Résumé
Les transporteurs à bas prix piquent du nez, votre portefeuille écope
Par Philippe Chabot, Le Soleil
15 février 2025 à 04h00
Qu’ont en commun Lynx Air, Swoop Airlines et Canada Jetlines? Ce sont quelques compagnies aériennes à bas prix, parmi une longue liste, qui ont été chassées en dehors du Canada (Todd Korol/Archives La Presse Canadienne)
VOYAGEUR AVERTI, 2e DE 3/ Qu’ont en commun Lynx Air, Swoop Airlines et Canada Jetlines? Ce sont quelques compagnies aériennes à bas prix, parmi une longue liste, qui ont été chassées en dehors du Canada. Et cela à des répercussions sur votre portefeuille.
«Ces compagnies représentaient trois des quatre compagnies aériennes à bas prix au Canada. Elles ont toutes disparu. Flair est la seule qui subsiste encore», a écrit le président-directeur général du transporteur, Maciej Wilk, dans une lettre envoyée au Bureau de la concurrence Canada.
«Nous savons qu’il nous reste beaucoup à faire pour améliorer notre compagnie aérienne, et nous ne cherchons pas d’excuses à la médiocrité passée. Mais nous sommes les seuls qui restent — nous sommes la dernière chance pour le Canada d’offrir un véritable transport aérien à bas prix», a-t-il ajouté.
Entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023, Flair a enregistré en moyenne 15,3 plaintes par centaine de vols. (La Presse Canadienne / Flair Airlines)
Le PDG avance que, lorsque Flair entre sur un marché, le prix pour un billet d’avion est réduit en moyenne de 34 % dans ce marché. En 2023, le transporteur aurait permis aux Canadiens d’économiser plus de 415 millions de dollars. Il est toutefois difficile de confirmer cela.
Seule contre tous, la vie n’est pas si rose pour la dernière «vraie» compagnie aérienne à bas prix au pays. D’ailleurs, elle délaisse pour de bon le Québec en avril pour se concentrer davantage dans l’ouest du pays.
«Depuis 30 ans, je regarde les transporteurs à bas prix s’installer au Canada puis faire faillite après deux à trois ans», fait savoir au Soleil John Gradek, coordonnateur du programme de gestion en aviation à l’Université McGill.
«Par exemple, la compagnie à bas coût Lynx Air ne voyait pas d’avenir au Canada. Les actionnaires ont décidé d’investir leurs fonds dans d’autres marchés plutôt que de tenter de faire compétition ici», poursuit-il.
Si la dernière décennie a donné raison d’être optimiste pour les voyageurs canadiens avec l’émergence de nouvelles compagnies aériennes au pays, les déboires récents de celles-ci nous ramènent rapidement à la réalité, mentionne la Canadian Anti-Monopoly Project, un groupe de réflexion sur le pouvoir des monopoles.
Une compétition jugée inégale
La réalité, c’est qu’Air Canada et WestJet ont la mainmise sur le transport aérien au Canada.
«Nous sommes dans un pays où il n’y a pas vraiment de compétition», affirme le directeur de l’Observatoire international de l’aéronautique et de l’aviation civile à l’UQAM, Mehran Ebrahimi.
Pour prouver ce point, le Dr Gábor Lukács, président de l’organisme bénévole indépendant Droits des voyageurs (DV), a calculé l’indice de Herfindahl-Hirschmann pour mesurer la concentration du marché canadien, c’est-à-dire la part de marché de toutes les entreprises du secteur. Plus le résultat est élevé, moins il y a de concurrence.
«Entre 2014 et 2019, l’IHH pour le transport aérien au Canada était supérieur à 4200, ce qui indique une forte concentration du marché. Au cours de la même période, l’IHH du marché américain du transport aérien intérieur n’était que d’environ 1200», indique-t-il au Soleil.
En règle générale, les marchés dont l’IHH est compris entre 1 000 et 1 800 sont considérés comme modérément concentrés, et ceux dont l’IHH est supérieur à 1 800 sont considérés comme très concentrés, donc très peu ouvert à la compétition.
