Migration, émigration et immigration - Discussion générale

Montréal multiple S’établir ou repartir, le dilemme des Français d’ici

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

La terrasse du Bar Mamie, où se donnent rendez-vous de nombreux Français de Montréal.

Chaque semaine de l’été, nos journalistes partent à la rencontre de communautés québécoises d’adoption. Deuxième arrêt : une visite au sein de la communauté française.

Publié à 1h05 Mis à jour à 6h00


Louise Leduc
Louise Leduc La Presse

Pas moins de 75 000 citoyens français* habitent au Canada. Selon les recensements de 2016 et de 2021, la France arrive en tête de liste en ce qui concerne le pays de naissance des nouveaux arrivants au Québec. On passe à table avec quelques-uns d’entre eux.

« Les Québécois qui viennent ici disent qu’ils ont l’impression de se trouver sur une terrasse à Bordeaux ou à Paris ! », lance Max Rosselin, propriétaire du Bar Mamie, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie.

Et pour cause : 50 % des clients de l’établissement sont français, tout comme la presque totalité du personnel.

Au menu : du fromage, du bon vin, des planches de charcuteries et aussi des plats typiques que la grand-mère du propriétaire ou que celles de ses employés cuisinaient.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Au menu du Bar Mamie : du fromage, du bon vin, des planches de charcuteries…

Au gré des saisons, la carte peut inclure une flamiche au maroilles ou un welsh, des spécialités du nord de la France – une raclette ou du poulet rôti « comme celui du dimanche, en famille ».

Tel est le concept du Bar Mamie, explique Max Rosselin : rendre hommage aux grands-mères françaises et redonner « un petit bout de pays » aux clients.

Qui, pour certains, viennent deux ou trois fois par semaine.

Notre restaurant n’est pas trop, trop cher, alors on a nos fidèles.

Max Rosselin, propriétaire du Bar Mamie

Et de fait, on fait la file pour manger à son établissement.

Lisez le premier texte de notre série : « Bienvenue dans la Plaza San Huberto ! »

Une communauté tissée serré

« Étant à l’extérieur de notre pays, j’ai l’impression qu’on est beaucoup plus tissés serré, qu’on a besoin de se réunir beaucoup plus souvent entre amis que les Québécois le font entre eux en général », avance le propriétaire.

Max Rosselin est originaire du nord de la France. Ce Ch’ti a posé ses valises ici il y a 11 ans et assure n’avoir plus envie de les boucler de nouveau.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Le propriétaire du Bar Mamie, Max Rosselin

J’aime trop l’état d’esprit au Québec, ce sentiment de liberté, ce sens de la communauté.

Max Rosselin, propriétaire du Bar Mamie

Il faut dire que son restaurant – qui devait ouvrir en mars 2020 – a été carrément adopté aussi bien par les Français d’ici que par Rosemont.

Confinement il y a ? Qu’importe, on se fera livrer la France à la maison ! « Les gens du quartier ont été hyper présents, ils nous ont aidés et ils sont venus nous supporter dès qu’on a ouvert. C’était vraiment génial. »

Parmi ceux-là : Julia Defossez, arrivée de Paris il y a quatre ans et qui a été séduite par le Québec. « Ici, j’ai toujours l’impression d’être en vacances, dit-elle. L’ambiance est vraiment conviviale. Il fait bon vivre au Québec, la vie me semble plus facile en général. »

C’est aussi ce qui a plu à Gaspard Carrey, également de Paris, qui est arrivé avec sa conjointe. Ils ont acheté un condo ici, « et on a fait une petite fille ».

Je ne sais pas si je vais y rester pour toujours, mais c’est sûr que nous serons au Québec encore au moins cinq ans. Ici, la vie est plus chill qu’à Paris, où il y a une certaine violence dans les rapports sociaux, sans doute liée au fait qu’il y a là-bas tellement plus de gens qui vivent entassés.

Gaspard Carrey

S’il a eu envie ce vendredi soir là d’une petite soirée chez Mamie avec la famille et les copains, à manger des plats typiques de son pays d’origine – car ça, oui, la cuisine française lui manque ! –, pas question pour lui de ne chercher que la compagnie de ses compatriotes.

« Je ne suis pas parti de France pour recréer un microcosme français », assure-t-il.

Sortir du Plateau

M. Carrey et sa conjointe se sont établis dans Hochelaga-Maisonneuve. Comme lui, de plus en plus de Français s’éloignent du Plateau Mont-Royal. Ils y sont encore nombreux – quelque 7000, selon les plus récentes données de la Ville de Montréal –, mais quelque 5000 ont choisi Rosemont–La Petite-Patrie, et Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce pour plus de 4000 autres.

Plusieurs, comme Hanna Parenti, sont venus au Québec pour les études et ont décidé de rester, sachant que l’emploi en France est difficile pour les jeunes.

Les opportunités professionnelles sont meilleures ici que là-bas. On obtient plus facilement des entretiens.

Hanna Parenti

Certains, comme le propriétaire du Bar Mamie, se voient rester au Québec pour de bon. Pour d’autres, c’est moins sûr. « Il y a toujours dans le fond de ma tête cette question : retournerai-je en France ? », se demande Maylis Balthazard.

« J’ai souvent eu envie de repartir », confie-t-elle.

La nourriture de là-bas lui manque, « les fruits et les légumes, aussi, sont moins chers qu’ici ». Le rythme de vie de Toulouse, aussi. « J’aime faire l’apéro à 14 h en terrasse, et pas seulement entre mai et septembre comme à Montréal. »

*Au dernier recensement canadien, 75 020 personnes ont uniquement mentionné la France comme pays de citoyenneté ; pas moins de 126 520 ont déclaré être entre autres des citoyens français.

Les Français en quelques chiffres

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Nombreux, les Français de Montréal ? Ici, au Palais des Congrès, des membres de la communauté attendent pour voter aux élections présidentielles de France.

1er rang

Les Français forment le plus gros contingent de personnes admises au Québec en 2021

Source : données du recensement de 2021

42 000

Nombre de personnes originaires de France qui vivent à Montréal

Source : Ville de Montréal

16,1 %

Proportion des nouveaux arrivants au Québec en 2022 qui viennent de la France

Source : Institut de la statistique du Québec

6730

Nombre de résidants d’origine française habitant le Plateau Mont-Royal

Source : données de la Ville de Montréal de 2016

3 « J'aime »

Planification en immigration Jusqu’à 64 600 immigrants permanents en 2024

(Québec) Le gouvernement Legault se prépare à accueillir jusqu’à 64 600 immigrants permanents l’an prochain, en tenant compte des étudiants étrangers et des gens d’affaires.

Publié à 10h46 Mis à jour à 16h23

Partager


Hugo Pilon-Larose
Hugo Pilon-Larose La Presse

Officiellement, Québec a annoncé mercredi qu’il fixe son seuil annuel d’immigration à 50 000 nouveaux arrivants pour les deux prochaines années. Or, en décortiquant les chiffres qui ont été présentés par le premier ministre François Legault et par la ministre de l’Immigration Christine Fréchette, le plan gouvernemental prévoit pour l’année 2024 :

  • Un maximum de 51 500 immigrants dans les admissions régulières (immigration économique, regroupement familial et réfugiés) ;
  • 6500 étudiants étrangers sélectionnés dans le volet diplômés du Programme de l’expérience québécoise (PEQ) ;
  • et l’écoulement de 5400 à 6600 demandes dans la catégorie des gens d’affaires, pour un total maximum de 64 600 immigrants permanents.

Pour l’année 2025, le gouvernement ne fournit pas dans son plan ses estimations pour les étudiants étrangers et les gens d’affaires qu’il sélectionnera.

