Ville de Québec.

Des festivaliers sous la pluie à un spectacle de musique.

La pluie et les orages ont forcé l’annulation de plusieurs spectacles lors du Festival d’été de Québec en juillet 2023. (Photo d’archives)

Photo : Radio-Canada / Daniel Coulombe

L’administration municipale précise que des pluies exceptionnelles l’ont contrainte à effectuer ces rejets. La Ville de Québec a fracassé son record de précipitations pour le mois de juillet. Durant cette période, la Capitale-Nationale a reçu plus de 267 millimètres de pluie, alors que le record précédent était de 256,4 millimètres en juillet 1992 , explique M. Lavoie.

À lire :

« C’est majeur »

Les autorités municipales auraient difficilement pu éviter ce rejet, selon André Bélanger, de la fondation Rivières.

Il estime que du 9 au 16 juillet, la Ville a dû rejeter 37 % de l’eau qui s’est retrouvée dans son réseau pour protéger ses installations.

Le fleuve Saint-Laurent au printemps.

Les eaux usées se retrouvent dans les eaux du fleuve Saint-Laurent. (Photo d’archives)

Photo : Radio-Canada / Jean-Pierre Robin

Mais de telles quantités d’eaux souillées, d’eaux de toilette et d’évier rejetées dans l’environnement, c’est majeur, selon lui.

Ce rejet massif préoccupe également Satinder Kaur Brar, experte en biotechnologie environnementale et en décontamination à l’Université York de Toronto.

Il y aura des effets néfastes sur le fleuve dans les années à venir.

Une citation de Satinder Kaur Brar, experte en biotechnologie environnementale et en décontamination

Les eaux souillées contiennent des contaminants chimiques : des pesticides, des produits pharmaceutiques et des contaminants comme le plastique.

Elles renferment également des pathogènes : des coliformes et d’autres bactéries nocives.

Ces contaminants peuvent être emprisonnés au fond du fleuve et se retrouver dans la chaîne alimentaire, être absorbés par les poissons, les micro-organismes, les animaux et les humains.

Bord du fleuve Saint-Laurent, depuis Lévis.

Le rejet de polluants dans l’eau peut avoir un impact nocif sur l’environnement. (Photo d’archives)

Photo : Radio-Canada / Kassandra Nadeau-Lamarche

À long terme, une trop grande quantité de polluants peut aussi limiter l’accès au fleuve et le nombre de journées de baignade pour les humains.

André Bélanger nuance toutefois : avec les pluies du mois de juillet, y’a tellement d’eau qui tombe que y’a une forme de diminution [des contaminants] dans l’eau.

Néanmoins, il croit que la Ville de Québec devrait moderniser ses installations afin d’être mieux préparée à encaisser ce type de précipitations.

Une opinion que partage Satinder Kaur Brar. Elle ajoute que les changements climatiques risquent d’accentuer le nombre d’intempéries et de désastres météorologiques et invite les municipalités québécoises à se doter de plans d’action et d’installations plus solides.

Modernisation à venir

De son côté, la Ville de Québec précise qu’elle travaille à moderniser ses installations de traitement des eaux.

Présentement, 95 % des eaux qui se rendent dans les usines d’épuration municipales subissent un traitement complet. La Ville aimerait que ce pourcentage grimpe à 99 %.

En 2022, 4 % des eaux déversées dans des cours d’eau du pays n’avaient pas été traitées au préalable.

Avec la collaboration de Marie-Claire Giffard, de Colin Côté-Paulette et d’Érik Chouinard

Donner à l’eau la place qui lui revient en milieu urbain

Des gens traversent le Cheonggyecheon grâce à un passage constitué de grosses pierres, à Séoul.

Des gens traversent la rivière Cheonggyecheon grâce à un passage constitué de grosses pierres, à Séoul.

Photo : afp via getty images / ANTHONY WALLACE

Publié à 4 h 00 HAE

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Qu’arrive-t-il lorsqu’on permet à l’eau d’occuper l’espace en ville? Inspirées par des projets d’aménagement urbain exceptionnels, de la France à la Corée du Sud, des initiatives visant à libérer des cours d’eau enfouis à Montréal ont voulu provoquer une discussion sur l’importance de développer la résilience des quartiers face aux aléas du climat.

Lorsqu’on regarde nos territoires, on réalise que nos rivières ont été non seulement canalisées, mais elles sont carrément sous les villes : on les a cachées, lance Isabelle Thomas, professeure à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal.

Si la population québécoise a historiquement cherché la proximité de l’eau en installant ses quartiers aux abords du fleuve et de ses affluents, elle a bâti les fondations des grandes villes en enfouissant les rivières et ruisseaux sous la pierre. Pour remédier aux problèmes de salubrité et faire place aux nouveaux développements, de nombreux cours d’eau ont ainsi été canalisés ou simplement ensevelis.

C’était bien avant que les événements météorologiques se fassent plus fréquents et plus imprévisibles, sous l’effet du réchauffement de la planète. Et que les villes se dotent d’objectifs pour protéger les milieux naturels et augmenter leur canopée.

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Aux prises avec des problèmes d’inondations, de refoulements, de qualité de l’eau et de vagues de chaleur, les citoyens manquent désormais d’espaces où le béton fait place à la verdure.

On s’est demandé : comment faire pour ramener la nature en ville et permettre du même coup un accès collectif à l’eau? explique Mme Thomas, spécialiste du développement durable et de la vulnérabilité urbaine.

De ces réflexions est né le projet Bleue Montréal, auquel Mme Thomas s’est jointe après sa création en 2017. Pilotée par WWF-Canada, l’initiative avait pour but d’exhumer des cours d’eau enfouis pour en faire profiter les citoyens et, surtout, permettre une meilleure gestion des eaux de ruissellement.

De l’anglais daylighting, le concept vise à libérer ces ruisseaux en les remontant à la surface, à la lumière du jour.

La pandémie nous a fait réaliser à quel point on a besoin de la nature en ville; à quel point on a besoin de ce bleu.