Et cela n’est que la pointe de l’iceberg, mentionne John Gradek. Selon lui, les transporteurs aériens établis au Canada font tout en leur pouvoir pour que les nouvelles compagnies aériennes à bas prix ne puissent pas survivre ici.
Un avis partagé entre autres par M. Ebrahimi et par le Centre pour la défense de l’intérêt public. Ceux-ci disent qu’Air Canada et Westjet, qui ont des reins financier solides, réduisent leurs prix au même niveau que les transporteurs au rabais, sinon plus bas, ce qui a mené à la perte de Lynx Air, par exemple, qui ne pouvait tout simplement pas rivaliser avec eux.
«Il n’y a aucune protection pour les petites compagnies. On ne donne pas la chance aux coureurs», signale M. Gradek.
«Les décideurs politiques devraient fixer des prix planchers pour les transporteurs dominants. Ces conditions empêcheraient les grands transporteurs d’opérer d’une manière qui pourrait nuire aux concurrents», a lancé le Centre pour la défense de l’intérêt public.
Un coup de pouce pour le portefeuille des Canadiens
En plus d‘imposer un prix plancher à Air Canada et WestJet, les différents acteurs de l’industrie nous ont partagé d’autres solutions permettant de rééquilibrer la compétition et possiblement faire baisser le prix des billets d’avion.
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La plupart d’entre eux croit fortement que les aéroports devraient réserver de bons créneaux horaires pour les nouvelles compagnies aériennes à bas prix. Car un bel horaire permet d’attirer plus de passagers et assurer la pérennité de la ligne aérienne.
«Les nouveaux arrivants sont exclus des heures de vol les plus importantes tout au long de la journée dans les principaux aéroports canadiens. Cette situation confère des avantages considérables en termes de recettes aux transporteurs en place», a dénoncé Maciej Wilk.
La Commission australienne de la concurrence et de la consommation a également estimé qu’il s’agissait du moyen le plus efficace de renforcer la compétition au profit des consommateurs.
Pour remédier au déficit de concurrence sur le marché canadien du transport aérien, Dr Gábor Lukács propose quant à lui d’accorder à certaines compagnies aériennes étrangères dignes de confiance le droit d’exploiter des vols à l’intérieur du Canada. L’augmentation de l’offre se traduirait par une baisse de prix.
Emirates ou Air France pourrait, par exemple, faire Québec—Montréal. Cette option ne fait toutefois pas l’unanimité.
«Ce concept a des risques. C’est une façon rapide de faire entrer de la compétition au pays, mais les nouveaux joueurs peuvent sortir très rapidement du marché. Il n’y a aucune règle pour les ancrer au Canada», explique John Gradek.
Bref, le Bureau de la concurrence aura la lourde de tâche de cibler les meilleures solutions et les proposer au gouvernement pour égaliser les règles du jeu entre les grandes compagnies aériennes et les plus petites à bas prix.
«Le consommateur canadien ne peut pas se permettre que la concurrence souffre plus qu’elle ne le fait déjà», a laissé tomber le PDG de Flair.
Le Soleil s’est penché sur le prix élevé des billets d’avion au Canada. Nous vous proposons une série de trois articles sur le sujet. Prochain rendez-vous lundi.
Résumé
Air Canada pourrait réduire ses vols vers les États-Unis
Par La Presse Canadienne
14 février 2025 à 09h38|
Mis à jour le14 février 2025 à 17h54
Air Canada a précisé que sa perte s’est élevée à 1,81 $ par action pour le trimestre qui a pris fin le 31 décembre. (Sean Kilpatrick/Archives La Presse Canadienne)
Air Canada pourrait réduire ses vols vers certaines destinations américaines plus tard cette année si la demande des voyageurs commence à faiblir, car la compagnie aérienne reconnaît vendredi qu’elle fait face à l’incertitude liée à l’environnement économique actuel, notamment à la menace des tarifs douaniers.
