Montréal: Innovation et recherche scientifique 🔬

Discussion générale sur l’innovation, la recherche scientifique et le développement de technologie de pointe à Montréal et ailleurs au Québec.


Des chercheurs montréalais sont sur la piste d’un « mini foie » qui, dans quelques années, pourrait permettre à certains patients de survivre assez longtemps pour permettre à leur foie de guérir, voire de carrément éviter la greffe d’un nouvel organe.

Résumé

Des chercheurs montréalais sont sur la piste d’un « mini foie »

PHOTO FRANCOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

L’insuffisance hépatique aiguë empêche l’organe d’éliminer les toxines de l’organisme et nécessite souvent qu’une greffe de foie soit réalisée très rapidement.

Des chercheurs montréalais sont sur la piste d’un « mini foie » qui, dans quelques années, pourrait permettre à certains patients de survivre assez longtemps pour permettre à leur foie de guérir, voire de carrément éviter la greffe d’un nouvel organe.

Publié à 11h42

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Jean-Benoit Legault La Presse Canadienne

Ce dispositif, a précisé le docteur Massimiliano Paganelli, s’adresse principalement aux patients qui présentent une insuffisance hépatique aiguë (IHA), à savoir des patients généralement en santé, mais dont le foie a été endommagé pour une raison quelconque.

Ces patients, a-t-il ajouté, ont simplement besoin de temps pour permettre à leur foie de se remettre, ce que l’organe a une capacité spectaculaire à faire.

« Le problème qu’on a avec l’insuffisance hépatique, c’est que le corps va mourir avant que le foie puisse se régénérer, et le foie va se régénérer presque toujours, a dit le docteur Paganelli, qui est hépatologue pédiatre et directeur du laboratoire de génie tissulaire et thérapie cellulaire hépatique au CHU Sainte-Justine.

« (Avec notre dispositif), on soutient le foie, on le remplace et on lui donne le temps de se régénérer. En plus, c’est très efficace pour accélérer la régénération du foie du patient. »

Après plusieurs années de travaux, le docteur Paganelli et son équipe de Sainte-Justine et de l’Université de Montréal ont développé ce qu’on pourrait appeler un « mini foie » qui est implanté aux patients en soutien au foie malade.

Un tissu hépatique qui ressemble à un timbre d’environ dix centimètres sur dix centimètres est généré en laboratoire à partir de cellules souches. Le « mini foie » est ensuite placé dans une capsule de biomatériaux novateurs ― ce qui le protège du système immunitaire et évite le recours aux immunosuppresseurs ― et implanté dans l’abdomen du patient par laparoscopie.

Une fois en place, le « mini foie » épaule le foie malade, permettant au patient de survivre assez longtemps pour que l’organe malade puisse se régénérer.

« Le foie a une capacité de régénération très bonne et dans les trois ou quatre semaines, il est même capable de doubler sa dimension, a expliqué le docteur Paganelli. Donc c’est très rapide, et c’est le temps dont on a besoin pour que le foie puisse se régénérer et revenir à sa fonction autonome. »

Une fois le foie guéri, le timbre serait retiré et le patient reprendrait sa vie normale, sans devoir prendre de médicaments ou risquer d’avoir besoin d’une nouvelle chirurgie.

Greffe rapide

L’insuffisance hépatique aiguë empêche l’organe d’éliminer les toxines de l’organisme et nécessite souvent qu’une greffe de foie soit réalisée très rapidement ― ce qui n’est clairement pas toujours possible, a rappelé le chercheur.

« Je vis dans la frustration quotidienne de ne pas avoir beaucoup de traitements disponibles pour mes enfants avec une maladie du foie, et c’est la même chose pour les adultes, a dit le docteur Paganelli. La transplantation du foie fonctionne très bien, mais c’est clair qu’on n’a pas assez de foies pour tout le monde. »

Le dispositif qu’il a mis au point avec son équipe permet en revanche de générer du tissu hépatique qui peut être congelé et utilisé en cas de besoin. Il pourrait donc être disponible en seulement quelques heures pour les patients atteints d’une IHA, ce qui serait infiniment plus rapide qu’une greffe.

Si les premiers résultats sont confirmés par les essais cliniques à plus grande échelle qui seront réalisés prochainement, il pourrait un jour être possible de « traiter des dizaines de milliers de patients chaque année dans le monde entier » et d’éviter jusqu’à 80 % des greffes de foie requises par les patients atteints d’une IHA, a prédit le chercheur.

