Migration, émigration et immigration - Discussion générale

Le texte en lien avec le reportage au Téléjournal

Des Montréalais répondent à l’appel des régions


Pierre-Antoine Auger a décidé de retourner dans sa ville natale, Victoriaville, après un passage dans la métropole.
PHOTO : RADIO-CANADA / OLIVIER BOURQUE

Olivier Bourque
Publié à 4 h 00

Pierre-Antoine Auger, un jeune trentenaire, a décidé de retourner aux sources. Après un passage dans la grande région montréalaise, cet homme d’affaires et sa conjointe ont acheté une pharmacie à Victoriaville, leur ville d’origine.

Ce n’est pas un concours, je ne veux pas détailler les problèmes de Montréal, mais dans notre région, il y a une accessibilité à tout, il y a une véritable proximité, on croise plusieurs gens qu’on adore. Il y a un véritable attrait ici, lance-t-il en entrevue avec Radio-Canada lors d’une journée radieuse de février.

De fait, plusieurs Victoriavillois arrêtent le jeune homme, lui parlent, lui demandent s’il compte se lancer en politique. À l’évidence, ce gentil voisinage plaît à Pierre-Antoine Auger, tout autant que le côté naturel et moins survolté de cette ville des Bois-Francs.

On a une maison tout près du centre-ville. J’ai même un tracteur pour tondre ma pelouse! dit-il en riant.

De larges panneaux publicitaires dans le Grand Montréal invitent les Montréalais à s’établir à Victoriaville ou à Drummondville pour éviter les travaux ou l’heure de pointe. Olivier Bourque est allé rencontrer des gens qui ont déjà répondu à l’appel.

La pandémie a profondément changé le marché du travail. Maintenant, plusieurs Montréalais peuvent faire du télétravail ailleurs que dans la métropole.

D’ailleurs, selon l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), la croissance démographique sera de seulement 3 % en 20 ans pour l’île de Montréal, et ce, au profit de plusieurs régions limitrophes comme les Laurentides, Lanaudière, la Montérégie et le Centre-du-Québec.

« Le marché du travail a nettement évolué au fil des dernières années et ça nous permet de revenir dans nos régions natales pour envisager soit le télétravail ou, dans notre cas, l’acquisition d’une entreprise. »

— Une citation de Philippe-Antoine Auger, revenu à Victoriaville après avoir vécu à Montréal


Le maire de Victoriaville, Antoine Tardif, veut attirer des Montréalais en télétravail ou des familles dans sa ville.
PHOTO : RADIO-CANADA / OLIVIER BOURQUE

Deux fois plus de migrations à Victoriaville

Il n’est pas le seul à avoir décidé de venir s’établir à Victoriaville. Avant la pandémie, environ 250 personnes migraient dans la municipalité chaque année; il y en a maintenant 500. Le jeune maire Antoine Tardif, ancien gardien de but dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ), souhaite que la tendance continue.

Pendant la pandémie, plusieurs sont venus à Victoriaville, mais on veut que ça se poursuive. Dans la région, on a la filière batterie qui se développe ultra rapidement, donc on aura un besoin de main-d’œuvre, dit M. Tardif, qui a été élu à l’âge de seulement 31 ans.

Victoriaville et Drummondville, municipalités rivales (au hockey comme dans le domaine de la frite-sauce-fromage…), ont donc décidé de faire équipe pour attirer les Montréalais en télétravail ou ceux qui en ont marre des problèmes de circulation et des travaux dans la métropole.


Sept panneaux publicitaires arborant cinq messages ont été installés aux abords des principaux ponts de la métropole et à la station de métro Longueuil.
PHOTO : GRACIEUSETÉ DE LA VILLE DE DRUMMONDVILLE

Des panneaux… à Montréal

Une série de panneaux publicitaires ont été installés tout près des ponts et des autoroutes pour attirer l’attention. Quelle heure de pointe? demande-t-on ironiquement à l’automobiliste montréalais. Dans une autre publicité, les deux villes affirment qu’elles ont beaucoup plus de conifères mais beaucoup moins… de cônes orange.

En entrevue avec Radio-Canada, la deuxième mairesse de l’histoire de Drummondville, Stéphanie Lacoste, affirme que la collaboration allait de soi entre les deux villes.

On a une saine compétition, on a décidé de travailler ensemble. Ça fait quand même quelque temps qu’on voulait faire une campagne, dit-elle.

« Quand on regardait ce qui se passait dans la région montréalaise, [on voyait que] tout le monde passe par les ponts. C’était une belle occasion de leur expliquer qu’il fait bon vivre à Drummondville, à Victoriaville et au Centre-du-Québec. »

— Une citation de Stéphanie Lacoste, mairesse de Drummondville


Stéphanie Lacoste est la mairesse de Drummondville.
PHOTO : GRACIEUSETÉ DE LA CANDIDATE

Plusieurs jeunes travailleurs ont déjà fait le changement, notamment Florence Béland, coordonnatrice en attraction d’étudiants internationaux à la Société de développement économique de Drummondville.

Depuis janvier 2023, elle s’est établie dans cette ville de 81 000 habitants après avoir fait du télétravail à partir de Montréal durant plusieurs mois. Elle faisait le chemin deux fois par semaine pour se rendre à son bureau à Drummondville. Maintenant, elle est à 100 % dans le Centre-du-Québec et elle ne regrette pas son choix.

Je trouve que les gens sont bienveillants. Moi, on m’a vraiment accueillie, mes collègues m’ont aidée à déménager, raconte-t-elle.

Prix des maisons

La jeune coordonnatrice voulait aussi en avoir plus pour son argent. Le prix des logements dans la métropole a donc motivé son choix.

« Je ne pouvais presque plus me permettre d’avoir un appartement à Montréal. Maintenant, j’ai mon appartement à Drummondville, au centre-ville, à distance de marche de mon travail. »

— Une citation de Florence Béland, coordonnatrice à la Société de développement économique de Drummondville

Le coût des propriétés est assurément un argument pour s’établir en région. Un exemple : le prix médian d’une unifamiliale dans le Grand Montréal est de 600 000 $. En comparaison, à Victoriaville, il est de 276 000 $, tandis qu’à Drummondville, il est de 326 000 $.

Avec l’inflation, ça devient de plus en plus difficile pour les familles de se loger. C’est beaucoup moins cher à Victoriaville. Donc, il y a vraiment un aspect financier [dans la décision] de quitter les grands centres, croit le maire Tardif.

Montréal encore attractive

Contacté par Radio-Canada, le cabinet de la mairesse Valérie Plante ne croit pas que Montréal perde en attractivité au profit des régions.

La réalisation de cette campagne témoigne de la pénurie de main-d’œuvre sans précédent qui affecte particulièrement les villes qui ont de grands parcs industriels, comme Drummondville et Victoriaville. Attirer et garder une main-d’œuvre qualifiée, tout comme les familles, sont aussi des priorités de notre administration, a souligné Catherine Cadotte, attachée de presse de la mairesse.

Les espaces verts, l’offre culturelle dynamique, la protection de l’abordabilité et le dynamisme du centre-ville sont au cœur des efforts que nous déployons pour préserver et faire rayonner l’attractivité de la métropole, a poursuivi Mme Cadotte.

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Explosion des demandes d’admission d’étudiants étrangers au cégep

Une annonce gouvernementale qui faisait miroiter des exemptions de droits de scolarité a provoqué un raz-de-marée de candidatures en provenance de l’Afrique francophone. Cependant, seule une poignée d’entre eux pourront en bénéficier et se retrouveront sur les bancs d’un cégep québécois en septembre prochain.


Un étudiant dans les ateliers de l’Institut maritime du Québec, un établissement membre du SRAQ.
PHOTO : RADIO-CANADA / JEAN-LUC BLANCHET

Fannie Bussières McNicoll
Publié à 4 h 00

Bon an, mal an, pandémie ou pas, le Service régional des admissions au collégial de Québec (SRACQ) reçoit environ 2000 demandes d’admission d’étudiants étrangers. Mais cette année, il en a reçu plus de 13 000, une véritable avalanche.

C’est du jamais vu! Les derniers mois ont été infernaux, lance Marc Viens, le directeur général du SRACQ, dont sont membres environ le tiers des cégeps de la province, tous hors de la région de Montréal.

En général, explique Marc Viens, les étudiants français représentent environ 50 % des demandes d’admission et ceux d’Afrique francophone constituent une grande partie des demandes restantes. Cette année, il y a eu presque 10 fois plus de candidatures africaines, au point de représenter près de 80 % de l’ensemble des demandes.

En fait, les demandes d’admission d’étudiants étrangers ont plus que quadruplé dans les cégeps hors Montréal entre 2022 et 2023. Et cette tendance se manifeste dans presque tous les programmes techniques. Tant en éducation à l’enfance qu’en génie, en passant par des techniques d’animation 3D ou de gestion d’entreprises agricoles, le nombre de demandes a bondi de manière exponentielle.

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Ce phénomène est limité aux cégeps en région, ce qui est très clairement prouvé par les chiffres du Service régional d’admission de Montréal (SRAM). Si le nombre de demandes d’admission d’étudiants étrangers dans les cégeps de la région métropolitaine de Montréal (RMM) est demeuré essentiellement le même entre 2022 et 2023, ce nombre est passé de 1385 à 5379 pour les établissements à l’extérieur de la RMM membres du SRAM.

Une annonce incomplète qui fait boule de neige

Pour Marc Viens, la cause de ce phénomène ne fait aucun doute. Cet engouement découle d’une annonce faite au printemps 2022 (Nouvelle fenêtre) par le ministre de l’Emploi de l’époque, Jean Boulet, d’un investissement de 80 millions de dollars sur quatre ans pour favoriser l’attraction d’étudiants étrangers en région.

Cette mesure prévoit l’ajout d’exemptions de droits de scolarité, c’est-à-dire que davantage d’étudiants étrangers paient les mêmes droits de scolarité au cégep et à l’université que les étudiants québécois. Cela représente une économie annuelle par étudiant de 17 000 $ au niveau collégial et d’environ 24 000 $ au premier cycle universitaire.

Pour être admissibles, les candidats doivent étudier à temps plein dans un établissement d’enseignement supérieur en région, à l’extérieur de la Communauté métropolitaine de Montréal. Et ils doivent être inscrits à un programme d’études en français ciblé par l’Opération main-d’œuvre, donc dans des secteurs qui souffrent de manque de travailleurs, par exemple ceux de l’enseignement, des technologies de l’information ou encore du génie.

Bernard Tremblay, le PDG de la Fédération des cégeps, l’institution responsable de la gestion de l’attribution de ces exemptions au collégial, le confirme. L’information au sujet de l’exemption des droits de scolarité a fait boule de neige à l’international et les demandes pour les programmes techniques, ayant bonne presse, ont explosé, écrit-il.

Les étudiants français bénéficiant déjà de l’entente France-Québec, cette annonce est rapidement devenue particulièrement attrayante dans une autre partie du monde : l’Afrique francophone.


Marc Viens, directeur général du Service régional d’admission au collégial de Québec.
PHOTO : RADIO-CANADA / COURTOISIE DE MARC VIENS

Ça a été beaucoup relayé en Afrique francophone sur les réseaux sociaux, sur YouTube, par des gens qui ont fait la promotion de cette mesure-là, précise Marc Viens. Cependant, plusieurs de ces vidéos laissaient entendre à tort que le cégep serait désormais gratuit pour tous les étudiants étrangers. Or, à aucun moment lors de l’annonce du ministre Boulet il n’était précisé combien d’étudiants pourraient en bénéficier, déplore-t-il.