Au printemps dernier, Mme Fréchette avait créé la surprise en présentant deux scénarios dans le cadre des consultations pour fixer le nombre d’immigrants permanents sur quatre ans, soit d’augmenter le seuil annuel à plus de 60 000 d’ici 2027 ou de le maintenir à un maximum de 50 000 par année. Le résultat annoncé mercredi ne figurait pas parmi les hypothèses étudiées.

Pour les années 2026 et 2027, Québec reste muet et n’indique pas les seuils d’immigration qu’ils entrevoient. Le gouvernement mènera de nouvelles consultations avant la prochaine élection générale afin de déterminer le nombre d’immigrants permanents que la province accueillera pour ces deux années.

Des tests de français aux travailleurs temporaires

Comme La Presse le révélait en septembre dernier, Québec impose de nouvelles mesures de français à certains immigrants temporaires, dont le nombre a explosé au cours des dernières années. Ils seraient désormais près de 466 000 sur le territoire québécois.

À l’avenir, un niveau débutant de connaissances du français à l’oral sera exigé aux travailleurs étrangers temporaires qui voudront renouveler leur permis de travail au-delà d’un délai de trois ans. Cette exigence ne vise toutefois pas les travailleurs agricoles. Environ 35 000 travailleurs sont concernés.

« Quand on dit que les travailleurs temporaires vont avoir trois ans pour apprendre le français, je trouve que c’est raisonnable et que ça amène un équilibre entre l’économie et protéger le français », a justifié François Legault lors d’un point de presse au Parlement, mercredi.

Le porte-parole péquiste en matière d’immigration, Pascal Bérubé, juge plutôt que la nouvelle mesure n’inversera pas le déclin du français. Selon lui, le niveau de français qui sera exigé est l’équivalent d’un Québécois qui se rend au bar dans un tout inclus et qui demande « je voudrais une cerveza por favor ». Le Parti québécois est en faveur d’une baisse du seuil d’immigration et du nombre de travailleurs étrangers temporaires au Québec.

De son côté, le gouvernement Legault demande au fédéral d’imposer à son tour après trois ans un test de français aux travailleurs étrangers issus du programme de mobilité internationale (PMI), qui est contrôlé par Ottawa. Environ 119 000 personnes détiennent un tel permis au Québec. Par ailleurs, le premier ministre réitère une fois de plus sa demande pour que le fédéral répartisse mieux à travers le pays les demandeurs d’asile qui arrivent au Canada à partir du Québec.

Les groupes économiques déçus

Dès l’annonce des nouveaux seuils pour les deux prochaines années, les groupes économiques ont tour à tour dénoncé les orientations prévues par Québec, affirmant qu’elles étaient insuffisantes pour contrer la pénurie de main-d’œuvre.

« L’économie du Québec souffrira de cette occasion manquée. En effet, les entreprises du Québec vont devoir encore refuser des contrats ou ralentir des investissements stratégiques alors que l’économie du Québec roule à vide depuis près d’un an », a déclaré Véronique Proulx, présidente-directrice générale de Manufacturiers Exportateurs du Québec.

Le président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Michel Leblanc, déplore que le Québec continue « de [se] priver de l’aide dont nous avons besoin pour réduire la pression sur notre économie ».

« Le gouvernement manque une belle occasion de faire face, avec les employeurs, à la pénurie de main-d’œuvre. Le plan de la ministre ne tient pas compte des besoins du marché du travail alors que les entreprises québécoises refusent des contrats et annulent des investissements faute de travailleurs », a affirmé Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec.

Du côté de l’opposition, le Parti libéral presse le gouvernement d’aider les entreprises qui devront libérer du temps pour les travailleurs temporaires qui voudront se franciser. Québec solidaire déplore pour sa part que le gouvernement accélère le traitement des demandes des gens d’affaires, mais pas celui de la catégorie de la réunification familiale.

« Ce qu’on apprend aujourd’hui, c’est qu’il faut être millionnaire finalement pour avoir droit à des délais de traitement raccourcis par la CAQ », a déploré le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard.

Immigration au Québec Déception dans les milieux d’affaires

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Le gouvernement du Québec a annoncé qu’il maintenait son seuil d’immigration à 50 000 personnes par an.

L’annonce par le gouvernement du Québec qu’il maintient son seuil d’immigration à 50 000 personnes par an déçoit les principaux porte-parole des milieux d’affaires, qui espéraient davantage pour atténuer l’impact du manque de main-d’œuvre sur l’économie.

Publié à 0h00

Partager


Martin Vallières
Martin Vallières La Presse

Trop peu pour les PME affectées par le manque de main-d’œuvre, selon la FCEI

« L’enjeu des pénuries de main-d’œuvre est si aigu au Québec qu’un nombre important de PME se disent à risque si cela persiste. Dans son annonce de mercredi, le gouvernement du Québec fait un petit pas en avant sur le nombre total d’immigrants permanents. Mais il fait aussi un pas en arrière en imposant de nouvelles contraintes aux PME quant à la connaissance du français pour les travailleurs temporaires », commente François Vincent, vice-président pour le Québec à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), qui compte 21 000 membres au Québec.

« Pour la FCEI, la voie à privilégier est d’accentuer les programmes incitatifs de francisation et non pas de créer de nouvelles contraintes pour les PME. On est inquiets des impacts que cela aura sur les PME québécoises, dont la confiance est au plus bas au pays en raison des pénuries de main-d’œuvre. »

Réponse partielle aux besoins du marché du travail, selon le Conseil du patronat

Avec le seuil de 50 000 immigrants par an, « le gouvernement du Québec manque une belle occasion de faire face, avec les employeurs, à la pénurie de main-d’œuvre », selon Karl Blackburn, président et chef de la direction du Conseil du patronat du Québec (CPQ).

« Le plan annoncé mercredi par la ministre de l’Immigration [Christine Fréchette] ne tient pas compte des besoins du marché du travail alors que les entreprises québécoises refusent des contrats et annulent des investissements faute de travailleurs. »

Selon le président du CPQ, « ces besoins de main-d’œuvre qui sont basés sur les données du ministère de l’Emploi devraient être à la hauteur de 84 000 immigrants par année, ce qui équivaudrait au quart (24 %) des 1,6 million de postes qui sont à pourvoir d’ici 2031 ».

Un seuil d’immigration trop bas, selon la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain

« Le Québec est confronté à une grave pénurie de main-d’œuvre qui affecte tous les secteurs, tant les entreprises que les services publics. Depuis 2016, nous demandons de hausser les seuils d’immigration jusqu’à 60 000 par an ; un objectif dont le gouvernement du Québec avait récemment reconnu la pertinence », rappelle Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).

Par conséquent, « nous sommes donc déçus de constater que le gouvernement n’a pas retenu ce scénario. Ce faisant, nous continuons de nous priver de l’aide dont nous avons besoin pour réduire la pression sur notre économie ».

Cela dit, la Chambre de commerce accueille favorablement le fait que les diplômés provenant de l’étranger qui se prévaudront du Programme de l’expérience québécoise (PEQ) pour poursuivre leur carrière au Québec seront exclus du calcul des seuils d’immigration.

« C’est un choix stratégique qui permettra d’accroître la disponibilité de talents bien formés, au bénéfice de tous les Québécois », selon Michel Leblanc.

Une « occasion ratée », selon Manufacturiers et exportateurs du Québec

Un seuil d’immigration établi à 50 000 personnes par an « ne répond pas aux besoins des manufacturiers et de l’économie québécoise », selon l’association Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ).

« Le gouvernement du Québec propose malheureusement de faire du surplace. L’économie du Québec souffrira de cette occasion manquée », considère Véronique Proulx, présidente-directrice générale de MEQ.

« Ce seuil [de 50 000 immigrants] ne donnera pas l’espace de manœuvre nécessaire aux entreprises manufacturières partout en région qui subissent une pénurie de main-d’œuvre importante qui les affecte quotidiennement. Ces entreprises vont devoir encore refuser des contrats ou ralentir des investissements stratégiques alors que l’économie du Québec roule à vide depuis près d’un an. »

Changement de cap regrettable, selon la Fédération des chambres de commerce

La Fédération des chambres de commerce du Québec « regrette le changement de cap du gouvernement qui a annoncé un maintien des seuils d’immigration actuels pendant deux ans, même après avoir tenu une consultation qui devait déboucher sur une vision ambitieuse pour les prochaines années ».