« Ça pourrait être pour la majorité des patients atteints d’insuffisance hépatique, a dit le docteur Paganelli. Il y aura toujours des cas qui auront besoin d’une greffe, mais ce sera clairement une minorité. »

Plusieurs années de travaux attendent encore le docteur Paganelli et son équipe. Un essai clinique sur des adultes atteints d’IHA devrait débuter en 2026 et le docteur Paganelli espère que des patients pourront bénéficier du traitement l’année suivante.

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Semiconducteurs La montréalaise 5N Plus achète un client allemand

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

5N Plus, dont le siège social est dans l’arrondissement de Saint-Laurent à Montréal, produit des métaux de grande pureté au-delà de 99, 999 %, dits de classe 5N, 6N et 7N, comme le tellurium, le cadmium et le sélénium.

Spécialisée dans la production de métaux purs utilisés pour les semiconducteurs, l’entreprise montréalaise 5N Plus est un important fournisseur pour la production d’énergie solaire. Elle a annoncé ce mardi avoir acquis une entreprise allemande dans ce domaine, AZUR, basé à Heilbronn en Allemagne, à un coût estimé « entre 73 et 79 millions d’euros », soit entre 108 et 117 millions de dollars canadiens.

Publié le 30 mars 2021 à 10h58 Mis à jour à 14h00

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Karim Benessaieh Karim Benessaieh
La Presse

AZUR, qui compte 240 employés, développe et vend des cellules solaires notamment destinées à l’industrie aérospatiale, ainsi que des panneaux photovoltaïques plus conventionnels. 5N, précise-t-on, est bien implantée dans ce domaine et est un des fournisseurs des matériaux de base pour les satellites américains.

Pour 5N Plus, l’acquisition d’AZUR, «un petit client», permettra de réellement compléter la chaîne de production, de la purification des métaux aux composantes utilisées pour produire de l’électricité solaire. « Ça fait plusieurs années qu’on échange avec eux, explique Richard Perron, chef de la direction financière de 5N Plus. Il nous manquait cette technologie, le dernier petit bout pour aller chercher toute la chaîne de valeur. »

MĂ©taux purs

5N Plus intégrera l’ensemble des employés d’AZUR, et fera une place au sein de son comité exécutif pour le directeur général de l’entreprise allemande, Jürgen Heizmann. La transaction doit être approuvée par les autorités réglementaires de ce pays, dans lequel 5N Plus compte déjà trois installations. AZUR, dont le nom complet est AZUR SPACE Solar Power GmbH, affiche des revenus annuels de 50 millions d’euros (74 millions CAD), pour un bénéfice annuel moyen de 6 millions d’euros (8,9 millions CAD) depuis trois ans.

La pénurie de semiconducteurs, qui frappe la planète depuis plusieurs mois au point de ralentir la production de téléphones, de consoles de jeu et même de voitures, n’a rien à voir avec cette transaction, précise M. Perron. « La pénurie touche surtout les semiconducteurs à base de silicium, ce n’est pas notre marché. Nous, c’est à un plus petit volume, nous développons et fabriquons plutôt des semiconducteurs spécialisés à valeur ajoutée, un marché de niche dans lequel il y a très peu de joueurs. »

5N Plus, dont le siège social est dans l’arrondissement de Saint-Laurent à Montréal, compte plusieurs centres de recherche, de production et de vente en Asie, en Amérique du Nord et en Europe. Peu connue du grand public, l’entreprise fondée en 2000 compte 578 employés dans le monde et a rapporté des revenus de 177,2 millions US, soit 223,8 millions CAD, en 2020. Elle produit des métaux de grande pureté au-delà de 99, 999 %, dits de classe 5N, 6N et 7N, comme le tellurium, le cadmium et le sélénium. Ils sont notamment utilisés en électronique et en pharmaceutique.

Son principal marché est aux États-Unis, où elle a enregistré 32,2 % de ses ventes. Son plus important actionnaire est la Caisse de dépôt et placement du Québec, avec 19,5 % des parts, suivi de Letko, Brosseau et associés, qui détient 12,4 % de ses actions.

Acquisition « conforme »

L’entreprise opère en ce moment une transformation «stratégique» avec laquelle elle espère acquérir un marché plus grand. Ses métaux purifiés et transformés pourraient à moyen terme être utilisés pour améliorer l’efficacité énergétique, notamment pour les batteries de voitures électriques, et dans les composantes électroniques liées à la 5G. « C’est la partie très excitante de cette acquisition, dit le chef de la direction financière de 5N Plus. C’est un marché qu’on va ouvrir, ça va devenir une nouvelle corde à notre arc. »

En février dernier, à l’occasion de la publication des états financiers de 5N Plus pour le quatrième trimestre 2020, la Banque Nationale Marchés financiers avait souligné la bonne santé financière de l’entreprise et noté sa volonté de procéder à des acquisitions qui lui ouvriraient « de futures opportunités de croissance ». L’analyse Rupert Merer, qui signait ce rapport, voit l’achat d’AZUR d’un bon oeil.