Une citation de Isabelle Thomas, professeure à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal

Près de 330 km de ruisseaux dorment sous les pieds des Montréalais sans qu’ils s’en doutent, selon les travaux de la professeure Valérie Mahaut, qui a cartographié en 2016 les bassins versants et les rivières anciennes de la métropole.

Conscients qu’il serait irréaliste de ramener à la surface la totalité de ces cours d’eau – tantôt enfouis, tantôt intégrés au réseau d’égouts –, les instigateurs du projet Bleue Montréal ont plutôt choisi trois arrondissements et proposé des projets pour libérer certains ruisseaux.

Une rivière entourée de murets de pierres traverse un quartier résidentiel.

À Darmouth, en Nouvelle-Écosse, la rivière Sawmill, autrefois canalisée sous terre, a été remise en liberté dans la ville.

Photo : CBC / Jill English

Loin de vouloir exproprier des citoyens ou d’éventrer des artères essentielles à la circulation en ville, les membres du projet cherchaient avant tout à identifier des arrondissements où des projets de redéveloppement ou d’aménagement du territoire s’amorçaient.

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On a jouxté ensemble les anciens cours d’eau et l’actuel territoire du parc Jarry, par exemple, pour réaliser qu’un cours d’eau passait dans Villeray; le ruisseau Provost, donne en exemple Sophie Paradis, ancienne directrice et cheffe de la conservation pour WWF-Canada, aux commandes du projet.

Ni nous ni la Ville ne savions s’il était canalisé. Mais chose certaine, il y avait des problèmes de rétention d’eau en plein centre du parc, dit-elle.

À l’aide d’études de faisabilité s’attardant à l’hydrologie et à la géomorphologie des lieux, à la qualité de l’eau, à la faune et la flore, à la présence de sols contaminés ou encore à l’acceptabilité sociale des résidents du secteur, WWF-Canada a présenté ses conclusions pour trois sites montréalais, à l’aube de la pandémie.

En plus du parc Jarry, l’organisation ciblait le parc des Faubourgs, dans Ville-Marie, et le secteur de l’échangeur Turcot, où se trouvaient autrefois le lac à la Loutre et la rivière Saint-Pierre.

Il nous fallait montrer que d’avoir ces rivières, c’est une opportunité exceptionnelle, résume Isabelle Thomas.

Espaces de fraîcheur, espaces régulateurs

Les fortes pluies qui ont déferlé sur Montréal et ailleurs au Québec cet été ont provoqué des inondations à répétition. Surchargé en raison des importantes précipitations, le réseau d’égout est alors plus susceptible de déborder et de rejeter des eaux usées dans les milieux naturels.

Aménager des cours d’eau – en libérant des rivières anciennes ou en créant de nouvelles rivières urbaines – permet d’alléger la pression exercée par ces eaux pluviales. Contrairement aux surfaces bétonnées, les espaces végétalisés donnent un coup de pouce aux villes en absorbant les eaux et en servant, du même coup, de filtre naturel.

Ce faisant, on développe aussi des espaces de fraîcheur, note Mme Thomas.

Séoul avant et après la restauration du Cheonggyecheon.

Au cœur de Séoul, la Cheonggyecheon, un cours d’eau enseveli sous le béton d’une autoroute pendant des décennies, coule désormais entre les immeubles sur près de 6 kilomètres.

Photo : Getty Images / AFP/CHOI JAE-KU/JUNG YEON-JE

Des projets d’envergure, comme celui de la rivière Cheonggyecheon, au cœur de Séoul, ont démontré les bénéfices d’aménager des ruisseaux urbains. Souvent citée en exemple, cette initiative a permis de ramener à la surface un cours d’eau remplacé dans les années 1970 par une large autoroute à six voies.

Depuis 2005, un ruisseau coule sur 5,8 kilomètres au centre de la capitale coréenne, îlot de verdure sillonnant entre les tours de la ville. Pour le traverser, les piétons empruntent des ponts ou des passages aménagés à l’aide de grosses pierres.

Dans le corridor créé par la Cheonggyecheon, la température moyenne a chuté de 3 à 4 degrés, en comparaison de la route parallèle qui la longe. La qualité de l’air s’est quant à elle améliorée à proximité du cours d’eau.

Des gens marchent ou sont assis aux abords du Cheonggyecheon, en mai 2023.

Des gens profitent d’un peu de fraîcheur aux abords du Cheonggyecheon, à Séoul.

Photo : afp via getty images / ANTHONY WALLACE

La renaturalisation de cet espace autrefois emprunté par quelque 160 000 véhicules par jour a en outre contribué à la hausse de la fréquentation des oiseaux, des insectes et des poissons.

Des projets coûteux qui rapportent

En plus d’avoir une valeur environnementale, ce type de projets – qui ont inspiré d’autres initiatives, de l’État de New York à Grenoble, en France – a une valeur économique, rappelle Mme Thomas.

Il y a un bénéfice économique à protéger les milieux humides et à ramener une rivière à la surface.

Une citation de Isabelle Thomas, professeure à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal

Nécessaires à la réalisation de ces projets, les analyses coûts-bénéfices permettent de démontrer les avantages d’aménager un cours d’eau en ville, autant pour éviter les dommages aux bâtiments que pour mesurer l’impact sur la santé publique.

Une démarche incontournable pour prouver la viabilité de ces initiatives qui peuvent sembler nouvelles et inhabituelles, convient de son côté Sophie Paradis, qui est aujourd’hui conseillère principale en planification et gestion de l’environnement et du développement durable à la Ville de Pointe-Claire.

Une rivière, entourée de rochers et d'arbustes, coule au centre de la ville.

À Yonkers, dans l’État de New York, un nouveau tracé a permis à la rivière Saw Mill de reprendre sa place à la surface en pleine ville.