Une petite minorité de chanceux

Lorsqu’il a entendu l’annonce du ministre Boulet en mai dernier, Denis Deschamps, le directeur général du Cégep de Victoriaville, a été ravi. On trouvait que c’était une excellente nouvelle. Les besoins en emploi sont immenses. Et les cégeps sont un véhicule d’intégration formidable. Donc, les étudiants étrangers sont les bienvenus chez nous!

Il a toutefois déchanté en décembre dernier lorsqu’il a appris que, dans les faits, ce ne serait qu’une poignée de candidats de l’étranger, parmi les centaines qui ont présenté une demande d’admission, qui pourraient bénéficier de cette aide financière. Avant, c’était trois ou quatre étudiants étrangers qui recevaient cette exemption. L’automne prochain, ce sont entre six et huit étudiants qui vont en bénéficier.

La Fédération des cégeps confirme que la mesure permettra de distribuer, pour l’ensemble du réseau collégial à l’automne prochain, 150 exemptions à de nouveaux étudiants étrangers et 109 à des étudiants étrangers déjà inscrits dans un établissement d’enseignement québécois. C’est une goutte d’eau dans l’océan des milliers de demandes d’admission qui sont parvenues aux cégeps en région cette année.

« Finalement, ça ne sera qu’un pour cent de nos candidats qui pourront recevoir cette aide financière. Pourtant, on pourrait recevoir plusieurs dizaines d’étudiants étrangers ici! On trouve la situation déplorable. »

— Une citation de Denis Deschamps, directeur général du Cégep de Victoriaville


Denis Deschamps, directeur général du Cégep de Victoriaville, dans le Centre-du-Québec
PHOTO : RADIO-CANADA

Marc Viens, du SRACQ, regrette que le nombre limité d’exemptions n’ait pas été connu plus tôt. On aurait eu avantage à préciser davantage les modalités d’attribution de ces bourses-là. On aurait créé moins d’attentes, dit-il. Tous ces candidats qui ont déposé une demande pour venir étudier au Canada ont espoir d’obtenir une bourse, donc on va faire beaucoup de déçus.

De plus, cette situation exceptionnelle l’a obligé à embaucher des ressources supplémentaires pour analyser les dossiers déposés par les aspirants étudiants étrangers. On sait qu’on travaille dans le vide parce que c’est une infime partie de toutes ces demandes-là qui vont se traduire en permis d’études et, ultimement, en “boursiers”, en candidats qui vont être assis dans nos classes au cégep.

« On met sur la table des bourses pour attirer des jeunes étrangers pour combler nos besoins de main-d’œuvre dans certains secteurs, donc il faudrait s’assurer que les ficelles soient bien attachées! »

— Une citation de Marc Viens, directeur général du Service régional d’admission au collégial de Québec

Parcours du combattant

Le directeur général du Cégep de Victoriaville ajoute que la démarche pour obtenir cette exemption est en soi démesurément complexe, surtout pour les étudiants africains.

Par exemple, les candidats qui ont correctement rempli leur dossier d’admission reçoivent une offre d’admission conditionnelle. Ils doivent alors entamer une démarche d’immigration afin de pouvoir séjourner au Canada pour étudier avant même de savoir s’ils pourront bénéficier ou non d’une exemption de droits de scolarité.

Radio-Canada a déjà révélé qu’il était particulièrement difficile pour les étudiants africains francophones d’obtenir un permis d’études délivré par Ottawa pour étudier au Québec. Même si la situation s’est améliorée (Nouvelle fenêtre) , il s’agit d’une embûche supplémentaire, souligne Denis Deschamps.

Pour les étudiants africains, c’est un parcours du combattant! Il y a beaucoup d’incertitudes pour eux et pour nous. On ne veut pas avoir des “boursiers” qui ne se présentent pas en classe avec nous à l’automne [à cause de la complexité des démarches]. C’est sûr qu’on accompagne les étudiants du mieux qu’on peut à distance, mais ce n’est pas facile!

De plus, comme pour ajouter à la difficulté du processus, même les chanceux qui auront été sélectionnés pour obtenir l’exemption de droits de scolarité devront démontrer qu’ils ont les ressources financières suffisantes pour payer leurs études et pour subvenir à leurs besoins comme s’ils n’allaient pas bénéficier de cette aide financière. Un non-sens, selon Denis Deschamps.

« Entre ce rêve-là qu’a vendu le ministre Boulet aux étudiants étrangers et comment ça se traduit en réalité, il y a toute une différence! »

— Une citation de Denis Deschamps, directeur général du Cégep de Victoriaville

« Je trouve qu’on tarde à peser sur l’accélérateur pour que nos cégeps puissent accueillir davantage d’étudiants étrangers », lance-t-il en soulignant à quel point, pour les étudiants en provenance de l’Afrique francophone, la barrière de la capacité financière est importante.

« Si on était capables d’accueillir plus d’étudiants avec des bourses pour venir étudier chez nous, c’est sûr que ça viendrait combler des besoins de main-d’œuvre d’ici deux ou trois ans. Et l’intérêt est là, on le voit bien! »

Les canal d’immigration latinos sur youtube en parle beaucoup de leur cotés ca creer surement une demande pour ce programme en region.

Surement a moindre échelle que en provenance des pays africains.

A l’échelle Canadienne on parle de recevoir 750 000 étudiants étrangers en 2023.
Par contre pour la tres grosse majorité ils doivent payer leur études. Contrairement a ce programme du Québec.

Entente Ottawa-Washington Le chemin Roxham fermerait

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Les appels pour la fermeture du chemin Roxham se font de plus en plus nombreux depuis que des milliers de demandeurs d’asile ont recommencé à le traverser.

(Ottawa) Le souhait du premier ministre François Legault pourrait finalement être exaucé. Le Canada et les États-Unis seraient finalement parvenus à une entente sur la migration irrégulière pour fermer le chemin Roxham.

Publié à 12h42

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Mylène Crête
Mylène Crête La Presse

La nouvelle de cette entente entre Ottawa et Washington a d’abord été rapportée par Radio-Canada jeudi. La Presse n’a pas été en mesure de confirmer ces informations.

« On va peut-être avoir quelque chose à annoncer », avait lâché le premier ministre Justin Trudeau la veille, sans ouvrir davantage son jeu.

Les appels pour la fermeture du chemin Roxham se font de plus en plus nombreux depuis que des milliers de demandeurs d’asile ont recommencé à le traverser. Le ministère fédéral de l’Immigration rapporte qu’il y a eu en tout 9392 interceptions au Québec en janvier et en février 2023.

La pression se faisait de plus en plus forte pour que ce passage irrégulier soit fermé. Le premier ministre du Québec, François Legault, a réitéré à nouveau sa demande jeudi. Le Bloc québécois a également fait parvenir une lettre à l’ambassadeur des États-Unis au Canada, David Cohen, pour réclamer la fermeture du chemin Roxham et la suspension de l’Entente sur les tiers pays sûrs. Le Canada et les États-Unis tentent de renégocier cette entente depuis plusieurs années.

Plus de détails à venir.

Fermeture du chemin Roxham L’entente entre Ottawa et Washington en vigueur dès minuit

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Les appels à la fermeture du chemin Roxham se faisaient de plus en plus nombreux depuis que des milliers de demandeurs d’asile avaient recommencé à l’emprunter pour entrer au Canada après la pause de la pandémie, alors que le point de passage était verrouillé.

(Ottawa) L’accord conclu entre Ottawa et Washington visant à colmater la brèche que représente le chemin Roxham, utilisé par des milliers de migrants pour entrer au Canada d’une manière irrégulière afin de demander l’asile, sera en vigueur dès minuit ce vendredi soir.

Publié à 11h08

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Mélanie Marquis
Mélanie Marquis La Presse


Mylène Crête
Mylène Crête La Presse


Joël-Denis Bellavance
Joël-Denis Bellavance La Presse

Cet accord, qui a été conclu au terme de plusieurs mois de négociations, mettra à jour l’Entente sur les pays tiers sûrs. Les détails de l’accord seront annoncés au terme de la rencontre entre le premier ministre Justin Trudeau et le président des États-Unis Joe Biden cet après-midi.

Essentiellement, l’Entente sur les tiers pays sûrs sera désormais appliquée tout le long de la frontière entre le Canada et les États-Unis, y compris aux points de contrôle non officiels comme le chemin Roxham, en Montérégie, que près de 40 000 migrants avaient emprunté en 2022.

Dans les deux camps, on s’attend à ce que ces ajustements mettent un frein à la migration irrégulière.

La politique s’appliquera aux demandeurs d’asile qui ne sont pas détenteurs de la citoyenneté canadienne ou américaine, et qui sont interceptés dans les 14 jours après avoir franchi la frontière, selon nos informations, qui viennent confirmer celles rapportées plus tôt par le Los Angeles Times.

Si ces personnes sont interceptées au Canada, elles seront refoulées vers les États-Unis, et vice versa.

Demandes insistantes de fermeture

Le souhait du premier ministre du Québec, François Legault, qui réclamait à cor et à cri la fermeture immédiate du chemin Roxham, s’apprête donc vraisemblablement à être exaucé.

« Je pense que c’est important pour les Québécois que ce sujet-là soit abordé et éventuellement réglé », a-t-il affirmé jeudi matin lors d’une brève mêlée de presse avant de se rendre au Salon bleu pour la période des questions.

Les appels à la fermeture du chemin Roxham se faisaient de plus en plus nombreux depuis que des milliers de demandeurs d’asile avaient recommencé à l’emprunter pour entrer au Canada après la pause de la pandémie, alors que le point de passage était verrouillé.

Le Bloc québécois avait également fait parvenir une lettre à l’ambassadeur des États-Unis à Ottawa, David Cohen, pour réclamer la fermeture du chemin Roxham et la suspension de cette entente.

« Si l’objectif est atteint, c’est-à-dire fermer Roxham et permettre aux demandeurs d’asile de faire leur demande de façon régulière à travers tout le Canada, donc désengorger la capacité d’accueil du Québec, à ce moment-là, ce sera une victoire », a commenté le député bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe.

« Maintenant, est-ce que c’est ça ? On ne sait pas. Il faut rester prudent. Le diable est dans les détails », a-t-il ajouté, se demandant entre autres ce qu’il adviendrait de l’investissement de 500 millions que le gouvernement fédéral a fait au chemin Roxham.

À l’instar du Bloc québécois, le Nouveau Parti démocratique réclamait une suspension de l’entente. « Mais s’il y a une autre façon de régler ce qui se passe, on est ouvert, parce qu’on doit régler ce problème », a déclaré en mêlée de presse le chef Jagmeet Singh.

Le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, s’est prononcé sur Twitter en soirée. « Trudeau a encore reculé et a accepté de fermer le chemin Roxham, environ 30 jours après que je lui ai demandé de le faire, a écrit M. Poilievre. Mais il n’aurait jamais dû l’ouvrir en premier lieu. Avant lui, il n’y avait jamais eu de franchissement illégal de la frontière en masse et je ne laisserai pas cela se reproduire. »

Un enjeu ailleurs qu’au Québec

Le Québec n’était pas la seule province à commencer à taper du pied.

En Ontario, où des centaines de demandeurs d’asile avaient été transférés, des élus insistaient sur l’urgence pour le fédéral de trouver une solution.

« Je sympathise avec le premier ministre Legault parce que Niagara Falls, comme le Québec, a atteint le point de saturation », affirmait le maire de Niagara Falls, Jim Diodati, début mars.

Le Canada et les États-Unis tentent de renégocier l’Entente sur les tiers pays sûrs depuis plusieurs années.

En vertu de l’accord entré en vigueur en 2004, une personne qui veut obtenir le statut de réfugié doit présenter sa demande dans le premier des deux pays où elle met les pieds.