Selon Charles Milliard, PDG de la Fédération, « les attentes des employeurs qui sont confrontés à une pénurie de main-d’œuvre étaient élevées, et l’annonce [de mercredi] n’aidera pas les entreprises québécoises ».

Pourtant, rappelle M. Milliard, « nous avions salué l’ouverture du gouvernement afin d’aborder les réels problèmes de notre approche sur l’immigration. Aussi, le gouvernement a investi des centaines de millions de dollars afin d’améliorer la capacité d’accueil du Québec et de ses régions, tout en corrigeant les lacunes des parcours de francisation des immigrants ».

« Mais en appelant au statu quo des seuils d’immigration, déplore Charles Milliard, nous comprenons que le gouvernement n’a pas confiance dans les mesures qu’il a lui-même mises en place depuis 2018. »

1 « J'aime »

Immigration : la ministre Christine Fréchette mise en demeure

Christine Fréchette et François Legault.

Les délais pour les dossiers de regroupement familial ont explosé au Québec et ne respectent pas la norme de service canadienne, plaide un avocat.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy-Roussel

Publié à 4 h 00 HNE

Soixante jours : c’est la période dont dispose la ministre de l’Immigration du Québec, Christine Fréchette, pour trouver une solution aux délais qui ne cessent de s’allonger en matière de regroupement familial, faute de quoi le dossier pourrait se retrouver en Cour supérieure. Une mise en demeure lui a été envoyée mardi, a appris Radio-Canada.

Ottawa est aussi mis en cause, bien que dans une moindre mesure. La missive a donc aussi été envoyée à son homologue fédéral, le ministre Marc Miller.

L’ultimatum vient de Me Maxime Lapointe, un avocat en droit de l’immigration. Selon lui, le délai moyen de 41 mois pour les Québécois qui attendent d’être réunis avec un conjoint d’origine étrangère n’est pas usuel.

À titre de professionnel, je représente des dizaines de dossiers par année et je constate un écart dans la norme de service des dossiers destinés à la province du Québec par rapport à ceux destinés au reste du Canada, indique Me Lapointe en entrevue.

Portrait de Me Maxime Lapointe.

Me Maxime Lapointe, avocat en droit de l’immigration

Photo : Maxime Lapointe

Ailleurs au pays, le délai moyen pour les Canadiens en attente de regroupement familial est de seulement 12 mois. Cette disparité est en grande partie attribuable au fait que presque 40 000 dossiers de regroupement familial sont en attente au Québec.

Malgré cet inventaire, le gouvernement Legault limite à environ 10 400 le nombre d’admissions par année, ce qui crée un goulot d’étranglement, une explosion des délais et beaucoup de détresse chez les couples concernés.

Or, en vertu de l’Accord Canada-Québec qui précise le rôle de chaque palier en matière d’immigration, le gouvernement provincial n’a pas le pouvoir d’imposer un quota dans la catégorie du regroupement familial, analyse Me Maxime Lapointe.

À mon avis, la ministre de l’Immigration du Québec et le gouvernement de la CAQ sont dans l’erreur en imposant un seuil à l’admission au Canada, qui est une tâche relevant du gouvernement fédéral.

Une citation de Me Maxime Lapointe, avocat en droit de l’immigration

Son interprétation est d’ailleurs partagée par l’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI).

Conséquemment, en ne traitant que le nombre de dossiers souhaité par le gouvernement Legault, Ottawa se trouve aussi à ne pas respecter les termes de l’Accord Canada-Québec, estime Me Lapointe.

On le voit dans les médias, les deux ordres de gouvernement se font une guerre ouverte en voulant dire c’est la faute de qui si on a des délais de traitement. Tout le monde se renvoie la balle, constate-t-il.

Réviser le seuil

Me Lapointe demande donc à Ottawa de finaliser d’ici 60 jours tous les dossiers de regroupement familial à destination du Québec qui excèdent le délai de 12 mois actuellement en vigueur dans le reste du pays.

Quant au gouvernement du Québec, Me Lapointe l’invite à décongestionner complètement les inventaires en regroupement familial et à abolir sa cible de 10 400 admissions par année dans cette catégorie.

Si la ministre Christine Fréchette n’obtempère pas, Me Lapointe lui suggère une autre voie : créer une cible d’admission dynamique qui s’ajusterait en fonction de l’offre et de la demande, afin que soit toujours respecté le délai moyen de traitement de 12 mois.

L’enjeu, c’est de réunir les familles au plus vite [au Québec] à l’intérieur de la norme de service du fédéral.

Une citation de Me Maxime Lapointe, avocat en droit de l’immigration

Me Lapointe ordonne aussi aux deux ordres de gouvernement de rouvrir l’Accord Canada-Québec afin de renégocier les rôles et les responsabilités de chacun.

C’est la bonne manière de faire si on veut revoir les pouvoirs en immigration. Ce n’est pas la manière de François Legault, qui dit : “Je veux récupérer tous les pouvoirs en immigration sans savoir ce que ça implique”, croit l’avocat.

Si les deux gouvernements n’agissent pas à l’intérieur des 60 jours impartis, Me Lapointe entend déposer une requête en jugement déclaratoire devant la Cour supérieure.

À la rédaction de ces lignes, ni le cabinet de Christine Fréchette ni celui de Marc Miller n’avaient confirmé la réception de la mise en demeure.

2 « J'aime »

Le Québec franchit le cap des 500 000 immigrants temporaires

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Les immigrants temporaires ont atteint un sommet historique au Québec.

Les immigrants temporaires dépassent le cap du demi-million au Québec. Les dernières données de Statistique Canada, publiées mardi, montrent que la croissance spectaculaire observée au troisième trimestre s’est poursuivie au quatrième trimestre de 2023.

Publié à 2h09 Mis à jour à 5h00

Partager


Suzanne Colpron
Suzanne Colpron La Presse

Ce qu’il faut savoir

Les immigrants temporaires ont atteint un sommet historique au Québec.

Leur nombre a bondi de 46 % en un an, pour l’ensemble des catégories, passant de 361 000 à 528 000.

Au Canada, le nombre d’immigrants temporaires atteint 2,5 millions.

Il y a un an, Statistique Canada dénombrait 360 936 immigrants temporaires, qu’on appelle aussi des résidents non permanents. Ce nombre atteint maintenant 528 034, soit une hausse de 46 % en un an.

Qui sont ces nouveaux venus ? Que font-ils ? Il s’agit d’étrangers qui détiennent un permis de travail, un permis d’études ou qui ont demandé l’asile.

Les gouvernements fixent des seuils annuels d’immigrants permanents. Mais dans le cas des temporaires, il n’y a aucun seuil, aucune limite. Ce qui explique l’explosion révélée par les données de Statistique Canada.

On peut même ajouter que cette explosion a été en partie nourrie par les politiques gouvernementales.

Ce n’est pas le cas pour les demandeurs d’asile, dont les flux résultent des tensions internationales. Mais ce sont les gouvernements du Québec et du Canada qui acceptent les étudiants, ou qui accordent ou non des permis aux travailleurs étrangers. C’est le gouvernement du Canada qui permet aux étudiants de prolonger leur séjour en leur accordant un permis de travail post-diplôme, et c’est le gouvernement du Québec qui entend attirer davantage d’étudiants étrangers francophones avec une promesse de passerelle rapide pour la résidence permanente.