Photo : Jim Henderson

Au-delà de la marginalité de la proposition, c’est le coût des travaux qui risque davantage de refroidir les autorités. Ce sont des projets coûteux, c’est pourquoi il faut bien comprendre quelle est l’opportunité de remettre en liberté une rivière, insiste Mme Thomas.

Dans ses études de faisabilité, WWF-Canada n’a pas déterminé les sommes à débourser pour réaliser la remise à l’air libre des ruisseaux ciblés à Montréal. Aucun des trois arrondissements n’a annoncé son intention de libérer les ruisseaux enfouis. Des solutions fondées sur la nature et des aménagements permettant une meilleure gestion des eaux pluviales se sont toutefois taillé une place dans les plans directeurs.

Loin d’y voir un échec, Sophie Paradis estime qu’il faut plutôt réaliser le chemin parcouru. Le but, après tout, était de nourrir la discussion, pour aller plus loin, dit-elle.

Apprivoiser la rivière

À Romorantin-Lanthenay, commune française à quelque 200 km au sud de Paris, les autorités ont cherché à anticiper les risques associés à l’eau. Le quartier Matra – qui incarne, selon Isabelle Thomas, la mise en œuvre de la résilience – s’est développé en adéquation avec les habitudes de la rivière à proximité.

L’architecte-urbaniste Éric Daniel-Lacombe a ainsi conçu un quartier résilient aux inondations sur une friche industrielle où se trouvait une ancienne usine. Situé en zone inondable, ce secteur était à risque d’être surpris par les crues de la Sauldre.

Nourri par les solutions innovantes mises en place aux Pays-Bas, à Venise et à La Nouvelle-Orléans, l’architecte a rejeté l’idée d’aménager une digue – quand elle lâche, ce qu’il y a derrière n’a pas pensé le risque, dit-il – au profit de structures qui permettent d’absorber l’eau ou de la surplomber.

Des régulations artificielles, nous passons aux régulations naturelles, explique M. Daniel-Lacombe. À Matra, 20 % du quartier a été réservé au développement; 80 % à la rivière et son milieu.

Un grand jardin et un bassin de rétention permettent à la rivière qui sort de son lit de se promener et de s’y calmer, illustre-t-il. Des creux et des bosses dans le dénivelé du sol régulent la rivière, qui tombe dans des trous et se fatigue avant de se retirer d’elle-même. Des clapets de régulation permettent en outre d’éviter de surcharger le réseau d’aqueduc.

J’ai imaginé un quartier où l’eau peut retourner naturellement à la rivière, résume l’architecte.

Si la nature vous est étrangère, vous serez toujours surpris.

Une citation de Éric Daniel-Lacombe, architecte-urbaniste

En 2016, le quartier a eu l’occasion de tester la résilience de ses installations. Une crue lente de la Sauldre a culminé à 1,45 mètre, établissant un record. Les habitants de Matra, eux, n’ont pas vu d’eau infiltrer leurs maisons.

La rue est inondée, mais les trottoirs demeurent secs. Des piétons peuvent donc s'y déplacer.

Le quartier Matra a pu tester si son aménagement était bel et bien résilient aux inondations lors de la crue de la Sauldre, en juin 2016.

Photo : DR / Fournie par Éric Daniel-Lacombe

Conçues sur différents niveaux pour permettre aux résidents de se préparer en cas d’inondations, les infrastructures n’ont eu aucun dommage. Sur les trottoirs, restés secs, les passants ont pu se déplacer et observer l’eau repartir tranquillement vers la rivière.

Sur l’autre rive, le quartier historique est resté trois semaines sous l’eau, fait remarquer l’architecte.

Plus l’on comprend le territoire et les rivières et ruisseaux qui le traversent, plus les quartiers que l’on conçoit seront en mesure d’affronter les aléas du climat, selon Éric Daniel-Lacombe.

Il y a tellement de rivières qui sont ensevelies, masquées, traitées comme des égouts, soulève-t-il. Il nous faut pourtant prendre conscience de l’eau.

Du même avis, Isabelle Thomas estime que ce type d’aménagement peut être reproduit, à des échelles différentes, dans une ville comme Montréal. Ce changement de paradigme, dit-elle, est nécessaire autant à l’international qu’au Québec.

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Environnement

Pour des toits plus blancs

PHOTO FOURNIE PAR TOITS VERTS ENR.

L’efficacité énergétique des toits blancs dans les régions nordiques fait débat.

Plusieurs arrondissements montréalais privilégient les toits blancs pour diminuer les îlots de chaleur. Des experts estiment qu’ils peuvent jouer un rôle important dans la lutte contre les changements climatiques. Des ingénieurs américains viennent d’inventer une peinture plus blanche que blanche.

Publié à 1h37 Mis à jour à 5h00

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Mathieu Perreault
Mathieu Perreault La Presse

Ce qu’il faut savoir

Les toits blancs reflètent la lumière du soleil et donc gardent les édifices plus frais.

Les peintures les plus blanches réfléchissent de 80 % à 90 % de la lumière du soleil.

Des ingénieurs américains ont réussi à produire de la peinture réfléchissant 98 % de la lumière du soleil.

« Les peintures blanches actuelles, qui sont utilisées pour les toits blancs, réfléchissent de 80 % à 90 % des rayons du soleil », explique Aljwirah Abdulrahman, un ingénieur des matériaux de l’Université Purdue, en Indiana, qui fait partie de l’équipe honorée l’hiver dernier par l’exposition scientifique du site Gizmodo. « Notre peinture dépasse 98 %. »

PHOTO TIRÉE DU SITE DE L’UNIVERSITÉ PURDUE

Xiulin Ruan, ingénieur mécanique de Purdue, dirige l’équipe ayant mis au point la peinture ultra-blanche.