« L’acquisition est conforme avec la stratégie (de 5N Plus) d’étendre son offre de semiconducteurs avancés, a-t-il précisé dans un courriel envoyé à La Presse. Cela devrait leur donner une plateforme technologique pour l’intégration verticale et leur fournir des produits pour une forte croissance des marchés dans le futur, incluant la 5G, la recharge d’automobiles et les satellites, notamment. »

Le prix d’acquisition « semble bon », note-t-il, « considérant que les entreprises semblables dans ce secteur ont tendance à se négocier à des multiples plus élevés ».https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2021-03-30/semiconducteurs/la-montrealaise-5n-plus-achete-un-client-allemand.php

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Montréal, capitale de la recherche quantique

Photo: iStock

Sliman Naciri

25 mars 2023 Ă  15h13 - Mis Ă  jour 25 mars 2023 Ă  16h57 2 minutes de lecture

Montréal accueillera un centre de recherche quantique, mis sur pied dans le cadre du programme mondial de recherche quantique de pointe d’Ericsson Canada. Il s’agit du premier programme de ce genre à être déployé sur le territoire Canadien, et c’est la métropole qui a été sélectionnée.

Des projets visant à «explorer les algorithmes quantiques pour accélérer le traitement dans les réseaux de télécommunications et l’informatique quantique distribuée» seront menés. Ericsson Canada indique par ailleurs que des boursiers postdoctoraux de l’Université d’Ottawa et de l’Université de Sherbrooke s’associeront aux travaux lors de stages d’appui de la recherche quantique.

«Le Canada est un pionnier et un chef de file mondial de la recherche quantique, comme en témoigne le lancement récent de la Stratégie quantique nationale. Les chercheurs et les experts d’Ericsson étudient depuis longtemps la meilleure façon d’intégrer les technologies quantiques dans les réseaux de communication», a déclaré la présidente d’Ericsson Canada, Jeanette Irekvist.

L’organisme national de recherche Mitacs s’impliquera dans la gestion du personnel «hautement qualifié».

Ericsson estime qu’à l’avenir, le secteur quantique occupera un rôle crucial dans l’économie, la technologie et la croissance du Canada. Une étude commandée par le Conseil national de recherches du Canada (CNRC) en 2020 prévoit qu’à l’horizon 2045, l’industrie quantique canadienne se chiffre à 139 milliards de dollars et qu’elle représente 209 200 emplois.

«Les technologies quantiques façonneront notre avenir, et le Canada est à l’avant-garde, leader mondial dans cette technologie émergente», s’est réjoui le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, l’honorable François-Philippe Champagne.

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Grande entrevue Stéphane Tremblay, directeur en chef de l’usine IBM de Bromont Prête pour le rapatriement de la fabrication des semi-conducteurs

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Stéphane Tremblay, directeur en chef de l’usine IBM de Bromont

Déjà la plus importante usine d’assemblage de semi-conducteurs pour le marché ouvert en Amérique du Nord, l’usine d’IBM à Bromont ne risque pas de manquer d’ouvrage au cours des prochaines années. La politique énergique de rapatriement de la production de semi-conducteurs qui a été mise en place l’an dernier avec l’adoption du CHIPS Act aux États-Unis va stimuler l’activité de l’usine, anticipe son directeur en chef, Stéphane Tremblay.

Publié à 1h22 Mis à jour à 5h00

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Jean-Philippe DĂ©carie
Jean-Philippe DĂ©carie La Presse

L’usine de Bromont, qui a célébré l’an dernier ses 50 ans d’existence, a fait parler d’elle récemment avec l’inauguration du superordinateur quantique, le Quantum System One, qui trône dans le hall d’entrée de l’entreprise manufacturière de la microélectronique.

L’usine, qui au départ réalisait l’assemblage des machines à écrire IBM Selectrics, s’est transformée au fil des ans pour faire l’assemblage mécanique de semi-conducteurs en céramique pour tous les besoins de la multinationale informatique, avant d’ajouter l’assemblage de microprocesseurs et de sous-systèmes de cryptage.

« Aujourd’hui, nous sommes la seule usine d’IBM dans le monde qui fait l’assemblage des composantes de tous les systèmes P et Z d’IBM, qui sont de gros systèmes informatiques utilisés par les grandes entreprises de la finance ou des assurances, en raison de leurs capacités de calcul uniques », m’explique Stéphane Tremblay, directeur en chef de l’usine IBM de Bromont.