La forte croissance des résidents non permanents n’étonne pas le professeur Jean-Pierre Corbeil, qui a été responsable pendant 15 ans du programme de la statistique linguistique de Statistique Canada. « En ce moment, il semble y avoir une certaine opacité pour ce qui est de l’information sur les résidents non permanents au ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration du Québec, déplore-t-il. Ça devient très difficile de savoir où on s’en va exactement avec tout ça. »

A-t-on perdu le contrôle ? M. Corbeil se fait prudent, mais « ce qui est clair, dit-il, c’est que ce nombre continue d’augmenter et qu’on ne sait pas dans quelle mesure cette hausse est arrimée aux besoins réels et aux demandes du milieu des affaires qui a des postes à [pourvoir] ».

Plus de travailleurs

Ce sont les travailleurs étrangers qui forment le plus gros contingent de résidents non permanents au Québec. Ils sont 225 684, incluant les membres de leur famille. Cela représente 43 % du total des temporaires.

Leur nombre a bondi de 85 500 en un an, soit une hausse de 61 %.

Le deuxième groupe en importance est celui des demandeurs d’asile. Ils étaient 106 000 en 2022, selon l’agence fédérale. Ils sont maintenant plus de 160 000. Il faut savoir qu’environ 100 000 d’entre eux ont un permis de travail.

Le groupe le moins important en nombre est celui des étudiants étrangers : 72 620. Fait étonnant, le nombre de détenteurs de permis d’études a bondi de 8000 entre le troisième et le quatrième trimestre, alors qu’il était plutôt stable depuis le début de l’année. Est-ce que cette croissance est attribuable à la menace de la hausse des droits de scolarité du gouvernement de la Coalition avenir Québec ? « C’est une possibilité », croit Jean-Pierre Corbeil, professeur au département de sociologie de l’Université Laval. « Parce que la mesure va s’imposer pour les nouveaux et non pas pour ceux qui ont déjà amorcé leur programme d’études. »

Explosion au Canada

Dans l’ensemble du Canada, le nombre de résidents non permanents est aussi en explosion. Sur une population estimée de 40,5 millions, on compte plus de 2,5 millions de résidents temporaires. Il y a un an, ils étaient 1,7 million.

Le plus grand groupe de temporaires est celui des travailleurs étrangers. À 1 165 500, ceux-ci comptent pour 46 % du total.

Le deuxième groupe en importance est celui des étudiants étrangers. Ils sont 660 000, ce qui équivaut à 26 % des résidents non permanents au Canada. Leur nombre a bondi de 122 000 en un an.

Les demandeurs d’asile sont proportionnellement beaucoup moins nombreux au Canada qu’au Québec. Ils sont 289 000 au pays, soit 12 % des résidents temporaires. Au Québec, ils comptent pour 30 % de tous les résidents non permanents.

Prendre racine, sous votre bonne étoile

PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE

Natalia Guskova et Artiom Prilepski (au premier plan) et leurs jumeaux, Iaroslava et Svetozar


Laura-Julie Perreault
Laura-Julie Perreault La Presse

Vous ai-je déjà dit, chers lecteurs, combien vous êtes généreux ? Et je ne suis pas la seule à le penser. Je connais une famille ukraino-russe qui a la même opinion.

Publié à 1h16 Mis à jour à 5h00

Partager

Vous vous souvenez peut-être d’elle. En février dernier, j’ai raconté en long et en large l’histoire d’Artiom Prilepski, un ami de longue date originaire d’Ukraine, de sa femme Natalia Guskova et de leurs deux enfants, des Moscovites pur jus. Profondément opposée à la guerre et à toute la haine qui l’accompagne, la famille est venue s’installer à Montréal en octobre 2022.

Lisez la (longue) chronique sur la famille Prilepski-Guskova

Comment vont-ils aujourd’hui ? Plutôt bien. Et c’est en partie grâce à vous ! Vous avez été nombreux à m’écrire après la parution de l’article pour leur proposer de l’aide. De l’aide vraiment concrète.

Des professeurs de français m’ont écrit pour leur offrir des cours particuliers.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

La famille Prilepski-Guskova, en février dernier

Copropriétaire de deux succursales de Pizzéria No 900 à Montréal, Richard Gélinas a offert d’embaucher le couple. Artiom a passé un mois et demi à préparer des pizzas l’été dernier.

Un autre lecteur, Louis Ménard, qui avait l’habitude d’envoyer des vélos usagés retapés en Haïti avec l’organisation Action-Haïti, mais qui peine à se rendre dans le pays des Antilles depuis que la situation sécuritaire s’y est dégradée, a offert quatre bicyclettes à la famille ukraino-russe. « Pour avoir du plaisir, on fait du vélo en famille. Ça nous a permis de découvrir Montréal », me dit Artiom, enthousiaste.

Le premier don de vélo n’a été que le début de la relation avec M. Ménard. Depuis, ce dernier a apporté 25 vélos chez les Prilepski-Guskova dans le quartier Côte-Saint-Paul. Artiom les a redistribués parmi les nouveaux arrivants ukrainiens et leurs familles.

Et ça ne s’arrête pas là. Lors de ma dernière visite chez mes amis, pour le 16e anniversaire des jumeaux Svetozar et Iaroslava, nous avons dégusté un gâteau aux fruits du temps des Fêtes apporté par M. Ménard. « C’est vraiment une bonne personne. Il nous envoie des courriels très gentils », lance Artiom, touché par ces délicates attentions.

Mon entrevue de mise à jour avec le couple se passe en français du début à la fin. Un français hésitant – laborieux par moments –, mais de plus en plus fonctionnel. Les jumeaux sont toujours dans une classe d’accueil à l’école secondaire Saint-Henri. Natalia – qui suit un programme intensif de français au cégep André-Laurendeau – a fait des progrès renversants au cours des six derniers mois.

Pendant qu’elle consacre toutes ses énergies à l’apprentissage de la langue, Artiom, lui, travaille dans un atelier de sculpture qui donne vie aux œuvres d’artistes urbains. Il quitte la maison à 6 h 30 le matin pour revenir à 19 h. Pour se faire l’oreille au français « international », il écoute la radio de Radio-Canada en travaillant. Et pour les spécificités québécoises ? « Nous regardons les Têtes à claques en famille ! », s’exclame Natalia. Un des épisodes de cette série de capsules humoristiques bien connue, relatant les péripéties d’une équipe de hockey de Sainte-Thérèse à Stalingrad, en Russie, les a fait rire aux éclats.

Considérant l’ampleur des efforts qu’il déploie pour apprendre la langue de Vigneault, le couple ne comprend pas pourquoi le gouvernement Legault estime que les immigrants sont aptes à recevoir des services de l’État en français seulement six mois après leur arrivée.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Artiom Prilepski, en février dernier

Nous commençons seulement à pouvoir soutenir une conversation. Six mois, c’est rêver en couleurs !

Artiom Prilepski

À ce jour, son plus grand choc d’adaptation a été de se frotter aux services publics d’ici. Et pas seulement pour une question de langue. Se butant aux ratés de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ), il attend patiemment depuis un an pour obtenir un permis de conduire. « C’est de la violence administrative ! », dit Natacha en riant.

En fait, le couple a bien peu de doléances sur sa nouvelle vie. Ce n’est pourtant pas facile tous les jours. « Nous gagnons assez pour payer le loyer, les téléphones, l’internet, l’électricité et une partie de la nourriture. Les banques alimentaires nous ont beaucoup aidés », confie un Artiom reconnaissant et qui en a vu d’autres.

S’ils sont contents d’avoir laissé la Russie et son climat guerrier derrière, plusieurs de leurs proches leur manquent. « Et quand on les appelle, on ne parle pas de politique et de la situation en Russie. Tout le monde se sent écouté, même sur WhatsApp », dit Artiom.

Natalia ne s’ennuie pas le moindrement du stress de la vie moscovite.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Natalia Guskova, en février dernier

Qu’est-ce qui me manque ? Les musées, les amis… et les pharmacies. Quand on est malade en Russie, on va directement à la pharmacie chercher ce dont on a besoin. On n’est pas obligé d’aller voir un docteur.

