Ville de Québec - Photographie et archives

Résumé

QUÉBEC DISPARUE | Beauport en 1953

Par Jean-Simon Gagné, Le Soleil

19 mai 2025 à 04h00

Vue de Beauport il y a plus de 70 ans (Archives Ville de Québec, Collection Michel Bédard N083227)

À la demande générale, Le Soleil, en collaboration avec les Archives de la Ville de Québec, présente une nouvelle série consacrée à des facettes disparues de la ville de Québec. Chaque semaine, elle rappellera le souvenir d’un immeuble, d’un commerce, d’un secteur ou d’un boisé disparu. À partir d’une image ancienne, un montage vidéo vous amène jusqu’à notre époque.


(Le Soleil, Jocelyn Riendeau)

La photo de 1953 pourrait s’intituler «Beauport avant les grandes transformations». Au centre, on remarque l’Église de la Nativité-de-Notre-Dame-de-Beauport, plusieurs fois reconstruite après des incendies. Elle peut servir de point de repère.

Jusqu’à la fin des années 1940, la croissance de Beauport se concentre autour de l’avenue Royale. Partout ailleurs, l’agriculture reste dominante. Mais le changement arrive. À l’est, de nouvelles constructions poussent le long de la rue Duchâtel. Entre 1947 et 1950, une trentaine de maisons préfabriquées y sont apparues.



Ce n’est qu’un début. Beauport commence à peine sa métamorphose. En 1950, la ville compte 5390 habitants. En 1975, elle va en dénombrer 55 300. En l’espace d’une génération, la population sera multipliée par 10.

Au bas de la photo d’époque, on aperçoit le boulevard Sainte-Anne. Ouvert en 1941, il mène au sanctuaire de Sainte-Anne-de-Beaupré. La voie s’appelle d’abord le boulevard d’Orléans, puis le boulevard Desroches, avant d’être baptisée boulevard Sainte-Anne…

Très vite, la construction du boulevard bouleverse la vie sur les berges du fleuve. Durant les années 1920 et 1930, les familles aisées s’y faisaient construire des maisons d’été. Pour profiter du calme et du paysage. Un peu jaloux, les gens du Beauport «d’en haut» les surnommaient même «les rapportés».

Avec l’arrivée d’une voie rapide, les activités se multiplient le long du fleuve. La population augmente. Des motels apparaissent. L’Église s’inquiète. Elle surveille tout particulièrement une plage appelée le «Phare Everell», où les gens s’amusent un peu trop à son goût.

En 1949, les deux curés de Beauport déposent une requête auprès du premier ministre Maurice Duplessis. Ils veulent que la plage cesse de présenter du cinéma, de la danse et de la lutte. Ils réclament aussi que l’on punisse «toute infraction à la loi des liqueurs» et «à la sanctification du dimanche».

Apparemment, les autorités ne sont pas trop pressées d’intervenir. En page 18 du Soleil du 21 juillet 1949, le «Phare» annonce encore un grand gala de lutte. Le combat principal, qui débute à 20 heures, oppose Luc «le rude» Milhomme à Fred «le dur» Mitchell.



On s’y donne rendez-vous?

Sources: Société historique de Québec et Histoire de raconter, la villégiature à Beauport, 2006.

[details=“Résumé”]

QUÉBEC DISPARUE | Le boulevard Laurier en 1969

Par Jean-Simon Gagné, Le Soleil

2 juin 2025 à 04h00

Vue aérienne du boulevard Laurier en 1969 (Archives Ville de Québec, Fonds W.B. Edwards Inc. Droits réservés Ville de Québec. N024287)

À la demande générale, Le Soleil, en collaboration avec les Archives de la Ville de Québec, présente une nouvelle série consacrée à des facettes disparues de la ville de Québec. Chaque semaine, elle rappellera le souvenir d’un immeuble, d’un commerce, d’un secteur ou d’un boisé disparu. À partir d’une image ancienne, un montage vidéo vous amène jusqu’à notre époque.


(Le Soleil, Jocelyn Riendeau)

Le boulevard Laurier est un enfant des bouchons de circulation! À la fin des 1930, le chemin Saint-Louis concentre tout le trafic qui circule entre la ville et le Pont de Québec. Il ne suffit plus à la tâche. Les fins de semaine, les automobilistes se plaignent que la circulation y devient trop dense!

Pour résoudre le problème, on construit «la voie Sir Wilfrid Laurier», bientôt surnommée le «boulevard Laurier». La nouvelle route est complétée en 1954, malgré les problèmes posés par un terrain marécageux à la hauteur de ce qui deviendra le CHUL…



L’ouverture du boulevard marque le début du développement effréné de Sainte-Foy. Les maisons poussent comme des champignons dans les paroisses de Saint-Charles Garnier, de Saint-Yves et de Saint-Denys-du-Plateau.

