Environnement et transition écologique

Des nouvelles fosses d’arbres sur la rue Bélanger

Les travaux sur la rue Bélanger, à l’intersection de la au coin 2e Avenue Photo: Alexis Drapeau-Bordage, Métro Média

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Alexis Drapeau-Bordage

30 septembre 2022 à 13h46 - Mis à jour 30 septembre 2022 à 14h06 1 minute de lecture

La rue Bélanger recevra 19 fosses d’arbres drainantes et verra ses trottoirs reconstruits à la suite d’une décision prise le 6 septembre par l’Arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie. Les travaux s’étendront sur 1,3 km, entre les rues de Lorimier et la 13e Avenue, et devraient se terminer en octobre.

Les fosses drainantes ont pour objectif de recueillir les excès d’eau dans la rue lors des fortes averses afin de la réutiliser pour les arbres plutôt que de procéder par arrosage. Le projet s’inscrit dans le Plan directeur de biodiversité et le Plan d’action en transition écologique adoptés par l’Arrondissement.

Le projet a été confié au Groupe ABF, dans un contrat de 316 800$, soit un budget inférieur aux premières estimations de l’Arrondissement.

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Agence canadienne de l’eau Le Grand Montréal, le choix logique

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« Le fleuve Saint-Laurent est une source en eau douce indispensable à nos vies, et ce, en plus d’offrir des opportunités de commerce, de loisirs et d’échanges culturels », écrivent les auteurs.

L’an dernier, le gouvernement fédéral a annoncé la création d’une Agence canadienne de l’eau vouée à trouver les meilleurs moyens pour assurer la salubrité, la propreté et la saine gestion de cette riche ressource naturelle.

Publié à 11h00

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François de Gaspé Beaubien

François de Gaspé Beaubien Président du conseil d’administration d’AquaAction, et 17 autres signataires*

Nous sommes d’avis que la création de cette agence est une excellente nouvelle pour l’écosystème des organisations canadiennes de l’eau et de l’environnement, et nous saluons l’initiative du gouvernement. Nous sommes également convaincus que la région du Grand Montréal est l’emplacement idéal pour l’accueillir.

Pourquoi au Québec ?

Le Québec est une province emblématique et mondialement reconnue en matière de protection de l’eau. Le territoire québécois détient 3 % des réserves mondiales d’eau douce et près de 40 % de cette eau se concentre dans le bassin hydrographique du fleuve Saint-Laurent, aussi connu que le Québec, et véritable moteur de notre développement social et économique. Son importance est primordiale, puisqu’il draine plus de 25 % des réserves mondiales d’eau douce et des millions de Canadiens en dépendent pour leur vie quotidienne, tant pour l’eau potable qu’il fournit que pour les emplois qu’il crée.

Le fleuve Saint-Laurent est un symbole fort pour le Québec, mais aussi pour le Canada. Il est un corridor de commerce fondamental pour notre pays et même pour toute l’Amérique du Nord. Il nous permet, tant à l’import qu’à l’export, d’échanger des biens, notre savoir-faire, notre culture, et bien plus encore. Étant un émissaire du bassin des Grands Lacs, qui contient environ 20 % de toute l’eau douce de surface de notre planète, il connecte ce dernier à l’océan Atlantique par le biais de la Voie maritime du Saint-Laurent.

Le fleuve Saint-Laurent est une source en eau douce indispensable à nos vies, et ce, en plus d’offrir des opportunités de commerce, de loisirs et d’échanges culturels.

Pourquoi le Grand Montréal ?

Avec la présence du seul port à conteneurs sur le Saint-Laurent, de l’industrie maritime qui le soutient, des nombreuses entreprises spécialisées dans le domaine de l’eau, d’un secteur scolaire prolifique reposant principalement sur quatre universités qui détiennent toutes une chaire de recherche sur l’eau, et d’un riche bassin d’organisations locales, régionales, nationales et internationales dédiées à la protection de l’eau et de l’environnement, la région du Grand Montréal dispose d’un riche écosystème d’acteurs commerciaux et environnementaux. Ces derniers font de la région un pôle central et stratégique pour l’utilisation et la protection de ce chemin qui marche, et de la ressource qui l’alimente.

C’est pour toutes ces raisons que la région du Grand Montréal est l’endroit le plus approprié pour accueillir le siège social de l’Agence canadienne de l’eau. Tous les acteurs majeurs qui se trouvent à Montréal et au Québec permettront à l’Agence d’avoir accès à leurs ressources, à leur collaboration, à leur expertise et, surtout, à leur engagement à protéger l’eau du Canada. L’expertise des organismes du Québec, dont ceux ayant un siège social à Montréal, est riche, tout comme leur dévouement à la protection et à la conservation de nos ressources en eau douce et de nos eaux intérieures.

Ainsi, nous demandons au gouvernement du Canada de se joindre à cette importante mobilisation d’acteurs à travers le Québec et de faire les gestes nécessaires pour que la région du Grand Montréal puisse accueillir le siège social de l’Agence canadienne de l’eau.

  • Cosignataires : Dominique Monchamp, directrice générale de la Fondation de Gaspé Beaubien ; Jean-Éric Turcotte, directeur général de Stratégies Saint-Laurent ; Mathieu Laneuville, président-directeur général de Réseau Environnement ; Karine Dauphin, directrice générale du Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ) ; Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) ; Madeleine Paquin, présidente et chef de la direction de LOGISTEC Corporation ; Julie Ruiz, présidente du Réseau québécois sur les eaux souterraines (RQES) ; Jean-Paul Raîche, coprésident du Réseau québécois sur les eaux souterraines (RQES) ; Catherine Trudelle, directrice intérimaire du Réseau Inondations InterSectoriel du Québec (RIISQ) ; Françoise Bruaux, directrice du Comité ZIP du Sud-de-l’Estuaire ; Yenny Vega Cárdenas, présidente de l’Observatoire international des droits de la Nature (OIDN) ; Sylvain Lafrance, directeur général d’Innovation maritime ; Louise Corriveau, directrice générale du Comité ZIP du lac Saint-Pierre ; Dany Dumont, directeur du Réseau Québec maritime (RQM) ; Daniele Luigi Pinti, directeur du Geotop ; Alain Saladzius, cofondateur et président du conseil d’administration de la Fondation Rivières ; François Gagnon, directeur général et chef de la direction de l’École de technologie supérieure (ETS)
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Acquisition de terrains de golfs Le Grand Montréal réclame 100 millions à Québec

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Les clubs de golf de Belœil, de Candiac, de Chambly, de Mascouche, de Rosemère et de Terrebonne sont protégés sous le règlement de contrôle, tout comme le club de golf de Boucherville, le Golf Dorval et le Golf Sainte-Rose, à Laval.

Deux jours après l’élection d’un second gouvernement Legault majoritaire, la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) réclame 100 millions sur cinq ans à Québec, afin d’aider les municipalités à acquérir neuf terrains de golf qui ont récemment été protégés du développement immobilier.

Publié à 11h32

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Henri Ouellette-Vézina

Henri Ouellette-Vézina La Presse

« Les récentes études et la multiplication d’évènements météo extrêmes comme l’épisode de pluie diluvienne du 13 septembre démontrent l’urgence d’agir et d’augmenter la superficie de milieux naturels et d’espaces verts. Plusieurs municipalités souhaitent agir en ce sens, mais elles font face à des obstacles majeurs et manquent d’outils », a déploré mercredi la mairesse Valérie Plante, qui est aussi présidente de la CMM.

Elle soutient que le nouveau gouvernement Legault, qui n’a toujours que deux élus sur l’île de Montréal, « doit vite mettre en place diverses mesures pour les soutenir et favoriser la réalisation de projets de protection et de mise en valeur », afin « d’augmenter la résilience » de toute la région.

À la mi-juin, Québec avait officiellement approuvé l’adoption du règlement de contrôle intérimaire (RCI) de la CMM, et avait du même coup restreint le développement immobilier sur près de 12 400 hectares supplémentaires de milieux naturels, dont six terrains de golf « nécessitant une attention prioritaire ». À la fin du mois de septembre, trois autres terrains ont été ajoutés à ce sommaire, pour un total de neuf.

Les clubs de golf de Belœil, de Candiac, de Chambly, de Mascouche, de Rosemère et de Terrebonne sont protégés sous le règlement de contrôle, tout comme le club de golf de Boucherville, le Golf Dorval et le Golf Sainte-Rose, à Laval.

Vers un parc nature à Candiac ?

À Candiac, le maire Normand Dyotte a soutenu mercredi que les municipalités doivent « respecter la capacité de payer des contribuables », une façon de dire qu’il ne peut hausser les taxes pour financer l’acquisition de terrains. « C’est pourquoi nous avons besoin de l’aide du gouvernement du Québec », plaide-t-il, disant vouloir « réaliser des projets porteurs ».

Son administration planche entre autres sur un projet de parc nature sur les terrains de l’ancien golf. La Ville n’a d’ailleurs pas caché son intention d’acquérir le terrain de golf, mais seulement quand « toutes les conditions favorables seront réunies » pour en faire un parc nature. Le projet inclurait une forêt urbaine, des prairies, des étangs ainsi qu’un sentier de plusieurs kilomètres.

La CMM réclame aussi une autre enveloppe de 100 millions pour créer un « réseau de parcs métropolitains », et l’intégrer à son réseau de Trame verte et bleue. Cette seconde somme servirait à financer la poursuite des travaux au Parc du Domaine-Seigneurial-de-Mascouche et l’aménagement de la Promenade fluviale du Grand Montréal, sur la digue de la Voie maritime du Saint-Laurent.

Sans surprise, l’organisme demande aussi que Québec aille de l’avant avec une réforme de la Loi sur l’expropriation, afin que l’indemnité soit calculée sur la base de la juste valeur marchande lors de l’acquisition de milieux naturels par expropriation.

En mai, François Legault s’était engagé à réformer cette loi et à donner le droit de préemption aux municipalités, en refusant toutefois net de revoir la fiscalité des villes, qui veulent se sortir du carcan de la taxe foncière. « Dans le prochain mandat, on va aussi adopter une loi sur les expropriations », avait-il lancé lors de son passage aux Assises de l’Union des municipalités du Québec.

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Compensations pour la destruction de milieux humides Près de 100 millions dorment à Québec

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Depuis cinq ans, le gouvernement du Québec a récolté près de 100 millions de dollars en compensation pour la destruction de milieux humides. À peine 2,6 % de ces fonds ont été réinvestis à ce jour pour la restauration ou la création de nouveaux milieux humides. Un retard qui sera de plus en plus difficile à combler, préviennent des experts.

7 octobre 2022 | Publié à 5h00 | ÉRIC-PIERRE CHAMPAGNE | LA PRESSE

Entrée en vigueur le 16 juin 2017, la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques était censée mettre fin à des décennies d’abus qui ont permis de détruire d’immenses superficies dans toute la province, particulièrement dans les basses-terres du Saint-Laurent. Elle fixe un objectif d’« aucune perte nette » de milieux humides.

Ces milieux jouent un rôle essentiel dans un contexte de lutte contre les changements climatiques, puisqu’ils captent d’importantes quantités de carbone, en plus d’assurer toutes sortes de services écosystémiques. Mais selon une analyse commandée en 2013 par l’ancien ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs, à peine 1 % des milieux humides détruits entre 2006 et 2010 ont été compensés.