Natalia Guskova

Et Artiom ? Il trouve surtout que la vie va vite au Québec. Il s’ennuie des copains qui débarquent à la maison et restent à coucher après avoir parlé jusqu’aux petites heures. « Les gens sont toujours occupés ici », note-t-il. (Message reçu cinq sur cinq.)

Mais tout ça n’est rien par rapport aux chantiers des possibles qu’ils sont en train d’échafauder en famille. « Quand tu travailles bien et que tu étudies bien ici, tu récoltes beaucoup plus qu’en Russie. De jour en jour, je comprends qu’il y a un monde d’occasions à saisir devant nous », lance Natalia.

Chers lecteurs, vous n’êtes pas étrangers à ce constat. Que 2024 soit à la hauteur de la bienveillance que vous avez démontrée à l’égard des Prilepski-Guskova. Et qu’elle soit douce pour les dizaines de milliers de nouveaux arrivants qui, comme Artiom, Natacha, Svetozar et Iaroslava, ont décidé de refonder leur vie au Québec. Par choix ou par nécessité.

4 « J'aime »
4 « J'aime »

Il ne faut pas oublier que la population de Montreal avait perdu 45000 habitants durant la pandemie.

1 « J'aime »

Donc est-ce que cela veut dire que des personnes ayant quitté la ville pour la ‘‘campagne’’ et qui sont revenues ou que c’est majoritairement des nouveaux arrivants ?

De toute façon, il faut continuer dans cette direction tout en s’assurant de bien intégrer les gens qui arrivent afin de leur donner une meilleure chance de s’intégrer au Québec et de participer au dynamisme de Montréal.

3 « J'aime »

Ottawa avait été averti qu’une forte hausse de l’immigration nuirait à l’accès au logement


Olivier Zuida, Le Devoir
Le sous-ministre fédéral de l’immigration avait été averti en 2022 que la construction de logements n’avait pas suivi le rythme de la croissance démographique.

Nojoud Al Mallees
La Presse canadienne
À Ottawa
08 h 34
Canada

Des fonctionnaires fédéraux ont averti le gouvernement du Canada il y a deux ans que de fortes augmentations de l’immigration pourraient affecter l’abordabilité du logement et les services, selon des documents internes.

Ces documents obtenus par La Presse canadienne grâce à une demande d’accès à l’information montrent qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a analysé les effets potentiels de l’immigration sur l’économie, le logement et les services, alors qu’il préparait ses objectifs d’immigration pour 2023 à 2025.

Le sous-ministre, entre autres, avait été averti en 2022 que la construction de logements n’avait pas suivi le rythme de la croissance démographique. « Au Canada, la croissance démographique a dépassé la croissance du nombre de logements disponibles », peut-on lire. « En tant qu’autorité fédérale chargée de gérer l’immigration, les décideurs du ministère doivent comprendre le décalage entre la croissance démographique et l’offre de logements, ainsi que la manière dont l’immigration permanente et temporaire façonne la croissance démographique. »

L’immigration est responsable de presque toute la croissance démographique au Canada, compte tenu du vieillissement démographique du pays.

Le gouvernement fédéral a finalement décidé d’augmenter le nombre de résidents permanents que le Canada accueille chaque année à 500 000 en 2025. Cela signifie qu’en 2025, le Canada accueillera près de deux fois plus de résidents permanents qu’en 2015.

Un document révèle que les fonctionnaires fédéraux étaient bien conscients des pressions qu’une forte croissance démographique exercerait sur le logement et les services. « Les augmentations rapides exercent une pression sur les soins de santé et le logement abordable », ont prévenu les fonctionnaires. « Les prestataires de services d’établissement et de réinstallation expriment des difficultés à court terme en raison des conditions du marché du travail, de l’augmentation des niveaux et des initiatives en Afghanistan et en Ukraine. »

L’abordabilité du logement est désormais devenue un handicap politique pour le gouvernement libéral. Les conservateurs ont pris un élan considérable au cours de la dernière année alors que le parti s’attaque aux questions d’abordabilité, tout en évitant la question de l’immigration en particulier. Ces pressions ont forcé le gouvernement libéral à recentrer ses efforts sur la politique du logement et à commencer à faire face à l’augmentation du nombre d’étudiants internationaux avec de nouvelles règles.

Des données récentes montrent que le rythme de croissance démographique du Canada continue d’établir des records, le pays accueillant également un nombre historique de résidents temporaires, en grande partie grâce aux programmes d’étudiants internationaux et de travailleurs étrangers temporaires.

La population du pays a augmenté de plus de 430 000 personnes au cours du troisième trimestre 2023, ce qui représente le rythme de croissance démographique le plus rapide jamais enregistré depuis 1957. Des analystes financiers jusqu’aux établissements universitaires ont averti que la forte croissance démographique du Canada érode l’abordabilité du logement, car la demande dépasse l’offre.

La Banque du Canada a émis une analyse similaire. Toni Gravelle, sous-gouverneur depuis octobre 2019, a prononcé un discours le mois dernier au cours duquel il a averti que la forte croissance démographique faisait monter les coûts des loyers et les prix des logements.

Les sondages d’opinion publique montrent également que les Canadiens sont de plus en plus préoccupés par la pression que l’immigration exerce sur les services, les infrastructures et le logement, ce qui entraîne une diminution du soutien en faveur d’une immigration élevée.

Le gouvernement libéral a défendu ses décisions en matière de politique d’immigration, affirmant que les immigrants contribuent à la prospérité économique et contribuent à améliorer la démographie du pays à mesure que la population vieillit. Toutefois, dans un contexte de surveillance accrue de la politique d’immigration du gouvernement libéral, le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a fixé l’objectif annuel à 500 000 résidents permanents pour 2026.

L’attention se déplace désormais vers la forte augmentation du nombre de résidents non permanents. Entre juillet et octobre, environ les trois quarts de la croissance démographique du Canada provenaient des résidents temporaires, y compris les étudiants internationaux et les travailleurs étrangers temporaires.

Cette tendance sonne l’alarme quant à la dépendance croissante des entreprises à l’égard des travailleurs migrants à bas salaires et à l’attrait des étudiants internationaux par des établissements postsecondaires douteux.

Mikal Skuterud, professeur d’économie à l’Université de Waterloo, en Ontario, qui est spécialisé dans la politique d’immigration, affirme que le gouvernement fédéral semble avoir perdu le contrôle des flux migratoires temporaires. Contrairement aux objectifs annuels pour les résidents permanents, le nombre de résidents temporaires est dicté par la demande de travailleurs migrants et d’étudiants internationaux.

Il note également qu’il existe un lien entre les objectifs en matière de résidents permanents et le flux de résidents temporaires. « Dans la mesure où vous augmentez le nombre de permanents et que les migrants réalisent que pour obtenir une permanence, il faut venir ici en tant que résident temporaire… alors les migrants sont incités à venir tenter leur chance », a-t-il observé.

Le professeur Skuterud, qui a vivement critiqué la politique d’immigration du gouvernement fédéral, affirme que les avantages d’une immigration élevée ont été exagérés par les libéraux. Selon lui, à partir de 2015 environ, lorsque le gouvernement libéral a été élu pour la première fois, un discours s’est développé au Canada selon lequel « l’immigration était en quelque sorte une solution aux problèmes de croissance économique du Canada ».

Et même si le professeur Skuterud affirme que des gens aiment croire ce discours, il note qu’une immigration plus forte ne fait pas grand-chose lorsqu’il s’agit d’augmenter le niveau de vie, tel que mesuré par le produit intérieur brut (PIB) réel par habitant.

Des fonctionnaires d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada sont d’accord, suggèrent les documents obtenus par La Presse canadienne. « L’augmentation de la population en âge de travailler peut avoir un impact positif sur le produit intérieur brut, mais peu d’effet sur le PIB par habitant », ont-ils noté.