La peinture blanche de Purdue, dont les performances ont été dévoilées en 2021 dans la revue Applied Materials & Interfaces, devrait aussi être plus durable. « Les toits blancs perdent leur performance avec les années parce qu’ils deviennent gris, dit M. Abdulrahman. C’est en grande partie à cause des dommages causés par les rayons ultraviolets. Notre peinture absorbe beaucoup moins les UV. Alors elle est plus durable. Nous allons publier une étude à ce sujet prochainement. »

L’équipe de l’Indiana a travaillé pendant sept ans pour trouver la bonne recette, à base d’un métal, le baryum. Les peintures blanches actuelles sont à base de titane. « Nous travaillons à la commercialisation de notre peinture avec des partenaires, dit M. Abdulrahman. Selon ce que je comprends, l’utilisation du baryum ne devrait pas entraîner des coûts beaucoup plus élevés par rapport au titane. »

Une peinture moins visqueuse, qui pourrait être utilisée pour des véhicules, est aussi dans le collimateur des chercheurs de Purdue.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE RESEARCHGATE D’ABDULRAHMAN ALJWIRAH

Abdulrahman Aljwirah, ingénieur des matériaux de l’Université Purdue

Ça pourrait diminuer les besoins de climatisation des voitures, des avions, des trains.

Abdulrahman Aljwirah, ingénieur des matériaux de l’Université Purdue

La quête d’une peinture plus blanche date des années 1970. « Au début, les chercheurs essayaient des cristaux photoniques, des structures très fines qui coûtent très cher, dit M. Abdulrahman. Ensuite, on a essayé des structures à plusieurs couches, qui étaient compliquées à produire et ne pouvaient pas être rendues assez minces pour des véhicules. En plus, on ne pouvait pas repeindre un toit blanc, il fallait le remplacer au complet. »

Hiver

Les toits blancs sont assurément dans le vent. En 2014, une étude de l’Université Berkeley a estimé que si tous les toits du monde étaient blancs, cela compenserait les émissions de 15 millions de voitures par année, soit 1 % du total actuel.

Mais un doute subsiste sur l’utilisation des toits blancs dans les climats nordiques, parce que l’hiver, les toits foncés absorbent davantage la lumière du soleil, ce qui diminue les coûts de chauffage.

Au Québec, plusieurs rapports gouvernementaux sur le sujet citent une étude américaine de 2005 du Center for Environmental Innovation in Roofing, un groupe de recherche industriel de Washington, qui proposait une carte des avantages et inconvénients des toits blancs en été et en hiver.

En savoir plus

  • 1000
    Nombre de toitures blanches dans Rosemont–La Petite-Patrie en 2015

SOURCE : Fondation du Grand Montréal

4200
Nombre de toitures blanches dans Rosemont–La Petite-Patrie en 2020

SOURCE : arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie

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Planète bleue, idées vertes Microforêt : entre vertu et lutte contre les îlots de chaleur

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Le phénomène de « microforêt » urbaine au Québec prend de l’ampleur. Ici, le parc du Pélican, dans Rosemont.

Dans le milieu horticole, on n’hésite pas à parler d’un « buzz vert ». Le phénomène de « microforêt » ne cesse de prendre de l’ampleur sur la planète. Au Québec, plusieurs villes ont multiplié les initiatives, cet été, en plantant des arbres et arbustes sur de petites superficies.

Publié à 1h37 Mis à jour à 6h00

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Sara Champagne
Sara Champagne La Presse

Mais est-ce que ces microforêts urbaines ont vraiment un impact environnemental ? Ou servent-elles juste à se donner bonne conscience ?

Dans le quartier Saint-Roch, à Québec, une cour bétonnée de 500 m⁠2 est en pleine cure verte. Les dalles de béton sont enlevées, le sol est décontaminé, 90 arbres et arbustes sont plantés. En ce moment, ça ne ressemble pas à grand-chose. Mais ça pousse. L’idée est de transformer la cour arrière de l’Université TÉLUQ en « Jardin du Savoir », explique l’établissement.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Arbres et arbustes fruitiers pour attirer oiseaux et insectes polinisateurs au parc du Pélican, dans Rosemont

Au bout du fil, l’un des maîtres d’œuvre du projet, Francis Lepage, explique que l’intention est de lutter contre les îlots de chaleur et d’aménager quelque chose de vivant pour les résidants, travailleurs et passants. Afin d’y parvenir, l’université a reçu une subvention de 18 000 $ de la Ville de Québec.

Juste en face, il y a un très beau parc. On a un groupe de travail en développement durable à l’université. On s’est dit que ça allait ajouter au quartier historiquement ouvrier, le rendre plus attrayant.

Francis Lepage, maître d’œuvre du « Jardin du Savoir »

À l’opposé du bonzaï solitaire, la microforêt consiste à planter un grand nombre d’espèces indigènes, très serrées les unes contre les autres, dans un petit espace de 100 à 3000 m⁠2. Le tout avec l’objectif de ne pas avoir à l’entretenir ou à l’arroser. On appelle ça la « méthode Miyawaki », du nom d’un botaniste japonais dont le concept a fait le tour du monde.

À Montréal, l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie en a été l’instigateur, avec quatre miniforêts à son actif. Ce qui était auparavant un terrain gazonné a changé d’allure dans une partie du parc du Pélican, adossée au boulevard Saint-Joseph Est.

Audrey Boulanger-Messier est ingénieure forestière. À cet endroit d’à peine 200 mètres carrés, elle explique que 600 arbres de 30 à 60 centimètres de haut, dont des érables, des chênes, et une trentaine d’arbustes fruitiers ont été plantés il y a deux ans. Le tout par des bénévoles, donc à faible coût.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Audrey Boulanger-Messier, ingénieure forestière

« On a devant nous un petit air climatisé urbain. Regardez-moi ça, aujourd’hui, lance-t-elle avec fierté, en pointant la cime des arbres. Certains doivent avoir atteint au moins quatre mètres de haut. Je suis étonnée de constater la rapidité avec laquelle la microforêt a poussé. On voit que le concept fonctionne, les arbres rivalisent entre eux pour avoir de la lumière. »

Pas une panacée

Alain Paquette est professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Il arrive à poser un regard critique sur le phénomène, même si sa chaire de recherche est largement financée par la Ville de Montréal. L’expert résume sa pensée en expliquant qu’on ne peut pas être contre la vertu, que ce n’est jamais mauvais de planter un arbre, mais qu’une microforêt est loin d’être la panacée.