Comme elle s’applique seulement aux postes frontaliers, aux aéroports et aux arrivées par train, de nombreux demandeurs d’asile empruntent des passages irréguliers comme le chemin Roxham pour la contourner.

Immigration Le Québec fracasse un record

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Le nombre d’immigrants au Québec a augmenté de près de 150 000 en 2022

Le nombre d’immigrants au Québec a augmenté de près de 150 000 en 2022, la plus forte hausse de son histoire. Cette marque vient fracasser le sommet de 98 000 atteint en 2019, selon les plus récentes données de l’Institut de la statistique du Québec.

Publié à 5h00

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Suzanne Colpron
Suzanne Colpron La Presse

Cette explosion de l’immigration est principalement due à une hausse marquée du nombre de résidents non permanents, que ce soient les travailleurs temporaires, les étudiants étrangers ou les demandeurs d’asile. Leur nombre a augmenté de 86 735 en 2022, en forte hausse par rapport au solde de 63 076 de 2019, l’année d’avant la pandémie. Le solde représente la différence entre le nombre de personnes venues s’établir au pays et celles ayant quitté le pays.

L’autre facteur de hausse provient de l’immigration permanente, nettement plus forte en 2022. Le seuil annuel d’immigrants a été établi à 50 000 par le gouvernement Legault. Mais comme ce niveau n’a pas été atteint en 2020 et en 2021, en raison de la pandémie, on assiste à un rattrapage qui a fait gonfler leurs rangs de 62 787 personnes l’an dernier.

Près de 350 000 résidents non permanents

Le nombre de résidents non permanents vivant au Québec connaît une croissance marquée depuis 2016. Le total est difficile à calculer, pour diverses considérations techniques, mais à partir d’estimations produites par Statistique Canada, l’Institut de la statistique du Québec avait établi à 262 500 leur nombre au Québec, au 1er janvier 2022, en hausse de 1350 personnes par rapport à la même date en 2021.

Avec les données disponibles sur le solde pour l’ensemble de l’année, on peut ainsi évaluer le total à 349 235 résidents non permanents, à la fin de 2022. Mais ce total, qui porte sur différentes catégories de détenteurs de permis, ne tient pas compte des personnes qui se trouvent sur le territoire sans permis et sans statut.

Ces données nous rappellent que pendant que le débat politique porte sur les seuils annuels d’immigration permanente, le fameux 50 000, le nombre de personnes qui s’établissent au Québec par d’autres canaux est beaucoup plus important et passe souvent sous le radar.

Après avoir connu un niveau modéré et relativement stable, aux alentours de 3000 à 4000, de 2010 à 2015, la hausse du nombre de résidents non permanents s’est accélérée depuis 2016 :

  • 2016 : 12 671
  • 2017 : 35 394
  • 2018 : 42 905
  • 2019 : 63 076

Ce nombre a chuté radicalement pendant les deux années de la pandémie et a même été négatif en 2020. C’est seulement en 2022, et surtout dans la deuxième partie de l’année, que la progression a véritablement repris.

50 % de travailleurs

La moitié de ces résidents non permanents sont des travailleurs temporaires, selon Statistique Canada. Ce groupe comprend des travailleurs peu qualifiés, par exemple dans l’agriculture, accueillis par l’entremise du Programme des travailleurs étrangers temporaires, mais il compte un plus grand nombre de personnes admises dans le cadre du Programme de mobilité internationale portant sur des travailleurs spécialisés. La part des demandeurs d’asile est de 29 % et celle des étudiants étrangers, de 20 %.

Le nombre de demandeurs d’asile, qui a atteint plus de 59 000 l’an dernier au Québec, a été élevé, notamment en raison de la notoriété mondiale du chemin Roxham, fermé le 25 mars à la suite de la renégociation de l’Entente sur les tiers pays sûrs.

Il est donc possible que le nombre de demandeurs d’asile baisse en 2023, tout comme le solde des résidents non permanents.

C’est ce que croit l’économiste Pierre Fortin. « Il va y avoir beaucoup, beaucoup moins de demandeurs d’asile qui vont entrer au Québec, explique-t-il. Par conséquent, le solde de 86 735 résidents permanents va sans doute diminuer. »

Selon M. Fortin, le nombre de 155 422 immigrants, permanents et temporaires, admis en 2022 est « passager » et « va redescendre de 40 000 ou 50 000 ».

Un phénomène national

Cela dit, le Québec n’est pas la seule province à enregistrer une hausse des résidents non permanents. Leur nombre a connu une croissance exponentielle dans l’ensemble du pays.

À la fin de 2022, on comptait 608 000 résidents non permanents de plus que l’année précédente, d’après l’agence fédérale. C’est en Ontario que l’on en a dénombré le plus, 306 000, suivi de la Colombie-Britannique, avec 99 000.

C’est ainsi que le Québec accueille une part des résidents non permanents inférieure au poids de sa population au sein du Canada. En 2022, le Québec, dont le poids démographique est de 22,3 %, accueillait 14 % des résidents non permanents. Mais les proportions de chaque catégorie varient grandement. On comptait, au Québec, 52 % des demandeurs d’asile du pays, à cause du chemin Roxham, mais 18 % des travailleurs temporaires et 12 % des étudiants étrangers.

Cependant, il y a une différence importante entre le Québec et le reste du Canada, à savoir que le gouvernement canadien a pour objectif d’augmenter ses cibles d’immigration économique et d’accueillir 500 000 nouveaux résidents permanents dès 2025. Une progression des résidents non permanents peut s’inscrire dans cette logique, d’autant que les étudiants étrangers et les travailleurs temporaires constituent un bassin privilégié par le gouvernement pour choisir les futurs immigrants.

Une proportion importante des nouveaux résidents permanents est en effet constituée non pas de nouveaux venus, mais plutôt de résidents non permanents qui changent de statut.

« L’immigration temporaire est la voie royale vers l’immigration permanente », rappelle l’économiste Pierre Fortin.

La situation est différente pour le Québec, qui n’appuie pas les objectifs d’immigration ambitieux du gouvernement canadien et qui ne veut pas augmenter ses propres seuils d’immigration. Mais qui, dans les faits, se trouve à le faire indirectement en accueillant 350 000 résidents non permanents sur son territoire, un nombre record.

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Ca vient démolir l’argument que l’on ne peut recevoir plus de 50 000 immigrants par année.

Tout ces immigrants temporaire travaille et occupe déja un logement.

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Le logement est probablement un des arguments les plus faibles sur ce point considérant que la situation actuelle sur le logement n’est pas souhaitable.

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A Montréal le taux de logement disponible a même déja été encore plus bas dans le passé de ce qui est maintenant.

Les immigrants surtout les jeunes indiens on tendance a partager leur logement plus que la moyenne.

Certains arrondissements ont une baisse de population ou stagne et quand meme le parc de logements augmente. Et malgré cela le taux de vacances est bas.

Principal facteur beaucoup de gens vivent seul.

En fait, il y a une pénurie de logements dans une certaine catégorie de prix
Dans Griffintown, dans les tours locatives, il y a bcp de logements qui ne trouvent pas preneur… surtout quand ça commence à 1500 $/mois pour un petit studio…

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J’ai consulté des petits annonces pour aider des immigrants récents a se trouver un appartement.

Les secteur les moins cher montreal-nord et st-michel.

Ëtonnament cote des neiges rempli d’immeuble en tres mauvais état est chere.

Ensuite ya certain secteurs de Dollard des Ormeaux qui sont assez abordable et aussi Lachine.

Griffintown on doit oublié ca. C’est hors de porté pour de nouveaux arrivants.

J’ai trouver un appartement dans un haut de duplex avec 3 chambres a 1350$ pour de jeunes indiens. Ils sont 4 ca ne leur revient pas trop cher.

A Toronto c’est une autre histoire beaucoup cherche a profiter des jeunes immigrants.Ils leur loue des sous sols de maisons ou ils sont entassé a plusieurs.

Tres souvent exploité par leur propre comnunauté respective.

Se tirer dans le pied avec l’immigration

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, Christine Fréchette


Philippe Mercure
Philippe Mercure La Presse

À vouloir réparer ce qui n’est pas brisé, on crée des problèmes au lieu d’en régler.

Publié à 0h44 Mis à jour à 5h00

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On l’a vu quand le gouvernement Legault a décidé de revoir la façon de fixer les hausses de tarifs d’électricité, qui fonctionnait pourtant bien, pour y introduire une généreuse dose d’arbitraire et de politique1.

On le voit aussi avec un programme d’immigration qui a déjà été un joyau au Québec, mais que la CAQ a décidé de saboter contre l’avis de tout le monde : le Programme de l’expérience québécoise, ou PEQ.

On parle ici d’un programme qui vise les futurs immigrants dont le profil est exactement celui qu’on cherche à retenir chez nous : des gens francophones ou francisés, déjà présents sur le territoire, intégrés à la société. Le PEQ est destiné aux étudiants étrangers et aux travailleurs temporaires déjà au Québec.

En 2019, le gouvernement Legault a décidé de transformer cette voie rapide en chemin cahoteux en multipliant les exigences pour les candidats.

Aujourd’hui, on en mesure les dégâts.

Il y a une baisse prononcée de la popularité du PEQ, selon des chiffres obtenus par Le Devoir en vertu de la Loi sur l’accès à l’information 2.

L’an dernier, à peine 5900 immigrants ont obtenu leur certificat de sélection en vertu du PEQ. C’est grosso modo quatre fois moins qu’en 2021 et trois fois moins qu’en 2020. C’est aussi considérablement moins que les propres cibles de la CAQ, qui visait à sélectionner entre 9000 et 11 000 personnes avec ce programme.

En pleine pénurie de main-d’œuvre, le gâchis est spectaculaire. Le Québec est en train de se priver de milliers de travailleurs qui répondent à tous les critères souhaitables et dont nous avons cruellement besoin.

La baisse est d’autant plus inquiétante que jusqu’à la première moitié de 2022, plusieurs immigrants ont encore pu bénéficier des anciennes règles. Si rien n’est fait, on peut penser que les admissions en 2023 seront encore plus anémiques.

Ce qui se passe était pourtant écrit dans le ciel et annoncé par tous les experts. Ce n’est pas sorcier : en plaçant des embûches sur le parcours des immigrants, on les décourage.

Vrai, le pire de la réforme du PEQ, d’abord pilotée par le ministre Simon Jolin-Barrette à l’époque où il dirigeait le ministère de l’Immigration, a été abandonné. Heureusement ! On peine à imaginer où on en serait aujourd’hui si ce n’avait pas été le cas.

Mais le gouvernement Legault a quand même complètement fermé le PEQ aux travailleurs les moins qualifiés, dont nous avons pourtant besoin en pénurie de main-d’œuvre. C’est le cas par exemple des préposés aux bénéficiaires, des serveurs, des caissiers, des manœuvres d’usine. Et il a exigé de longs mois d’expérience de travail au Québec pour les autres.

Il est possible qu’une partie de ces gens aient choisi de passer par le Programme régulier des travailleurs qualifiés, un programme complètement différent qui exige de recevoir une invitation du gouvernement pour qu’un candidat soit sélectionné. On a observé une hausse importante des admissions en 2022 et il est possible qu’elle compense une partie des pertes du PEQ.

Mais les avocats spécialisés en immigration à qui nous avons parlé sont formels : plusieurs de leurs clients ont simplement choisi d’immigrer dans d’autres provinces, où les démarches sont moins longues et fastidieuses. Cela inclut de nombreux francophones.

