Dans mon enfance à Montréal les ruelles des années 50 étaient des lieux principalement fonctionnels et très minéralisées, elles donnaient accès aux nombreux hangars sombres, aux escaliers arrières et aux stationnements selon le cas. Elles servaient aussi l’été pour les vidanges qui étaient ramassées régulièrement, tout en laissant souvent plein de détritus derrière, car tout se faisant à la main.
C’était aussi des lieux de jeux plus ou moins conseillés pour les enfants, bien que l’on préférait aller jouer au parc où des moniteurs-monitrices organisaient toutes sortes d’activités quotidiennes et où on se faisait plein de nouveaux ami.e.s.
Dans le sud-ouest les ruelles étaient souvent pavées, plutôt sales et peu invitantes. Tandis que les vieux hangars en bois devenaient facilement la proie des flammes qui décimaient parfois plusieurs logements alentour.
Puis est venu le programme de démolition des dangereux hangars qui a fait place à plus de lumière et d’espace pour de la végétation en fond de cour. Cependant il faudra attendre encore plusieurs décennies avant de reconnaitre la valeur de ces surfaces publiques et leur grand potentiel d’aménagement social, urbanistique et environnemental.
Les ruelles vertes furent donc une véritable révolution pas seulement à Montréal mais aussi dans d’autres villes du Québec. Enfin la ruelle se faisait belle et attrayante, fleurie et verte qui devenait en même temps un lieu différent de socialisation et de promenades pour le voisinage.
Il faut dire bien sûr qu’avant on socialisait aussi dans les ruelles et arrières cours et balcons, surtout que tout le monde se connaissait, que les cordes à linge grinçaient tous les lundis exposant la lessive de chacun dans un tableau multicolore, qui grouillait de vie et de bavardages pas toujours gentils…
Les temps ont changé, mais les ruelles sont restées, toujours fonctionnelles mais plus piétonnières. C’est aujourd’hui la verdure qui colore davantage le paysage, le mobilier urbain, les murales et autres formes d’art public. En plus elles aident à tempérer l’air de nos villes, profitent à la biodiversité et deviennent des lieux fréquentés à part entière où la créativité en fait des espaces invitants, qui n’ont plus rien à envier aux autres parties moins intimes de la ville.