Selon lui, il ne faut pas les planter partout. À Montréal, par exemple, il explique que les quartiers plus industriels devraient être favorisés. Notamment certains secteurs de l’est de Montréal où la qualité de l’air est généralement moins bonne.

« À Bordeaux, en France, l’administration a décidé de ne pas en implanter davantage à la lumière des résultats. D’abord, il est absurde de penser que les plantations vont survivre après 12 ans. La moitié des arbres seront morts, et c’est naturel. Cependant, il y a du positif dans le fait que les gens s’intéressent aux forêts urbaines. Il y a un apport pour l’éducation et l’accès à des espaces verts. »

Sur le territoire métropolitain, une dizaine de miniforêts ont été plantées dans les arrondissements Le Plateau-Mont-Royal, de Rosemont–La Petite-Patrie, d’Outremont et de Verdun. Neuf autres projets sont en développement, notamment dans Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles, Montréal-Nord et Pierrefonds-Roxboro.

PHOTO FOURNIE PAR L’ARRONDISSEMENT D’OUTREMONT

Projet de microforêt dans le parc Beaubien à Outremont

Dans Outremont, le maire Laurent Desbois est particulièrement fier de trois projets, dont un dans le parc Beaubien, comptant 805 arbres et 95 arbustes, entre l’avenue McEachran et le chemin de la Côte-Sainte-Catherine. Il rappelle que l’argent pour les microforêts provient du budget participatif de la ville-centre, donc un budget approuvé par les citoyens.

« Nous n’aurions pas pu utiliser cet argent pour régler notre problème de circulation de transit, précise-t-il. Ça permet de planter des arbres à des endroits difficiles d’accès. Nos citoyens trouvent ça beau. »

On voit des avantages au niveau de la biodiversité, de la canopée et de la capture du dioxyde de carbone (CO2). On pourra tracer un bilan dans quelques années.

Laurent Desbois, maire d’Outremont

Inspectrice en horticulture et arboriculture dans Outremont, Stéphanie Paradis ajoute que les microforêts ne vont pas régler le problème des îlots de chaleur à elles seules. Il faut penser en termes de quantité. Mais contrairement aux arbres plantés sur rue, ces petites forêts urbaines vont certainement favoriser les oiseaux, les insectes pollinisateurs.

« C’est nouveau, on verra avec le temps. On va les surveiller et s’ajuster. C’est certain que notre climat va entrer en ligne de compte », dit-elle.

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Changements climatiques | Un réputé chercheur claque la porte du comité mis en place par Legault


PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE
Pierre-Olivier Pineau, professeur au département des sciences de la décision à HEC Montréal et titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie, a remis sa démission la semaine dernière au Comité consultatif sur les changements climatiques mis en place par le gouvernement Legault.

Le spécialiste de l’énergie Pierre-Olivier Pineau a démissionné du Comité consultatif sur les changements climatiques du gouvernement Legault. Celui-ci dénonce « une sorte de censure », un manque de vision et de transparence, des programmes inefficaces ainsi que l’absence de remise en question sur la façon dont les Québécois consomment l’énergie.

Publié à 17h27
STÉPHANE BLAIS
LA PRESSE CANADIENNE

M. Pineau, professeur au département des sciences de la décision à HEC Montréal et titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie, a remis sa démission la semaine dernière au Comité consultatif sur les changements climatiques mis en place par le gouvernement Legault.

C’est la quatrième fois en deux ans qu’un conseiller quitte l’organisme scientifique.

« Mais les trois autres ne sont pas forcément liés à des raisons similaires », a toutefois tenu à préciser Pierre-Olivier Pineau qui a quitté mercredi dernier le comité qu’il juge « dysfonctionnel et non productif ».

Une « sorte de censure »

Celui qui co-rédige chaque année l’État de l’énergie au Québec a expliqué à La Presse Canadienne que le comité travaillait récemment à produire un bilan indépendant de l’action climatique du gouvernement.

« Il y a des professionnels de recherche qui sont engagés par le comité et qui travaillaient sur des documents, mais lorsque venait le temps de voir ces documents-là, ça ne correspondait pas aux discussions qu’on avait eues en sous-comité et donc j’avais l’impression qu’il y avait comme une sorte de censure qui était exercée, que les thèmes sur lesquels on avait travaillé en sous-comité ne se retrouvaient plus dans les documents qu’on discutait, et ça, ça me troublait et j’avais un peu perdu espoir que le comité puisse faire un travail critique indépendant sur le bilan de l’action climatique du gouvernement québécois », a résumé le chercheur.

« Une des raisons plausibles, c’est que les gens, les professionnels de recherche qui sont des employés du ministère de l’Environnement, mais qui sont prêtés au comité, n’avaient pas la latitude pour mettre de l’avant et documenter les idées que le sous-comité avait discutées », selon Pierre-Olivier Pineau.

Fonds vert : des dépenses critiquées

Le chercheur souhaitait que le comité puisse se pencher sur les dépenses du Fonds vert, qui est devenu le Fonds d’électrification et de changements climatiques (FECC), et qui ont fait l’objet de critiques dans le passé.

En mai 2022, le rapport de la commissaire au développement durable Janique Lambert soulignait que 80 % des dépenses prévues au FECC étaient destinées à des projets qui « n’ont pas d’indicateurs ni de cibles adéquates ».

Ces projets représentaient 5,4 milliards des 6,7 milliards de dépenses prévues au FECC.

« Ce programme avait une certaine cible pour 2020, puis on se rend compte qu’il atteint seulement 53 % de sa cible » et pourtant, le programme a été reconduit, sans que la cible soit changée, « puis en remettant de l’argent supplémentaire », avait notamment souligné Janique Lambert.