La nouvelle loi a donc introduit un système de compensations financières qui sont versées au Fonds de protection de l’environnement et du domaine hydrique de l’État. Les sommes recueillies doivent servir à des projets de création ou de restauration de milieux humides.

Au 31 mars 2021, Québec avait autorisé la destruction de 11,9 km⁠2 de milieux humides en échange de compensations financières totalisant 75 millions. Selon les plus récentes données qui n’incluent pas l’année 2022, les sommes recueillies totalisent maintenant 92,5 millions. Malgré des demandes répétées de La Presse, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) n’a pas été en mesure de nous confirmer les superficies détruites durant les neuf derniers mois de l’année 2021. On peut néanmoins présumer que le fonds dépasse aisément les 100 millions en octobre 2022.

Six projets approuvés

Or, depuis 2017, le MELCC a financé seulement six projets de restauration ou de création de milieux humides pour un total de 2,4 millions. Selon des données obtenues par La Presse en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics, les superficies restaurées ou créées vont totaliser 1 million de mètres carrés, soit l’équivalent du parc Angrignon à Montréal.

En Montérégie, 390 892 m⁠2 de milieux humides ont été détruits en cinq ans en échange de compensations financières totalisant 15 millions, selon des données obtenues par la Fondation Rivières transmises à La Presse. À ce jour, seulement 44 000 m⁠2 seront restaurés ou créés dans la région. On observe une situation similaire à Montréal, où moins de 30 % des superficies détruites depuis 2017 seront recréées à ce jour.

À Laval, par exemple, le groupe immobilier Beau Vallon inc. a versé une compensation de 973 000 $ pour obtenir l’autorisation de détruire 13 000 m2 de milieux humides au bois de l’Équerre pour un projet de lotissement résidentiel. À Lévis, l’entreprise Immobilier QCMW S.E.C. a pu détruire près de 29 000 m2 de milieux humides en versant une compensation de 1 million de dollars pour construire un « mégacentre de traitement de données ».

« C’est clair que ce programme ne fonctionne pas », soutient André Bélanger, directeur général de la Fondation Rivières, qui demande que le gouvernement du Québec se donne des cibles de protection des milieux humides.

Le rôle d’un gouvernement, c’est de fixer des objectifs, des cibles. Ça s’appelle un plan, et là, il n’y a pas de plan.

André Bélanger, directeur général de la Fondation Rivières

« C’est de l’écoblanchiment », lance Alain Branchaud, directeur général de la Société pour la nature et les parcs au Québec. Selon lui, le système actuel ne fonctionne pas puisqu’il ne tient pas compte des coûts réels pour la société quand des milieux humides sont détruits.


PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE | Alain Branchaud, directeur général de la Société pour la nature et les parcs au Québec

Des compensations revues à la baisse

En Ontario, par exemple, le gouvernement a estimé que les milieux humides dans le sud de la province produisaient chaque année 14 milliards de dollars en « avantages économiques » pour la population. Mais selon Anne-Sophie Doré, avocate au Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), la valeur des services écosystémiques des milieux humides n’est pas prise en compte dans le calcul des compensations au Québec.

Le MELCC a plutôt révisé l’an dernier son Règlement sur la compensation pour l’atteinte aux milieux humides et hydriques afin qu’un plus grand nombre d’activités soient exemptées de l’obligation de payer une compensation financière. Les sommes à verser ont aussi été revues à la baisse pour certaines régions.

« Ce n’est pas vrai qu’on va en créer à la hauteur de ce qui a été détruit », tonne Jean-François Girard, avocat spécialisé en droit de l’environnement. Selon lui, au rythme actuel, il sera de plus en plus difficile de trouver des terrains pour créer de nouveaux milieux humides dans le sud du Québec. « On ne peut pas tout détruire au sud pour aller en recréer à la baie James ! », plaide-t-il.


PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, ARCHIVES LA PRESSE | Jérôme Dupras, professeur au département des sciences naturelles de l’Université du Québec en Outaouais

« Je donne la chance au coureur », répond Jérôme Dupras, professeur au département des sciences naturelles de l’Université du Québec en Outaouais. Selon cet expert dans l’évaluation économique des services écosystémiques, les nouveaux plans régionaux de milieux humides et hydriques (PRMHH) des villes et des MRC devraient permettre de corriger la situation.

« Mais si l’année prochaine, nous sommes encore dans un ratio [de restauration] de 2 à 3 %, on a un problème », ajoute-t-il, tout en précisant qu’il faut également mettre en place des mécanismes pour ralentir la destruction des milieux humides.

Les 101 MRC au Québec avaient jusqu’en juin dernier pour déposer leurs plans, mais seule une douzaine ont respecté cet échéancier prévu dans la loi, précise Jean-François Girard. Les autres ont demandé un délai supplémentaire. Or, sans ces plans qui identifient les stratégies pour assurer la conservation des milieux humides, Me Girard croit qu’il n’y aura pas beaucoup de demandes pour financer des projets de restauration ou de création dans les prochaines années.

La biologiste Kim Marineau, qui compte plus de 30 ans d’expérience, estime que plusieurs villes craignent encore de protéger des milieux naturels sur leur territoire. « Je le vois dans l’accompagnement que je fais [avec le monde municipal]. Les villes et les MRC marchent sur des œufs. Elles avancent à pas de tortue. »

Avec la collaboration de William Leclerc, La Presse

UN BILAN EN 2027

« Le ministère s’est donné un horizon minimal de 10 ans pour mettre en place les différents mécanismes de la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques et tendre vers un objectif d’aucune perte nette », indique Caroline Cloutier, relationniste au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Dans une réponse écrite transmise à La Presse, la porte-parole précise qu’un nouveau programme « est en cours d’élaboration » et qu’il tiendra compte de l’expérience du programme précédent « et des commentaires formulés par les clientèles ». Un bilan sera déposé à l’Assemblée nationale en 2027 pour fait état de la situation.

L’INFLUENCE D’UNE DÉCISION DE LA COUR SUPRÊME

Une décision récente de la Cour suprême du Canada pourrait freiner les ardeurs des villes qui souhaitent protéger ou restaurer des milieux humides sur leur territoire. Le plus haut tribunal au pays a refusé d’entendre une demande d’appel de la Ville de Mascouche, condamnée par la Cour d’appel du Québec à payer une compensation financière à une citoyenne propriétaire d’un terrain dont le zonage est passé de « résidentiel » à « conservation » au fil des ans. « Toutes les villes vont mettre le pied sur le brake pour leurs plans régionaux de milieux humides et hydriques. Ça va tout stopper », croit l’avocat Jean-François Girard. « C’est une décision qui va faire jurisprudence et qui va être très contre-productive [pour la protection des milieux humides] », ajoute le professeur Jérôme Dupras.

EN SAVOIR PLUS

567 km⁠2
En 2013, la biologiste Stéphanie Pellerin a calculé qu’une superficie égale à 567 km⁠2 de milieux humides avait été détruite dans les 22 années précédentes dans les basses-terres du Saint-Laurent.

SOURCE : RAPPORT D’ANALYSE DE LA SITUATION DES MILIEUX HUMIDES AU QUÉBEC ET RECOMMANDATION À DES FINS DE CONSERVATION ET DE GESTION DURABLE

8,5 millions
Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, 83 projets de restauration ou de création de milieux humides ont été soumis au MELCC pour un total de 8,5 millions. Seuls 3 millions ont été alloués, dont 2,4 millions pour des projets concrets, les autres sommes étant affectées à des études de faisabilité.

SOURCE : MELCC

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Des solutions pour les milieux humides


PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE | Une superficie de 22 000 m⁠2 au boisé du parc Marcel-Laurin, dans l’arrondissement de Saint-Laurent, sera restaurée d’ici 2025.

La Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques permettra-t-elle d’atteindre l’objectif d’aucune perte nette ? À ce jour, seulement 2,6 % des fonds recueillis par Québec pour financer des projets de restauration ont été dépensés. Des experts proposent des solutions à un enjeu trop souvent mis de côté.

8 octobre 2022 | Publié à 0h00 | ÉRIC-PIERRE CHAMPAGNE | LA PRESSE

La restauration coûte cher

L’un des rares projets de restauration ou de création de milieux humides autorisés par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) sera réalisé à Montréal au coût de 1 million de dollars. Celui-ci devrait permettre de restaurer une superficie de 22 000 m⁠2 au boisé du parc Marcel-Laurin, dans l’arrondissement de Saint-Laurent. En juillet dernier, la Ville a embauché un agent de recherche spécialisé en restauration écologique pour un mandat de trois ans. Selon Marc-Olivier Fritsch, du service des communications de Montréal, la Ville prépare actuellement un appel d’offres pour sélectionner une firme spécialisée qui réaliserait les travaux d’ici 2025. Rappelons qu’à ce jour, seulement 2,6 % des 92,5 millions de dollars amassés par le gouvernement du Québec ont été affectés à des projets de restauration ou de création de milieux humides.


PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE | Boisé du parc Marcel-Laurin, dans l’arrondissement de Saint-Laurent

Stopper la destruction

Selon l’avocat Jean-François Girard, spécialisé en droit de l’environnement, « la véritable approche serait d’arrêter de détruire des milieux humides ». Selon lui, le Québec risque de se retrouver dans une situation « où ce sera pire » dans quelques années. Un avis que partage la biologiste Kim Marineau, qui compte plus de 30 ans d’expérience. « Avant de recréer des milieux humides, il faut protéger ceux qu’on a », plaide-t-elle. La situation est particulièrement critique en Montérégie, précise-t-elle. Les milieux humides, en particulier les tourbières, sont aussi des puits de carbone et de méthane. Des GES sont relâchés quand ces milieux sont détruits ou perturbés. Une étude publiée en 2021 dans la revue Science Advances a calculé que la destruction des milieux humides toujours intacts au Canada pourrait relâcher 15 millions de tonnes de GES dans l’atmosphère.

Il faut un plan

« Il faut avoir une vue d’ensemble dans ce dossier, soutient André Bélanger, directeur général de la Fondation Rivières. On ne peut pas seulement donner aux générations suivantes des problèmes à régler. » Il suggère que Québec s’inspire de la Loi sur les espèces en péril au fédéral, qui prévoit une classification des espèces menacées. Le MELCC pourrait ainsi désigner les milieux humides qu’il faut absolument protéger, pour lesquels il n’y a aucune compensation possible. Selon lui, détruire des milieux humides en échange d’une compensation est une espèce de « trou sans fond » qui ne permettra pas d’atteindre l’objectif d’aucune perte nette. « Le gouvernement devrait aussi se donner des cibles contraignantes. » Le gouvernement de l’Ontario, par exemple, s’est donné pour objectif de freiner d’ici 2025 la perte nette de milieux humides dans les régions où les pertes sont les plus importantes. La stratégie ontarienne prévoit également de faire des gains d’ici 2030, toujours dans les régions les plus touchées.