Stéphane Tremblay a entrepris sa carrière chez IBM à Bromont en 1991, à titre d’ingénieur au service du contrôle de la qualité. Durant ses 30 années passées dans l’entreprise, il a occupé 18 postes différents, pour en devenir le grand responsable en février 2021.

On recommande de changer de poste au moins trois fois tous les dix ans, ça donne une vision globale de l’entreprise, plus collaborative, on comprend mieux les enjeux de nos collègues dans chacun des départements.

Stéphane Tremblay

Il y a une dizaine d’années, l’usine de Bromont a encore dû se transformer lorsqu’elle a cessé progressivement de faire l’assemblage des semi-conducteurs pour les trois grands manufacturiers de consoles de jeux vidéo, en raison de l’évolution des technologies.

« Au même moment, IBM a vendu ses fonderies de semi-conducteurs qu’elle avait dans l’État de New York. Il a fallu travailler avec un nouveau fournisseur, GlobalFoundries. Maintenant, on fait aussi affaire avec TSMC de Taïwan et Samsung de la Corée », explique Stéphane Tremblay.

Essentiellement, l’usine de Bromont reçoit les gaufres de semi-conducteurs de ses fournisseurs et trace le chemin pour que les électrons circulent, tout en appliquant des solutions thermiques pour protéger les composants de la chaleur induite par cette activité.

L’usine de Bromont est la seule en Amérique du Nord à réaliser l’assemblage de semi-conducteurs pour des clients de l’extérieur, pour le marché ouvert.

« Il y a d’autres usines de semi-conducteurs, mais elles font uniquement l’assemblage de leurs propres produits. Avec notre capacité, on fait l’assemblage des semi-conducteurs d’IBM, mais on le fait pour d’autres clients selon leurs spécifications.

« On travaille notamment avec les grands équipementiers de la 5G et les centres de données, mais on veut aussi desservir les fabricants automobiles, alors que les autos deviennent de plus en plus des centres de données sur roues », souligne Stéphane Tremblay.

Des développements prévisibles

Les grands clients de l’usine de Bromont représentent aujourd’hui entre 50 et 60 % du volume d’activités du centre d’assemblage, alors qu’IBM accapare de 40 à 50 % de la production annuelle.

Ce pourcentage sera appelé à se modifier au cours des prochaines années à la faveur de clients externes, alors que les États-Unis investissent massivement dans le rapatriement de leur capacité de production de semi-conducteurs.

En 2022, le président Joe Biden a fait adopter le CHIPS Act qui a mis à la disposition des fabricants de puces 52 milliards de dollars pour la construction de fonderies aux États-Unis. Les fonds fédéraux serviront à financer de 20 à 30 % du coût des projets d’implantation. On prévoit donc plus de 150 milliards en projets de nouvelles usines.

« Ce sera essentiellement des fonderies qui vont répondre aux besoins du marché nord-américain, pour cesser la dépendance aux semi-conducteurs asiatiques. C’est un marché en continuelle expansion. On va pouvoir faire l’assemblage final des semi-conducteurs dans notre usine, où on a encore des capacités qu’on peut déployer », précise le directeur en chef.

IBM Bromont a déjà compté plus de 2000 employés, au plus fort de la production de semi-conducteurs pour les fabricants de consoles de jeux vidéo. Aujourd’hui, l’entreprise recense plus de 1000 travailleurs, dont plusieurs centaines d’ingénieurs.

Elle a été obligée de se repenser lorsqu’elle a été forcée d’assumer seule la prospection de nouveaux clients après qu’IBM a vendu ses fonderies américaines.

« Je me suis joint au groupe de développement des affaires et des nouveaux produits en 2016, lorsqu’on a commencé à opérer de façon autonome. On a créé une équipe de vente, des processus, la gestion des clients et on a retrouvé les volumes qu’on avait perdus lorsque les fabricants de consoles ont cessé de faire affaire avec nous », précise le gestionnaire.

Stéphane Tremblay souligne d’ailleurs qu’il s’agit là de la grande force de l’entreprise, sa capacité à relever des défis.

« On est une usine qui manufacture de la fierté et on est bien positionné pour tirer profit de la construction des nouvelles fonderies qui vont avoir besoin de nous. En plus, on est au cœur de la zone d’innovation de Bromont, ce qui constitue un bon noyau pour l’industrie de la microélectronique », anticipe le directeur en chef d’IBM Bromont.