Pierre-Olivier Pineau voulait que le comité fasse « à tout le moins une synthèse des critiques qui ont été émises pour comprendre si le gouvernement s’améliore dans ses programmes, mais toutes ces notions-là, de faire un résumé, une synthèse (des critiques) du fonctionnement du fonds d’électrification, tout ça avait été évacué ».

Il faut revoir notre rapport à la consommation

Le titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie déplore également que les programmes du gouvernement ne permettent pas de remettre en question notre rapport à la consommation d’énergie.

« Quand on achète un véhicule électrique, on reçoit de l’argent et ça diminue le prix du véhicule électrique. Si on fait des rénovations à travers le programme Rénoclimat, on peut aussi recevoir de l’argent […], mais ces programmes n’amènent pas le consommateur à réfléchir à sa consommation d’énergie. C’est bien de changer un frigo inefficace par un frigo efficace, mais ça ne remet pas en question notre rapport à la consommation », a expliqué Pierre-Olivier Pineau.

Selon le professeur, « pour faire une transition énergétique, il faut aller au-delà de simplement améliorer l’efficacité technique des équipements qui nous entourent, il faut repenser notre consommation d’énergie et c’est ce que ces programmes ne font pas ».

Selon lui, certains programmes du gouvernement ne sont tout simplement pas efficaces.

« Mais c’est difficile de le prouver parce que les données sont très difficiles à obtenir et il y a peu de transparence, et ça c’est un problème en soi, le manque de transparence, parce que ça rend l’évaluation de ces programmes là très ardue », a ajouté le chercheur.

M. Pineau remet également en question que le gouvernement du Québec puisse acheter des réductions d’émission de gaz à effet de serre dans d’autres juridictions, dans le cadre de la bourse du carbone, et de les attribuer à son propre bilan.

« Le gouvernement interprète tous les achats nets de droits d’émission en Californie comme des réductions dans son bilan, mais c’est discutable que ça soit une réduction, parce que ça reste un droit d’émission qu’on achète dans une entité, une juridiction différente, ce n’est pas forcément une réduction d’émissions de gaz à effet de serre de manière concrète. »

Donc « c’était important, à tout le moins, d’avoir une discussion sur l’usage du mot réduction », a précisé le professeur en ajoutant que « cette discussion a été complètement évacuée ».

Dans une déclaration transmise à La Presse Canadienne, l’attachée de presse du ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a écrit que celui-ci prenait « acte de la décision » de M. Pineau.

« Le comité consultatif en changements climatiques demeure une entité indépendante, dont l’expertise est précieuse pour le Québec et en laquelle nous avons pleinement confiance », a également indiqué Mélina Roberge.

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Je n’ai rien trouvé comme information supportant cela. La ville semble toujours aller dans cette voie, je me demande quels pourraient être ces résultats qui auraient fait reculer l’administration de Bordeaux?

Article de mars 2023: Deux autres microforêts à venir en 2023 dans le quartier de Bordeaux Maritime
En 2023, Bordeaux entend accélérer sa « renaturation » : 4 000 nouveaux plants seront plantés cette année à Bordeaux Maritime,

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Environnement

De nouvelles aires protégées dans le sud du Québec

PHOTO TIRÉE DU SITE WEB DE TOURISME RIMOUSKI

Une partie (90 km2) de la réserve faunique Duchénier, dans le Bas-Saint-Laurent, fait partie des nouvelles aires qui seront protégées par Québec.

Québec ajoute quelque 3000 km⁠2 d’aires protégées dans le sud de la province, s’attaquant au « déficit » de protection de la biodiversité dans cette portion du territoire, mais le caribou pourrait devoir attendre aux Fêtes avant de voir la protection de son habitat renforcée.

Publié à 1h14 Mis à jour à 5h00

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Jean-Thomas Léveillé
Jean-Thomas Léveillé La Presse

Ce qu’il faut savoir

Le gouvernement protège près de 3000 km2 de territoire dans le sud de la province.

L’essentiel de ces futures aires protégées se trouve dans le Bas-Saint-Laurent, en Abitibi-Témiscamingue, en Outaouais et sur la Côte-Nord.

Québec s’efforce ainsi de combler un « déficit » de protection du territoire dans le sud de la province par rapport au nord.

Le renforcement de la protection de l’habitat du caribou est attendu « d’ici la fin de l’année ».

Onze nouveaux territoires totalisant plus de 2100 km⁠2 ont officiellement été « mis en réserve » à la mi-août et quatre autres totalisant 850 km⁠2 le seront prochainement, annoncera ce mercredi le gouvernement Legault.

Qu’est-ce que « la mise en réserve » d’un territoire ?

La mise en réserve d’un territoire lui confère une protection complète, notamment en y interdisant toute exploitation des ressources naturelles, jusqu’à ce que le type d’aire protégée soit déterminé et adopté. Une entente conclue avec le ministère des Ressources naturelles et des Forêts indique qu’il n’y aura pas non plus d’activités industrielles sur les quatre territoires que Québec annonce vouloir mettre en réserve, a indiqué le ministre Benoit Charette.

L’essentiel de ces futures aires protégées se trouve dans le Bas-Saint-Laurent, en Abitibi-Témiscamingue, en Outaouais et sur la Côte-Nord, là où la superficie de territoire protégé est plus faible que dans le nord de la province.

« On vient s’assurer de protéger le patrimoine naturel dans toute sa diversité », a déclaré à La Presse le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette.

Certains de ces territoires permettront d’agrandir des aires protégées existantes, tandis que d’autres en créent de nouvelles.

Cette annonce « répond à la volonté de combler le déficit [de protection] dans le sud du Québec », a estimé Alain Branchaud, directeur général de la section québécoise de la Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec).

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Alain Branchaud, directeur général de SNAP Québec

C’est quelque chose qu’il faut applaudir.

Alain Branchaud, directeur général de SNAP Québec

« Il y a beaucoup d’oiseaux migrateurs qui vont bénéficier de la protection de pans de territoire de la forêt boréale », observe le biologiste, qui salue notamment la création d’une aire protégée de plus de 850 km⁠2 en Outaouais. « C’est énorme », a-t-il déclaré.