Le fédéral a ainsi son propre programme de « l’expérience canadienne », dont les critères sont désormais plus souples que celui du Québec. En 2021, le fédéral a aussi créé une voie rapide temporaire pour 90 000 travailleurs essentiels et étudiants étrangers diplômés, avec des places dédiées pour les francophones.

La bonne nouvelle, c’est qu’au cabinet de la nouvelle ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, on reconnaît le problème. On affirme travailler à des solutions et on promet des annonces bientôt.

Mais à moins de sortir un lapin d’un chapeau, on voit mal ce que la ministre pourrait faire outre atténuer les obstacles que ses prédécesseurs ont dressés avant elle.

En clair, on aura brassé beaucoup d’air et braqué beaucoup de monde… pour revenir probablement à la situation initiale.

Espérons seulement que quelqu’un dans le gouvernement Legault en tirera des leçons et inscrira le cas dans la colonne « choses à ne pas reproduire ».

1. Lisez l’éditorial « Jouer au bingo avec les tarifs d’électricité »

2. Lisez l’article du Devoir « Chute drastique des admissions au PEQ »

L’histoire jusqu’ici

2010

Le Programme de l’expérience québécoise (PEQ) est créé pour faciliter l’obtention du certificat de sélection du Québec aux étudiants étrangers et aux travailleurs temporaires qui parlent français (niveau 7 exigé).

2019

Simon Jolin-Barrette, alors ministre de l’Immigration, propose une première réforme du PEQ qui met le feu aux poudres. Son accès est limité à certaines catégories d’emploi selon une liste limitative et désuète.

2020

Celle qui succède à Simon Jolin-Barrette, Nadine Girault, accouche d’une réforme moins brutale du PEQ. Celui-ci est néanmoins réservé aux emplois qualifiés et l’expérience de travail requise est rehaussée.

2022

Le nombre de candidats admis connaît une chute marquée.

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Immigrants francophones « Pas désirés » au Québec, recherchés au Canada

PHOTO BRENT LEWIN, ARCHIVES BLOOMBERG

Pendant que Québec tente d’attirer des immigrants francophones pour contrer le déclin du français, le nombre de nouveaux résidents permanents parlant français qui s’installent dans les autres provinces canadiennes est en augmentation.

Vous voulez immigrer ici ? Vous êtes francophone ? Vous aurez beaucoup plus de chances si vous choisissez d’aller ailleurs qu’au Québec.

Publié à 5h00 Mis à jour à 5h00

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Suzanne Colpron

Suzanne Colpron La Presse

Plus facile pour les francophones d’immigrer au Canada anglais

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, ARCHIVES LA PRESSE

Centre-ville d’Halifax

Le 2 septembre 2022, Joe El Ghazouli a demandé la résidence permanente au Canada. Partout, sauf au Québec. En décembre, trois mois plus tard, il était admis. Et le 9 février, il débarquait à Halifax, en Nouvelle-Écosse.

« C’est allé très vite », constate le Marocain de 35 ans, qui parle français et anglais, qui a fait ses études en France et qui possède de l’expérience dans le milieu de la construction.

Pendant que Québec tente d’attirer des immigrants francophones pour contrer le déclin du français, le nombre de nouveaux résidents permanents parlant français qui s’installent dans les autres provinces canadiennes, comme Joe El Ghazouli, est en augmentation.

En Nouvelle-Écosse, selon les données d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, il est passé de 180 en 2021 à 795 en 2022. En Ontario, de 3905 en 2021 à 9760 en 2022. La hausse est encore plus marquée au Nouveau-Brunswick : 790 en 2021, contre 2315 en 2022.

Pourquoi choisissent-ils d’autres provinces ? Parce que le gouvernement fédéral leur ouvre les bras et facilite le processus d’admission au moment même où le gouvernement québécois serre la vis et envoie des messages négatifs, analysent les experts consultés.

La plupart des demandes faites dans le cadre du programme fédéral Entrée express sont traitées en moins de six mois. Au Québec ? « Pour avoir la résidence permanente, ça peut prendre facilement deux ans », répond Me Gabrielle Thiboutot, spécialisée en immigration.

Le fédéral s’est en effet fixé des objectifs d’immigration très ambitieux avec 500 000 nouveaux arrivants par année d’ici 2025. Il s’est aussi engagé à augmenter la proportion des immigrants francophones dans les provinces où le français est minoritaire.

De son côté, le Québec, qui vise l’admission de 52 500 immigrants en 2023, a resserré les critères d’admission du Programme de l’expérience québécoise, pour limiter le flux.

Résultat : les délais sont plus longs pour immigrer au Québec et le dénouement est souvent incertain, sans compter que ça coûte plus cher.

« Pour les gens qui cherchent à se bâtir un avenir, demander la résidence permanente au Québec, c’est plus cher et plus lent que dans les autres provinces », affirme Benjamin Brunot, avocat spécialisé en immigration. « Il y a un coût d’environ 1000 $ de plus juste en frais administratifs. »

« Au Québec, le message, c’est de restreindre, ajoute Me Brunot. De façon générale, les immigrants ressentent qu’ils ne sont pas désirés. C’est aussi de la discrimination économique. Vous avez de meilleures chances si vous payez les services d’un professionnel qui va vous aider à naviguer à travers tout ça. Mais globalement, le message, c’est : on va vous compliquer la vie le plus possible. »

Un système compétitif

Tant au Québec qu’au fédéral, le système de sélection des immigrants économiques est basé sur la concurrence. Pour demander la résidence permanente, un travailleur qualifié doit créer un profil, choisir un programme et répondre aux critères d’admissibilité : compétences linguistiques, études, âge, expérience de travail, revenu, offre d’emploi, etc.

Ses compétences lui donnent des points. Si le total des points est jugé suffisant, sa candidature est placée dans un bassin de candidats à l’immigration. Il pourrait recevoir une invitation à demander la résidence permanente, en fonction de sa note et de son classement dans le bassin.

Au Québec, la plateforme utilisée pour gérer les candidatures s’appelle Arrima. Au fédéral, c’est Entrée express.

Les francophones ont deux avantages à postuler hors Québec. Le premier : le fédéral accorde 50 points additionnels à ceux qui maîtrisent le français, des points précieux qui peuvent faire la différence entre une acceptation et un refus. Seule condition : ils doivent s’engager à s’établir à l’extérieur du Québec.

Le second, c’est qu’ils sautent une étape longue, coûteuse et risquée, l’obtention du certificat de sélection du Québec (CSQ). « En ce moment, pour obtenir le CSQ, on est à environ six mois de délai de traitement, une fois la personne choisie pour présenter sa demande », précise Me Thiboutot.

Du Togo aux T. N.-O.

Koko Avoyi, 35 ans, et sa femme de 32 ans, du Togo, ont fait le choix de s’installer hors Québec. Parents de deux petites filles de 4 et 5 ans, ils parlent français et sont titulaires d’une maîtrise en gestion, comptabilité-contrôle-audit, en plus de neuf ans d’expérience.

« On a postulé au programme de sélection du Québec, mais on ne m’a pas sélectionné », précise Koko Avoyi, qui avait aussi rempli une demande sur Entrée express.

Sa femme et lui ont reçu une invitation du fédéral en septembre 2022. Ils ont obtenu la résidence permanente et ont déménagé à Yellowknife, aux Territoires-du-Nord-Ouest (T. N.-O.), le 10 mars. Koko Avoyi a trouvé un emploi en français dans son domaine. Sa femme s’occupe de la plus jeune en attendant de lui trouver une place en garderie. Et l’aînée est à l’école.

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Yellowknife

Pourquoi Yellowknife ?

Comme on a été sélectionnés par Entrée express, on ne pouvait pas aller au Québec. On a fait des recherches et c’est Yellowknife qui nous a plu. On se disait qu’ici, on peut vite s’intégrer et avoir un boulot.

Koko Avoyi

Les T. N.-O. comptent 11 langues officielles, dont le français. Sur une population de 40 000 habitants, 4395 personnes peuvent s’exprimer en français, soit 11 %.

Française, Lisa Boisneault, 29 ans, a aussi choisi de s’établir aux T. N.-O. pour demander sa résidence permanente, obtenue l’été dernier, après deux ans passés au Nouveau-Brunswick.

PHOTO FOURNIE PAR LISA BOISNEAULT

Lisa Boisneault, coordonnatrice à la Communauté francophone accueillante de Yellowknife

Il y a des communautés francophones en dehors du Québec avec leurs spécificités et des emplois. C’est ça que j’ai découvert et que je trouve très intéressant.

Lisa Boisneault, coordonnatrice à la Communauté francophone accueillante de Yellowknife

Lisa ajoute que le programme des candidats des T. N. -O. a un volet francophone. « Ça facilite le parcours pour un candidat qui parle français, note-t-elle. On a beaucoup de postes à pourvoir et une communauté francophone bien établie. »

La beauté de Vancouver

Hajer Ben Ajroudi, 44 ans, elle, a plutôt choisi Vancouver.

Originaire de Tunisie, elle est venue au Canada en septembre 2022, avec un visa de visiteur, pour voir sa sœur jumelle qui vit à Ottawa depuis trois ans. Une fois sur place, elle a décidé de créer son profil sur Entrée express et de répondre à une offre d’emploi en français, à Vancouver.

« Je suis arrivée en Colombie-Britannique en décembre, dit-elle. Et comme j’étais déjà inscrite dans Entrée express et que j’avais un profil, j’ai fait une déclaration d’intérêt à la Colombie-Britannique. » Le 26 avril, Hajer a reçu une invitation à demander la résidence permanente.

PHOTO FOURNIE PAR HAJER BEN AJROUDI

Hajer Ben Ajroudi, responsable des communications à la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique

Franchement, on dirait que c’est le destin qui m’a fait un cadeau. J’aime beaucoup la Colombie-Britannique et Vancouver est magnifique. Je parle anglais, pas aussi bien que le français, mais je me débrouille.

Hajer Ben Ajroudi

Pourquoi pas Montréal ? « Oui, ça aurait pu être mon choix, sans hésitation, reconnaît la Tunisienne. Montréal est une ville que j’aime, que je connais. Si j’avais eu une occasion intéressante, j’aurais accepté. »

Hajer remarque que depuis quelques années, il y a de plus en plus de Tunisiens qui vont au Nouveau-Brunswick et au Manitoba plutôt qu’au Québec.

L’appel du Nouveau-Brunswick

Cédrelle Eymard-Duvernay aurait aussi aimé vivre au Québec, où elle a passé deux ans, de 2016 à 2018.

« J’aurais pu demander un permis d’études ou trouver une autre solution pour rester, mais c’était plus cher et plus compliqué », explique la Française de 38 ans. « Donc, je suis retournée en France avec l’idée de revenir au Canada pour m’installer. »

Elle a repris ses études et fait une maîtrise en enseignement du français, langue seconde, à l’Université de Tours. Elle devait aller à Moncton, au Nouveau-Brunswick, en mars 2020, avec un permis de travail temporaire, mais la COVID-19 a frappé. Elle a dû repousser son arrivée au printemps 2022.

Au bout d’une année d’emploi à temps plein, elle vient de recevoir son invitation à la résidence permanente. « Je vais pouvoir déposer tous mes documents la semaine prochaine, précise-t-elle. C’est la dernière étape. C’est quatre à six mois, normalement. »

Pourquoi Moncton ?

Au Québec, c’est trop compliqué, trop long d’avoir un permis de travail fermé. J’ai fait beaucoup de recherche et je me suis rendu compte qu’il fallait faire une croix sur le Québec pour la résidence permanente. J’ai des amis français qui sont au Québec depuis plusieurs années et qui n’ont toujours pas la résidence permanente.

