Mes trois cartes Opus
Clémence Lamarche| 07 Décembre 2022, 06h26
Comment la simplification des tarifs de transport en commun mène à la multiplication des cartes dans mon sac à main.
J’habite la très charmante municipalité de Longueuil, juste de l’autre côté du pont Jacques-Cartier, à très exactement 7 km de mon lieu de travail. Comme bien des familles de mon quartier, nous avons fait le choix, il y a plusieurs années, de n’avoir qu’une seule voiture. Cette décision a été prise pour des raisons économiques, écologiques, et aussi parce que je n’aime pas vraiment conduire. Cela implique que je marche beaucoup, je prends aussi souvent mon vélo et j’utilise les transports en commun.
Dans le monde prépandémique, j’allais au bureau quatre ou cinq jours par semaine. J’achetais donc une passe mensuelle. Exceptionnellement, quand je prenais mes vacances et que ça ne valait pas la peine d’acheter ma passe, je me procurais des billets d’autobus du Réseau de transport de Longueuil ainsi que des billets de métro-autobus de la Société de transport de Montréal. Je les mettais (tous) de manière électronique, dans ma carte Opus. Rien de sorcier.
Puis, pendant deux ans et demi, j’ai essentiellement télétravaillé, j’ai beaucoup réduit mes activités sociales et j’ai donc très peu utilisé les transports en commun.
Durant ce temps, l’Autorité régionale de transport métropolitain a procédé à une refonte tarifaire censée simplifier les titres de transport en commun dans le Grand Montréal. Peut-être que certains remarquent une simplification ? En tout cas, certainement pas moi !
Opus Pocus ! Trois tarifs…
Opus Pocus ! D’un coup de baguette magique (qui paraphrase la célèbre incantation des dessins animés), voilà que, pour ma vie de tous les jours, j’ai besoin de trois titres de transport différents.
Tous modes AB (4,50 $ ou 4,25 $ à l’achat de 10 billets) : c’est le titre dont j’ai besoin pour passer de Longueuil à Montréal, et vice versa. Ce ticket me donne accès autant à l’autobus qu’au métro, c’est celui dont j’ai besoin pour aller au travail et en revenir.
Tous modes A (3,50 $ ou 3,15 $ à l’achat de 10 billets) : ce titre donne accès au métro ou aux autobus, mais seulement à Montréal. C’est le titre que j’utilise si je quitte mon lieu de travail pour aller à une réunion au centre-ville ou si je veux aller souper avec des copines après le boulot (oui, ça arrive, enfin!).
Bus seulement ABC (3,50 $ ou 3,15 $ à l’achat de 10 billets) : ce titre donne accès à l’autobus seulement partout dans le Grand Montréal, à Longueuil et sur la Rive-Sud. Pour moi, c’est le titre dont j’ai besoin pour aller de la maison à mon cours de danse à Saint-Lambert ou pour un rendez-vous médical sur la Rive-Sud.
Opus Pocus ! Et aussi trois cartes…
Bon ! Déjà, bien comprendre la nouvelle tarification m’a demandé un petit bout de temps. Mais là où je suis vraiment tombée en bas de ma chaise, c’est quand j’ai réalisé que j’aurais dorénavant besoin de trois cartes Opus différentes.
Les titres Tous modes AB ne peuvent être installés que sur une carte Opus « spéciale », vendue seulement dans quelques points de vente. Au moins, si vous avez déjà une carte Opus, vous pourrez obtenir cette deuxième carte gratuitement.
Les titres Tous modes A et Bus seulement ABC peuvent être chargés sur une carte Opus « ordinaire »… mais pas en même temps ! Plus précisément : si j’ai des titres Tous modes A sur ma carte Opus, la machine refusera obstinément d’y ajouter des titres Bus seulement ABC . Et vice versa. Et ça, vraiment, j’ai de la difficulté à comprendre.
Je me suis donc résolue à me procurer une troisième carte Opus (qu’on m’a fait payer, cette fois-ci), pour avoir dans mon portefeuille tous les titres de transport dont j’ai besoin lorsque j’en ai besoin.
Au-delà de l’anecdote (parce qu’il y a des choses pires dans la vie que de devoir traîner trois cartes Opus), je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est une très mauvaise façon d’encourager les gens à prendre le transport en commun. L’Autorité régionale de transport métropolitain rend ça tellement complexe que… même les employés des sociétés de transport, censés nous aider, ont de la difficulté à comprendre les règles !
J’ai aussi l’impression que le système est davantage pensé pour les gens qui se procurent une passe mensuelle que pour ceux qui, comme moi, utilisent le transport en commun quatre ou cinq fois par semaine. Or, mon entreprise n’est pas la seule à être passée en mode hybride, et je n’ai pas l’impression que la tendance va s’inverser dans les prochaines années.
Évidemment, si j’étais paresseuse, je pourrais n’acheter que des titres Tous modes A qui fonctionnent pour tous mes déplacements et qui tiennent sur une seule carte Opus. Par contre, je paierais souvent un dollar de trop par déplacement. Et comme le transport en commun est déjà assez coûteux, je n’ai pas vraiment envie de payer plus cher que je ne dois.
Bref, ces tracas ne sont pas assez contraignants pour que je retourne m’acheter une voiture. Mais j’ai bien peur que ce le soit assez pour en décourager plusieurs d’abandonner la leur…