REM 2 (Est de Montréal) - Projet annulé

Je ne sais pas si c’est du bluff (comme j’aimerais que ce le soit pour le 3e lien à Quebec… :smirk:) de la part de la ministre, mais CDPQinfra devra repasser à la planche à dessin. :thinking:

L’expert en planification des transports et chargé de cours à l’Université de Montréal, Pierre Barrieau, n’a pas été tendre envers l’ARTM dans ses commentaires (voir 2 derniers paragraphes…).

Québec assure que le REM de l’Est ira de l’avant malgré tout

Le Devoir | Transports / Urbanisme | 8 février 2022 | Jeanne Corriveau et François Carabin

Québec oppose une fin de non-recevoir à l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM), qui critique sévèrement le projet de Réseau express métropolitain (REM) de l’Est, à Montréal. Le train électrique verra le jour, a répliqué la ministre Chantal Rouleau mardi.

« Le projet, il va de l’avant, a signifié la ministre responsable de la Métropole dans une mêlée de presse à l’Assemblée nationale. Il n’y a pas de modification dans l’échéancier. »

Dans un avis transmis au gouvernement du Québec la semaine dernière, l’ARTM, un organisme chargé de la planification du transport collectif dans la grande région de Montréal, soutient que le projet affaiblira le réseau actuel de transport collectif, ne permettra pas de gains importants de nouvelles clientèles, en plus de coûter cher aux municipalités.

La note, dont La Presse révélait l’existence mardi, précise que le projet, essentiellement axé sur les déplacements vers le centre-ville, « apporte une réponse partielle aux besoins de déplacements actuels et futurs » en provenance de l’est de Montréal et de la couronne nord-est. À la lumière des données de l’enquête origine-destination de 2013, l’ARTM conclut que seulement 12 % des déplacements dans les secteurs desservis par le REM de l’Est se destinent au centre-ville.

L’Autorité doit « retourner à la planche à dessin », croit Chantal Rouleau, qui affirme que l’avis comporte des « failles ». Elle invite l’organisme à respecter ses fonctions. « Tous les partenaires doivent travailler ensemble. Le rôle de l’ARTM, c’est de s’assurer de la coordination des partenaires. Il faut qu’elle joue son rôle », a-t-elle tonné.

L’élue de l’est de l’île croit toujours en l’utilité du projet pour le développement du secteur. « En ce moment, c’est une heure et trois quarts le matin, une heure et trois quarts le soir en autobus, a-t-elle dit sur un ton impatient. Ça fait des dizaines d’années que c’est comme ça. »

L’appui nécessaire de Plante

Dans l’impasse, le premier ministre François Legault tourne son regard vers la mairesse de Montréal. « Pour moi, la clé, c’est vraiment l’appui de Valérie Plante. On n’ira pas faire un projet si on n’a pas [son] appui. Quant à moi, la balle est dans le camp de Mme Plante. [C’est à elle] de nous présenter un projet qui fait son affaire », a-t-il dit en marge d’un point de presse sur la COVID-19.

CDPQ Infra prévient d’ailleurs que l’appui de la Ville de Montréal ainsi que celui de l’ARTM seront nécessaires pour réaliser le REM de l’Est. « CDPQ Infra n’imposera pas le projet », a soutenu Jean-Vincent Lacroix, directeur des communications de CDPQ Infra. La filiale de la Caisse déplore toutefois que l’ARTM ne l’ait pas mise à contribution dans la rédaction du rapport, malgré de fréquentes rencontres depuis 2019.

Selon le cabinet de la mairesse Valérie Plante, la Ville de Montréal souhaite toujours voir le REM de l’Est se réaliser. « Le REM est le plus important projet de transport collectif depuis une décennie et il doit être évalué en bonne et due forme », a précisé l’administration dans une déclaration.

Le cabinet de Valérie Plante dit vouloir prendre le temps d’analyser l’avis de l’ARTM. Lors d’une rencontre vendredi avec les représentants du gouvernement du Québec et de CDPQ Infra, la mairesse a réitéré ce qu’elle considère comme les « conditions de réussite » du projet, soit une gouvernance permettant la participation de la Ville dans l’intégration du REM de l’Est au centre-ville et dans les quartiers traversés et le financement de Québec pour les aménagements requis en milieu urbain.

Impact sur la ligne verte

Dans son avis, l’ARTM soutient notamment que le nombre d’automobilistes qui se convertiraient au transport collectif serait limité, soit 2100 automobilistes, ce qui représente 6 % de l’achalandage du REM de l’Est. L’essentiel des usagers du REM de l’Est, soit 94 %, proviendrait d’un transfert des services actuels de transport en commun, selon l’ARTM.

La ligne verte du métro ferait donc les frais de l’arrivée du REM de l’Est et, selon les évaluations de l’ARTM, elle perdrait 15 000 passagers, soit une diminution d’achalandage de 26 %. L’effet serait encore plus important pour le train de Mascouche qui, sur sa portion montréalaise, perdrait 75 % de son achalandage.

Annoncé en décembre 2020, le REM de l’Est imposerait aussi un poids financier important aux villes, soit 98 millions de dollars de plus par année, et accroîtrait le déficit du métro et du train de Mascouche en raison du transfert de la clientèle, fait valoir l’Autorité.

L’insertion urbaine du projet pose aussi problème, selon l’ARTM. Cet aspect pourrait cependant être revu à la lumière des recommandations du comité d’experts mis sur pied par CDPQ Infra.

Compte tenu de tous ces constats et du coût élevé du REM de l’Est, soit 10 milliards de dollars, l’ARTM estime qu’il serait nécessaire d’envisager d’autres options de transport, « à budget égal ou moindre ». L’organisme signale par ailleurs que son avis pourrait être révisé en fonction de la proposition finale de CDPQ Infra. « Les décisions finales appartiendront au gouvernement », a reconnu mardi Benoit Gendron, directeur général de l’ARTM.

Expert en planification des transports et chargé de cours à l’Université de Montréal, Pierre Barrieau estime que l’avis de l’ARTM comporte des problèmes de méthodologie. Selon lui, l’ARTM se base sur un scénario « très défaitiste » de la relance du centre-ville de Montréal et du transport collectif post-COVID, en plus de négliger l’important potentiel de développement de l’est de Montréal. L’expert reproche aussi à l’ARTM de considérer comme négative la proximité entre le futur REM et la ligne verte du métro. « Pourtant, en planification de réseaux, la redondance est quelque chose de positif, parce qu’elle permet des solutions de rechange pour les usagers et, en cas de panne, d’autres lignes peuvent prendre le relais », explique-t-il.

Il croit aussi que l’ARTM a manqué de leadership depuis sa création en 2016, incapable de développer une vision forte de l’avenir des transports dans la région de Montréal. Pendant ce temps, les gouvernements libéral et caquiste ont misé sur la Caisse de dépôt, qui a fait avancer deux projets du REM. « L’ARTM est en crise depuis sa création. […] Elle n’a pas assumé le rôle qu’elle pouvait prendre, dit-il. Si le REM tombe, ça prendra de 30 à 40 ans avant qu’un nouveau projet émerge. »