Cédrelle Eymard-Duvernay

Elle ajoute : « Je ne regrette pas ma décision. C’est de l’argent, des sacrifices, il y a beaucoup de mauvaises expériences, évidemment, mais au bout du compte, c’est la résidence permanente au Canada et c’est une qualité de vie qui sera bien supérieure, ici, à ce que j’aurais pu avoir en France. »

Combien ça coûte ?

Faire une demande de résidence permanente n’est pas gratuit. Voici les principaux frais exigés par Québec et Ottawa.

1365 $

Somme exigée par Ottawa, par adulte, pour traiter la demande de résidence permanente, ce qui inclut les frais relatifs au droit de résidence permanente (515 $). Une somme de 230 $ s’ajoute par enfant à charge de moins de 22 ans.

869 $

Somme que le candidat doit payer pour faire une demande de certificat de sélection du Québec (CSQ), dans le cadre du Programme régulier des travailleurs qualifiés. Une somme additionnelle de 186 $ est exigée pour le conjoint et pour chacun des enfants à charge. Somme payable uniquement pour les demandeurs souhaitant s’établir au Québec

340 $

Coût approximatif du test de niveau en français qui peut donner des points pour la demande de résidence permanente.

280 $

Coût approximatif du test pour évaluer les compétences en anglais, en lecture, en écoute et en écriture.

250 $

Coût moyen de l’examen médical obligatoire aux fins d’immigration.

85 $

Frais exigés pour les services de collecte des données biométriques. Le tarif familial est de 170 $.

Sources : ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC)

PHOTO SETH KUGEL, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

Centre-ville de Vancouver

Un concurrent musclé

Le Québec risque d’avoir un concurrent musclé dans ses efforts pour recruter des immigrants francophones parce que le fédéral a décidé d’employer les grands moyens pour les attirer dans les autres provinces et territoires.

Ottawa mise en effet beaucoup sur l’immigration francophone pour contrer l’érosion du poids démographique des francophones en situation minoritaire, c’est-à-dire hors Québec. C’est même le premier pilier de son Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028, déposé le 26 avril.

« Pour apporter des éléments de solution, le Plan d’action suggère l’adoption d’une nouvelle Politique en immigration francophone. Cette nouvelle politique permettra d’orienter les futures actions, [dont] les efforts de promotion et d’appui au recrutement améliorés tant au Canada qu’à l’étranger associés à des mécanismes de sélection plus robustes des immigrants », précise-t-on.

Le Canada a atteint sa cible de 4,4 % d’immigrants d’expression française hors Québec, avec 16 300 personnes, pour la première fois en 2022. Mais il en faudra davantage pour contrer l’érosion. En 20 ans, la proportion de francophones hors Québec est passée de 4,4 % à 3,3 %, selon Statistique Canada.

Pour rétablir le poids démographique de la francophonie à 4,4 %, la cible d’immigration francophone à l’extérieur du Québec devrait passer de 12 % en 2024 à 20 % en 2036, selon la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada.

« On suggère une cible progressive, précise la présidente de l’organisme, Liane Roy. On commence à 12 % pour arriver à 20 % en 2036. »

Le gouvernement fédéral n’a pas encore annoncé de nouvelles cibles, mais le budget de 137,2 millions consacré à cet enjeu dans son plan quinquennal indique que les efforts seront intensifiés.

De ce total, un budget de 18,5 millions sera consacré à un accroissement des efforts de promotion et de recrutement, 50 millions iront à soutenir l’établissement et l’intégration des immigrants et à renforcer les capacités d’accueil des communautés francophones, et 25 millions à un nouveau Centre d’innovation en immigration francophone qui soutiendra entre autres ces communautés.

Le bouche-à-oreille

Cette politique de recrutement et d’accueil survient à un moment où le Québec a plutôt tendance à fermer le robinet. « Ce qui veut dire que le Québec va se retrouver avec un concurrent majeur pour l’immigration francophone, parce qu’on a une étape de plus, avec le certificat de sélection du Québec (CSQ) », avance Gabrielle Thiboutot, avocate spécialisée en immigration.

À cela peut s’ajouter un autre phénomène : le bouche-à-oreille.

On a pu voir, dans des dossiers d’immigration, à quel point l’existence de bons filons peut se répandre comme une traînée de poudre partout dans le monde.

Ce fut évidemment le cas du chemin Roxham, connu du Venezuela au Pakistan. Mais aussi d’autres filières, comme les établissements collégiaux qui ont attiré une clientèle indienne. Le message voulant que les candidats francophones soient les bienvenus au Canada sera rapidement entendu en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique.

Le défi sera de convaincre ces candidats que les autres provinces canadiennes constitueront un milieu de vie attirant, sachant que leur point de chute naturel aurait plutôt été le Québec.

« La meilleure option »

L’Algérien Tayeb Oussedik fait partie des convaincus. Il a choisi le Manitoba plutôt que le Québec pour son bilinguisme. À Winnipeg depuis un peu plus de deux ans, il est directeur adjoint de l’Accueil francophone, un organisme qui facilite l’établissement des immigrants francophones et allophones au Manitoba.

« Ma femme et moi, on est des globe-trotters à la base, explique-t-il. On a fait une trentaine de pays avant de décider de nous installer quelque part. En pesant le pour et le contre, on a estimé que, peut-être, pour nos enfants, le Canada serait la meilleure option, pour son système d’éducation, son bilinguisme. Ça explique pourquoi on n’a pas choisi le Québec. »

Pourquoi le Manitoba ? « Au Manitoba, il y a cette relation à la nature que je n’ai pas vue ailleurs, répond-il. Au-delà de ça, c’est aussi pour les occasions que la province pouvait offrir du point de vue de l’employabilité. Je suis arrivé à Winnipeg. Au bout d’un mois, j’ai trouvé un emploi. Au bout de trois mois, j’ai été promu. Au bout de deux ans, j’ai eu un poste que je n’aurais jamais pensé avoir dans une autre province. Le Service d’accueil et d’établissement m’a été d’un grand secours. »

112 000

Nombre de personnes au Manitoba qui ont une connaissance du français, en légère augmentation par rapport à 108 000 en 2016

Source : Statistique Canada

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Je connait des congolais qui sont parti en Alberta ils n’arrivaient pas a obtenir leur residence permanente au Québec.

C’est du foutu niaisage de politiquaillerie.

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La CAQ veut obtenir toute la gestion de l’immigration de la part d’Ottawa, pourtant elle n’est même pas foutue de gérer efficacement sa propre part. Encore du travail d’amateurs et dire qu’on n’est qu’au début d’un deuxième mandat :grimacing:

Travailleurs temporaires Boom des emplois approuvés pour les futurs immigrants

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Les postes dernièrement approuvés par les autorités qui se traduiront normalement par de l’immigration temporaire ont explosé ces derniers mois.


Francis Vailles
Francis Vailles La Presse

Vous pensez que le Québec a reçu beaucoup de travailleurs étrangers temporaires l’an dernier ? Que l’immigration a été forte ? Vous n’avez probablement rien vu.

Publié à 1h43 Mis à jour à 6h30

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Les postes dernièrement approuvés par les autorités qui se traduiront normalement par de l’immigration temporaire ont explosé ces derniers mois. Et on ne parle plus seulement des travailleurs agricoles, souvent saisonniers, mais de travailleurs dans une multitude de métiers et de professions demandés.

Informaticiens, soudeurs, cuisiniers, infirmières, bouchers : les postes sont extrêmement variés et seront bientôt pourvus dans toutes les régions du Québec, à la mesure de la pénurie de main-d’œuvre qui sévit.

Les données que j’ai auscultées viennent de la firme de recrutement Auray, affiliée à Raymond Chabot Grant Thornton. Essentiellement, Auray a compilé les postes offerts par les entreprises aux travailleurs étrangers dont l’évaluation a été jugée favorable par Ottawa et Québec. Ces postes doivent faire l’objet d’une « évaluation d’impact sur le marché du travail (EIMT) », comme le veut le jargon bureaucratique. Auray les a extirpés des bases de données du ministère Emploi et Développement social Canada.

Résultat ? Plus de 61 125 ont été approuvés en 2022, un bond de 81 % par rapport à 2021. La hausse est surtout explosive durant les 2 derniers trimestres de 2022.

En 2019, l’essentiel de ces postes visait le travail dans les champs (71 %), mais cette proportion est passée à 45 % en 2022, si bien qu’aujourd’hui, près de 34 000 concerneront des métiers et professions non agricoles, bref des emplois que cherchent avidement à pourvoir les entreprises.

Ces quelque 34 000 postes non agricoles de 2022 sont 3,5 fois plus nombreux qu’en 2021 !

Ces postes dont l’évaluation d’impact (EIMT) a été approuvée sont un indicateur précurseur de l’éventuelle croissance de l’immigration temporaire, en quelque sorte. Pourquoi ? Parce que la plupart du temps, il y a un certain délai entre cette approbation – essentielle – et l’obtention officielle d’un permis de travail et l’immigration à proprement parler.

Pour les travailleurs venant de pays occidentaux ou du Mexique et du Chili, les ressortissants sont dispensés de visa et les permis de travail sont délivrés rapidement à l’entrée au pays. Ce n’est toutefois pas le cas d’autres pays, notamment du Maghreb et des autres pays africains, où les futurs travailleurs doivent faire des démarches avant leur arrivée au Canada.

Par exemple, les délais sont de 9 semaines en France, contre 14 semaines au Maroc et 20 semaines en Tunisie, m’explique Jean-Sébastien Plourde, le directeur chez Auray, qui est responsable de cette recherche. Le programme d’immigration en question, qui exige une approbation de l’EIMT, s’appelle le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET).

Ce recours des entreprises au PTET est en train de rééquilibrer le marché du travail. Il comble des besoins spécifiques selon les professions et les régions, dans la ligne de pensée du gouvernement Legault.

Jean-Sébastien Plourde, directeur chez Auray

Les données officielles d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada confirment que le boom des approbations de 2022 commence à se traduire par des hausses de nombre de permis de travail PTET en 2023. Ainsi, au premier trimestre de 2023, le nombre de nouveaux titulaires de permis a doublé par rapport au même trimestre de 2022, à 13 600. Et 2022 était déjà en hausse sur l’année précédente ou encore sur l’année prépandémique normale de 2019 (+ 65 %).

Qu’est-ce qui explique l’explosion ? Deux raisons, essentiellement, selon M. Plourde. D’abord, les entreprises ont davantage eu recours au PTET pour combler leurs besoins, vu la pénurie de main-d’œuvre. Les entreprises en ont ardemment besoin, et investissent pour les retenir longtemps : les démarches coûtent environ 11 000 $ par emploi, tout compris.

Ensuite, il y avait un certain retard dans le traitement des demandes au fédéral, qui a été comblé. Il y a un an, il fallait 60 jours pour que les entreprises reçoivent leur approbation EIMT pour des employés de métier. Or, ce délai était tombé à 33 jours en février 2023. Et pour la catégorie des talents mondiaux – les cerveaux recherchés partout sur la planète –, le temps d’attente n’est plus que de 9 jours, en moyenne. La pandémie a peut-être été un facteur dans l’allongement des délais.

Le rattrapage sur l’inventaire et un possible ralentissement économique pourraient éventuellement réduire le flot, mais d’ici là, les nouveaux travailleurs aux accents colorés seront plus nombreux, à Montréal comme ailleurs (voir autre texte).

La plupart du temps, les travailleurs temporaires cherchent à « permanentiser » leur statut d’immigration, éventuellement, d’autant que leur permis de travail a une durée d’au plus deux ans, quoiqu’il soit renouvelable.