Le « piège démographique » montréalais (et canadien)

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

L’île de Montréal a attiré près de 100 000 nouveaux habitants pendant la dernière année alors que les mises en chantier se sont effondrées de 26 %.


Maxime Bergeron
Maxime Bergeron La Presse

Je n’ai pas eu la meilleure note du groupe à mon cours de mathématiques 436, mais j’ai amassé tout juste assez de connaissances pour savoir reconnaître un problème de calcul lorsqu’il me saute au visage.

Publié à 1h01 Mis à jour à 5h00

Partager

Celui qui se présente aujourd’hui est visible à des kilomètres à la ronde.

Deux chiffres récents, aux antipodes, illustrent la crise majeure dans laquelle s’enfonce non seulement la métropole québécoise, mais aussi tout le pays.

L’île de Montréal a attiré près de 100 000 nouveaux habitants pendant la dernière année, a révélé La Presse la semaine dernière, une hausse spectaculaire de 5,3 %1. Ce gain net de population est essentiellement attribuable à la migration internationale, temporaire et permanente.

En parallèle, les mises en chantier se sont effondrées de 26 % depuis un an dans l’île de Montréal, nous a appris mardi la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), pour s’établir à un total famélique de 7705 nouveaux logements Vous avez bien lu.

La pire performance depuis 2001, à l’échelle métropolitaine.

Le décalage est gigantesque, et cette déconnexion grandissante entre démographie et construction cause des ravages partout au Canada.

Prenons les choses morceau par morceau.

Le sujet est tabou, chargé et complexe, mais depuis quelques mois, de plus en plus d’experts réputés tirent la sonnette d’alarme. Leur constat est tranchant : les cibles d’immigration fixées par le gouvernement fédéral de Justin Trudeau dépassent les capacités d’accueil du pays, en matière de logement et de services publics.

Lundi, deux économistes de la Banque Nationale, Stéphane Marion et Alexandra Ducharme, ont publié un rapport spécial pour exposer le « piège démographique » dans lequel se trouve aujourd’hui le Canada2.

Rien de moins*.*

La population du pays a grimpé de 1,2 million de personnes l’an dernier, soulignent-ils, un chiffre jugé « incroyable », « stupéfiant » et « extrême ». Cette croissance démographique de 3,2 % en une seule année est cinq fois plus élevée que la moyenne des pays de l’OCDE (+ 0,6 %).

La venue de 543 000 travailleurs temporaires et de 455 000 immigrants explique la majeure partie de cette hausse, note le rapport. Pendant la même période, il y a eu 360 000 naissances et 332 000 décès.

Cette poussée démographique a un impact dans les hôpitaux, dans les écoles et dans les refuges pour sans-abri. Ça déborde d’un océan à l’autre. J’ai reçu plusieurs témoignages poignants en ce sens au cours des derniers mois.

Mais « ce défi de l’absorption n’est nulle part plus évident que dans le domaine du logement, où le déficit de l’offre a atteint un nouveau record, avec seulement une mise en chantier pour 4,2 personnes entrant dans la population en âge de travailler », écrivent les économistes de la Banque Nationale.

Historiquement, il y avait une nouvelle construction pour 1,8 personne.

Ottawa a injecté des dizaines de milliards pour tenter d’accélérer les mises en chantier, mais il faudrait doubler la cadence de production à environ 700 000 nouvelles constructions par an pour espérer combler le déficit. Nous sommes très loin du compte.

Les économistes de la Banque Nationale estiment que le Canada est coincé « dans un piège démographique qui a historiquement toujours été réservé aux économies émergentes ». Ils préconisent de ramener la croissance démographique totale entre 300 000 et 500 000 pour sortir de l’impasse.

J’écrivais plus haut que la crise actuelle était visible à des kilomètres à la ronde, mais il faut croire que les autorités fédérales ne l’ont pas vue se profiler sur leur écran radar, ce qui est assez déroutant.

Pire encore : Ottawa a ignoré l’avis de ses propres fonctionnaires, qui l’ont averti il y a deux ans que ses cibles d’immigration ambitieuses risquaient d’affecter l’abordabilité des logements et les services publics. La Presse Canadienne a révélé ces informations très embarrassantes pour le gouvernement Trudeau jeudi dernier3.

À Québec, le découplage entre la croissance de la population et la disponibilité des logements inquiète au plus haut point le gouvernement Legault. D’autant que la province n’a aucun pouvoir sur la sélection d’une partie de ses nouveaux résidants, dont les demandeurs d’asile.

Le Québec a accueilli un nombre record de 150 000 immigrants en 2022, et les projections s’établissent entre 174 000 et 190 000 par année d’ici 2028, selon un document interne que j’ai pu consulter.

La province a besoin d’immigrants, et, oui, elle espère attirer davantage de nouveaux venus issus de la francophonie, mais l’ampleur récente des arrivées est vue comme une « catastrophe » pour l’accès aux logements et aux services publics, m’a fait valoir une source bien placée au gouvernement.

Ce qui nous ramène aux mises en chantier.

Le Québec en a enregistré 38 900 l’an dernier, un recul du tiers sur un an. C’est le niveau le plus faible depuis 2015, et dans le segment des maisons unifamiliales… le pire score depuis 1955 !

La baisse est de 37 % dans la région métropolitaine de Montréal, et comme je l’écrivais d’entrée de jeu, de 26 % dans l’île.

Inflation, hausse des taux d’intérêt et des coûts de construction, embûches réglementaires, sous-investissement dans le logement social : les causes de ce repli sont nombreuses. On ne saurait absolument montrer du doigt l’immigration pour cette contre-performance de la construction.

Une chose est assurée, toutefois : la forte croissance de la démographie, combinée à la baisse des mises en chantier, constitue une recette pour le désastre. La crise du logement, déjà bien enracinée, va s’aggraver.

La bonne vieille loi de l’offre et de la demande jouera de plus en plus son rôle au fil des prochaines années, ce qui rendra l’accès à des logements abordables de plus en plus impensable.

1. Lisez « La population de Montréal rebondit »

2. Consultez l’étude Le Canada est pris dans un piège démographique

3. Lisez « Ottawa avait été prévenu des impacts de l’immigration »

Au sujet de l’étude des économistes de la BNC

Entrevue radio à Midi Info avec un des auteurs de l’étude

Immigration et logement : Le piège démographique avec Stéfane Marion Rattrapage du 17 janv. 2024 : Les défis de la croissance démographique et la santé financière des restaurants


Dans le Devoir

L’économie canadienne dans un «piège démographique», dit une étude


Valérian Mazataud, Le Devoir
Le Canada ne dispose pas du stock de capital nécessaire pour absorber la croissance de la population et améliorer le niveau de vie de ses habitants, selon l’étude.

Alex Fontaine
19 h 55
Économie

Le Canada est aux prises avec un « piège démographique ». L’économie serait incapable de gérer les présents niveaux d’immigration, ce qui rend impossible l’amélioration du niveau de vie des Canadiens, selon une étude de la Banque Nationale parue lundi dernier. Pour qu’on puisse s’extirper de ce piège, les auteurs estiment que la croissance annuelle de la population ne devrait pas dépasser de 300 000 à 500 000 personnes.

La croissance démographique actuelle au Canada « semble extrême par rapport à la capacité d’absorption de l’économie », selon les auteurs de l’étude. Ils soulignent un déficit record de l’offre de logements et estiment que, pour y remédier, « le Canada devrait doubler sa capacité de construction à environ 700 000 mises en chantier par an, un objectif inatteignable ».