Les sept merveilles du Bas-Saint-Laurent

Québec complète aussi la protection des « sept merveilles du Bas-Saint-Laurent », s’est félicité le ministre Charette.

Ces sites, dont le Lac-de-l’Est, la Rivière-Cascapédia et la Rivière-Causapscal, faisaient l’objet de démarches de protection de la part de groupes environnementaux et citoyens.

« Les milieux se mobilisaient et nous, on a voulu donner suite à tout ça », a expliqué le ministre, ajoutant que cette mobilisation avait facilité l’action du gouvernement.

« C’est l’aboutissement d’un travail qui a duré 10 ans », s’est réjoui Alain Branchaud.

Accélérer le pas

La concrétisation de ces projets d’aires protégées après des années de travail doit cependant susciter une réflexion au sein du gouvernement, estime M. Branchaud.

« On ne pourra pas prendre autant de temps pour les prochains projets », dit-il, rappelant que le gouvernement Legault s’est engagé à protéger 30 % du territoire québécois d’ici 2030.

« Il va falloir accélérer le pas pour atteindre la cible de 30 % », prévient-il, appelant à « fluidifier » les mécanismes gouvernementaux et dénonçant au passage l’« obstruction historique de certains ministères ».

Benoit Charette se montre cependant optimiste, rappelant que son gouvernement a protégé plus de 100 000 km⁠2 de territoire depuis cinq ans.

« Il n’y a pas de gouvernement avant nous qui a autant pris à cœur ce dossier-là », dit-il.

Québec prévoit d’ailleurs annoncer d’autres mises en réserve de territoires au cours des prochains mois.

« C’est un travail constant. De façon périodique, on ajoute de nouveaux territoires », rappelle le ministre.

Un plan pour le caribou « d’ici la fin de l’année »

De nouvelles aires protégées seront notamment créées dans le cadre de la stratégie québécoise de protection du caribou, assure le ministre Charette.

Ce vaste plan devait être déposé en juin, mais le gouvernement Legault l’a reporté en raison des incendies de forêt qui ont fait rage au Québec.

« On vise d’ici la fin de l’année », a indiqué le ministre Charette.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Benoit Charette, ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs

Les incendies ont épargné l’essentiel des territoires envisagés pour la protection des caribous, mais ont durement touché ceux consacrés à la foresterie, rapportait La Presse en juin.

« Ça a été un été difficile pour la foresterie », reconnaît le ministre, qui affirme que l’évaluation des impacts des incendies se poursuit avec les ministères concernés.

« On ne veut pas retarder le dévoilement [de la stratégie], dit-il, mais on veut bien faire les choses. »

Les cinq principaux territoires mis en réserve par Québec

Rivières-Noire-et-Coulonge, Outaouais : 853 km2

Rivière-Cascapédia, Bas-Saint-Laurent : 369 km2

Rivière-Dumoine, Abitibi-Témiscamingue : 332 km2

Vallée-de-la-Rivière-Godbout, Côte-Nord : 215 km2

Duchénier, Bas-Saint-Laurent : 90 km2

Source : Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs du Québec

En savoir plus

  • 253 344 km⁠2
    Superficie du territoire québécois bénéficiant d’une protection officielle, en date du 31 mars 2023

source : ministère de l’Environnement

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Longueuil pourra abattre les cerfs du parc Michel-Chartrand

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

L’automne dernier, la Ville de Longueuil estimait le nombre de cerfs au parc Michel-Chartrand à 108, sur un territoire de moins de deux kilomètres carrés. Elle souhaitait n’en laisser qu’une quinzaine en vie.

L’abattage à l’arbalète des cerfs du parc Michel-Chartrand, à Longueuil, pourra aller de l’avant, vient de décréter la Cour supérieure.

Publié à 16h26 Mis à jour à 17h23

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Isabelle Ducas
Isabelle Ducas La Presse

« La Ville [de Longueuil] et le MFFP [ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs] ont tout mis en place afin que l’opération de chasse contrôlée à l’arbalète s’exécute dans le respect de la sensibilité des cerfs permettant qu’il soit mis fin à leur vie d’une manière aussi douce et rapide que possible », écrit le juge Bernard Jolin dans sa décision rendue jeudi, en rejetant la demande des opposants à l’opération d’abattage.

Le groupe Service Sauvetage animal et la citoyenne Florence Meney avaient déposé, l’année dernière, un recours en justice pour empêcher la Ville de Longueuil de procéder à cette opération, destinée à réduire le nombre de cerfs dans le parc.

La prolifération de ces animaux dans le parc très fréquenté cause une dégradation de la végétation et pose un danger pour la sécurité routière, selon la Ville, qui a obtenu en août 2022 un permis du MFFP pour tuer un maximum de 100 cerfs.

L’automne dernier, la Ville estimait leur nombre à 108, sur un territoire de moins de deux kilomètres carrés. Elle souhaitait n’en laisser qu’une quinzaine en vie.

La mairesse Catherine Fournier a réagi par communiqué, en indiquant que, maintenant le jugement rendu, la Ville irait de l’avant avec l’abattage.

« Nos équipes reprendront le travail pour mener à terme l’opération de réduction du cheptel et ainsi rétablir l’équilibre écologique du parc Michel-Chartrand, tel que nous l’avons entrepris dans les semaines suivant notre entrée en fonction à l’hôtel de ville, à l’automne 2021 », indique-t-elle.

« L’état du parc Michel-Chartrand continue de se dégrader rapidement en raison de la surpopulation de cerfs, ce qui inquiète les citoyennes et les citoyens, en plus des enjeux de sécurité routière inhérents aux abords du parc », déclare Jonathan Tabarah, conseiller municipal du secteur et vice-président du comité exécutif de la Ville de Longueuil, dans le même communiqué.