« Les travailleurs temporaires finissent par s’enraciner en région, apprennent le français et deviennent fidèles à l’employeur qui les a embauchés. C’est un facteur de rétention important pour les entreprises », dit Jean-Sébastien Plourde, de la firme Auray.

Les plus qualifiés pourraient faire une demande en vertu du Programme de l’expérience québécoise (PEQ) ou du Programme régulier des travailleurs qualifiés (PRTQ). Ces voies se sont cependant obstruées sous la CAQ, ainsi que l’expliquait mon collègue Philippe Mercure⁠1. Le gouvernement devra faire un ménage, surtout avec le flot de nouveaux travailleurs étrangers qui se présentent.

Soudeur à Victoriaville, éducatrice en Abitibi

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

Les données sont si précises qu’elles permettent de savoir que l’Abitibi-Témiscamingue a reçu son approbation pour embaucher 3 éducatrices à la petite enfance, Laval 14, la Montérégie 24 et Montréal, 77.

Les entreprises ont massivement recours au Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET) pour combler leurs besoins. Soudeur à Victoriaville, informaticienne à Québec, infirmier à Montréal : voilà le genre de postes que les entreprises cherchent à pourvoir.

Parmi les grandes régions du Québec, cinq se sont démarquées en 2022, selon les données de la firme Auray. À elle seule, la Montérégie est responsable de près de 1 poste sur 5 offert aux futurs travailleurs étrangers temporaires non agricoles (6200 postes). Montréal et la Capitale-Nationale complètent le trio de tête, avec près de 7400 et 4600 postes⁠1.

Auray a pu faire cette ventilation par régions en utilisant le code postal indiqué sur les demandes faites par les entreprises à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Les données sont si précises qu’elles permettent de savoir que l’Abitibi-Témiscamingue a reçu son approbation pour embaucher 3 éducatrices à la petite enfance, Laval 14, la Montérégie 24 et Montréal, 77.

Les employeurs s’en remettent également au PTET pour embaucher dans le secteur de la santé. Quelque 1200 postes d’infirmières sont ou seront pourvus prochainement par des travailleurs temporaires, dont le permis de travail a une durée de deux ans, maximum, quoiqu’ils soient renouvelables.

Pourra-t-on se passer d’eux après ?

Ce sont les postes qui requièrent peu de qualifications qui, au bout du compte, sont les plus demandés par les employeurs, à l’image de la pénurie. Dans les 10 premiers de la liste se trouvent les manœuvres dans le secteur de la transformation alimentaire, ceux pour l’aménagement paysager ou encore les cuisiniers. Le secteur informatique, associé à une bonne paye, est également bien représenté.

Fait remarquable : il y a peu d’ouvriers de la construction, malgré la forte demande dans ce secteur au Québec. Que font nos entreprises ? Sommes-nous trop réglementés ?

Autre angle d’analyse : les postes approuvés selon le niveau de salaire ou la catégorie. Les données permettent ainsi de constater que 58 % des emplois sont dans la catégorie des bas salaires (moins de 25 $ au Québec), 32 % des hauts salaires (25 $ ou plus) et 10,4 % dans les talents mondiaux (ingénieurs, informaticiens, etc.).

Grande différence Québec-Canada

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Le Québec recueille beaucoup plus de candidats qualifiés de « talent mondial » que le reste du Canada. Il s’agit de candidatures sélectes, recherchées partout sur la planète (informaticiens, ingénieurs, etc.).

Le Québec a une approche nettement différente du reste du Canada pour alimenter son marché du travail d’immigrants dits temporaires.

Les travailleurs temporaires obtiennent leur permis de travail en vertu de deux programmes, essentiellement. Le premier, soit le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), est bien davantage utilisé par les entreprises du Québec. Il s’adresse notamment aux travailleurs qui sont à l’étranger, mais ses paramètres exigent que soit faite une évaluation des impacts sur le marché du travail (EIMT), qui doit être approuvée par le fédéral et avalisée par Québec.

Le second, soit le Programme pour la mobilité internationale, est bien plus souvent utilisé dans les autres provinces. Il touche beaucoup de résidents non permanents déjà ici, comme les étudiants étrangers. Aucune évaluation EIMT n’est nécessaire pour accorder le permis de travail.

En additionnant les deux programmes, qui comprennent le secteur agricole, on constate que 90 310 travailleurs temporaires du Québec ont effectivement reçu leur permis de travail en 2022, contre 223 000 en Ontario, selon les données d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

Ce niveau du Québec, bien qu’inférieur à l’Ontario, est bien au-dessus de la cible de 50 000 immigrants fixée par la CAQ. Et on s’attend maintenant à en recevoir davantage en 2023, selon les chiffres analysés par la firme Auray.

En plus de l’important écart du nombre, on note deux différences entre les deux provinces. Au Québec, 43 % des temporaires ont eu ce permis par le truchement du PTET, contre seulement 18 % en Ontario, tel qu’expliqué plus haut. Autre distinction : au Québec, seulement 18 % des travailleurs temporaires sont de récents diplômés d’un établissement local, contre 32 % en Ontario.

Le Québec est donc plus pointilleux dans le recrutement de ses travailleurs temporaires.

Davantage de talent mondial au Québec

Une consolation, mais tout une : le Québec recueille beaucoup plus de candidats qualifiés de « talent mondial » que le reste du Canada. Il s’agit de candidatures sélectes, recherchées partout sur la planète (informaticiens, ingénieurs, etc.).

En 2022, 44 % des 8026 talents mondiaux venus au Canada se sont retrouvés au Québec. Cette part est bien plus importante que le poids du Québec dans la part globale des travailleurs étrangers canadiens de 2022 (15 %). Il appert que les organismes Montréal International et Québec International y sont pour quelque chose, me dit Jean-Sébastien Plourde, de la firme de recrutement Auray.

Ces candidatures « talent mondial » obtiennent très rapidement leur approbation du gouvernement fédéral pour l’évaluation d’impact du PTET. Le délai cible après une demande en bonne et due forme par une entreprise est d’un maximum de 10 jours.

1. Lisez « Se tirer dans le pied avec l’immigration »

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Démographie québécoise Bond record de la population

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Le Québec a connu en 2022 la plus forte croissance de sa population depuis 50 ans.

La population québécoise a augmenté de 149 900 personnes, en 2022. Cette croissance record repose essentiellement sur l’immigration, car l’accroissement naturel, soit la différence entre le nombre de naissances et le nombre de décès, n’est que de 2300 personnes, selon le dernier bilan démographique du Québec, publié mercredi. Coup d’œil.

Publié à 1h04 Mis à jour à 6h00

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Suzanne Colpron
Suzanne Colpron La Presse

Une croissance basée sur l’immigration

Le Québec a connu en 2022 la plus forte croissance de sa population depuis 50 ans. Au 1er janvier dernier, le nombre d’habitants s’élevait à 8,8 millions, en hausse de 1,7 %. L’accroissement migratoire, c’est-à-dire le nombre d’entrées moins le nombre de sorties, a atteint 146 400 personnes en 2022. Ce gain résulte d’un solde migratoire international de 149 500 personnes et d’un solde migratoire négatif de 3100 personnes avec les autres provinces. En tout, 68 700 immigrants permanents et 86 700 résidents non permanents ont été admis au Québec, et 5900 personnes sont parties vers d’autres pays. « Le Québec n’avait jamais connu un solde aussi élevé depuis que des données comparables sont disponibles (1972) », souligne l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).

Le poids du Québec continue de baisser

L’augmentation de sa population ne permettra pas au Québec d’accroître son poids au sein du Canada, puisque la hausse a été encore plus forte dans l’ensemble du Canada, avec un gain de 1 040 110 personnes. En conséquence, le poids démographique du Québec est passé de 22,4 % à 22,2 %. Le taux de natalité n’est pas plus faible au Québec qu’ailleurs au Canada. L’indice synthétique de fécondité a également baissé pour s’établir à 1,49 enfant par femme, passant sous la barre de 1,5 enfant par femme pour la première fois depuis 2002. Mais cet indice reste plus élevé que ceux de l’Ontario, de la Colombie-Britannique ou des quatre provinces de l’Atlantique. C’est l’immigration, et non les naissances, qui soutient la croissance de la population canadienne.

Baisse des naissances, hausse des décès

Si le Québec avait compté sur l’accroissement naturel de sa population, sa croissance démographique serait quasi nulle, avec un gain de 2300 personnes. Sans immigration, la population stagnerait. Ce faible accroissement naturel s’explique par deux phénomènes : une fécondité en baisse et une mortalité en hausse. L’ISQ estime que 80 700 bébés sont nés ici en 2022, ce qui constitue le niveau le plus bas depuis 2005. Le nombre de décès a par ailleurs fortement augmenté. Il s’est établi à 78 400, en hausse de 12 % par rapport à 2021. Cela dépasse même les 74 849 décès de 2020. Cette augmentation exceptionnelle s’explique par la pandémie et la circulation d’autres virus respiratoires.

L’espérance de vie recule

La hausse du nombre de décès en 2022 a fait chuter l’espérance de vie de neuf mois. La baisse a été plus marquée chez les femmes, de 84,9 à 84,1 ans, que chez les hommes, de 81,1 à 80,5 ans. L’espérance de vie a connu des mouvements en yoyo en raison de la pandémie et de la surmortalité qu’elle a entraînée : d’un sommet de 82,9 ans en 2019, elle a chuté à 82,3 en 2020, est remontée à 83 en 2021, pour redescendre à nouveau en 2022. L’Institut de la statistique du Québec estime que ces mouvements font « figure d’exception », car l’espérance de vie a augmenté progressivement au fil des ans, quoique cette tendance à la hausse ait été moins marquée dans les années prépandémiques.

Laval mène le bal

C’est à Laval qu’on vit le plus vieux (83,8 ans). Les régions de Chaudière-Appalaches, du Saguenay–Lac-Saint-Jean et de la Capitale-Nationale se distinguent aussi avec une espérance de vie qui dépasse 83 ans. Le Nord-du-Québec occupe le dernier rang avec une espérance de vie de 73,8 ans. Les disparités régionales n’évoluent pas toutes dans le même sens, puisque si Laval est en tête pour l’espérance de vie, elle est à l’avant-dernier rang des 17 régions administratives pour la fécondité, avec un indice de 1,45, Montréal étant en queue de peloton, à 1,23. Et c’est le Nord-du-Québec qui occupe le premier rang, loin devant avec un indice de 2,61. Dans la plupart des régions, cet indice se situe entre 1,5 et 1,7 enfant par femme.

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Hausse des seuils d’immigration « Suicidaire » ? Pas du tout !

PHOTO ANNE GAUTHIER, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

« Pour son deuxième mandat, la CAQ propose deux grands changements en immigration : hausser les seuils d’immigration, et ne sélectionner que des immigrants économiques qui parlent français », écrit notre éditorialiste.


Vincent Brousseau-Pouliot
Vincent Brousseau-Pouliot La Presse

Finalement, ce n’est pas « un peu suicidaire » pour le français d’accueillir plus d’immigrants au Québec.

Publié à 1h31 Mis à jour à 5h00

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C’est pourtant ce que le premier ministre François Legault disait en campagne électorale.

Huit mois plus tard, il propose de hausser les seuils d’immigration. Il faudra s’en souvenir quand un politicien tentera à nouveau de courtiser une partie du vote nationaliste sur le dos de l’immigration…

Cette volte-face n’efface pas les déclarations malheureuses de la Coalition avenir Québec (CAQ) sur l’immigration durant la campagne. Mais on aime mieux un gouvernement qui recule quand il a tort qu’un gouvernement qui s’obstine et qui continue d’avoir tort.