Or, il faut regarder plus loin que le logement, explique au Devoir le coauteur de l’étude Stéfane Marion, économiste et stratège en chef de la Banque Nationale. « J’ai besoin de 700 000 logements l’année prochaine. Ça n’arrivera pas, mais même si je les faisais, est-ce que j’aurais la capacité d’augmenter le nombre d’écoles, de garderies, d’infrastructures, d’hôpitaux ? Est-ce que les villes auraient même la capacité de creuser les rues, de faire les égouts ? »

Un coffre qui manque d’outils

D’où l’importance de regarder du côté du « stock de capital », selon l’économiste. Il compare ce concept à un coffre à outils, qui serait composé d’usines, de bureaux, d’équipements, de logiciels… Bref, de tout ce qui permet aux travailleurs d’accomplir leur besogne.

« Si j’ai une politique d’immigration extrêmement vigoureuse — c’est le cas au Canada présentement —, je veux faire entrer plein de gens, explique M. Marion. Mais si mon coffre à outils ne grossit pas au moins aussi rapidement que le nombre de travailleurs, je me retrouve avec des gens qui manquent d’outils. »

Mal outillés, les travailleurs sont donc moins productifs, ce qui entraîne une baisse du PIB par habitant, c’est-à-dire un appauvrissement collectif. C’est ce qu’indique l’étude, qui fait état d’un « niveau de vie au point mort » depuis six ans.

En d’autres mots, le Canada ne dispose pas du stock de capital nécessaire pour absorber la croissance de la population et améliorer le niveau de vie de ses habitants. C’est le piège démographique.

Selon les calculs de la Banque Nationale, le stock de capital par habitant au pays a diminué de près de 1,5 % en 2023. Si on exclut le logement, il diminue chaque année depuis sept ans, alors qu’il ne cesse d’augmenter aux États-Unis.

Une réputation à risque

Si le gouvernement souhaite qu’une croissance démographique comme celle de l’an dernier — estimée à plus de 1,2 million de personnes — devienne la norme, il faut « favoriser des politiques qui incitent les entreprises, les municipalités et d’autres acteurs économiques à augmenter substantiellement l’investissement », estime Stéfane Marion.

Selon lui, attirer des travailleurs étrangers au pays sans être en mesure de leur offrir un logement, des services et des occasions de carrière à la hauteur de leurs compétences pourrait les inciter à repartir. « Cela pourrait entacher la réputation du Canada comme terre d’accueil digne de ce nom », dit M. Marion, qui « préconise la formation d’un conseil d’experts non partisans qui donne le chiffre d’immigration aux politiciens » afin de dépolitiser l’enjeu.

La question des seuils d’immigration a d’ailleurs fait réagir la classe politique au cours des derniers jours. Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a cité les conclusions de l’étude de la Banque Nationale lors d’un point de presse à Alma, mercredi, pour mettre l’accent sur les dossiers de l’immigration et de l’accès à la propriété. Il a critiqué au passage les objectifs de croissance démographique d’Ottawa.

À Québec, la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, s’est inquiétée du nombre de demandeurs d’asile qui arrivent dans la province, arguant que le Québec avait atteint sa capacité maximale d’accueil.

Justin Trudeau a répété cette semaine vouloir accueillir 500 000 immigrants, tout en affirmant vouloir « remettre sous contrôle » l’immigration temporaire. Le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, a affirmé vendredi dernier que le Canada devrait arrimer sa politique d’immigration à la construction de logements.


Autre article du Devoir sur l’immigration temporaire

L’augmentation de l’immigration temporaire sur toutes les lèvres à Québec


Jacques Boissinot, La Presse canadienne
«Si nous continuons à recevoir des gens par dizaines de milliers en très peu de temps, de manière non planifiée et concentrée dans une même région, soit Montréal en ce qui nous concerne, c’est sûr que nous nous approchons à plus grande vitesse d’un [point de bascule]», a déclaré mercredi Christine Fréchette.

François Carabin et Sébastien Tanguay
respectivement à Alma et à Québec
20 h 08
Québec

La hausse fulgurante du nombre d’immigrants temporaires pousse le Québec vers un « point de bascule », selon la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, et amène le Parti québécois (PQ) à considérer une révision de ses cibles d’immigration.

Un jour après que le premier ministre Justin Trudeau a réitéré l’ambition de son gouvernement d’accueillir un demi-million de nouveaux arrivants à partir de 2025, la classe politique québécoise a lancé mercredi un avertissement devant le nombre croissant de résidents non permanents dans la province. En décembre dernier, le Québec en comptait plus de 500 000, selon Statistique Canada.

Depuis Alma, où il participait au caucus présessionnel de son parti, le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, a convenu que l’effet « important » de l’immigration temporaire — les demandeurs d’asile, les travailleurs temporaires et les étudiants internationaux — sur le marché immobilier le poussait à retourner à la table à dessin.

Le parti refera ses « calculs » et pourrait bientôt proposer de nouveaux seuils d’immigration permanente, le levier sur lequel le Québec a le contrôle. « Il y aura du nouveau », a dit le chef péquiste mercredi. S’il reconnaît que la situation a évolué ces derniers mois, il refuse de dire si la cible du PQ sera revue à la baisse ou à la hausse. « À ce stade-ci, je ne peux pas vous donner de réponse à l’avance. Le travail, il est devant nous. »

Lors de la dernière campagne électorale, en 2022, la formation souverainiste avait fixé sa cible annuelle d’immigration permanente à 35 000 nouveaux arrivants. Un seuil plus bas encore que celui de la Coalition avenir Québec (50 000). Les cibles du Parti libéral et de Québec solidaire dépassaient, pour leur part, les 60 000.

Mais, depuis, c’est l’immigration temporaire qui a dominé le débat politique à Québec.

La croissance de ce type d’immigration « contribue à accentuer la crise du logement », estime PSPP. « À l’élection, non seulement la crise du logement n’était pas aiguë et on n’avait pas toutes les données, mais la question de l’immigration temporaire était presque périphérique », a-t-il souligné mercredi.

Le PQ entend déposer ce printemps un document détaillant sa vision de l’immigration. Il se veut une réplique de l’« Initiative du siècle », une proposition d’un groupe de pression pour rehausser radicalement les seuils d’immigration et faire grimper la population canadienne à 100 millions de personnes en 2100. Ottawa affirme publiquement qu’il ne se pliera pas à ces demandes. L’ex-ministre fédéral de l’Immigration Sean Fraser avait d’ailleurs affirmé en Chambre l’an dernier que « l’Initiative du siècle, la Century Initiative, n’est pas la politique du gouvernement fédéral ».

Vers un « point de bascule » ?

Le gouvernement libéral à Ottawa entend resserrer l’admission des étudiants internationaux pour relâcher la pression que l’immigration temporaire exerce sur le marché de l’habitation, avait lancé Justin Trudeau.

Mais pour le gouvernement caquiste, c’est insuffisant. L’arrivée rapide et improvisée de dizaines de milliers de membres d’une autre catégorie d’immigrants temporaires — les demandeurs d’asile — rapproche le Québec d’un « point de bascule », a même lancé mercredi la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette.

« Le Québec assure une trop grande part de l’accueil des demandeurs d’asile qui arrivent au Canada », a déploré l’élue lors d’une conférence devant la Chambre de commerce et d’industrie de Québec. « Si nous continuons à recevoir des gens par dizaines de milliers en très peu de temps, de manière non planifiée et concentrée dans une même région, soit Montréal en ce qui nous concerne, c’est sûr que nous nous approchons à plus grande vitesse d’un tipping point [” point de bascule”]. »

Selon Mme Fréchette, il est urgent que le fédéral « change sa façon de gérer cet enjeu » afin d’éviter qu’un « climat franchement moins accueillant » s’installe au Québec. Elle demande à Ottawa de resserrer l’octroi de visas et de mieux répartir les demandeurs d’asile « dans l’ensemble des provinces ».

Paul St-Pierre Plamondon accuse le gouvernement caquiste de lancer des paroles en l’air. « La vérité, c’est que si on veut décider par nous-mêmes, c’est possible. Il faut choisir de décider par nous-mêmes, tout simplement. Sinon, continuons à laisser Ottawa décider », a-t-il soutenu depuis Alma.