Un porteur de ballon

La biologiste Kim Marineau croit qu’il faut mettre sur pied une instance dont la mission sera de fixer les objectifs et de mesurer les progrès. « Ça va prendre aussi une surveillance à long terme [des nouveaux milieux humides] et un entretien, sinon tous ces efforts n’auront servi à rien. » Selon elle, le gouvernement ne peut seulement attendre que des organismes ou des municipalités manifestent leur intérêt pour la création de nouveaux milieux humides. D’autant que les coûts risquent d’être beaucoup plus élevés que les sommes recueillies en compensations financières, estime-t-elle. Elle précise que la nouvelle loi et son régime de compensation n’ont pas vraiment freiné la destruction de ces milieux naturels. « Il n’y a rien qui a vraiment changé dans la tête des promoteurs. La seule différence, c’est que maintenant, ils demandent combien ça va coûter [pour détruire des milieux humides]. »

Modifier la loi sur la protection des terres agricoles

« C’est un enjeu d’aménagement du territoire », lance Sébastien Rioux, directeur pour le Québec de Canards illimités, un organisme qui se spécialise dans la conservation et la restauration de milieux humides. Selon lui, il faut aussi réfléchir à élargir le « terrain de jeu » pour créer de nouveaux milieux humides. « On est mûrs pour une mise à jour de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles en 2022 dans un contexte d’urgence climatique et de crise de la biodiversité. » Il estime qu’il faut prévoir la possibilité d’aménager des milieux humides sur des terres agricoles, « au bon moment et au bon endroit », sans avoir à faire systématiquement des demandes d’exception. « Ce sont des infrastructures vertes qui vont profiter autant aux agriculteurs qu’à la population. »

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Lachine en mode séduction pour accueillir l’Agence canadienne de l’eau

Photo: Archives - Métro

Éric Martel

8 octobre 2022 à 5h00 3 minutes de lecture

Lachine espère convaincre Ottawa de lui permettre d’accueillir le nouveau siège social de l’Agence canadienne de l’eau. L’arrondissement de l’ouest de Montréal vante ses mérites dans une lettre expédiée au ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, obtenue par Métro.

«Nous vous informons ici d’une opportunité de bâtir l’agence à Lachine, sur un site d’importance nationale, explique la mairesse de l’arrondissement, Maja Vodanovic, dans la lettre adressée au ministre. Lachine est un arrondissement de Montréal qui se trouve au confluent de différents lacs et rivières, une véritable plaque centrale de voies navigables qui ont permis l’exploration de l’Amérique du Nord.»

En 2019, le gouvernement fédéral prenait l’initiative de fonder une Agence canadienne de l’eau. Sa mission? Collaborer avec les provinces, les organismes et les communautés autochtones pour s’assurer de la sécurité, de la propreté et de la bonne gestion des eaux au pays. L’agence devrait être mise sur pied dès cette année. On réserve une enveloppe de près de 50 M$ au projet.

En mai, Montréal adoptait une motion pour que des représentations soient entamées devant Ottawa pour que l’agence s’établisse sur l’île. L’un des attraits de la métropole constitue son «bassin d’expertise», revendiquait-on. Effectivement, plusieurs centres de recherche s’y situent, notamment un Centre de recherche sur l’eau, fondé par un consortium de différentes universités.

Au début du mois, près de 18 personnes d’influence dans le domaine de l’environnement, de la santé publique et de la biologie unissaient leurs voix dans une lettre ouverte pour demander l’implantation de l’agence dans le Grand Montréal. Ils vantaient notamment «la présence du seul port à conteneurs sur le Saint-Laurent, de l’industrie maritime qui le soutient, des nombreuses entreprises spécialisées dans le domaine de l’eau».

Laval comme compétitrice

Mais dans le Grand Montréal, Lachine se butera à de la compétition. Selon la mairesse de l’arrondissement, la ville de Laval aimerait aussi accueillir l’agence. Lachine dispose toutefois d’une meilleure candidature, assure-t-elle. On propose que la construction se trouve à l’entrée du parc René-Lévesque.

«C’est un site très intéressant, soutient Mme Vodanovic en entrevue avec Métro. Exactement à cet endroit, le canal et le fleuve confluent. Historiquement, c’est une plaque centrale de voies navigables qui ont permis l’exploration de l’Amérique du Nord.»

Le site indiqué appartient déjà à Parcs Canada. Ottawa a comme projet d’y assurer la reconstruction d’une installation qui servait de bâtiment des visiteurs dans la zone. Lachine espère que la capitale pourra faire d’une pierre deux coups en y construisant aussi l’agence.

Simplification des processus

La mise sur pied de l’agence sera essentielle pour simplifier les processus concernant les infrastructures liées à l’eau, estime Maja Vodanovic. Selon les réglementations actuelles, un simple projet au municipal doit parfois être approuvé par plus de dix instances différentes, explique-t-elle.

«Les instances ne se parlent pas, se désole-t-elle. Le temps d’acheminer toutes les demandes, on doit parfois recommencer nos efforts, parce qu’il est trop tard. Imaginez tout le temps et l’effort que ce cela demande.»

En accueillant l’agence à Lachine, les processus se simplifieront, espère Mme Vodanovic. «Loin des yeux, loin du cœur: en voyant l’eau tous les jours, c’est sûr que c’est plus naturel de s’en préoccuper», conclut-elle.

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Changements climatiques Le fermier qui plantait des arbres

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Vue aérienne de la parcelle expérimentale d’agroforesterie de la ferme Bertco

(Baie-du-Febvre) Au bout de la terre de Jacques Côté apparaît un paysage agricole inhabituel. Dans un vaste champ de foin, trois rangs d’arbres matures s’alignent sur près d’un demi-kilomètre.

Publié à 5h00

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Daphné Cameron

Daphné Cameron La Presse

Des peupliers, des chênes, des érables, des noyers : près de 400 arbres poussent sur le site expérimental que le producteur laitier a planté il y a 11 ans avec l’aide du chercheur David Rivest.

Sous un soleil radieux d’automne, le duo se dirige vers le centre de la parcelle, où se trouve une série de capteurs qui enregistrent en continu une foule de données microclimatiques. Force des vents, précipitations, rayonnement solaire, humidité et température du sol : rien n’est laissé au hasard.

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Ces données permettront de déterminer l’effet protecteur des arbres sur les cultures lorsqu’elles subissent des conditions météo extrêmes, comme des sécheresses. Des données précieuses au moment où les agriculteurs cherchent des solutions pour devenir plus résilients par rapport aux changements climatiques.

« On veut amener plus de stabilité dans les rendements d’année en année », explique David Rivest, professeur au département des sciences naturelles de l’Université du Québec en Outaouais (UQO).

Avec les changements climatiques, on s’attend à des fluctuations. On veut limiter ces écarts-là en ayant des effets bénéfiques lorsque c’est stressant pour la plante agricole.

David Rivest, professeur au département des sciences naturelles de l’UQO

Au cours des dernières années, la province a connu des sécheresses historiques. En 2020, le Québec a connu son mois de juillet le plus chaud en 100 ans. Par conséquent, le programme québécois d’assurance récolte (ASREC) a versé des sommes faramineuses aux agriculteurs : 35 millions pour indemniser 2100 entreprises qui ont subi les effets des sécheresses et 40,5 millions aux producteurs de foin pour « manque d’eau ». Et ce sont les contribuables canadiens qui ont essuyé 60 % de la facture.

Des résultats encourageants

Jacques Côté ne pensait pas aux changements climatiques lorsqu’il s’est lancé dans cette aventure. Il a d’abord vécu un « coup de foudre » en voyant une photo présentée à la fin d’une présentation. « Je suis tombé en amour », se remémore-t-il.

Sur l’image captée en France, une moissonneuse-batteuse récoltait le blé entre des rangées de noyers. Une technique inédite au Québec : le « système agroforestier intercalaire ».

De fil en aiguille, il contacte David Rivest et en mai 2012, les deux se lancent.

Ils planteront des arbres tous les 5 mètres, sur 480 mètres, avec des espacements de seulement 40 mètres entre les rangées.

Les résultats obtenus jusqu’à présent sont étonnants.

Malgré une réduction modérée de la lumière et de l’eau disponible pour la croissance des cultures proches des rangées d’arbres, aucune diminution du rendement n’a été mesurée dans les allées cultivées.

David Rivest, professeur au département des sciences naturelles de l’UQO

« C’est vrai pour les différentes cultures qui se sont succédé au fil des dernières années, ce qui inclut le maïs grain, le soya et une culture fourragère à base de luzerne », ajoute-t-il.

Au centre des allées, l’équipe du professeur Rivest a aussi mesuré une diminution significative de la vitesse du vent et une augmentation de l’humidité du sol et de l’air.

« Ces conditions microclimatiques peuvent être bénéfiques à la culture. Par exemple, en 2018, marquée par un été anormalement sec et chaud, nous avons mesuré, proche du centre des allées cultivées, une augmentation du rendement du soya de près de 20 %. »

Jacques Côté a aussi observé des effets bénéfiques.

La dernière fois qu’il y a eu du maïs ici, c’était mon champ record !

Jacques Côté

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Jacques Coté

Le système agroforestier semble aussi avoir des effets bénéfiques sur la rétention d’eau dans les champs.

« Pendant l’été 2021, qui a été relativement sec, nous avons mesuré que l’humidité du sol proche du centre des allées cultivées était d’environ 50 % supérieure à celle dans les parcelles témoins dépourvues d’arbres », affirme M. Rivest.

Des mentalités à changer

Jacques Côté prévoit récolter ses premiers arbres au cours des prochaines années, afin d’en revendre le bois. La récolte des peupliers est prévue après 15 ans et celle des feuillus « à bois noble » (chênes, érables, noyers noirs), après 40 ans.

« Si mon arrière-grand-père était un adepte d’agroforesterie et qu’il y en avait sur toute la ferme à la grandeur, chaque année, on aurait un revenu de ventes de billes de bois », explique le producteur de cinquième génération. « Je fais ça pour la relève. »

Au Québec, David Rivest estime qu’il existe « tout au plus » une dizaine de systèmes agroforestiers intercalaires.

Jacques Côté, qui a parfois l’impression de « prêcher dans le désert », espère convaincre ses confrères. Mais avant, il faudra changer les mentalités.

« Ce sont des paradigmes à changer. L’agriculture, c’est un combat contre la forêt : tu l’enlèves et tu fais pousser autre chose, rappelle-t-il. Si tu laisses un sol à nu, un arbre va finir par y pousser. Donc si le sol ne considère que ce qui est le mieux pour lui, je pense que c’est [une bonne idée] de faire un alliage avec l’agriculture. »

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Planète bleue, idées vertes Chauffer moins pour diminuer nos émissions de GES ?

PHOTO FOURNIE PAR LA RAMQ

Le siège social de la Régie de l’assurance maladie du Québec, à Québec, chauffe entièrement son bâtiment avec les rejets de chaleur de son centre de données.

Face à la crise de l’énergie en Europe, le Danemark va baisser les températures dans les bâtiments publics à 19 °C. Serait-il pertinent de faire de même au Québec afin d’économiser de l’énergie et de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre (GES) ?

Publié à 6h00

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Frédérik-Xavier Duhamel

Frédérik-Xavier Duhamel La Presse

« La température intérieure doit être abaissée à 19 ℃, sauf si des conditions particulières exigent une température plus élevée », a expliqué lors d’une conférence de presse en septembre le ministre de l’Énergie et du Climat danois, Dan Jørgensen. Normalement, la température est comprise entre 21 et 23 ℃, a dit le ministre, précisant que les maisons de retraite, garderies et hôpitaux n’étaient pas concernés par la mesure.