Pour son deuxième mandat, la CAQ propose deux grands changements en immigration : hausser les seuils d’immigration, et ne sélectionner que des immigrants économiques qui parlent français.

Pour les seuils d’immigration 2024-2027, le gouvernement Legault choisira l’un des deux scénarios suivants :

  1. Augmenter graduellement de 50 000 à environ 68 000 immigrants permanents par an.
  2. Maintenir le seuil à 50 000 immigrants par année (la promesse électorale de la CAQ).

On a tous compris cette semaine que Québec préfère le premier scénario. La décision finale sera prise à l’automne, après des consultations publiques.

Il y a quelques mois, nous nous étions demandé quel serait le seuil d’immigration optimal pour le Québec. Notre conclusion : entre 65 000 et 70 000 immigrants permanents par an. Nous ne pouvons que nous réjouir que le gouvernement aille dans cette direction. Il pourrait même le faire plus rapidement.

Lisez le dossier « De combien d’immigrants le Québec a-t-il besoin ? »

Aussi, il faut se réjouir du fait que le gouvernement Legault remette sur les rails le Programme de l’expérience québécoise (PEQ), qui vise à attirer les étudiants étrangers et les travailleurs temporaires déjà au Québec. Le PEQ fonctionnait très bien jusqu’à la réforme catastrophique de Simon Jolin-Barrette. La ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, propose de revenir en quelque sorte à l’ancien PEQ, avec davantage d’exigences pour le français.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le premier ministre du Québec, François Legault, et la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette

Toutefois, il y a deux problèmes majeurs dans la proposition dévoilée jeudi par la CAQ. Le premier : on hausse uniquement le nombre d’immigrants économiques, et non le nombre de réfugiés et d’immigrants issus du regroupement familial (deux types d’immigration contrôlés par Ottawa).

Traditionnellement, l’immigration économique représente environ 65 % de l’immigration, les réfugiés et le regroupement familial, 35 %. Avec la proposition de Québec, on serait plutôt à 70 %-30 %. On doit continuer de fournir notre effort et garder la proportion 65 %-35 %. C’est une question de justice sociale et d’équité.

Le deuxième problème de la réforme Fréchette : n’accueillir que des immigrants économiques qui parlent français. Ce serait une première au Québec.

On est d’accord à 200 % avec l’objectif du gouvernement Legault de porter une attention particulière à la défense du français. Le français fait partie intégrante de notre identité québécoise. Il faut le chouchouter, le valoriser et le protéger.

On ne croit toutefois pas qu’il faille obliger tous les immigrants économiques à connaître le français avant d’immigrer au Québec.

Il est injuste de faire porter aux immigrants le sort de l’avenir du français.

La réalité, c’est que les immigrants québécois… n’ont jamais autant parlé français !

La proportion d’immigrants qui parlent le français et qui ont le français comme première langue officielle parlée augmente sans cesse depuis les années 1970.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Le gouvernement Legault répète souvent que le français est en « déclin » parce que la proportion des Québécois et des Montréalais qui ont le français comme langue maternelle ou comme langue parlée le plus souvent à la maison diminue.

Or, le français n’est pas menacé parce que des immigrants parlent arabe, espagnol, portugais, italien ou créole entre eux à la maison. L’important, c’est que les immigrants adoptent le français comme langue principale à l’extérieur de leur domicile, au travail, dans la sphère publique et avec leurs amis. Et que leurs enfants aillent à l’école en français.

Dans le contexte où les immigrants québécois n’ont jamais autant parlé français, on juge trop sévère de sélectionner uniquement des immigrants francophones avant leur arrivée au Québec. On se privera de l’apport de futurs Québécois qui pourront apprendre le français une fois sur place.

Pendant des décennies, on a favorisé l’arrivée d’immigrants francophones par l’intermédiaire d’un système de sélection des immigrants économiques où la connaissance du français vaut beaucoup de points. C’est ainsi que 88 % des immigrants économiques sélectionnés en 2022 parlaient français (connaissance à l’oral et à l’écrit). On peut améliorer ce système sans rendre la connaissance du français obligatoire. On doit aussi faire beaucoup mieux avec nos programmes de francisation. De 2019 à 2021, le Québec n’a même pas tout dépensé l’argent que lui envoie Ottawa pour l’accueil, l’intégration et la francisation des immigrants.

Cela dit, si la CAQ va de l’avant avec cet aspect de sa réforme, le Québec ne serait pas le seul endroit au monde à exiger que ses immigrants économiques parlent sa langue officielle. Le Royaume-Uni fait de même avec l’anglais pour un visa de travail. Dans le reste du Canada, le principal programme fédéral d’immigration économique, Entrée express, exige aussi la connaissance de l’anglais ou du français.

On doit pouvoir discuter sereinement de ces questions.

Et si Québec haussait les seuils ?

Dans l’un des deux scénarios dévoilés jeudi, Québec propose de hausser graduellement les seuils de 50 000 à 60 000 immigrants permanents par an d’ici 2027. On ajouterait à ce seuil les immigrants issus du Programme de l’expérience québécoise, soit environ 8000 immigrants par année avant la pandémie. C’est pourquoi nous écrivons que le seuil annuel passerait à environ 68 000 immigrants en 2027.

  • 2024 : 50 000 immigrants + immigrants du PEQ (env. 8000)
  • 2025 : 54 000 immigrants + immigrants du PEQ
  • 2026 : 57 000 immigrants + immigrants du PEQ
  • 2027 : 60 000 immigrants + immigrants du PEQ

Un bémol au 100 %

En sélectionnant seulement des immigrants économiques francophones, Québec estime que 96 % des immigrants économiques en 2026 connaîtront le français. Pourquoi 96 % et non 100 % ? Parce qu’on fera des exceptions pour les travailleurs en technologies de l’information et les talents d’exception, soit 4 % des immigrants économiques.

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Immigrants francophones « Évitez le Québec »

PHOTOMONTAGE LA PRESSE

La réforme imposée en 2020 par le gouvernement Legault au Programme de l’expérience québécoise a terni la réputation du Québec au point où le message qui circule sur les réseaux sociaux est d’éviter la province. Avec les assouplissements annoncés la semaine dernière, le Québec retrouvera-t-il la cote auprès des étudiants étrangers francophones ?

Publié à 5h00

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Suzanne Colpron

Suzanne Colpron La Presse

Un virage à 180 degrés

« Si vous voulez immigrer, visez hors Québec. »

Si le gouvernement Legault fait un virage à 180 degrés en ouvrant la porte à une augmentation des seuils d’immigration et à un assouplissement des règles, c’est parce qu’il a frappé un mur avec sa réforme du Programme de l’expérience québécoise (PEQ), en 2020.

En effet, depuis le durcissement des critères de sélection, le mot se propageait sur les réseaux sociaux où les immigrants racontent leurs expériences et échangent des conseils : « Évitez le Québec. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Claire Launy a cofondé Le Québec c’est nous aussi, un organisme qui défend les droits des immigrants au Québec.

« C’est encore la première règle », assure Claire Launy, cofondatrice et présidente de l’organisme voué à la défense des droits des immigrants Le Québec c’est nous aussi, né dans la foulée de la réforme du Programme de l’expérience québécoise, en 2020. « Parce que si tu viens au Québec, tout va être beaucoup plus compliqué. »

Voici quelques extraits de messages publiés dans un groupe privé sur Facebook :

« Pour les nouveaux arrivants, le Québec est clairement la province à éviter pour immigrer. »

« Si j’ai un conseil à donner aux immigrants, évitez le Québec. »

« Entre nous, immigrer au Québec, c’est long et dur. Vaut mieux viser ailleurs. »

« Si tu vas dans une autre province que le Québec, c’est beaucoup plus simple et plus rapide. »

Claire Launy constate que les gens qui souhaitent immigrer au Canada, même s’ils parlent français, sont nombreux à écouter ces conseils. « En fait, dit-elle, on ne les voit même pas passer par le Québec, maintenant. Ils vont directement dans d’autres provinces parce qu’ils se sont déjà fait dire que ce n’était pas la peine, quoi. »

Ces réactions peu flatteuses pour le Québec résultent de deux phénomènes qui se sont conjugués pour créer une tempête parfaite. D’un côté, le gouvernement du Canada a multiplié les initiatives pour attirer les francophones hors Québec. Et de l’autre, le gouvernement du Québec a mis en place des critères pour restreindre le flux d’immigration.

Les nouvelles mesures ont particulièrement visé les étudiants étrangers. Le Programme de l’expérience québécoise (PEQ), créé en 2010, offrait une voie rapide vers l’immigration au Québec à ces étudiants diplômés et aux travailleurs temporaires.

Le gouvernement, en 2020, a durci les critères d’admission de ce programme pour en limiter l’accès. Cette mesure lui permettait de respecter rapidement son engagement électoral de réduire le seuil d’immigration permanente.

Le but a été atteint et même largement dépassé. Dans la catégorie des diplômés, les admissions au PEQ se sont littéralement effondrées, passant de 8068 en 2021, à 1958 en 2022.

Mais cette baisse a eu un effet pervers. En voulant serrer la vis, Québec s’est du même coup privé de ses meilleurs immigrants potentiels. Le premier ministre reconnaît maintenant la qualité de ces candidats que son gouvernement avait délaissés. « Les étudiantes et étudiants étrangers diplômés de nos programmes francophones nous apparaissent comme des candidats idéaux », a-t-il écrit, dans le cahier de consultation déposé jeudi. M. Legault parle aussi de « bassin exceptionnel ».

Pour corriger le tir, Le Québec c’est nous aussi souhaitait un assouplissement des critères, à l’instar de l’Institut du Québec qui vient de publier une étude sur les étudiants étrangers au Québec. Ce regroupement préconisait l’abolition de l’expérience de travail de 12 à 18 mois, encore exigée pour se qualifier au PEQ.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Christine Fréchette, ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI)

Une des deux options soumises au débat public par la ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI), Christine Fréchette, répond à ces préoccupations. L’autre option proposée, celle du statu quo, ne changerait pas la situation actuelle.

Dans son option d’ouverture, le gouvernement éliminerait, comme cela lui a été recommandé, l’obligation d’expérience de travail. L’accès au PEQ serait également très rapide pour les étudiants issus des établissements d’enseignement francophones répondant aux critères. De plus, ces diplômés seraient exclus du calcul des seuils d’immigration.

Est-ce que cela suffira à renverser la vapeur et à modifier les perceptions à l’égard des seuils ? Le Québec c’est nous aussi reste prudent. « Ce n’est pas encore adopté, souligne Claire Launy. On garde une petite distance parce que les consultations sur la planification pluriannuelle n’ont pas encore eu lieu. Donc, ce n’est pas encore final, mais les propositions qu’on voit dans ces scénarios, notamment pour les étudiants internationaux, c’est très positif. »

On peut supposer qu’avant que le mot se passe, les étudiants étrangers voudront être certains que la réforme a été adoptée et voudront en connaître les modalités avant de consacrer plusieurs années de leur vie à une démarche visant à s’établir au Québec.

En outre, la réforme ne réussirait pas à complètement résoudre un autre point de friction. Depuis l’entrée en vigueur des nouvelles normes du PEQ, en 2020, Mme Launy constate que des immigrants ont quitté le Québec pour aller dans une autre province, non seulement parce que c’est plus facile d’obtenir la résidence permanente ailleurs au Canada, « mais aussi parce que c’est difficile de se projeter dans une province qui change les règles à tout bout de champ ».

Enfin, le geste d’ouverture proposé ne s’adresse pas à tous les étudiants. Rappelons que 44 % des étudiants internationaux au Québec étudient dans les universités anglophones, qui n’auront pas accès, sauf de rares exceptions, à ce PEQ assoupli.