Le transporteur aérien établi à Montréal se prépare au cas où les clients décideraient de voler moins souvent vers le sud de la frontière en 2025, indique le vice-président général, chiffre d’affaires et planification du réseau, Mark Galardo.
Mais il prévient que cela n’a pas encore été le cas, les tendances de réservation de janvier étant conformes aux attentes de l’entreprise.
«Nous prévoyons de manière proactive qu’il pourrait y avoir un ralentissement», avance M. Galardo aux analystes lors d’une conférence téléphonique, alors que la compagnie aérienne présentait ses résultats du quatrième trimestre.
«Aux États-Unis, nous ne voyons pas de ralentissement majeur ni rien de substantiel qui pourrait modifier notre vision du marché. Cela étant dit, si nous pouvions réduire un peu les risques et être un peu proactifs et déplacer la capacité vers d’autres secteurs dans lesquels nous voyons des forces, je pense que ce serait la bonne décision à prendre en ce moment dans ce contexte.»
M. Galardo souligne que les destinations de loisirs, comme la Floride, Las Vegas et l’Arizona, pourraient être touchées si les Canadiens renonçaient à leurs projets de voyage aux États-Unis.
Il ajoute qu’il pourrait y avoir une occasion de redéployer des avions vers les marchés de loisirs canadiens à la place.
«Il est encore prématuré de discuter de l’impact potentiel, le cas échéant, des tarifs réglementaires réels ou potentiels ou d’éventuelles représailles», affirme M. Galardo.
«Nous surveillons avec diligence et en permanence le comportement des clients et la dynamique du marché. Si ces derniers évoluent à l’avenir, nous disposons d’une grande flexibilité pour réagir en déplaçant la capacité comme nous l’avons toujours fait.»
Prévisions maintenues
Malgré ces préparatifs, Air Canada maintient ses prévisions pour 2025. Dans ses perspectives, la compagnie aérienne indique qu’elle s’attend à ce que sa capacité mesurée en sièges-miles disponibles augmente de 3 à 5 % par rapport à 2024.
Elle estime que ses frais ajustés par siège-mile disponible se placent entre 14,25 et 14,50 cents.
Le transporteur précise que son coût ajusté par siège-mile disponible pour 2024 est de 13,80 cents, soit une augmentation de 2,3 % par rapport à 2023.
Au quatrième trimestre, Air Canada subit une perte de 644 millions $, comparativement à un bénéfice de 184 millions $ au même trimestre un an plus tôt, alors que ses revenus d’exploitation augmentent. La compagnie aérienne ajoute que sa perte s’élève à 1,81 $ par action pour le trimestre clos le 31 décembre, contre un bénéfice de 41 cents par action il y a un an.
Les revenus d’exploitation pour le trimestre totalisent 5,4 milliards $, en hausse par rapport à 5,2 milliards $ au même trimestre de l’exercice précédent.
Air Canada dit avoir gagné 25 cents par action sur une base ajustée, contre une perte ajustée de 12 cents par action au même trimestre l’année dernière. Les analystes s’attendaient en moyenne à un bénéfice ajusté de 26 cents par action, selon LSEG Data & Analytics.
«Dans l’ensemble, nous considérons les résultats et les prévisions pour 2025 comme positifs, commente James McGarragle, analyste à la Banque Royale, dans une note. Toutefois, nous pensons que le sentiment sera influencé par les impacts sur les voyages en raison de l’incertitude tarifaire.»
Le président et chef de la direction, Michael Rousseau, indique que la compagnie aérienne «poursuivra ses efforts en vue de composer avec l’incertitude et les pressions externes avec prudence et détermination», notant qu’Air Canada est prête à s’adapter rapidement aux «changements ou aux défis qui pourraient se présenter».
Les actions d’Air Canada ont clôturé en baisse de 2,6 % à 17,75 $ à la Bourse de Toronto vendredi.
Entreprise dans cette dépêche: (TSX:AC)









 
  
 
  