Le ministre français de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a quant à lui affirmé que son ministère n’allumerait pas le chauffage au cours de l’hiver « tant que la température [à l’intérieur] ne sera pas en dessous de 19 ℃ », et que lui-même porterait désormais des cols roulés.

Dans un rapport de 2018, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estimait que les températures intérieures des logements devaient être « suffisamment élevées pour protéger les résidants des effets nocifs du froid sur la santé ». Pour les pays aux climats tempérés ou plus froids, 18 °C a été proposé comme la bonne température pendant les saisons froides, excepté pour les personnes vulnérables.

Plus chaud au Québec

Au Québec, le chauffage des bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels compte pour 10 % des émissions de GES. Ce secteur est au troisième rang de ceux produisant le plus d’émissions, après le transport et l’industrie, selon le dernier inventaire, qui date de 2019.

En saison froide, la température à l’intérieur des logements locatifs doit être d’environ 21 ℃, indique le Tribunal administratif du logement (TAL). Le Règlement sur la santé et la sécurité du travail prévoit aussi que la température minimale obligatoire au bureau, pour du « travail léger en position assise, notamment tout travail cérébral, travail de précision ou qui consiste à lire ou à écrire », est de 20 °C. Une température plus basse est permise pour du travail plus exigeant physiquement.

À ma connaissance, les températures de consigne de chauffage dans les bâtiments publics sont souvent plus élevées, vers 21 ou 22 °C, voire plus, parce que les opérateurs veulent éviter les plaintes, et parce que le confort ressenti dépend d’autres facteurs.

Michaël Kummert, professeur au département de génie mécanique de Polytechnique Montréal

« Il y aurait sans doute de la marge entre les consignes effectivement utilisées et le minimum réglementaire, au risque de ne pas assurer le confort dans certaines parties d’un bâtiment », selon l’expert.

Mais ce n’est probablement pas le meilleur moyen d’économiser de l’énergie, avance le professeur Kummert.

« Un chiffre souvent cité [en France, par exemple] est 7 % d’économie en abaissant la consigne de 1 ℃ », dit-il, mais ces économies dépendent notamment de la température extérieure. « Avec nos températures hivernales au Québec, on aurait sans doute des valeurs plus faibles, mais on resterait dans l’ordre de quelques pour cent. »

Mieux appliquer les consignes actuelles, par exemple en abaissant les thermostats la nuit et en évitant de faire en sorte que la climatisation « se batte » avec le chauffage, « pourrait amener des économies notablement plus grandes », soutient le professeur Kummert.

Chauffer avec la chaleur d’un centre de données

Le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) met aussi de l’avant d’autres mesures en la matière, comme la valorisation des rejets thermiques. Par exemple, « le siège social de la RAMQ [Régie de l’assurance maladie du Québec] à Québec chauffe entièrement son bâtiment avec les rejets de chaleur de son centre de données », explique la porte-parole, Caroline Cloutier.

« Le potentiel de réduction de GES reste à déterminer de manière plus précise, mais les premières évaluations du [ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles] laissent présager un potentiel de réduction de GES important », soutient-elle.

L’interdiction de l’installation d’un appareil de chauffage au mazout dans les nouvelles constructions résidentielles — qui doit être élargie à tous les bâtiments existants à la fin de 2023 – fait également partie de la solution, ajoute Mme Cloutier.

« L’abaissement à 19 °C a sans doute aussi une valeur symbolique, conclut le professeur Kummert, celle de se dire que chacun doit contribuer aux efforts pour économiser l’énergie. »

Avec l’Agence France-Presse

Consultez le site de l’Inventaire québécois des émissions de GES 2019

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  • 8,4 millions
    En 2019, le secteur résidentiel, commercial et institutionnel (chauffage des bâtiments) a produit 8,4 millions de tonnes métriques en équivalent dioxyde de carbone, soit 10,0 % des émissions de GES du Québec.

Source : Inventaire québécois des émissions de GES 2019

Transition énergétique Le grand retour du nucléaire

PHOTO AYHAN UYANIK, ARCHIVES REUTERS

Centrale Isar 2, à Essenbach, en Allemagne

Après avoir déçu les attentes qu’elle avait suscitées dans les années 1970, l’énergie nucléaire a été oubliée et même bannie dans de nombreux endroits du monde. Mais cette source d’énergie qui n’émet pas de gaz à effet de serre pourrait faire un grand retour dans plusieurs pays qui doivent à la fois augmenter leur production d’électricité et réduire leur empreinte carbone.

Publié à 5h00

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Hélène Baril

Hélène Baril La Presse

Au Canada, en Europe et aux États-Unis, une porte qu’on croyait fermée s’ouvre de plus en plus grande pour que l’énergie nucléaire joue un rôle plus important dans la transition énergétique.

Même le Canada, pays riche en ressources énergétiques, voit l’énergie nucléaire sous un jour nouveau. Steven Guilbeault, ancien militant écologiste devenu ministre de l’Environnement et du Changement climatique, a surpris et déçu de nombreux environnementalistes en plaidant en faveur de l’utilité de l’énergie nucléaire.

« Dans le contexte d’une crise climatique, nous devons examiner toutes les sources d’électricité non émettrices, y compris l’énergie solaire, l’énergie éolienne, l’hydroélectricité et l’énergie nucléaire, et leur donner une chance équitable de rivaliser sur le marché », a réitéré Steven Guilbeault, dans un message transmis à La Presse.

Au Canada, où 15 % de l’électricité est produite par des réacteurs nucléaires, les provinces de l’Ontario, de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Nouveau-Brunswick ont uni leurs efforts pour développer la technologie des petits réacteurs modulaires (SMR) qui pourraient fournir de l’énergie fiable et sans émissions de GES.

Aux États-Unis, l’administration Biden, qui a de grandes ambitions en matière d’environnement, a décidé de consacrer 6 milliards US pour prolonger la vie des centrales nucléaires existantes et aider le pays dans sa lutte contre les changements climatiques.

Après des débats corsés, l’Union européenne a inclus l’énergie nucléaire dans sa liste des énergies vertes qui pourront contribuer à l’atteinte de ses objectifs de carboneutralité en 2050.

Actuellement, dans le monde, le nombre d’anciennes centrales qui ferment est supérieur au nombre d’ouvertures. Ça pourrait changer.

« Oui, je crois que le nucléaire va revenir, tranquillement, dans le mix énergétique de plusieurs pays, prévoit Pierre-Olivier Pineau, professeur et titulaire de la Chaire en énergie à HEC Montréal. Surtout avec les enjeux actuels autour du gaz naturel, le nucléaire apparaît comme une option très intéressante. »

Preuve de cet intérêt croissant pour le nucléaire, la production d’électricité à partir de l’énergie nucléaire dans le monde devrait augmenter de 20 % au cours des prochaines années, selon la World Nuclear Association. L’an dernier, 10 nouveaux réacteurs nucléaires ont commencé à produire de l’électricité et 10 autres sont en construction en Chine, en Inde, en Turquie et en Corée du Sud.

Consultez la base de données des réacteurs nucléaires (en anglais)

Pas parfait, mais intéressant

L’intérêt nouveau pour l’énergie nucléaire est facile à comprendre, selon Normand Mousseau, professeur au département de physique de l’Université de Montréal et directeur de l’Institut de l’énergie Trottier. Il s’agit d’une source d’énergie fiable, dont le monde a besoin pour appuyer la production intermittente des éoliennes et des panneaux solaires.

La question de la disposition des déchets nucléaires, qui reste cruciale pour les environnementalistes, ne doit pas être un obstacle au développement de cette filière, estime le professeur Mousseau.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Normand Mousseau, professeur au département de physique de l’Université de Montréal et directeur de l’Institut de l’énergie Trottier

Il n’y a aucun problème à gérer les déchets avec l’enfouissement. Au Canada, on a des roches qui n’ont pas bougé depuis des milliers d’années.

Normand Mousseau, professeur au département de physique de l’Université de Montréal

Cela dit, il y a d’autres solutions, selon lui, comme le recyclage et la réutilisation du combustible irradié, qui méritent d’être explorées. « On n’a pas travaillé fort sur les nouvelles technologies liées au nucléaire depuis 50 ans », souligne-t-il.

Le nucléaire a été laissé de côté dans un contexte d’abondance de gaz naturel et de pétrole bon marché. Si l’intérêt revient, c’est qu’on voit ses avantages stratégiques pour la transition énergétique.

« Ce n’est pas parfait, mais ça reste un outil intéressant, estime-t-il. Il reste à savoir où et dans quel contexte l’énergie nucléaire peut être la plus utile. »

Ailleurs dans le monde, la renaissance du nucléaire est bel et bien amorcée. L’année dernière, l’Agence internationale de l’énergie (AIEA) atomique a relevé ses prévisions de croissance pour le nucléaire pour la première fois depuis le tremblement de terre qui avait détruit la centrale nucléaire de Fukushima en 2011. L’agence, qui relève de l’ONU, vient de revoir à la hausse ses prévisions encore cette année.

L’AIEA prévoit maintenant que la puissance nucléaire installée va doubler d’ici 2050 dans le monde, passant de 390 gigawatts actuellement à 875 gigawatts. « Les gouvernements repensent leurs portefeuilles en faveur de l’énergie nucléaire », pour sécuriser leur approvisionnement énergétique, alors que « la pandémie de COVID-19, les tensions géopolitiques et le conflit en Ukraine ont perturbé les flux et provoqué une flambée des prix », explique l’AIEA dans un communiqué publié le 26 septembre dernier.

« Si la priorité du monde est la réduction des gaz à effet de serre, alors le recours au nucléaire est incontournable, résume Gaëtan Lafrance, professeur à l’INRS et spécialiste des prévisions énergétiques. Pour des raisons techniques d’abord, parce que tous les réseaux électriques auront toujours besoin d’énergie de base, et aussi pour des raisons de sécurité énergétique. La guerre en Ukraine a rappelé à tout le monde qu’il est dangereux de trop dépendre d’un autre pays. »

De nouveaux barrages, mais pas de nucléaire au Québec

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Centrale nucléaire Gentilly-2, à Bécancour, en 2017

Le Québec ne verra pas de renaissance du nucléaire, prévoit Normand Mousseau. Hydro-Québec a fermé Gentilly-2, sa seule centrale nucléaire, en 2012 après avoir renoncé à la rénover à un coût estimé à 2 milliards en 2008.

« Au Québec, on a d’autres options avec l’hydroélectricité et la capacité de stockage des grands réservoirs, illustre-t-il. Et il y a toujours la possibilité d’ajouter des turbines aux centrales existantes pour augmenter leur production. »

Ailleurs au Canada, la construction de nouvelles centrales nucléaires est plus probable, croit-il, notamment dans les provinces productrices de pétrole qui sont sous pression pour diminuer leurs émissions de GES et qui n’ont pas beaucoup d’autres options.

Ne rien écarter, selon RBC

Comme tous les autres pays du monde, le Canada aura besoin de produire plus d’électricité pour répondre à la demande croissante générée par la transition énergétique. Il aurait tort d’exclure l’énergie nucléaire, de même que les centrales hydroélectriques, qui sont des solutions qui ne doivent pas être écartées, ont conclu les économistes de la Banque Royale après avoir analysé les options disponibles.