Partout, l’automobile triomphe. Entre 1940 et 1954, le nombre de véhicules immatriculés dans la région passe de 15 500 à 60 200!

Le long du boulevard Laurier, on voit apparaître de grands bâtiments à l’architecture hétéroclite. L’édifice Murdock (1961). L’édifice Le Delta (1966). Le futur édifice de la SSQ (1968). Mais c’est l’arrivée des centres commerciaux qui marque un changement d’époque. Un vrai.

Les nouveaux venus bouleversent les habitudes de consommation. Le «magasinage» devient plus facile, grâce aux nombreux stationnements. En 1969, les stationnements extérieurs occupent quatre fois plus d’espace que les commerces!

Pour la petite histoire, on notera que Place Ste-Foy voit le jour en 1957, à l’initiative de la compagnie Steinberg. Cette dernière veut implanter une nouvelle formule à travers tout le Québec. Un centre commercial avec comme noyau un supermarché.

Au début, le «Centre d’achats Sainte-Foy» se limite à un supermarché Steinberg. Quelques boutiques s’ajoutent l’année suivante. Mais il faut attendre 1964 pour qu’il devienne un centre commercial intérieur, c’est-à-dire avec un toit.



Revenons à la photographie de 1969. Sur le boulevard Laurier, juste en face du centre commercial, les habitués reconnaîtront l’ancien édifice de Radio-Canada, surnommé le «bungalow». La société d’État y produira ses émissions jusqu’en 2004.

Comme d’habitude, nous gardons le meilleur pour la fin. En 1969, la construction du futur pont Pierre-Laporte bat son plein. Malgré tout, on craint qu’il ne suffise pas. L’année précédente, le rapport Vandry-Jobin sur les déplacements dans la région avait donc suggéré la construction d’un troisième pont, entre Québec et Lévis.

L’histoire ne se répète pas. Mais il lui arrive de bégayer.

Source: Michel Lessard, Sainte-Foy, l’art de vivre en banlieue au Québec, Les Éditions de l’homme, 2001.
Résumé

QUÉBEC DISPARUE | Le cinéma Princesse en 1975

Par Jean-Simon Gagné, Le Soleil

9 juin 2025 à 04h00|

Mis à jour le9 juin 2025 à 09h24

3 minutes

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Le cinéma Princesse, sur la rue Saint-Joseph, en 1975. (Archives Ville de Québec, Fonds Gérard Donnelly N400059)

À la demande générale, Le Soleil, en collaboration avec les Archives de la Ville de Québec, présente une nouvelle série consacrée à des facettes disparues de la ville de Québec. Chaque semaine, elle rappellera le souvenir d’un immeuble, d’un commerce, d’un secteur ou d’un boisé disparu. À partir d’une image ancienne, un montage vidéo vous amène jusqu’à notre époque.


La rue Saint-Joseph, dans le quartier Saint-Roch, a longtemps été surnommée la «Broadway de Québec». On y trouvait de grands magasins à rayons comme le Syndicat, Paquet, Laliberté ou Pollack. Sans parler des théâtres et des cinémas.

Pour la petite histoire, c’est sur la rue Saint-Joseph que s’est déroulée la première représentation cinématographique à Québec, le 30 septembre 1896. Une nouveauté que la publicité présentait comme «la plus grande merveille du monde».



On raconte que les spectateurs n’ont pas été déçus. Imaginez! Ils voyaient pour la première fois des images qui bougent! Certains prenaient peur! D’autres avaient un mouvement de recul en apercevant des chevaux qui galopaient vers la caméra!

Vers la banlieue

En juillet 1975, le temps a passé. La «Broadway de Québec» n’a plus le lustre d’antan. Le quartier Saint-Roch a perdu la moitié de ses résidents en l’espace d’une génération! Le magasinage s’est déplacé vers la banlieue. Le cinéma aussi…

Pendant longtemps, chaque cinéma de la basse-ville possédait ses spécialités. Pour sa part, le Princesse présentait surtout des westerns et des films américains de série B. Mais la baisse de clientèle ne pardonne pas, malgré les programmes doubles et les billets réduits à 50 cents! [2,90 $ en argent de 2025]

Laissé à l’abandon durant quelques mois, le Princesse sera finalement démoli en août 1975.

Signe des temps, le cinéma voisin a été rebaptisé le Midi-Minuit. Il s’est aussi reconverti dans les films pornos. À l’été 1975, il présente un film intitulé Allons, enlève ta robe. Un navet qui n’est pas passé à l’histoire!

Aujourd’hui, le Midi-Minuit a repris son nom d’origine: l’Impérial. Reconverti en salle de spectacle, il reste l’un des derniers témoins de la grande époque de la «Broadway de Québec». Nos respects à ce vénérable survivant!