Depuis la « fermeture » du chemin Roxham, l’an dernier, la plupart des demandeurs d’asile arrivent au Canada par les aéroports. « Nous le disons depuis longtemps : notre capacité d’accueil, elle a atteint sa limite maximale par rapport aux demandeurs d’asile », a affirmé Christine Fréchette mercredi.

À Québec, le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime, a exhorté Québec à diminuer ses seuils d’immigration. « Présentement, il y en a beaucoup trop », a-t-il déclaré en point de presse. L’objectif du gouvernement fédéral d’accueillir 500 000 immigrants par année est excessif, a-t-il indiqué. « Il faut arrêter de penser que réduire le nombre d’immigrants, c’est de l’intolérance ou quelque chose qui est négatif. L’ensemble des pays développés en accueille beaucoup moins que le Canada. Il y a eu une explosion, ces derniers mois, qu’on n’avait jamais vue. »

M. Duhaime n’a pas voulu s’avancer sur un nombre qui serait raisonnable ni sur la catégorie d’immigration qui devrait diminuer au Québec. Mais il croit qu’il faut augmenter la construction de nouveaux immeubles résidentiels. « On continue à diminuer le nombre de mises en chantier ; eh bien ça veut dire qu’il faudrait que tous les ans, on réduise aussi le nombre d’immigrants », a-t-il dit.

Plus tôt cette semaine, à Québec, le chef conservateur fédéral, Pierre Poilievre, a détaillé sa vision d’un seuil d’immigration acceptable au micro de Radio-Canada. Selon lui, Ottawa ne devrait pas accueillir plus d’immigrants que la capacité du pays à créer des logements. « C’est une question de mathématiques », avait-il dit.

Avec Alexandre Robillard

Immigration Legault exhorte Trudeau à freiner l’afflux de demandeurs d’asile

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

François Legault soutient qu’en 2022, le Québec a pris en charge plus de demandeurs d’asile que tout le reste du Canada réuni.

(Québec) Le premier ministre du Québec, François Legault, exhorte son homologue du Canada, Justin Trudeau, à freiner l’afflux de demandeurs d’asile, sinon le Québec atteindra son « point de rupture ».

Publié à 6h16

Partager

Caroline Plante La Presse Canadienne

M. Legault a lancé cet avertissement dans une lettre officielle qu’il a fait parvenir à M. Trudeau mercredi en fin de journée et dont La Presse Canadienne a obtenu copie.

« Nous sommes tout près du point de rupture en raison du nombre excessif de demandeurs d’asile qui arrivent au Québec mois après mois. La situation est devenue insoutenable », écrit le premier ministre québécois.

Il soutient qu’en 2022, le Québec a pris en charge plus de demandeurs d’asile que tout le reste du Canada réuni. En 2023, la fermeture du chemin Roxham a ralenti « momentanément » ce flux.

« Cependant, les arrivées ont continué de s’accentuer aux aéroports, affirme-t-il. Le nombre de personnes qui arrivent avec un visa de visiteur et déposent une demande d’asile est également en augmentation importante. »

Durant les 11 premiers mois de 2023, ce sont près de 60 000 nouveaux demandeurs d’asile qui ont été recensés au Québec, ce qui a généré une « pression très importante » sur les services, selon M. Legault.

« Les demandeurs d’asile ont du mal à se trouver un toit, ce qui contribue à accentuer la crise du logement. Nombre d’entre eux se retrouvent dans les refuges pour sans-abris, qui débordent.

« D’autres sont en situation d’itinérance, ce qui aggrave un problème déjà aigu, particulièrement en hiver. À nouveau, les organismes qui accueillent et accompagnent les demandeurs d’asile ne suffisent plus à la tâche.

« Nos écoles débordent, alors que nous manquons déjà cruellement d’enseignants et de locaux pour accueillir ces milliers d’enfants qui, pour la majorité, ne parlent pas français », poursuit François Legault.

Il rappelle également que dans l’attente d’un permis de travail, les demandeurs d’asile reçoivent une aide financière de dernier recours du Québec.

En octobre dernier, quelque 43 200 demandeurs d’asile recevaient 33 millions. Les demandeurs d’asile constituent 16 % des prestataires de l’aide de dernier recours.

Ressortissants mexicains

Le premier ministre du Québec cible particulièrement les ressortissants mexicains, qui représentent, selon lui, une « proportion croissante des demandeurs d’asile arrivant au Québec ».

« La possibilité d’entrer au Canada en provenance du Mexique sans visa explique certainement une partie de l’afflux des demandeurs d’asile », affirme-t-il.

« Les aéroports, notamment de Toronto et de Montréal, sont en train de devenir des passoires et il est temps d’agir », a-t-il renchéri, exigeant qu’Ottawa resserre sa politique d’octroi des visas.

Le « relâchement » actuel risque « d’ouvrir des brèches utilisées par des groupes criminalisés qui posent de sérieux enjeux de sécurité pour le Québec et le Canada », prévient par ailleurs M. Legault.

Transferts par autocar

De plus, François Legault insiste sur la répartition « équitable » des demandeurs d’asile sur l’ensemble du territoire canadien, « par exemple, en recommençant à installer des demandeurs dans d’autres provinces par autocar ».

Et il s’attend à ce que le gouvernement fédéral rembourse au Québec les 470 millions encourus pour l’accueil des demandeurs d’asile en 2021 et 2022, et qu’il fasse de même pour les années subséquentes.

« Le Québec n’est plus en mesure d’accueillir une part disproportionnée de demandeurs d’asile qui entrent au Canada, conclut-il. Il s’agit d’une affaire urgente et de la plus haute importance. »

Mercredi, la ministre québécoise de l’Immigration, Christine Fréchette, avait lancé un avertissement semblable dans les médias.

Selon elle, l’arrivée de dizaines de milliers de demandeurs d’asile rapproche le Québec d’un « point de bascule ».

La veille, devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Justin Trudeau avait réaffirmé son intention de porter à 500 000 le nombre annuel d’immigrants.

Il avait toutefois déclaré vouloir reprendre le contrôle sur l’immigration temporaire, plus spécifiquement les étudiants étrangers et les travailleurs temporaires qui, selon lui, ont davantage d’impact sur la crise du logement.

M. Trudeau avait d’ailleurs invité les institutions d’enseignement supérieur et les entreprises à trouver elles-mêmes des solutions de logement pour ces résidants temporaires.

Legault pourrait offrir le transport en autobus gratuit en espérant que certains partent s’installer en région ou dans d’autres provinces, mais ces gens-là restent toujours bien libres de leur mouvements. À moins d’offrir des incitatifs autres, je doute que ça soit très populaire comme programme…

Ca fonctionne pour les étudiant indiens ils sont 7200 a l’université du cap breton a Sydney Nouvelle-Ecosse . On parle d’une ville de 30 000 habitants. Par contre j’essaie juste d’imaginer seulement ou toute ces personnes peuvent habiter.

4 « J'aime »

Le monde a l’envers les mexicains qui se plaignent que des etrangers viennent s’établir dans leur pays. Et produisent une gentrification dans plusieurs villes.

Un vidéo sur le sujet mais seulement en espagnol pour ceux qui comprennent la langue.

1 « J'aime »

Je ne parle pas espagnol donc je n’ai pas écouté la vidéo. Mais mon père va à toutes les années à Puerto Vallarta, une ville mexicaine magnifique, qui n’a rien à voir avec le look américain de Cancun par exemple.

Or dans cette ville, et surtout dans la vieille portion, il se construit une quantité phénoménale de condos à 300k$-400k$ voire plus (je parle des prix que j’ai vu en 2018)

Éventuellement la vieille ville sera remplie de gringos qui parlent anglais et vont remplacer les vrais résidents.

3 « J'aime »