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La filière électronique deviendra la prochaine filière des batteries pour l’économie québécoise, avec des investissements potentiels de 10 milliards de dollars. Avec son écosystème en électronique, Bromont a beaucoup à offrir.

(Bromont) Si les pièces du puzzle tombent en place comme prévu, le Québec accueillera des investissements de quelque 10 milliards dans les prochaines années dans le domaine de l’électronique, notamment l’électronique de puissance, spécialité liée aux véhicules électriques.

Publié à 0h57 Mis à jour à 5h00

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André Dubuc
André Dubuc La Presse

Ce qu’il faut savoir

  • Des usines de semiconducteurs se construisent dans le nord-est des États-Unis depuis l’adoption du CHIPS and Science Act en 2022.
  • Le QuĂ©bec, qui dispose Ă  Bromont d’un pĂ´le en Ă©lectronique, s’insère dans la chaĂ®ne rĂ©gionale d’approvisionnement des micropuces.
  • L’électronique de puissance, des puces fonctionnant Ă  voltage Ă©levĂ©, est un crĂ©neau porteur en raison de ses applications dans l’électrification des vĂ©hicules.
  • Jusqu’à 10 milliards d’investissements pourraient y voir le jour d’ici 5 Ă  10 ans.
  • Les premières annonces d’envergure sont attendues d’ici 24 mois.

C’est en partie à Bromont, chef-lieu de l’électronique dans la province et siège de la zone d’innovation en technologies numériques Technum Québec, que l’action va se passer.

« Nos plans indiquent que des investissements pourraient atteindre près de 10 milliards dans les 5 à 10 prochaines années au Québec ou au Canada », précise Normand Bourbonnais, PDG de la zone d’innovation, lors d’une rencontre avec La Presse dans les locaux du C2MI, Centre de collaboration MiQro Innovation de l’Université de Sherbrooke.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Normand Bourbonnais, président-directeur général de Technum Québec

Le but de l’activité médiatique était d’expliquer pourquoi la filière électronique deviendra la prochaine filière des batteries pour l’économie québécoise.

Avec son écosystème en électronique, Bromont a beaucoup à offrir. Elle a de grands industriels sur place (IBM et Teledyne Dalsa), des chaires de recherche au C2MI, des étudiants et un bassin de main-d’œuvre important. Bromont dispose aussi de 12 millions de pieds carrés prêts à bâtir, et la Ville a investi 4,5 millions dans les infrastructures.

Selon M. Bourbonnais, un ancien d’IBM, le Québec est bien positionné pour s’insérer dans la chaîne d’approvisionnement des semiconducteurs en Amérique du Nord, comme il a su tirer son épingle du jeu de la démondialisation de la fabrication de la batterie lithium-ion.

Les semiconducteurs sont des composants qu’on retrouve dans les équipements électroniques modernes, comme les cellulaires et les ordinateurs.

« Jusqu’à maintenant, la chaîne d’approvisionnement était globale et les usines étaient locales, concentrées en Asie. Dorénavant, la chaîne sera régionale, mais les usines seront installées un peu partout, en Asie, en Europe et en Amérique du Nord », explique M. Bourbonnais.

Ă€ quand les annonces ?

« Il devrait y avoir de belles annonces d’ici deux ans de la part de sociétés d’importance qui viendraient s’installer ici. Ce sont des implantations de 100 millions à plusieurs milliards. On parle d’usines de 500 000 pieds carrés avec des salles blanches comptant environ un millier d’emplois », dit-il, sans s’avancer sur aucun nom.

Mais, convient-il, le Québec n’attirera probablement pas d’usines de semiconducteurs. Celles-là sortent de terre aux États-Unis, convaincues par les 52 milliards US du CHIPS and Science Act, adopté en 2022.

Depuis l’adoption de la loi, on y dénombre plus de 23 annonces de nouvelles usines et 9 agrandissements dans l’industrie des semiconducteurs, pour des investissements totalisant 293 milliards.

Dans l’État de New York, l’un des deux pôles de l’industrie aux États-Unis avec le Sud-Ouest, Micron construit une usine de semiconducteurs à Syracuse au coût initial de 20 milliards US (100 milliards en 20 ans). Global Foundries agrandit la sienne à Malta, près de Saratoga Springs, pour 1 milliard US. Un peu plus à l’ouest, à New Albany, en Ohio, Intel consacre elle aussi 20 milliards US à une manufacture de puces électroniques.

Grâce à Albany NanoTech, plus grand centre de R-D sur les micropuces intelligentes, la capitale de l’État de New York est sur les rangs pour accueillir le futur Centre national de technologie sur les semiconducteurs (NSTC) de plusieurs milliards. M. Bourbonnais y part d’ailleurs en mission en novembre.