Sources: L’Électeur, 29 septembre 1896, p. 4 et Yves Berger, «Aller aux vues» dans la Capitale, Cap-aux-Diamants, No 38, été 1994.

Résumé

QUÉBEC DISPARUE | Le théâtre Crystal en 1911

Par Jean-Simon Gagné, Le Soleil

7 juillet 2025 à 04h08|

Mis à jour le7 juillet 2025 à 06h53

Le théâtre Crystal, sur la rue Saint-Joseph, en 1911. (Collection iconographique de la Ville de Québec N001809)

À la demande générale, Le Soleil, en collaboration avec les Archives de la Ville de Québec, présente une nouvelle série consacrée à des facettes disparues de la ville de Québec. Chaque semaine, elle rappellera le souvenir d’un immeuble, d’un commerce, d’un secteur ou d’un boisé disparu. À partir d’une image ancienne, un montage vidéo vous amène jusqu’à notre époque.


(Le Soleil, Jocelyn Riendeau)

Le théâtre Crystal voit le jour durant une période faste pour le théâtre à Québec. De 1900 à 1911, une quinzaine de théâtres émergent, incluant les théâtres d’été.

En 1911, la façade du Crystal explose d’optimisme et de motifs inspirés de la nature. Un classique de ce que l’on surnommera avec nostalgie «La Belle époque».



La Belle époque? Une période où la vie était rude, mais que l’on jugera tout même préférable aux catastrophes qui ont suivi.*

Le Crystal n’est pas seulement un lieu de théâtre. Il propose aussi du cinéma et du cirque. Un véritable feu roulant. Durant la semaine du 20 août 1911, par exemple, le public peut voir quatre films, des jongleurs, une troupe de 12 chiens savants et un contorsionniste dont on vante la grande «distinction».

Inutile de le cacher. Le préféré de la foule reste «Shorty Edwards», que l’on décrit comme un «nain prodige». La publicité de l’établissement parle d’une programmation de «première classe». Mais nous comprenons que certains lecteurs puissent avoir des doutes…

Quelques jours plus tard, le 28 août, le Crystal connaît un succès retentissant avec le spectacle de l’homme fort Hector Décarie. Quelques années plus tôt, Décarie a défié le légendaire Louis Cyr. Ce dernier lui a gracieusement cédé sa couronne de champion…

Le critique du Soleil raconte la fin du spectacle. «Le dernier tour de force du programme n’était pas une chose ordinaire, écrit-il. Dix hommes se placèrent sur une plate-forme que Décarie souleva sur son dos. Le poids total devait être d’environ 1800 livres. [820 kg]»

«Décarie peut faire encore beaucoup mieux; nous avons déjà constaté cela plus d’une fois», conclut le critique sur une note énigmatique.



Le Crystal va continuer ses activités jusqu’à la fin des années 1920. Il sera ensuite remplacé par le cinéma Le Pigalle, dont l’édifice sera démoli durant les années 1990. En 2002, il a été remplacé par le bâtiment actuel du Théâtre La Bordée. À l’arrière, on trouve désormais une murale géante. Un clin d’œil à l’histoire très chargée des lieux…

* On pense à la Première Guerre mondiale de 1914-1918, à la grippe espagnole de 1917-1919 et la grande crise économique de 1929.
Sources: Christian Beaucage, Le théâtre à Québec au début du XXe siècle, Nuit Blanche Éditeur, 1996 et Le Soleil, 28 août 1911, p. 10.
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Résumé

QUÉBEC DISPARUE | Les livreurs de Brunet dans les années 1930

Par Jean-Simon Gagné, Le Soleil

4 août 2025 à 04h14

Des livreurs de Brunet sur Saint-Joseph au milieu des années 30 (Fournie par Henri Rhéaume)

À la demande générale, Le Soleil, en collaboration avec les Archives de la Ville de Québec, présente une série consacrée à des facettes disparues de la ville de Québec. Chaque semaine, elle rappellera le souvenir d’un immeuble, d’un commerce, d’un secteur ou d’un boisé disparu. À partir d’une image ancienne, un montage vidéo vous amène jusqu’à notre époque.


(Le Soleil. Jocelyn Riendeau)

Avouez qu’ils ont fière allure, les livreurs de la pharmacie Brunet, sur leurs motocyclettes Harley-Davidson. Le standard, c’est le standard. Beau temps mauvais temps, il semble que le complet et la cravate soit de rigueur!

À l’époque, la pharmacie Brunet de la rue Saint-joseph promet un service rapide dans toutes les parties de la ville. Autant dire que pour les livreurs, la tâche ne doit pas être de tout repos. Au milieu des années 1930, malgré l’augmentation rapide du nombre de véhicules, il n’y a même pas encore de feu de circulation dans les rues de Québec!