Le Québec a besoin d’ajouter 100 térawattheures à sa production actuelle de 200 térawattheures pour répondre à la demande prévisible d’électricité. Le gouvernement de François Legault nouvellement réélu veut relancer la construction de grands ouvrages hydroélectriques, qui doivent être planifiés longtemps à l’avance. C’est une bonne idée, selon la RBC.

Le contexte favorise le développement de l’éolien et du solaire, des sources moins chères et plus rapides à construire, mais laisse de côté le nucléaire et l’hydroélectricité. À long terme, ce pourrait être une erreur coûteuse, estime le rapport.

« Notre modélisation montre qu’un réseau qui intègre et table sur le nucléaire [et l’hydroélectricité] pourrait être plus abordable. Un réseau ne reposant que sur l’énergie renouvelable avec stockage par batteries pourrait faire grimper les coûts annuels [de la transition énergétique] de 7 milliards de dollars, tandis que la hausse serait réduite d’environ de moitié dans le cas d’un réseau plus diversifié. »

Une centrale nucléaire, comme une centrale hydroélectrique, commande des investissements importants, mais ses avantages compensent ces coûts plus élevés, estime la RBC.

Le nucléaire et l’hydroélectricité, des sources d’énergie sans émissions à la source, peuvent appuyer les approvisionnements intermittents en énergie éolienne et solaire, souligne l’analyse. « Exclure les projets hydroélectriques du réseau parce qu’on les juge actuellement chers — compte tenu du temps qu’ils prennent à construire – risque d’éliminer une source rentable et durable à long terme. »

De même, la production d’une centrale nucléaire sera moins affectée par les changements climatiques, « ce qui a une valeur plus grande dans un monde incertain ».

Lisez l’étude Le prix de l’énergie de la RBC

En savoir plus

  • 350 milliards US
    Sommes investies dans l’énergie solaire et éolienne dans le monde en 2021, comparativement à 24 milliards dans le secteur nucléaire

Source : World Nuclear Industry Report

Dossier Transition écologique La Centrale agricole : un laboratoire unique d’économie circulaire

journaldesvoisins.com | Agriculture urbaine | Publié le13 octobre 2022 | Phoeby Laplante, journaliste stagiaire


L’intérieur des bureaux de Succurbaine.(Photo : François Robert-Durand, archives JDV)

Située dans le District central, au sud-ouest d’Ahuntsic, la Centrale agricole représente une expérience unique et révolutionnaire en agriculture urbaine et en économie circulaire.

La Centrale agricole, une coopérative agricole fondée en février 2019, regroupe une vingtaine d’entreprises agroalimentaires partageant sa mission et sa vision de production agricole urbaine au sein d’un même bâtiment, tout en mettant en commun ressources et savoir-faire. La coop a obtenu un permis de l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville sous la forme de projet pilote. Elle entend se démarquer parmi la relève de l’agriculture urbaine, en centralisant ses activités à l’intérieur d’un bâtiment de 60 000 pieds carrés, complètement isolé du point de vue énergétique, sans qu’un déchet ne sorte à l’extérieur.

« Notre but est de favoriser les entreprises qui veulent participer à l’économie circulaire et la production de produits qui n’émettant aucun gaz à effet de serre, tout en réutilisant les déchets de leur production, affirmait Kevin Drouin-Léger, directeur des opérations de la Centrale agricole. Nous habitons un bâtiment où plusieurs entreprises travaillent à proximité pour faciliter le partage des ressources et l’entraide. »


Kevin Drouin-Léger, directeur des opérations de la Centrale agricole (Photo : courtoisie Centrale agricole)

TriCycle, une étonnante culture d’insectes

Une des entreprises logeant à la Centrale agricole, TriCycle, est un modèle de l’économie circulaire. Son principal objectif est de réduire le gaspillage alimentaire tout en luttant contre les changements climatiques. Entre autres, elle se démarque par sa production d’insectes en milieu fermé, qui favorise les conditions nécessaires à leur accouplement et leur alimentation.

« On doit les laisser dans le noir parce qu’ils se développent plus facilement dans l’obscurité, explique Noémie Hotte, étudiante en maîtrise de l’environnement et travailleuse chez TriCycle. Nous voulons nous assurer de créer les conditions nécessaires à la fertilisation des œufs et la maturation des coquerelles. »


La coop TriCycle et sa culture d’insectes. (Photo : François Robert-Durand, JDV)

La consommation d’insectes, ou entomophagie, s’est popularisée dans de nombreuses régions d’Afrique et d’Asie. Elle commence à peine à se manifester chez nous. Depuis le tournant du 21e siècle, elle est considérée comme un bon moyen de lutter contre le réchauffement climatique et la surconsommation de viande. Pour Mme Hotte, même si certaines personnes ne sont pas encore prêtes à déguster des insectes, elle juge ce virage nécessaire, pour que les citoyens puissent contribuer plus facilement à l’économie circulaire.

De plus, TriCycle entend réutiliser le plus possible les composants de l’insecte, y compris les excréments, pour en faire du compost. C’est pour cette raison que l’entreprise a conçu une salle où tous les déchets sont transformés en engrais. Le produit qui en est issu s’apparente à de la terre, qui est réutilisée pour la croissance des plantes.

Enfin, depuis le 16 juin 2022, TriCycle est finaliste au Défi de réduction du gaspillage alimentaire, un concours pancanadien, ce qui s’est traduit par une subvention de 400 000 $. Dans le cadre de ce concours, une somme de 1,5 M$ sera allouée au finaliste, dont le nom sera révélé à l’été 2023.

Le laboratoire à micropousses

Parmi les 16 entreprises au sein de la coopérative de la Centrale agricole, un projet, lancé en 2014, a mené au développement de micropousses en milieu fermé et dans des conditions tempérées. Il s’agit de AU/LAB, un laboratoire d’agriculture urbaine, un OSBL québécois créé par un groupe d’universitaires.

AU/LAB se spécialise dans la culture de végétaux dans une serre intérieure, soit un milieu où sont contrôlées humidité, chaleur et lumière. L’organisme a des points communs avec l’entreprise Succurbaine, une organisation fondée par deux frères, Rodolphe et Victor Bruneault, qui se passionnent pour les plantes ornementales. AU/LAB, en revanche, se spécialise dans les fruits et légumes.

« On va tenter de faire une sélection des aliments, affirme M. Drouin-Léger. On doit encore progresser sur ce plan, mais il ne s’agit pas de manipulation génétique. Nous voulons simplement exposer les végétaux à des conditions particulières pour qu’ils puissent développer la capacité que l’on recherche. »

L’immeuble abrite également la société Opercule, une pisciculture urbaine destinée à la production de protéines durables. Le producteur, dont les locaux sont situés au sous-sol, abrite plus de 35 000 poissons dans une dizaine de bassins, dont le fonctionnement est entièrement automatisé. Le système fait circuler 6 000 litres d’eau filtrée et assainie à la minute, pour un taux de récupération de plus de 99 %.

D’autres projets sont menés par la Centrale agricole, comme une champignonnière, qui est encore à l’étape de démarrage. Elle réutilise le marc de café du torréfacteur installé dans l’immeuble et a établi un partenariat avec la Cidrerie urbaine d’Ahuntsic-Cartierville.


Champignonnière à la Centrale agricole (Photo : François Robert-Durand, JDV)

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Stratégie énergétique du Québec Sophie Brochu lance un ultimatum

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Sophie Brochu, PDG d’Hydro-Québec, en décembre 2020

Francis Vailles

Francis Vailles La Presse

François Legault doit y réfléchir à deux fois avant de passer à l’acte. Car Sophie Brochu est sérieuse : elle envisage de démissionner si le gouvernement force Hydro-Québec à miser sur des projets énergivores au détriment de ceux favorables à l’environnement.

Publié à 5h00

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Selon mes informations, celle qui vient d’être nommée PDG de l’année par The Globe and Mail a eu des discussions tendues avec le ministre Pierre Fitzgibbon, le printemps dernier, lorsqu’il a été question d’adopter le processus d’approbation des grands projets industriels.

Et un tournant pourrait avoir lieu si, comme le rapportent mes collègues, le ministère de l’Énergie passait sous le contrôle d’un superministère économique dirigé par Pierre Fitzgibbon, lors des nominations ministérielles du 20 octobre.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Pierre Fitzgibbon, ministre sortant de l’Économie

Bref, Sophie Brochu n’exclut pas de quitter Hydro si l’actuel ministre de l’Économie prend le contrôle de la stratégie énergétique, stratégie qui serait alors subordonnée aux impératifs de développement économique au détriment des énormes besoins de décarbonation de l’économie.

Mes informations, obtenues de sources qui exigent la confidentialité, recoupent les sous-entendus faits par Mme Brochu lors d’une entrevue à l’émission de Paul Arcand, mercredi matin, à l’antenne du 98,5 FM.

« Tant que le cadre de gouvernance à l’intérieur du gouvernement d’Hydro-Québec est sain et qu’on est capables de faire valoir les grandes prérogatives du besoin du système énergétique, je vais être là. Mais si, pour une raison ou pour une autre, je voyais que ce système était à risque, eh bien, j’aurais de sérieuses discussions avec mon actionnaire », a-t-elle répondu à une question de l’animateur sur les rumeurs de son départ dès le printemps prochain.

Or, justement, les projets industriels qui pourraient être approuvés prochainement sont de nature à mettre à risque notre système énergétique.

Une cinquantaine de projets ont été déposés par des entreprises d’ici et de l’étranger qui exigent d’énormes blocs d’énergie. Au total, ces projets excèdent les 15 000 mégawatts (MW), soit près de 40 % de toute la puissance installée d’Hydro-Québec.

Plusieurs de ces projets portent sur le développement de l’hydrogène vert. Les experts jugent cette filière non rentable au Québec, sauf pour des besoins spécifiques limités, puisqu’il faut davantage d’énergie électrique pour produire l’énergie que n’en procure l’hydrogène tiré de l’eau. Si l’hydrogène vert est exporté, cette énergie équivaut même à une subvention aux pays acheteurs.

Les alumineries en question

Font aussi partie des dossiers qui suscitent des réserves chez Sophie Brochu les projets d’agrandissement de quelques alumineries au Québec, selon mes informations.

Ces projets sont revenus sur la table au cours de la dernière année avec l’explosion du prix de l’aluminium. Son prix a atteint 3400 $ US la tonne en mars dernier – un sommet en 25 ans – avant de redescendre à 2355 $ US cette semaine. Même en recul, ce prix demeure nettement plus élevé que la moyenne des 10 dernières années.

La liste de projets énergivores comprend également des projets d’entrepôts de serveurs.

L’enjeu porte sur le prix de vente de notre électricité. Le tarif des grands projets industriels avoisine les 5 cents le kilowattheure – les alumineries bénéficient historiquement d’un tarif moindre –, alors que le coût pour les nouveaux approvisionnements électriques d’Hydro-Québec peut atteindre 11 cents le kilowattheure.

Ce genre d’écart défavorable entre le coût de l’énergie et le prix obtenu est l’équivalent d’une subvention d’Hydro-Québec aux entreprises. Il a pour effet de faire hausser les tarifs des autres clients d’Hydro-Québec – résidentiels et autres – puisque la société d’État a des impératifs de rendement1.

Ce faisant, Hydro juge dans son plan stratégique qu’il faut privilégier les projets essentiels, surtout dans le contexte de la rareté de l’énergie et des enjeux climatiques.