« On trouve que c’est quand même dommage pour les étudiants qui ont choisi d’aller étudier dans les universités anglophones, même s’ils ont passé un test de français. On a du mal à se l’expliquer, parce que, pour toutes les catégories d’immigration, un test de français suffit pour prouver la connaissance du français. Mais pour les étudiants qui ont choisi les établissements anglophones, ça ne suffit pas », ajoute Mme Launy.

« On leur dit que ça ne sert à rien d’apprendre le français. »

62 330

Nombre de titulaires de permis d’études au Québec en 2022

Source : Statistique Canada

Le parcours de quatre candidats à l’immigration

Qui sont ces étudiants étrangers ? D’où viennent-ils ? Pourquoi ont-ils choisi le Québec ? La Presse en a sondé quelques-uns.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

La Française Julie Sénat

« Il y a du flou autour de l’avenir »

Au Québec depuis 2018, Julie Sénat compte demander la résidence permanente. Mais à des amis français qui songeraient à immigrer, elle dirait : « Si l’idée est de se poser quelque part, c’est mieux d’aller ailleurs. Ce qui est triste parce que le Québec est une belle province. »

« Dans les dernières années, ici, il y a du flou autour de l’avenir », constate la Française de 29 ans.

Julie Sénat est venue au Québec avec un permis d’études pour faire une maîtrise en didactique des langues à l’UQAM. Elle a obtenu son diplôme, puis son permis de travail post-diplôme il y a un an. Elle doit maintenant accumuler 12 mois d’expérience de travail à temps plein pour postuler au Programme de l’expérience québécoise (PEQ). « J’ai postulé à McGill pour un poste de chargée de cours à temps plein, et j’ai eu la chance d’être prise, dit-elle. Ça m’a sauvée. Ça m’a redonné l’opportunité de rester ici parce que sinon, je serais sûrement partie aux États-Unis. »

Si tout va bien, Julie Sénat aura sa résidence permanente au Québec à l’été 2025.

Que pense-t-elle de la réforme proposée ?

« Ils sont juste revenus en arrière. C’est beaucoup d’énergie pour rien de leur part. »

« C’est compliqué »

PHOTO JEAN ROY, LA TRIBUNE

Alison Jolly a obtenu un DEC en soins infirmiers au Québec.

Alison Jolly, 27 ans, a fait des études au cégep de Baie-Comeau, puis à celui de Drummondville, dans un domaine très recherché : soins infirmiers. Cette Française a travaillé pendant un an comme infirmière avant de demander le certificat de sélection du Québec (CSQ), préalable à la résidence permanente.

Depuis, le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) lui a fait parvenir deux « intentions de refus », que La Presse a consultées.

Dans la première, datée du 28 avril, on lui demande de prouver qu’elle a séjourné au Québec dans le but principal d’y étudier et qu’elle a respecté les conditions de son séjour. « Je l’ai fait », dit Alison Jolly, qui précise être neuroatypique.

Dans la seconde, reçue une semaine plus tard, on lui demande de fournir une série de documents : relevé de notes du cégep de Baie-Comeau, conditions d’obtention de sa bourse d’études, preuve de réussite du stage, preuve de demande de permis de travail post-diplôme, avis de cotisation pour 2021 et 2022…

« Est-ce que je conseillerais à un ami de s’établir au Québec ? Non, vraiment pas ! s’exclame Alison. C’est compliqué, et on ne sait même pas ce que le gouvernement va apporter comme modifications à la réforme. Il y a plus d’ouverture et c’est beaucoup plus rapide dans les autres provinces d’avoir la résidence permanente. »

Que pense-t-elle de la réforme proposée ?

« Ça ne change rien pour moi, malheureusement. »

« Halifax est devenu mon chez-moi »

PHOTO FOURNIE PAR SANDRINE MOUNIER

Sandrine Mounier a fait un doctorat à l’UQAM en études urbaines.

Sandrine Mounier, elle, est partie. À la suite de l’entrée en vigueur de la réforme du PEQ, cette Française de 38 ans a plié bagage. Elle a déménagé en Nouvelle-Écosse, où on lui a donné la résidence permanente au bout de huit mois.

« J’étais fatiguée des procédures administratives, explique-t-elle. Je voyais qu’il fallait encore peut-être trois ans, quatre ans, avant d’avoir ma résidence permanente, et ça faisait déjà six ans que j’étais au Québec. Je voyais que les choses changeaient tout le temps. J’avais complètement perdu confiance en l’administration québécoise. »

En quittant le Québec, après avoir obtenu un doctorat en études urbaines à l’UQAM, Sandrine Mounier estime avoir « gagné au moins deux ans » sur l’obtention de la résidence permanente.

« Je ressens toujours quelque chose pour Montréal, précise-t-elle. Mais Halifax est devenu mon chez-moi. Pour l’instant, le Québec fait partie de mon histoire. Mais il y a des moments où je ressens de l’amertume. Ça me fait de la peine de me dire que j’ai dû quitter une partie de moi là-bas. En fait, cette peine-là ne me donne pas envie de revenir. J’ai plutôt envie d’aller de l’avant. »

Que pense-t-elle de la réforme proposée ?

« Les changements qu’ils avaient faits, il y a trois ans, n’ont pas été satisfaisants. Donc, ils sont obligés de retourner en arrière. »

« Un double discours »

PHOTO FOURNIE PAR NÉVIN RICQUEBOURG

Névin Ricquebourg est devenu résident permanent au Québec en avril 2022.

Névin Ricquebourg, 27 ans, est résident permanent au Québec depuis avril 2022.

« C’était très long, tumultueux, mais ça a fonctionné. J’ai été chanceux », lance-t-il.

Originaire de l’île de la Réunion, un département français, il est arrivé au Québec en 2016 pour étudier en animation 3D au cégep de Matane, dans le Bas-Saint-Laurent. Il a trouvé un emploi avant même la fin de ses études. Mais il a dû travailler pendant un an à temps plein, après son diplôme, avant de postuler au PEQ.

« J’ai demandé le CSQ en juillet 2021, dit-il. Un an et demi plus tard, j’ai eu la résidence permanente. Un an et demi, c’est long. Ailleurs au Canada, c’est six mois. C’est sûr que d’aller dans une autre province, c’est tout gagnant. »

Névin Ricquebourg estime qu’il y a un « double discours » au Québec.

« On a entendu plein de fois : “En prendre moins, mais en prendre soin.” Mais en prendre soin ? Non. En prendre moins, c’est sûr ! On fait toutes ces étapes et on n’a pas l’impression que le gouvernement est content, alors que l’on contribue à l’économie québécoise. »

Que pense-t-il de la réforme ?

« Ils sont revenus à la raison ! Mais pour être sûr qu’il n’y ait pas de mauvaise surprise, j’attends que ce soit appliqué. »

Le PEQ en cinq questions

La réforme du Programme de l’expérience québécoise adoptée en 2020 a transformé la voie rapide en course à obstacles. Voici comment le gouvernement compte réparer les pots cassés.

C’est quoi, le PEQ ?

Le Programme de l’expérience québécoise (PEQ) a été créé en 2010 pour attirer et retenir les étudiants étrangers diplômés, ayant une bonne connaissance du français. Jusqu’à la réforme de 2020, ce programme était la voie rapide de l’immigration pour les étudiants étrangers et les travailleurs temporaires au Québec. Les candidats obtenaient, dans des délais très courts, le certificat de sélection du Québec, un document préalable à la résidence permanente.

Quel était le but de la réforme ?

Le gouvernement Legault a été élu en promettant de baisser à 40 000 le nombre d’immigrants, en 2019. Il devait donc trouver le moyen de fermer le robinet. En resserrant les règles du PEQ, il a réduit le nombre de nouveaux arrivants qui pouvaient postuler. Il a justifié son choix en disant que le nombre de places pour les immigrants était limité au Québec, et que, compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre, la sélection des candidats devait être faite « en adéquation avec les besoins du marché du travail ».

Il y a eu trois tentatives. Pourquoi ?

La réforme de 2020 a été pilotée par Simon Jolin-Barrette, alors ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI).

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Simon Jolin-Barrette a piloté la réforme de 2020, alors qu’il était ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration.

La première mouture, très controversée, a été présentée en novembre 2019. En gros, elle limitait l’accès au PEQ aux diplômés de certains domaines de formation. Le milieu des affaires et de l’éducation s’est mobilisé pour forcer le gouvernement à reculer, notamment parce que la liste des formations privilégiées comportait des omissions et des incohérences. Le ministre Jolin-Barrette s’est excusé et a promis de faire des consultations.

La deuxième version a été présentée en mai 2020. Elle consistait à ajouter un critère d’expérience de travail de 12 à 18 mois pour les diplômés, et de 36 mois pour les travailleurs temporaires. Elle rendait aussi certains domaines d’emploi non admissibles.

« Auparavant, dès qu’on obtenait un diplôme, on était qualifié automatiquement, que ce soit un DEP, un DEC, une technique, un bac, une maîtrise, un doctorat », explique Benjamin Brunot, avocat spécialisé en immigration. « Pour les travailleurs, il fallait 12 mois d’expérience professionnelle au Québec. »

Le ministre Jolin-Barrette avait comparé cette nouvelle version à l’application de rencontres Tinder. C’est le « Tinder de l’immigration », avait-il déclaré en février 2019. « Nous avons lancé le système Arrima afin de mieux arrimer la sélection des personnes immigrantes aux besoins du marché du travail et de réduire les délais pour leur arrivée. »

Quels changements ont été apportés ?

Les nouvelles normes sont entrées en vigueur le 22 juillet 2020. Entre-temps, Nadine Girault (aujourd’hui décédée) a succédé à Simon Jolin-Barrette à la tête du MIFI. Elle a revu à la baisse le nombre de mois d’expérience exigé aux travailleurs temporaires (24 mois) et aux titulaires d’un diplôme d’études professionnelles (18 mois). Mais elle a maintenu une exigence d’expérience de travail de 12 mois pour les autres diplômés.

La réforme a aussi entraîné une augmentation des délais. Le traitement accéléré, qui permettait d’obtenir le certificat de sélection du Québec (CSQ) en 21 jours ouvrables, a été éliminé.

« On a volontairement exclu des gens, explique Me Brunot. Il y a tout un profil de gens à qui on a dit : vous ne nous intéressez pas. Alors, beaucoup moins de gens ont postulé. »

Quels sont les nouveaux changements proposés ?

Pour retenir les étudiants étrangers, le gouvernement propose maintenant d’éliminer l’exigence de l’expérience de travail post-diplôme de 12 à 18 mois, qu’il a lui-même imposée en 2020. Le PEQ remanié s’adresse aux étudiants étrangers qui terminent leurs études au Québec dans un programme enseigné en français. Les diplômés des universités anglophones, McGill ou Concordia, pourront postuler s’ils ont étudié trois ans en français à un niveau secondaire ou postsecondaire à temps plein. Les autres seront exclus même s’ils parlent français. Autre changement : les immigrants francophones sélectionnés dans le cadre du PEQ ne seront plus comptabilisés dans les seuils annuels de l’immigration permanente. En outre, il n’y aura pas de plafond quant au nombre de diplômés francophones pouvant être admis chaque année. Cela signifie que le nombre d’immigrants permanents dépassera le seuil de 60 000 proposé par le gouvernement dans cette option. De combien ? On ne le sait pas. Ça dépendra du nombre d’étudiants diplômés qui choisiront de s’inscrire au PEQ. En 2021, c’était plus de 8000. Mais il est possible que cette nouvelle formule suscite un engouement qui gonflera l’immigration.

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