Ce n’est pas le fruit du hasard si le président Joe Biden et le premier ministre Justin Trudeau ont parlé en mars dernier du corridor Albany-Bromont dans l’électronique, à l’image du corridor Detroit-Windsor dans l’automobile.

« Les Américains fabriquent des puces. La portion senseurs [chez Teledyne Dalsa] et la portion de l’assemblage [IBM Bromont] sont deux portions sur lesquelles on travaille ici à Bromont et qui complémentent les efforts américains, d’où l’idée de corridor », explique Marie-Josée Turgeon, PDG du C2MI.

C2MI, plus grand centre de R-D en Ă©lectronique au Canada

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Pareille complémentarité existe dans le secteur des batteries. Les usines de batteries et de véhicules électriques sont en Ontario, tandis que le Québec se concentre dans les composants de batterie.

Électronique de puissance

Un exemple de cette complémentarité est l’électronique de puissance. « Il y a des firmes spécialisées dans l’électronique de puissance. Ça peut être intéressant pour le Québec et le Canada, dit M. Bourbonnais. L’électronique de puissance est requise pour les batteries. Chaque fois qu’on fait la conversion du courant électrique d’alternatif à direct, on a besoin d’électronique qui fait cette conversion. On appelle ça des puces de puissance qui vont fonctionner à des voltages beaucoup plus élevés. C’est en plein en lien avec la filière batterie. On s’en va dans la filière batterie en même temps qu’on s’en va dans la filière de l’électronique. C’est un gain pour tout le monde. »

Ça va être un travail de longue haleine, mais on travaille avec Investissement Québec et Investir au Canada. On a identifié déjà un paquet de sociétés ayant un intérêt à venir s’installer en Amérique. Il y a énormément de pression sur les fabricants de puces qui alimentent les véhicules automobiles pour qu’ils rapatrient leur production sur le continent nord-américain.

Normand Bourbonnais, PDG de la zone d’innovation en technologies numériques Technum Québec

« Les firmes japonaises investissent rarement à l’extérieur de leur pays. Aujourd’hui, il y a une ouverture. Une délégation se rend prochainement au Japon. On va rencontrer tous les joueurs du segment de marché. On pense avoir de l’intérêt. Des compagnies taïwanaises sont également venues nous visiter dernièrement. Elles sont très intéressées, mais on parle là aussi d’un délai de 24 à 36 mois », fait savoir le patron de la zone d’innovation Technum.

C’est dire qu’après Bécancour et la filière des batteries, les multinationales étrangères apprendront prochainement à situer Bromont sur une carte.

En savoir plus

  • 165 000
    Population combinée des MRC de la Haute-Yamaska, avec Granby, Shefford et Waterloo, et de Brome-Missisquoi, avec Cowansville, Bromont, Farnham et Lac-Brome

Source : ministère des Affaires municipales et de l’Habitation du Québec

(Bromont) Coup de pouce à une filière électronique qui pourrait représenter des investissements de plus de 10 milliards. Ottawa et Québec ont annoncé vendredi des participations totalisant près de 100 millions, qui financeront notamment le vaste projet d’expansion de l’usine IBM de Bromont.

Résumé

Bromont Ottawa et Québec investissent 100 millions dans « l’électronique de puissance »

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, LA PRESSE CANADIENNE

Présent à Bromont, le premier ministre du Canada Justin Trudeau a expliqué cet investissement fédéral, qui contribue à hauteur de 59,9 millions au projet d’expansion, par la nécessité de « renforcer les chaînes d’approvisionnement des semi-conducteurs au pays […] dans un monde de plus en plus incertain ».

(Bromont) Coup de pouce à une filière électronique qui pourrait représenter des investissements de plus de 10 milliards. Ottawa et Québec ont annoncé vendredi des participations totalisant près de 100 millions, qui financeront notamment le vaste projet d’expansion de l’usine IBM de Bromont.

Mis Ă  jour hier Ă  15h08

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Karim Benessaieh
Karim Benessaieh La Presse

Cette usine, ouverte en 1972, est le centre des activités d’IBM d’assemblage et de test de composantes électroniques en Amérique du Nord, ces « semiconducteurs » intégrés à pratiquement tous les appareils technologiques. Ils sont par ailleurs intégrés à une autre filière que souhaite développer le Québec, celle des batteries.

IBM a prévu un projet d’expansion totalisant 226,5 millions à son usine de Bromont. Elle est implantée au sein de la zone d’innovation en technologies numériques Technum Québec. En novembre dernier, le PDG de l’organisme, Normand Bourbonnais, indiquait à La Presse s’attendre à des investissements « pouvant atteindre près de 10 milliards dans les 5 à 10 prochaines années au Québec ou au Canada ».