Nouveaux barrages

Le différend entre Sophie Brochu et le gouvernement ne porte pas tant sur la construction de nouveaux barrages que sur leur utilisation future.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Barrage hydroélectrique Manic-5, sur la Côte-Nord

Dans son plan stratégique, Hydro-Québec estime qu’il faudra ajouter environ 100 térawattheures (TWh) de nouvelles énergies au Québec d’ici 2050, ce qui constituerait un bond de 50 % par rapport au niveau actuel, comme le faisait valoir François Legault en campagne électorale.

Toutefois, selon le plan d’Hydro, cette hausse doit surtout servir à réduire l’empreinte carbone des entreprises et à électrifier les transports.

Cette semaine, par exemple, Rio Tinto a annoncé un investissement de 737 millions à son usine de Sorel, qui est énergivore. Mais cet argent servira à réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’usine et à accroître la production de minéraux critiques pour la transition énergétique.

Les 100 TWh additionnels d’ici 2050 n’incluent pas les nouveaux projets industriels énergivores, comme ceux des alumineries, de l’hydrogène vert ou des entrepôts de données. La filière des batteries électriques, pas encore très gourmande en énergie, ne soulèverait pas de désaccord entre Sophie Brochu et Pierre Fitzgibbon.

Le « Dollarama » de l’électricité

Sophie Brochu a bien expliqué la situation à Paul Arcand : « Ce qu’il ne faut pas faire, c’est d’attirer un nombre indu de kilowattheures industriels qui veulent payer pas cher, et après ça, de construire des barrages pour les alimenter parce qu’on manque d’énergie », a-t-elle expliqué.

La PDG d’Hydro veut éviter que le Québec soit le « Dollarama » de l’électricité. Elle juge que nos faibles tarifs sont problématiques, ne représentant pas la juste valeur de notre électricité.

Hydro-Québec n’a pas voulu commenter mes informations sur l’éventualité d’une démission de Sophie Brochu, me renvoyant à ses propos à l’émission de Paul Arcand.

Pas de commentaires non plus de Pierre Fitzgibbon, bien que son ministère m’assure ne pas vouloir faire de notre énergie l’équivalent des mines de fer de Maurice Duplessis, dans les années 1950, dont le minerai était vendu au rabais aux Américains.

Hydro-Québec est une société d’État détenue à 100 % par le gouvernement du Québec. La société fait néanmoins approuver ses décisions et son plan stratégique par son conseil d’administration, formé de 16 administrateurs, la plupart venant du secteur privé, en plus de Sophie Brochu.

Un des membres est la sous-ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles et elle pourrait éventuellement relever, ultimement, de Pierre Fitzgibbon, selon le remaniement ministériel en vue.

Sophie Brochu a reçu le mandat de diriger Hydro-Québec en avril 2020 et son mandat a une durée de cinq ans.

  1. Certes, les contrats avec les alumineries lient souvent le prix payé pour l’électricité, en partie, au prix de l’aluminium, mais les grandes variations du prix de l’aluminium rendent la rentabilité fort incertaine pour Hydro-Québec.
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Environnement et solidarité Une alliance gauche-droite réclame des outils

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Cette semaine, le collectif G15+ a publié une série d’indicateurs du bien-être, qui compare l’évolution du Québec dans le temps, mais aussi par rapport à l’Ontario et à la moyenne canadienne.

Francis Vailles

Francis Vailles La Presse

Saviez-vous que le Conseil du patronat du Québec (CPQ), symbole fort du capitalisme québécois, milite pour une planète plus solidaire et plus verte ? Moi non plus.

Publié à 6h30

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C’est pourtant ce que l’on constate en lisant le manifeste du G15+, ce groupe qui veut aller au-delà du produit intérieur brut (PIB) pour mesurer nos progrès. Le gouvernement Legault aurait intérêt à tendre l’oreille.

Le groupe est composé des leaders des milieux syndical, communautaire et environnemental, mais aussi de personnalités du monde des affaires, comme le président du CPQ, Karl Blackburn, et celui de la Fédération des chambres de commerce du Québec, Charles Milliard.

Dit autrement, l’environnement et le progrès social ne sont pas seulement l’affaire des mouvements de gauche au Québec, mais aussi du milieu des affaires, qui a pourtant la réputation de répondre aux seuls impératifs des profits pour prendre des décisions.

Pourquoi une telle cohésion ? Parce que ces dirigeants jugent que la prospérité ne peut plus se faire en vase clos et au détriment de l’environnement, notamment. Et ils demandent à la population et aux élus d’agir, d’où ce groupe formé en 2020.

Indicateurs du bien-être

Cette semaine, justement, le collectif a publié une série d’indicateurs du bien-être, qui compare l’évolution du Québec dans le temps, mais aussi par rapport à l’Ontario – cible de François Legault – et à la moyenne canadienne.

Résultat ? Le Québec se compare très bien à plusieurs égards, mais il a du chemin à faire sur bien d’autres, notamment du côté environnemental. Surtout, le groupe constate qu’il nous manque plusieurs indicateurs cruciaux en environnement. Si on veut se fixer des cibles et les atteindre, comme c’est le cas pour les GES, encore faut-il pouvoir les quantifier.

Le groupe s’appuie sur une approche validée par les économistes François Delorme, de l’Université de Sherbrooke, et Emna Braham, de l’Institut du Québec.

D’abord, les bonnes nouvelles. Au Québec, 65 % des 17 indicateurs économiques disponibles ont progressé favorablement ces dernières années. Taux d’emploi, qualité de l’emploi, dette publique, revenus disponibles par habitant, jeunes en situation précaire (ni aux études ni en emploi) : tous ces indicateurs, entre autres, montrent des signes d’amélioration. En Ontario, la proportion est plutôt de 55 %.

Constat assez semblable pour les indicateurs sociaux (ou de société) : 55 % des 22 indicateurs indiquent une amélioration au Québec, contre seulement 36 % en Ontario (la moyenne canadienne est de 40 %).

Pauvreté, criminalité, logements…

Parmi les bons coups au Québec, le taux de pauvreté est en baisse, comme les inégalités hommes-femmes (emplois et salaires) et la gravité de la criminalité. Même le fameux coefficient de Gini – qui mesure les inégalités entre les riches et les pauvres – s’est amélioré.

En revanche, le logement et les efforts consacrés à la culture sont en baisse, et le milieu communautaire a besoin de bras et de fonds.

Oui, mais l’environnement ? Au Québec comme en Ontario, seulement le quart des 15 indicateurs montrent des signes d’amélioration. Surtout, 10 des 25 indicateurs jugés essentiels sont inexistants.

Ainsi, la part des territoires qui est protégée est en hausse, comme la densification urbaine et l’économie d’eau potable, ce qui est une bonne nouvelle.

Par contre, la part de l’économie verte est relativement stagnante au Québec, à 5 % du PIB, et l’indice de circularité de l’économie demeure très faible (seulement 3,5 % des matières).

Autre point faible : les véhicules en circulation sur les routes par personne sont plus élevés au Québec qu’en Ontario, et cet indicateur est en croissance constante. Ce poids plus grand du transport, notamment, explique pourquoi nos GES n’ont presque pas bougé depuis 30 ans, si l’on exclut l’année pandémique 2020, alors que la cible de 2030 approche à grands pas (baisse de 40 % au Canada par rapport à 2005).

Parmi les grands indicateurs absents figurent l’évolution des catastrophes naturelles, celle des budgets d’adaptation aux changements climatiques ou encore de séquestration de carbone.

Le parent pauvre est assurément la biodiversité : on sait peu de chose sur l’évolution des espèces menacées au Québec et à peu près rien sur l’évolution de la faune et de la flore, dans le contexte des changements climatiques.

On ne sait guère plus la part des sols du Québec qui est recouverte notamment d’asphalte, de béton et de bâtiments, soit le taux d’artificialisation des sols, ou encore de boisés et de milieux humides ni l’évolution de ces données. En France, par exemple, 5,6 % des sols sont artificialisés, contre 7,6 % en Allemagne et 11,7 % en Belgique.

Quel budget consacre-t-on à cette biodiversité ? Aucune idée.

« On a besoin de plus d’indicateurs pour poser des diagnostics, qui serviront à prendre des décisions », me dit l’économiste François Delorme, qui interpelle Statistique Canada et l’Institut de la statistique du Québec, entre autres.

La pauvreté de l’information est ironique dans le contexte où Montréal accueillera justement la COP15 sur la biodiversité en décembre, qui regroupera les pays qui ont signé une convention à ce sujet. Cette biodiversité a une incidence directe sur la santé de la planète et de sa population, qui a un impact sur tout le reste.

Ce que je pense de ces indicateurs ? Que l’exercice est très intéressant, mais qu’il serait davantage mobilisateur si les gouvernements fixaient des cibles et qu’ils exigeaient des gestes concrets pour les atteindre.

C’est ce que réclament les membres du G15+, qui s’inquiètent de l’intensification des changements climatiques, de l’érosion de la biodiversité, de la crise du logement et de la pénurie de main-d’œuvre.

« Nous sommes issus au Québec d’une culture singulière qui accorde une place de choix à la concertation et à la cohésion sociale. En misant sur le dialogue social, nous proposons une véritable transformation de notre société », écrivent les signataires, dont fait partie Karl Blackburn, du CPQ, Béatrice Alain, du Chantier de l’économie sociale, Denis Boldus, de la FTQ, et Colleen Thorpe, d’Équiterre.

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Planète bleue, idées vertes Devrait-on recycler l’eau des piscines ?

PHOTO CHARLY TRIBALLEAU, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Des employés municipaux vident la piscine Alfred-Nakache, de Toulouse, et utilisent l’eau à d’autres fins, notamment pour arroser de jeunes arbres et des fleurs.

La Ville de Toulouse, dans le sud-ouest de la France, a décidé de réutiliser l’eau de l’une des plus grandes piscines d’Europe pour arroser ses espaces verts, après plusieurs épisodes de canicule. Pourrait-on faire la même chose au Québec ?

Publié à 6h00

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Frédérik-Xavier Duhamel

Frédérik-Xavier Duhamel La Presse

« Depuis près d’un siècle, on vidange cette piscine à la fin de l’été, sans se poser de questions. Cette année, on s’est dit : “Pourquoi ne pas récupérer l’eau ?” », a déclaré le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc.

Pour la rendre propre à l’arrosage, les traitements chlorés ont cessé à la fin d’août. Des camions-citernes ont vidé la piscine Alfred-Nakache de ses six millions de litres d’eau en septembre.

« Cette eau va être introduite dans un certain nombre de parcs, de jardins où on a fait des plantations récentes, notamment [pour arroser] de jeunes arbres, qui ont moins de trois ans et qui ont beaucoup souffert avec la canicule de l’été », a précisé M. Moudenc. Des fontaines ou des bassins de jardins publics seront également approvisionnés avec l’eau de cette piscine.

PHOTO CHARLY TRIBALLEAU, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

L’expérience de récupération de l’eau de la piscine Alfred-Nakache, de Toulouse, sera répétée l’an prochain.

« Le coût est difficile à évaluer, car cela a été fait avec du matériel appartenant déjà à la Ville par les agents de la Ville », indique la porte-parole Stéphanie Arnaud.

