Québec - Projets d'infrastructure

Un groupe citoyen à la défense du tramway

24 août 2022 3h00 Mis à jour à 9h17
ÉMILIE PELLETIER
Le Soleil

De nouvelles affiches pousseront bientôt en façade de maisons et dans des fenêtres de Québec. Et pas en vue des élections provinciales, mais plutôt pour permettre aux citoyens de dire haut et fort que «Québec désire son tramway».

Dans leur maison du boulevard René-Lévesque, au centre-ville de Québec, là où passera le futur tramway, Jesse Greener et sa conjointe, Nora Loreto, voient défiler le flot de voitures, en direct de leur terrasse couverte. Même les fenêtres fermées, ils entendent le trafic presque incessant devant chez eux et sentent la poussière remonter à l’intérieur.

Voyant les affichettes signées par le groupe antitramway Québec mérite mieux plantées sur les pelouses de résidences du boulevard René-Lévesque, ils ont choisi de faire compétition. Question de «rendre la majorité un peu plus visible», illustre M. Greener.

Sans voiture, avec deux jumeaux d’âge primaire, le couple est fondamentalement en faveur du projet de tramway développé par la ville de Québec.

Un avis partagé par l’ensemble de ses amis et voisins, explique-t-il en entrevue avec Le Soleil. «Avec toutes ces voitures, c’est dans nos pensées en tout temps, à toute heure de la journée. Le tramway, ça va être facile, ça va diminuer le trafic, ça va aller plus vite», partage Nora, la voix pratiquement enterrée par le va-et-vient quasi continuel sur le boulevard.

Pourtant, ce qu’elle qualifie d’«avantages» d’un tramway, elle ne les voit que rarement véhiculés dans l’espace public, déplore-t-elle, jugeant que les opposants «monopolisent» le discours.

«Il y a une minorité bruyante», ajoute à l’autre bout de la pièce son conjoint Jesse. Il fait référence à Québec mérite mieux, regroupement farouchement opposé au tramway, qui dirige une contestation judiciaire contre le projet évalué à près de 4 milliards $. «Pendant ce temps, l’appui au tramway est si large qu’on sent qu’on n’a pas besoin de partager notre soutien et que les paliers de gouvernement vont faire le travail. Mais ça laisse un espace aux autres pour dire n’importe quoi», observe-t-il.

600 membres

La campagne citoyenne baptisée Québec désire son tramway est née officiellement ainsi, dans l’optique de «rétablir le débat» et d’entamer un dialogue.

«C’est un peu fâchant d’entendre des arguments de niaiseries et de voir que la réponse, c’est juste de reculer, parce que c’est impossible d’avoir une conversation», poursuit M. Greener. Il a connu par le passé l’échec d’un projet tramway à Brampton, sa ville ontarienne natale, et il n’a pas l’intention de le revivre.

Il y a moins d’une semaine, le couple a donc lancé un groupe Facebook éponyme dans l’espoir de rassembler des gens qui, comme eux, sont d’avis que le tramway est le meilleur projet pour Québec. «Il fallait quelqu’un pour prendre le lead. On a pensé que si on lançait le bal, ce serait repris par un réseau de voisins», note M. Greener. La mobilisation citoyenne a bel et bien crû rapidement, atteignant près de 600 membres en date de mardi.

Avec l’aide de connaissances, ils ont donc conçu un design de tramway sur fond vert, agrémenté du slogan Québec désire son tramway.


Jesse Greener et sa conjointe, Nora Loreto ont conçu un design de tramway sur fond vert, agrémenté du slogan Québec désire son tramway.
LE SOLEIL, ERICK LABBÉ

En vente au coût de 5$, les affiches «de soutien» au projet ont jusqu’ici trouvé plus d’une centaine d’acheteurs, selon les instigateurs. Les soixante premières seront distribuées mercredi à 14h lors d’un événement à la place éphémère François-Duchesne, à l’angle du boulevard René-Lévesque et de la rue Cartier. Une commande a d’ailleurs été placée pour en recevoir quelque 500 autres la semaine prochaine.

Continuer de «défendre» le tramway

La campagne se poursuivra tant et aussi longtemps que l’engouement y sera, prévoient Nora et Jesse.

Habitués du transport en commun torontois, ils sont convaincus que le mode de transport structurant prévu pour relier le secteur Chaudière au pôle D’Estimauville, d’ouest en est, permettrait non seulement d’atténuer la circulation face à la maison, mais aussi d’accélérer les déplacements pour les résidents.

Même s’ils «adorent» les arbres et que plusieurs devront tomber sur le tracé. «Franchement, des arbres meurent naturellement aussi et est-ce qu’on fait une vigile chaque fois? Chaque auto est beaucoup plus empoisonnée pour nous que la coupe d’arbres», s’entendent-ils.

Avant de s’installer à Québec, tous deux vivaient à Toronto, lorsqu’ils ont assisté à la reconstruction de la ligne St. Clair. «On sait comment ça se passe de vivre pendant la construction d’un projet de tramway, raconte Nora. Ça va être dérangeant pendant quelque temps, oui, mais ça prend des citoyens pour dire que ça ne va pas défigurer la ville».

Ce sera leur mission. «Il y a des personnes dans cette ville qui ont des pensées fermées. Je ne sais pas pourquoi ça crée une angoisse profonde chez eux et qu’ils s’en tiennent à une idée de ne pas changer, ajoute Mme Loreto. On a besoin du monde qui est en faveur pour pousser dans notre direction».

«Militants» de nature, elle et son conjoint sont prêts à continuer à défendre bec et ongles le mégaprojet, et ce, jusqu’à ce que le tramway foule les rails sur le pas de leur porte.

Quitte à placarder la ville, s’il le faut, afin de montrer que «Québec désire son tramway».

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