Des partenaires « fiables »

Présent à Bromont, le premier ministre du Canada Justin Trudeau a expliqué cet investissement fédéral, qui contribue à hauteur de 59,9 millions au projet d’expansion, par la nécessité de « renforcer les chaînes d’approvisionnement des semi-conducteurs au pays […] dans un monde de plus en plus incertain ».

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, LA PRESSE CANADIENNE

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau

Il a relevé que 80 % des batteries équipant les voitures électriques provenaient de la Chine et que la Russie a utilisé le gaz naturel pour faire pression sur les Européens après l’invasion de l’Ukraine.

On voit que ce n’est pas seulement l’efficacité des chaînes d’approvisionnement qui est importante, mais la résilience et la sécurité des chaînes d’approvisionnement. Aux États-Unis, au Canada, chez nos alliés, il y a une préoccupation de plus en plus grande de pouvoir avoir des partenaires fiables.

Justin Trudeau, premier ministre du Canada

Le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, a inscrit ces investissements dans le plus large projet de « corridor Bromont-Albany [dans l’État de New York] » pour les semi-conducteurs, visant à accroître l’autonomie de l’Amérique du Nord dans la production de ces composantes essentielles.

« On se trouve dans un lieu historique, mais aussi un lieu d’avenir pour la résilience de nos chaînes d’approvisionnement, a-t-il fait valoir. Avec l’annonce d’aujourd’hui, on franchit un pas important dans la réalisation de cette grande vision d’un corridor stratégique qui sera avec nous pour les prochaines décennies. On fait un pas important pour renforcer, sécuriser nos chaînes d’approvisionnement et on fait un pas important pour consolider la place du Canada. »

Les fonds serviront également à soutenir des projets menés par le Centre de collaboration MiQro Innovation (C2MI), un organisme clé de la recherche en microélectronique. Les composantes fabriquées à Bromont « vont servir de matière première à toute une panoplie de produits, à toute une industrie qui va nous servir à devenir les leaders de ces marchés-là ici au Québec et au Canada », a déclaré Marie-Josée Turgeon, PDG de C2MI.

On s’attend à ce que ces projets créent quelque 280 emplois dans la région de Bromont. Deux cent quarante postes de stagiaires seront également offerts à des étudiants.

Sous les feux de la rampe

Du côté de Québec, qui versera 38,9 millions au projet, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, a présenté cet investissement comme « l’archétype de ce [que le gouvernement] veut faire dans les zones d’innovation ». Trente-deux millions seront fournis sous forme de prêts-subventions (des « prêts pardonnables »), a-t-il mentionné sans plus de détails.

PHOTO CHRISTINNE MUSCHI, LA PRESSE CANADIENNE

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie du Québec, Pierre Fitzgibbon, et le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne

« Avoir un donneur d’ordres comme IBM au Québec, c’est une grande opportunité pour accroître nos parts de marché de l’assemblage des semi-conducteurs, a-t-il déclaré. Le secteur est clairement sous les feux de la rampe depuis quelques années. On a senti les impacts majeurs qu’un dérangement dans la chaîne d’approvisionnement de ce secteur pouvait avoir sur l’ensemble de l’économie. »

En réponse aux questions des journalistes, M. Trudeau a tenu à défendre cette nouvelle dépense de son gouvernement, dont le dernier budget comportait un déficit de 39,8 milliards.

« Les investissements qu’on fait aujourd’hui sont en train de garantir qu’il y aura une quatrième génération, une cinquième et même une sixième génération de travailleurs ici à Bromont pour continuer à créer de la croissance pour la région […]. Quand on arrive à attirer de grands investisseurs comme IBM, comme Honda, comme Northvolt […], ce n’est pas seulement parce qu’un gouvernement met un peu d’argent sur la table. N’importe quel gouvernement le ferait et, d’ailleurs, il y a des pays qui payent beaucoup plus. »

En savoir plus

  • 700
    Nombre d’entreprises du « secteur des systèmes électroniques intelligents » incluses dans la zone d’innovation Technum Québec, centrée sur le parc scientifique de Bromont

source : c2mi

Résumé

Démystifier la science Du plastique dans l’asphalte

PHOTO FOURNIE PAR L’INSTITUT DE TECHNOLOGIE DU NORD DE L’ALBERTA

L’Institut de technologie du nord de l’Alberta teste la performance de l’asphalte dans lequel a été ajouté un peu de plastique.

Chaque semaine, notre journaliste répond aux questions scientifiques de lecteurs.