Quoi qu’il en soit, Toulouse a bien l’intention de recommencer l’an prochain « de façon plus organisée encore » et se penche sur la possibilité de récupérer l’eau de plus petites piscines également.

« C’est renvoyé aux égouts, tout simplement »

« À Montréal, l’eau des piscines publiques pour l’ensemble des piscines extérieures n’est pas recyclée actuellement, explique la porte-parole de la Ville, Mélanie Dallaire. Cette eau se retrouve dans le réseau des eaux usées pour des raisons d’enjeu de contamination, considérant les produits chimiques utilisés. »

« En ce moment, dans la quasi-totalité des cas, c’est renvoyé aux égouts, tout simplement », confirme Éric Hervieux, président de l’Association des responsables aquatiques du Québec (ARAQ), qui représente plus de 300 membres.

M. Hervieux souligne que le climat de Toulouse n’est pas celui de Montréal — les vidanges, ici, n’arrivent pas nécessairement à un moment propice à l’arrosage des cultures, avec l’arrivée du temps froid. Il n’est toutefois pas fermé à l’idée de recycler l’eau pour d’autres usages, tout dépend des coûts d’une telle opération.

De l’eau de piscine pour alimenter les sanitaires

Et la Ville a déjà fait un pas dans cette direction.

Pour certains projets d’envergure, comme celui du Complexe aquatique de Rosemont, l’eau rejetée est conservée et utilisée pour alimenter les installations sanitaires.

Mélanie Dallaire, porte-parole de la Ville de Montréal

Bien qu’il ne s’agisse pas d’une piscine extérieure, une partie de l’eau doit néanmoins être rejetée « afin de maintenir une eau de baignade de qualité », et dans le cadre des opérations de lavage des filtres.

Mais au Complexe aquatique de Rosemont, « nous avons prévu l’aménagement d’un réservoir de récupération de ces eaux plutôt que de les rejeter aux égouts, explique Mme Dallaire. Ainsi, lorsque les citoyens utilisent les toilettes du Complexe aquatique, l’eau utilisée provient des eaux de piscine, évitant du même coup de gaspiller l’eau potable ».

Et cette réalisation pourrait faire des petits. « Nous sommes à la première année d’opération, ce concept sera évalué afin de déterminer s’il sera réutilisé dans de futurs projets », dit la porte-parole.

Rébecca Pétrin, directrice générale de l’organisme Eau Secours, rappelle cependant que Montréal perd encore une grande partie de son eau par des fuites dans les canalisations. « S’ils ont une priorité à mettre de l’avant pour économiser l’eau potable, ça demeure celle-là », tranche-t-elle.

Lisez l’article « Réseaux d’aqueduc et d’égouts : les fuites en baisse à Montréal »

Avec l’Agence France-Presse

En savoir plus

  • 150 m sur 50 m
    Construite dans les années 1930, la piscine Alfred-Nakache, de Toulouse, est présentée comme la plus grande d’Europe, avec ses 150 m de long et 50 m de large.

Source : Agence France-Presse

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Québec a autorisé des travaux à Laval dans des milieux humides


Photo: Jacques Nadeau, Le Devoir
Le ministre Benoit Charette a donné son aval pour la destruction de milieux humides abritant six espèces en péril.

Ulysse Bergeron et Alexandre Shields
22 octobre 2022

Avant d’être nommé ministre responsable de la Faune, Benoit Charette a autorisé la Ville de Laval à détruire des milieux humides qui constituaient un habitat pour six espèces en péril afin de permettre la réalisation d’un projet de développement urbain. Un avis d’experts du gouvernement a été produit avant l’octroi des autorisations, mais le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs a refusé de le transmettre au Devoir.

Afin de pouvoir lancer les travaux de construction d’infrastructures nécessaires au développement immobilier prévu de part et d’autre du boulevard Lévesque, dans l’est de la ville, Laval a déposé des demandes d’autorisations au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) et au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC).

Le MFFP dit ainsi avoir « collaboré à l’analyse du projet », qui prévoit de rogner sur un autre espace vert de l’Île Jésus, mais aussi sur le littoral de la rivière des Prairies. Le ministère n’a pas effectué lui-même d’inventaire des espèces fauniques présentes dans le secteur. Celui-ci a été fait soit par le promoteur, soit par la Ville de Laval.

Les biologistes du MFFP ont toutefois pu « dresser un portrait adéquat de la situation » en s’appuyant sur cet inventaire, mais aussi sur des données déjà disponibles. Les experts du gouvernement ont même produit un « avis », qui permet de préciser quels seraient les impacts du projet sur la faune, notamment sur les espèces menacées. Le ministère a refusé de le transmettre au Devoir, en précisant qu’il « n’est pas public ».

À la suite de cet avis, la Ville de Laval a obtenu des « permis SEG » de la part du MFFP. Ceux-ci permettent « la capture et la manipulation d’animaux ». Dans ce cas précis, « ces permis visent l’application des mesures d’atténuation des impacts demandées dans l’avis faunique et l’autorisation du MFFP », indique le ministère. Au moins une espèce « à statut précaire » a donc pu être déplacée pour permettre les travaux de développement urbain.

Il a par ailleurs été possible d’apprendre que « plusieurs espèces de poissons à statut précaire » sont connues pour fréquenter la rivière des Prairies, mais elles n’ont pas été détectées « près de la zone des travaux et du site ». Sur le terrain où les travaux sont déjà en cours, on ne retrouve pas moins de six espèces menacées, dont cinq bénéficient d’un statut en vertu de la Loi sur les espèces en péril du gouvernement fédéral.

Malgré la présence de ces espèces, dont l’habitat a été considérablement réduit au fil des ans en raison de l’étalement urbain, le promoteur a pu obtenir une « autorisation ministérielle » de la part du MELCC, donc de la part du ministre Benoit Charette. Celle-ci a été émise à la « suite de l’analyse des documents et informations fournies par le requérant » dans le cadre de sa demande et « après que le MELCC a obtenu des réponses satisfaisantes à toutes ses questions, notamment sur la mise en place de mesures de mitigation qui permettent de réduire l’impact du projet sur l’environnement ».

Dans le cadre de ce projet, Laval a décidé de verser environ 265 000 de dollars pour compenser la destruction de milieux humides, comme le permet la Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques, qui devait normalement mettre fin aux pertes de ces écosystèmes critiques.

Un Code de l’urbanisme

Les travaux se déroulent alors que la Ville de Laval dit vouloir encadrer davantage l’aménagement du territoire. Depuis mai 2020, elle est en processus pour adopter un règlement afin de protéger des « milieux humides d’intérêt ». Ceux-ci ont d’ailleurs été cartographiés. Or, le site au nord du boulevard Lévesque qui sert d’habitat à des espèces menacées n’y apparaît pas. Pourtant, dans une étude d’impacts que la Ville a elle-même produite, une partie du site — d’une superficie de 3,7 hectares (37 000 m2) — est présentée comme « un complexe de marécages bordés de marais ».

Laval a récemment adopté un nouveau code d’urbanisme qui n’est, par ailleurs, toujours pas entré en vigueur. Par conséquent, les règlements d’urbanisme qui encadrent le développement datent encore de 1970. Telle que décrite, la nouvelle réglementation à venir a pour but de protéger les milieux naturels pour permettre « aux Lavallois d’avoir accès à des espaces verts de qualité, en plus de préserver les corridors écologiques ».

Les nouveaux projets devront aussi limiter les places de stationnement, restreindre les îlots de chaleur et intégrer des équipements écologiques, comme des systèmes géothermiques ou des toitures vertes.

Les promoteurs devront se plier à de nouvelles exigences en intégrant des « aménagements paysagers d’une qualité environnementale supérieure » pour assurer la rétention des eaux, « plutôt que leur traitement dans les infrastructures municipales ».

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La CAQ en reconfirmant Charette comme ministre de l’Environnement, prouve son total entêtement à considérer l’environnement comme une simple commodité, dont on peut disposer au profit d’une économie en porte-à-faux avec le développement durable.

Que faudra-t-il pour que ce gouvernement revienne sur terre et qu’il cesse de malmener la qualité environnementale de notre territoire? Faudra pourtant que la population se lève et pèse de tout son poids pour que les choses changent vraiment, car 4 ans de plus de ce régime destructeur et irresponsable n’augure rien de bon pour le présent et encore moins pour l’avenir.

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Je ne sais pas pourquoi on s’en prend au gouvernement dans ce cas-ci. Il n’a fait qu’autoriser une demande de la ville de Laval. Oui, on aurait souhaité une plus grande préoccupation de la part du ministère afin de bloquer ce projet mais en bout de ligne c’est à la ville que revient le blâme, si blâme il y a. Et si la population devait réagir, c’est plutôt contre la ville aussi, à mon humble avis, non ?

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Certaines compétences sont bien du ressort des ministères lors de demandes de permis. Je ne connais pas ces cas-ci précisément, mais ce que j’en comprends, c’est que Québec avait la responsabilité d’approuver ou non le permis du promoteur pour le développement immobilier et le permis de la Ville de Laval pour construire des infrastructures. Ces deux demandes étaient donc du ressort du ministère.

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Le gouvernement fédéral peut sévir ou arrêter des projets qui mettent en danger certaines espèces protégées par le fédéral.

Un exemple ici

Hydro-Québec condamnée à payer 40 000 $ en lien avec la rainette du faux-grillon


La rainette faux-grillon de l’Ouest adulte n’atteint même pas une longueur de 4 cm; l’espèce est protégée par le gouvernement fédéral depuis 2016.
PHOTO : ISTOCK / CHRISTINA PRINN

Hugo Prévost
Publié à 13 h 36

Environnement et Changement climatique Canada met Hydro-Québec à l’amende, pour un montant de 40 000 $, en raison de travaux, réalisés sur la rive sud de Montréal, qui ont enfreint les mesures mises en place pour protéger la rainette faux-grillon de l’Ouest.

Dans un communiqué transmis mardi avant-midi, le ministère fédéral précise que cette violation de la Loi sur les espèces en péril est survenue à La Prairie.

La présence d’équipement lourd destiné à des travaux aurait été remarquée à la fin du mois de mars dernier, dans la zone où s’appliquent les mesures d’urgence pour protéger ce batracien menacé.

Une enquête menée par des agents du ministère a permis de déterminer qu’Hydro-Québec était responsable des travaux qui ont causé des dommages visibles sur une zone estimée à plus de 3955 mètres carrés, indique-t-on dans le communiqué.

La Loi interdit de tuer une espèce sauvage inscrite comme espèce menacée ou de lui nuire ainsi que d’endommager ou de détruire son habitat. Le Décret d’urgence [les mesures de préservation, NDLR] interdit d’installer ou de construire une infrastructure ou de procéder à toute forme d’entretien d’une infrastructure dans l’aire d’application, rappelle encore Environnement et Changement climatique Canada.

Espèce protégée par le fédéral

En juin 2016, le gouvernement fédéral a annoncé l’entrée en vigueur de ce décret d’urgence pour protéger la rainette, une espèce de minuscules grenouilles aux taches brunes.

La zone de protection délimitée englobe un territoire d’environ deux kilomètres carrés, qui comprend des parties des municipalités de La Prairie, Candiac et Saint-Philippe, à l’ouest de Longueuil.