La saga des cerfs de Longueuil a commencé il y a trois ans, lorsque des citoyens se sont opposés à la décision de la Ville de tuer les animaux en surnombre, estimant qu’il s’agissait de cruauté.

Les opposants prônaient plutôt une relocalisation des cerfs, mais des experts ont rejeté cette solution, en soulignant que les bêtes risquaient de ne pas survivre à une telle opération.

La présence de cerfs en trop grand nombre cause des problèmes à plusieurs endroits, notamment dans l’est de l’île de Montréal, où des experts estimaient, en mars 2021, qu’il y avait 50 bêtes de trop.

Dans le parc national des Îles-de-Boucherville et dans celui du Mont-Saint-Bruno, en Montérégie, plusieurs centaines de cerfs devront aussi être abattus. La Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ), qui gère les deux parcs, attend que le gouvernement du Québec modifie la réglementation sur les activités permises dans les parcs nationaux, afin d’autoriser l’utilisation d’armes ou d’engins de chasse pour contrôler les populations animales, afin d’assurer la conservation de la biodiversité.

Le 28 juin dernier, un communiqué du gouvernement du Québec annonçait que ces modifications au règlement entreraient bientôt en vigueur.

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Enfin!

Rapiécer notre forêt brûlée

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Trois cent mille hectares de forêt brûlée sont actuellement à risque de ne pas se régénérer au Québec.


Philippe Mercure
Philippe Mercure La Presse

Le chantier est titanesque. Ses coûts se compteront en centaines de millions de dollars. Il exigera un labeur éreintant que peu de travailleurs voudront accomplir, particulièrement dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre.

Publié à 1h49 Mis à jour à 5h00

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Ce défi, le Québec est pourtant forcé l’affronter. Lequel ? Reboiser la forêt boréale ravagée par les incendies de cet été, les pires depuis un siècle dans la province.

La nature se relève habituellement elle-même d’un incendie de forêt. Mais il arrive qu’un brasier frappe une forêt trop jeune pour s’en remettre. Les arbres brûlés, en particulier les épinettes noires, n’ont pas eu le temps d’arriver à maturité et de produire les graines nécessaires pour régénérer la forêt.

Sans intervention, ces zones ne seront plus jamais des forêts. Elles deviendront des landes parsemées d’arbustes et de lichen – des trous béants et permanents dans notre forêt boréale.

Laisser ces brèches s’installer a des conséquences considérables. La biodiversité y est bouleversée. La possibilité pour l’industrie forestière de récolter des arbres est perdue à jamais. Et l’ex-forêt perd ses capacités à capter du carbone. Cela nous prive d’un outil de lutte naturel contre les bouleversements climatiques… qui favorisent justement les incendies de forêt.

Yan Boucher, directeur de l’Observatoire de recherche régional sur la forêt boréale, calcule que 300 000 hectares de forêt brûlée sont actuellement à risque de ne pas se régénérer au Québec. C’est plus de huit fois la superficie de l’île de Montréal. Et le calcul n’inclut que la forêt dite « attribuable », soit le terrain de jeu de l’industrie forestière. Toute la forêt située plus au nord est exclue des estimations. Les superficies brûlées cet été y sont pourtant deux fois plus importantes que dans le Sud.

Bon an mal an, le Québec reboise environ 50 000 hectares de forêt brûlée. Cette année, le fardeau est donc multiplié… par six.

À raison d’au moins 2000 $ pour reboiser un hectare, la facture potentielle atteint 600 millions de dollars pour le Sud seulement. On parle de gros bidous – l’équivalent du budget annuel de l’ensemble du ministère de l’Environnement.

Il est utopique de penser qu’on reboisera toutes les zones à risque cette année ou même l’an prochain. Les arbres plantés doivent être préparés à partir de semis et ne sont pas disponibles en si grand nombre. Mais il faut que les pépinières qui font pousser ces arbres s’y mettent rapidement. Plus on attend, plus les plantes et les arbustes envahiront les zones brûlées, rendant la plantation d’arbres plus difficile – et plus coûteuse.

On attend donc le signal du ministère des Ressources naturelles et des Forêts avec impatience. À sa décharge, Québec en a plein les bras depuis le déclenchement des incendies. Mais rapiécer notre forêt trouée est maintenant prioritaire.

Bien sûr, des questions se posent avant de lancer une opération aussi coûteuse. Vaut-il la peine de reboiser certaines zones très à risque de brûler à nouveau ? Faut-il replanter les mêmes espèces ?

Christian Messier, professeur d’écologie forestière à l’Université du Québec à Montréal et en Outaouais, propose par exemple une audacieuse réingénierie de la forêt boréale, allant jusqu’à suggérer de planter des feuillus plus résistants aux flammes comme l’érable, le chêne et le bouleau dans les forêts d’épinettes. Une étude publiée cette semaine montre même que l’industrie forestière y trouverait son compte1.

L’idée ne fait toutefois pas consensus et soulève des questions. Ces arbres sont-ils vraiment adaptés au climat nordique ? Comment les nouvelles essences affecteraient-elles les écosystèmes ? Il serait intéressant de faire des essais ciblés pour le vérifier.

Le reboisement amène une autre question, politique celle-là. On sait que le gouvernement Trudeau peine à remplir son engagement de planter deux milliards d’arbres – il n’en a planté que 56 millions, selon le commissaire à l’environnement du Canada. Le reboisement post-incendies lui donne une occasion de redorer son blason. Selon nos informations, les négociations avec Québec au sujet de son éventuelle implication sont toutefois difficiles.

Il faut aussi dire que même si le protocole fédéral permet le reboisement après les incendies, la promesse de M. Trudeau était d’ajouter deux milliards d’arbres dans le paysage canadien pour capter plus de carbone, pas de compenser des pertes.

Chose certaine, il est impératif de planifier le reboisement de la forêt boréale. Ne pas agir reviendrait à baisser les bras face aux conséquences des changements climatiques.

1. Consultez l’étude A trait-based approach to both forestry and timber building can synchronize forest harvest and resilience (en anglais)