Votre déménagement de 30 boîtes vous cause des maux de tête ? Imaginez en avoir 30 000 à déplacer.
Résumé
Déménagement des archives municipales « Un gros casse-tête »
PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE
Les archives municipales ont été entreposées dans des locaux temporaires, rue Saint-Denis, pendant six ans en attendant la fin des travaux de rénovation à l’hôtel de ville de Montréal.
Votre déménagement de 30 boîtes vous cause des maux de tête ? Imaginez en avoir 30 000 à déplacer.
Publié à 0h44 Mis à jour à 5h00
Philippe Teisceira-Lessard Équipe d’enquête, La Presse
C’est la tâche à laquelle s’attaquent ces jours-ci les archives municipales de Montréal, qui retournent dans un hôtel de ville fraîchement rénové après six ans d’absence. Un délai qui s’est étiré avec le retard des travaux.
Fin mai, lors de la visite de La Presse dans les locaux temporaires de la rue Saint-Denis, tout était fin prêt pour le déplacement. Sur chaque boîte : trois codes numériques. Son ancien emplacement à l’hôtel de ville, son emplacement provisoire et son futur emplacement à son retour dans le dépôt.
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L’archiviste Nicolas Bednarz
Les archives de la Ville de Montréal, c’est « 5,6 kilomètres de documents, 2 000 000 de photos à peu près », explique l’archiviste Nicolas Bednarz.
Les documents retracent l’évolution de Montréal depuis 1642, mais surtout depuis la constitution de sa première administration civile en 1796.
Pas question d’égarer ou de bardasser tous ces souvenirs comme certains déménageurs en ont la réputation.
Le double objectif, « c’est d’assurer l’intégrité des documents et de les retrouver », a expliqué le chef de division Florian Daveau.
Des centaines de négatifs sur verre, par exemple, devront être déplacés alors qu’ils sont « très fragiles ». « Les déménageurs ont des consignes bien précises. Il faut faire attention à toutes les boîtes, mais pour celles-ci, il y a des consignes particulières, a-t-il continué. Il y a toujours un archiviste ou un technicien qui va être avec les déménageurs pour s’assurer que ces documents arrivent en bon état. »
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Florian Daveau, chef de la Division de la gestion documentaire et des archives de la Ville de Montréal
L’enjeu, c’est beaucoup le repérage. C’est comme un gros casse-tête que tu mélanges et que tu refais différemment.
Florian Daveau, chef de la Division de la gestion documentaire et des archives de la Ville de Montréal
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Juin 1833, l’élection de Jacques Viger, premier maire de Montréal, est enregistrée.
« Interminables fichiers Excel »
Les archives n’ont pas dormi pendant leurs années rue Saint-Denis, dans un ancien bâtiment industriel situé à l’angle du boulevard Rosemont. Des chercheurs et des fonctionnaires municipaux continuaient à consulter les documents dont ils avaient besoin, en personne ou – pour ceux qui ont été numérisés – par internet.
Ce n’est toutefois pas l’assistance aux chercheurs qui occupe le plus clair du temps des archivistes dans les dernières semaines. « Depuis le mois de janvier, on travaille au quotidien ou presque » sur le déménagement, a indiqué M. Daveau. Dans d’interminables fichiers Excel, les 30 000 boîtes et leurs 216 000 ensembles de documents sont listés.
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Certains objets demandent une attention particulière lors du déménagement, comme les négatifs sur verre.
La planification demeure la clé du succès du transfert, selon son collègue et lui. Aucune boîte n’a été perdue dans le déménagement de l’hôtel de ville vers la rue Saint-Denis, mais « pour être très honnête, il y en a qui ont pris un peu de temps » à localiser, a dit Nicolas Bednarz. « Je suis assez fier. »
Trois camions vont faire l’aller-retour entre les deux lieux pendant tout le mois de juin.
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Chambres fortes réaménagées
Ce n’est pas le premier chambardement de l’hôtel de ville de Montréal que connaissent les archives municipales. En 1922, le bâtiment a complètement brûlé, une cinquantaine d’années après sa construction.
Le plus gros des archives s’en est toutefois sorti indemne : une chambre forte souterraine avait été construite sous le parvis du bâtiment en 1919. « Les documents avaient été transférés progressivement entre 1919 et 1922, a relaté M. Bednarz. C’est une chance, vraiment. […] On a des photographies de l’ouverture des portes qui fermaient les voûtes. On voit les documents, tout est détruit autour. »
Une deuxième voûte souterraine a été construite juste à côté dans les années 1950.
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Registres, photographies, cartes – comme celle-ci de l’île Sainte-Hélène datant de 1937 –, déménager l’ensemble des archives prend des mois de planification.
C’est dans ces deux espaces que les archives retournent en ce moment même. Ils ont toutefois été réaménagés, permettant aux archivistes de gagner environ 20 % d’espace supplémentaire. La rançon des efforts investis par les équipes des archives depuis 2018.
« Un déménagement comme ça, c’est une fois tous les 100 ans », a assuré Florian Daveau. En 2124, les archives pourront dire s’il se trompait.