Depuis cette annonce, la Communauté métropolitaine de Montréal a adopté, en avril dernier, un nouveau règlement qui permettra de protéger 12 367 hectares de milieux naturels supplémentaires et l’entièreté de l’habitat de la rainette faux-grillon de l’Ouest.

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L’année dangereuse de Steven Guilbeault

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement du Canada

Paul Journet

Paul Journet La Presse

Quand Justin Trudeau est invité dans les sommets environnementaux, il ne se fait plus applaudir. La semaine dernière, le premier ministre a subi une entrevue corsée lors de la conférence de l’Institut climatique du Canada.

Publié à 6h00

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Ses discours optimistes ont passé leur date d’expiration. L’heure est aux bilans, et le sien est décevant. Depuis l’Accord de Paris en 2015, le Canada est le cancre du G7 en matière de réduction de gaz à effet de serre (GES). Il occupe aussi le deuxième rang pour le pire taux par habitant du G20, tout juste derrière l’Arabie saoudite. Et sa province qui pollue le plus, l’Alberta, continue sa fuite vers l’avant.

Pour racheter sa crédibilité, M. Trudeau compte sur une personne : Steven Guilbeault.

Vendredi, cela fera une année que l’ex-militant écologiste a été nommé ministre de l’Environnement. Pour l’instant, il passe sous les projecteurs. On se demande ce qu’il fait.

La réponse courte : beaucoup de choses.

Il pilote déjà plus de six réformes. Mais aucune n’a encore abouti, et la route devant lui est remplie de dangers.

Il veut plafonner les émissions de GES du gaz et du pétrole. Les consultations viennent de se terminer. Le cadre devrait être déposé dans les prochains mois. On saura à partir de quand le plafond s’appliquera, à quel rythme les émissions diminueront et si des exceptions seront prévues. Mais déjà, l’Alberta menace de contester devant les tribunaux.

Deuxième mesure, créer une norme canadienne sur l’électricité propre. L’objectif : la carboneutralité d’ici 2035. Cela implique des changements majeurs, notamment en Ontario et en Alberta, provinces qui dépendent encore beaucoup du gaz. Et aussi en Nouvelle-Écosse et en Saskatchewan, où le charbon est parfois utilisé.

Mais comme pour le plafond des émissions, il s’agit d’une compétence partagée avec les provinces, et leur collaboration est loin d’être acquise… Par exemple, peu après sa première élection, Doug Ford avait retiré l’Ontario du marché du carbone et avait annulé des projets éoliens et solaires.

Les autres mesures prévues ne seront pas simples non plus.

M. Guilbeault veut forcer les constructeurs à offrir un seuil minimal de véhicules électriques. Le règlement laxiste du Québec, qui aura peu d’effet avant 2029, constitue l’exemple à ne pas imiter.

Il veut aussi réduire les émissions de méthane pour l’agriculture et pour les déchets. Et il renforcerait le règlement en vigueur pour le secteur pétrolier et gazier. Après la baisse prévue de – 40 % en 2025, on passerait à - 75 % en 2030.

À cela s’ajoutent trois autres morceaux.

Il y a le dépôt attendu d’un projet de loi sur la transition juste. En agissant dans leurs mandats précédents, les libéraux auraient pu rassurer les travailleurs. Mais aux Ressources naturelles, le simple terme de « transition énergétique » est tabou.

M. Guilbeault promet aussi d’éliminer graduellement les subventions aux énergies fossiles. Reste à voir quelles exceptions seront prévues pour financer la capture du carbone, une technologie qui n’a pas fait ses preuves et qui sert pour l’instant de prétexte à l’industrie pour continuer d’augmenter sa production.

Et enfin, il y a la mise à jour du marché du carbone. Les provinces qui le tarifient déjà devaient soumettre leur plan à Ottawa pour la période 2023-2030.

On vérifiera si leurs systèmes se conforment aux exigences fédérales. Ce sera un test pour le Québec, qui est passé de pionnier à élève très moyen à cause de son prix modeste sur la pollution.

M. Guilbeault doit commencer à se sentir un peu seul.

Le 11 octobre, à Washington, la vice-première ministre Chrystia Freeland a esquissé ce qui ressemble à la nouvelle stratégie géopolitique du Canada. Les démocraties alliées doivent se serrer les coudes, a-t-elle plaidé dans un discours. Pour Ottawa, cela passerait par une hausse des exportations de ressources naturelles afin de remplacer la Russie.

En parallèle, le lobby pétrolier s’active. Dans les rues du centre-ville d’Ottawa, une affiche proclame que « le monde aura besoin de pétrole et de gaz pour les prochaines décennies à venir ». Un unifolié flotte bravement dans un ciel bleu pur. Puis on pose la question : « D’où [cette énergie] devrait-elle venir ? » On omet toutefois de rappeler que, selon les climatologues, les émissions mondiales doivent commencer à diminuer dès 2025 pour éviter le pire. Je répète : en 2025. Demain matin.

C’est dans ce contexte que certaines provinces veulent bloquer le fédéral. L’Alberta conteste même devant les tribunaux le projet libéral de restreindre les emballages en plastique. Tout comme des multinationales comme Dow et Imperial Oil, elle allègue que la toxicité du plastique n’est pas prouvée.

Certes, l’obstruction de certaines provinces n’explique pas toutes les hésitations et tous les reculs du gouvernement Trudeau.

Une belle preuve : le récent feu vert accordé au projet pétrolier de Bay du Nord. Et le gouvernement Trudeau n’a que lui-même à blâmer s’il a tant attendu avant de lancer ces nouvelles réformes.

D’autant plus que le pire pourrait être à venir. Les libéraux doivent prier pour que Danielle Smith, nouvelle première ministre de l’Alberta issue de la droite pure et dure, perde ses élections en mai prochain.

Et si les libéraux reportent leurs annonces de quelques mois pour ne pas donner de munitions à Mme Smith en campagne électorale, ils prendraient un pari énorme. Car leur mandat à Ottawa est minoritaire, et Pierre Poilievre les a rattrapés dans les sondages.

Voilà le contexte dans lequel M. Guilbeault travaille. Pour lui comme pour le climat, l’année à venir sera périlleuse.

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C’est annoncé depuis longtemps. Il me semble qu’ils ont eu assez de temps pour s’y préparer…

La consigne élargie doit être repoussée en 2025, plaident les détaillants


La consigne élargie doit normalement entrer en vigueur le 1er novembre 2023 au Québec.
PHOTO : ISTOCK

Alexandre Duval
Publié à 4 h 00

Le gouvernement est « en dehors de la track » s’il croit encore possible d’implanter un système de consigne élargie dans un an, selon l’Association des détaillants en alimentation du Québec (ADAQ), qui demande « de l’ouverture » au ministre de l’Environnement pour reporter cette réforme en 2025.

Ce n’est pas qu’on est contre [la consigne élargie] : on veut juste prendre le temps de bien faire les choses, insiste le vice-président aux affaires publiques de l’ADAQ, Stéphane Lacasse.

À compter du 1er novembre 2023, au Québec, tous les contenants de boissons de 100 ml à 2 litres devront être consignés, qu’il soient faits de verre, de plastique ou de carton enduit de plastique (comme les contenants de lait, par exemple). Aux bouteilles de bière et de boissons gazeuses s’ajouteront donc les bouteilles de vin, de spiritueux, de jus et d’eau pétillante, notamment.

Environ deux milliards de contenants additionnels devraient donc être consignés chaque année au Québec, ce qui accroîtra de manière considérable les volumes de matières retournées chez les épiciers.

Ce changement nécessitera aussi l’ajout d’infrastructures adaptées aux nouveaux formats et aux nouvelles matières de contenants consignés.

« On ne veut pas que ce soit un échec. »

— Une citation de Stéphane Lacasse, vice-président aux affaires publiques de l’ADAQ

Plus tôt cette année, l’ADAQ croyait que le travail nécessaire pourrait être accompli en repoussant la réforme d’un an, mais il lui apparaît maintenant clair que la province ne pourra pas y arriver avant 2025.

L’instauration de la consigne élargie a déjà été reportée au cours du premier mandat de la Coalition avenir Québec (CAQ), mais M. Lacasse estime que la nouvelle échéance arrive encore trop tôt et entraînerait des ruptures de services.

On est mieux de prendre notre temps, de s’assurer que les lieux soient prêts, que les équipements soient prêts et que les installations soient prêtes pour accueillir le client au jour 1, a fait valoir M. Lacasse à titre d’illustration.

Écueils à l’horizon

Au-delà des gobeuses, qui devront être réparties dans un minimum de 1500 sites à travers la province, M. Lacasse indique qu’il y aura des questions réglementaires à résoudre pour implanter ces machines à l’extérieur dans certaines municipalités.

Il entrevoit aussi une pénurie de camionneurs pour venir vider les gobeuses et pour rediriger les matières récupérées vers des centres de tri.

Lors de la dernière campagne électorale, l’ADAQ avait écrit à tous les partis politiques pour les informer de ses craintes et pour réclamer des engagements de leur part.

M. Lacasse confirme avoir eu un accusé de réception de la CAQ, mais sans plus. Il réclame maintenant une rencontre avec le ministre Benoît Charette pour lui exposer toute la complexité de la situation.

Le ministre a décliné la demande d’entrevue de Radio-Canada. Son attachée de presse confirme cependant avoir effectivement reçu la lettre de l’Association des détaillants en alimentation et promet qu’une réponse leur sera acheminée sous peu.

Craintes partagées

Au début de la semaine, l’Association québécoise de recyclage des contenants de boissons (AQRCB) a reçu la confirmation qu’elle aura la responsabilité de la gestion du nouveau système de consigne.

L’AQRCB devra, dès le mois de novembre 2022, entreprendre des démarches en vue de conclure des contrats établissant les paramètres qui encadreront la participation des détaillants visés par l’élargissement de la consigne, indique le ministère de l’Environnement par courriel.

L’AQRCB et les détaillants ont ainsi plusieurs mois pour convenir de ces paramètres et pour assurer une mise en œuvre optimale du système modernisé à temps pour le 1er novembre 2023, ajoute le ministère.

Un des administrateurs de l’AQRCB est conscient que sa mission, c’est de tout faire pour y arriver, mais il assure avoir déjà manifesté ses craintes au gouvernement.

« On a déjà annoncé au gouvernement les difficultés qu’on allait rencontrer. On a signalé dès le dépôt du règlement que les délais étaient trop serrés d’après nous. »

— Une citation de Martin-Pierre Pelletier, administrateur de l’AQRCB

On avait peur que ça nous mène dans une situation où l’expérience des Québécois ne sera pas à la hauteur de leurs attentes si on va trop vite, ajoute M. Pelletier.

L’ADAQ se demande par ailleurs sur quels éléments factuels se base le ministère de l’Environnement pour affirmer que la date butoir du 1er novembre 2023 est encore réaliste.

Est-ce qu’ils ont des lettres d’intention des fabricants qui vont leur assurer un [nombre suffisant] de machines de récupération? se demande M. Lacasse.

Est-ce que le ministère a des lettres de [l’AQRCB] démontrant le nombre de camions supplémentaires qui vont être sur les routes pour récupérer ces contenants-là? Est-ce que la chaîne logistique est prête?

M. Lacasse estime que l’implantation de la consigne élargie pourrait nécessiter des investissements d’au moins un milliard de dollars.