Vérification faite, les premiers feux de circulation seront installés en 1937, sur les rues Dorchester et de la Couronne! En attendant, les policiers qui font la circulation sont de plus en plus débordés. Dépassés par les événements.

Heureusement pour nos livreurs, la ville de Québec est moins étendue qu’aujourd’hui. La moitié des 135 000 habitants se concentrent dans la Basse-Ville. À l’ouest, les habitations deviennent rares après le quartier Belvédère. Au nord, elles se terminent à Limoilou.

Pour la petite histoire, notons que le fondateur de la pharmacie, Wilfrid-Étienne Brunet, a acheté le terrain de la rue Saint-Joseph en 1872 pour la coquette somme de 3000 $ (environ 80 000 $ en argent d’aujourd’hui).

L’année suivante, il fait bâtir sur les lieux un édifice de style Second empire. Le summum pour l’époque.

Un siècle plus tard, en 1987, la bannière Brunet a été rachetée par McMahon Distributeur pharmaceutique, une filiale de Metro. Mais la succursale de la rue Saint-Joseph constituerait la plus ancienne pharmacie du Québec toujours en activité, dans le même édifice.

Quand la pharmacie ouvre ses portes, en 1873, la reine Victoria règne sur l’Empire britannique. La Russie est dirigée par le tsar Alexandre II. Et un tailleur du Nevada vient d’obtenir un brevet pour un nouveau pantalon de travail renforcé avec des rivets métalliques: le blue-jean.

Remerciements à M. Henri Rhéaume pour cette photo tirée des archives de son père, qui fut un employé de Brunet durant plus de 40 ans.

Sources: Rénald Lessard, Wilfrid-Étienne Brunet, fondateur des pharmacies Brunet, Cap-aux-Diamants, Vol. 4. No. 4, Hiver 1989 et Le Soleil, 24 mars, 1934, p. 4.

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La Capitale

QUÉBEC DISPARUE | La porte du Palais en 1860

Par Jean-Simon Gagné, Le Soleil

3 novembre 2025 à 04h01

Un aperçu de la porte du Palais il y a plus de 150 ans (Archives Ville de Québec N010222)

À la demande générale, Le Soleil, en collaboration avec les Archives de la Ville de Québec, présente une série consacrée à des facettes disparues de la ville de Québec. Chaque semaine, elle rappellera le souvenir d’un immeuble, d’un commerce, d’un secteur ou d’un boisé disparu. À partir d’une image ancienne, un montage vidéo vous amène jusqu’à notre époque.

(Le Soleil/Jocelyn Riendeau)

Construite en 1830, la porte du Palais était considérée comme l’une des plus belles de Québec. Elle avait la forme d’un arc de triomphe. On disait même qu’elle s’inspirait de l’une des portes de… Pompéi, la ville romaine engloutie par une éruption volcanique en l’an 79.

Reste qu’à l’époque de la photo, en 1860, la porte du Palais n’est pas seulement une décoration. Des soldats habitent juste à côté, dans le corps de garde. Chaque soir, elle est fermée et verrouillée avec de gros battants. Comme toutes les autres portes de Québec!



Personne ne peut entrer ou sortir de la ville avant le lever du jour! La place forte de Québec est prête à repousser les envahisseurs!

En 1871, la garnison britannique quitte la ville. Dès lors, les portes ne sont plus gardées. Elles deviennent inutiles. En plus, elles apparaissent trop étroites. Elles nuisent à la circulation des calèches et des autres attelages.

Très vite, la démolition des portes va commencer…

Quelques voix s’élèvent pour préserver la porte du Palais. Mais le chroniqueur Arthur Buies ne cache pas sa satisfaction. Il se moque «des gens qui regrettent l’infect corps de garde et la misérable porte du Palais, qui laissait à peine passer une voiture péniblement traînée par un cheval haletant, essoufflé, morfondu.»

Et vlan dans les dents!

Au fil des ans, la reconstruction de la porte du Palais a souvent été évoquée. Tout comme celle de la porte Hope, sur la côte de la Canoterie. Reconstruites sous des formes moins encombrantes, les deux portes permettraient une promenade ininterrompue de deux kilomètres sur les remparts.



En 1992, le gouvernement conservateur de Bryan Mulroney avait même débloqué un budget de plusieurs millions de dollars pour le projet. Une promesse balayée par sa cuisante défaite électorale, l’année suivante.

Depuis, il n’apparaît pas exagéré de dire que la porte s’est refermée…

Sources: Jean-Marie Lebel, Le Vieux-Québec, Guide du promeneur, Septentrion, 2015 et Le Soleil, 22 janvier 1992, p. B-9.
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