Publié à 2h18 Mis à jour à 5h00

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Mathieu Perreault
Mathieu Perreault La Presse

Y a-t-il des tests qui pourraient être menés pour introduire dans l’asphalte une certaine proportion de plastique ?

Daniel VĂ©ronneau

Il y a beaucoup de travaux prometteurs sur le sujet. Tellement qu’il devrait y avoir du plastique dans l’asphalte d’ici quelques années.

En entrevue, Alan Carter, ingénieur spécialiste de l’asphalte à l’École de technologie supérieure (ETS), souligne qu’un peu partout sur la planète, des ingénieurs évaluent actuellement l’ajout de plastique à l’« enrobé » (aussi appelé bitume ou asphalte) pour aider à enrayer la pollution plastique. « Il reste encore des choses à vérifier, mais c’est prometteur. »

L’asphalte avec plastique sera opérationnel d’ici quelques années, mais comme changer les pratiques industrielles et les appels d’offre gouvernementaux prend du temps, M. Carter pense qu’il faudra une décennie pour voir les premiers réasphaltages de ce genre.

Selon M. Carter, l’ajout de plastique à l’asphalte pourrait utiliser la totalité des plastiques de certaines catégories qui sont envoyés dans les sites d’enfouissement au Canada. Cet asphalte comporterait moins de 3 % de plastique, en poids.

Quels problèmes reste-t-il à régler ?

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Alan Carter, ingénieur spécialiste de l’asphalte à l’École de technologie supérieure (ETS)

L’ajout de plastique produit de l’enrobé [asphalte] de très grande qualité quand il fait chaud, mais nuit un peu à basse température. Il faut voir la proportion maximale de plastique pour nos conditions hivernales.

Alan Carter, ingénieur spécialiste de l’asphalte à l’ETS

Autres points qui font encore l’objet de recherches : la possibilité que des microplastiques s’échappent de l’asphalte, la possibilité de réutiliser le mélange plastique-asphalte (comme on le fait actuellement pour l’asphalte) et l’impact sur l’asphalte du durcissement du plastique avec les années, lequel le rend plus fragile.

Les résultats préliminaires sur ces points, notamment à l’ETS, sont encourageants, signale M. Carter.

Ses travaux découlent d’une demande des autorités de la Gaspésie, qui sont responsables du recyclage du plastique pour une région plus large.

Le facteur température

On ne peut pas mélanger tous les plastiques, parce qu’ils fondent à des températures différentes. « Certains fondent à 100 degrés Celsius, alors que d’autres sont encore rigides à 200 degrés », explique M. Carter. Si on chauffe certains plastiques un peu trop, ils peuvent brûler. Et l’asphalte ne doit pas être chauffé à plus de 170 degrés, parce qu’il peut s’endommager.

Certains plastiques, par exemple les bouteilles de boissons gazeuses, sont faciles à recycler. « On cible surtout les plastiques souples, comme les sacs à usage unique ou les sacs en textile plastique. »

Le plastique a aussi tendance à se séparer du reste de l’asphalte, ce qui complique la donne. Pour éliminer ce problème, des chercheurs de l’Institut de technologie du nord de l’Alberta (NAIT) misent sur une cire fabriquée à partir de plastique par une entreprise ontarienne, Greenlandplast.

PHOTO FOURNIE PAR L’INSTITUT DE TECHNOLOGIE DU NORD DE L’ALBERTA

Adetoyese Oyedun, de l’Institut de technologie du nord de l’Alberta

« Ça semble améliorer beaucoup la stabilité par toutes les températures », explique Adetoyese Oyedun, de NAIT. Greenlandplast utilise déjà sa cire plastique pour fabriquer des tuiles de bardeaux pour les toitures.

Le modèle australien

Le leader mondial de l’incorporation du plastique dans l’asphalte est l’Australie, indique M. Carter. « Ils ont été les premiers à financer un programme de recherche. C’est sûr que c’est plus intéressant parce que chez eux, il fait rarement très froid. »

Filippo Giustozzi, de l’Institut royal de technologie de Melbourne (RMIT), confirme l’avance australienne. « Avec certains plastiques, le vieillissement de l’asphalte est même ralenti, parce qu’ils agissent comme un écran solaire », ajoute M. Giustozzi, auteur du livre Plastic Waste for Sustainable Asphalt Roads, publié en 2022.

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En savoir plus

  • 1,9 million de tonnes
    Quantité de plastique générée par le Canada chaque année

Source : Nature

30 millions de tonnes
Quantité d’asphalte produite au Canada chaque année

Source : Ressources Naturelles Canada