Résumé
« Loi Airbnb » : Québec lancera son répertoire public lundi
Québec cherche à lutter contre l’hébergement touristique illégal depuis l’incendie qui a fait sept morts dans le Vieux-Montréal, en mars 2023.
Photo : Shutterstock
Publié à 4 h 00 HNEMis à jour à 7 h 14 HNE
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Le registre public de tous les établissements d’hébergement touristique du Québec, dont la création était prévue par la « loi 25 », sera mis en ligne lundi. On y retrouvera notamment les adresses correspondant à tous les certificats d’enregistrement délivrés par le gouvernement, y compris celles des résidences principales offertes en location de courte durée – ce qui, selon Airbnb, soulève des problèmes de sécurité.
La date d’entrée en vigueur de cette disposition de la Loi visant à lutter contre l’hébergement touristique illégal a été confirmée dans la Gazette officielle du 4 décembre dernier.
La « loi 25 » a été adoptée en juin 2023, peu de temps après l’incendie qui a fait sept morts dans un immeuble du Vieux-Montréal dont les logements étaient loués sur Airbnb, avec pour but de s’assurer de la conformité des établissements d’hébergement touristique.
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Depuis son entrée en vigueur, la loi force notamment les plateformes numériques comme Airbnb ou Vrbo à exiger de leurs hôtes qu’ils affichent dans leurs annonces le numéro de leur certificat d’enregistrement de la Corporation de l’industrie touristique du Québec (CITQ).
AILLEURS SUR INFO : L’info en questions
Le registre public permettra donc aux consommateurs de vérifier la validité de ces numéros. Mais il sera aussi utile aux municipalités et… aux inspecteurs de Revenu Québec, chargés de faire respecter la loi.
Comme prévu, le registre comprendra, pour chaque établissement, la catégorie à laquelle il appartient (établissement d’hébergement touristique général ou résidence principale, par exemple), le numéro de son certificat d’enregistrement, les dates de délivrance et d’expiration de celui-ci ainsi que le statut de l’enregistrement (en vigueur, expiré, suspendu ou annulé).
Mais dans un règlement adopté en juin dernier, le gouvernement a également déterminé que l’adresse de chaque établissement serait incluse dans le registre.
Airbnb – dont l’approche consiste à ne pas exiger que les hôtes affichent l’adresse exacte d’une annonce avant qu’une réservation soit confirmée – s’était pourtant opposée à une telle mesure dans son mémoire déposé lors des consultations particulières sur le projet de loi 25.
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Le registre public ne devrait pas inclure les noms, adresses ou informations contractuelles des exploitants, avait plaidé la multinationale. Dévoiler ces renseignements, disait-elle, risquait de porter atteinte à la sûreté et à la sécurité des hôtes et de leurs biens.
Joint par courriel cette semaine, Airbnb a réitéré que l’obligation de rendre publics le nom et l’adresse d’un résident pourrait potentiellement mettre en danger la sécurité des hôtes. Elle a aussi indiqué qu’elle n’entendait pas, malgré le lancement du registre, changer d’approche et exiger de ses hôtes qu’ils affichent l’adresse exacte d’une annonce avant qu’une réservation soit confirmée.
Un registre gratuit
Selon nos informations, le répertoire qui sera lancé lundi n’inclura pas les noms des établissements ou de leurs propriétaires.
Il ne sera pas non plus possible de faire des recherches par adresse, mais cette information sera bel et bien accessible dans les listes qui seront générées en effectuant des recherches par code postal ou par municipalité, par exemple.
Le répertoire, qui sera mis en ligne sur le site gouvernemental Quebec.ca, sera accessible gratuitement, et il ne sera pas nécessaire de donner son identité pour le consulter, comme c’est le cas, par exemple, pour le Registre foncier du Québec.
Il reflétera dans un premier temps les informations colligées par la CITQ. Les pourvoiries et les campings y seront ajoutés ultérieurement.
Les villes comblées
L’Union des municipalités du Québec (UMQ), qui avait demandé la création d’un tel répertoire, est satisfaite de la tournure des événements.
Cet outil permettra à ses membres de connaître en temps réel le nombre, l’adresse ainsi que la catégorie de tous les établissements d’hébergement touristique qui se trouvent sur leur territoire, dit-elle.
Il sera particulièrement pratique pour les petites administrations, dont les moyens sont limités, fait valoir le président du Caucus des municipalités locales de l’UMQ, Joé Deslauriers, qui est aussi maire de Saint-Donat, dans les Laurentides.
Avoir accès à cette information-là nous permettra d’intervenir ou, en tout cas, d’apporter une surveillance accrue en cas de problème, résume-t-il.
Le RCLALQ relativise
Porte-parole du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ), Cédric Dussault estime pour sa part que le lancement du registre ne changera pas grand-chose au combat que mène l’organisme.
Le problème d’Airbnb, c’est les logements locatifs que ça enlève, et cet élément-là, il n’est pas nécessairement lié à la question de la légalité, explique-t-il. On peut contrôler, on peut rendre ça légal, mais même s’il y a des annonces qui respectent la loi, ça ne veut pas dire que ça n’enlève pas des logements dans le parc locatif.
En commission parlementaire, son collègue Martin Blanchard avait néanmoins réclamé la création d’un registre public incluant les adresses des établissements d’hébergement touristique, excédé que les inspecteurs de Revenu Québec [doivent] louer chaque logement dont l’annonce est présumée illégale pour s’assurer que le numéro de certification correspond ou non à l’adresse sur le certificat.
La ministre du Tourisme, Caroline Proulx, avait également soutenu lors des consultations particulières que la création d’un tel registre permettrait à Revenu Québec de pouvoir, en temps réel, consulter et s’assurer de la conformité des annonces.
La fin d’un cycle
Le lancement du répertoire des établissements enregistrés à la CITQ est la dernière disposition de la « loi 25 » à entrer en vigueur.
Plus tôt cette année, Québec a aussi mis au point une interface de programmation d’application (API) pour permettre aux exploitants de plateformes numériques d’hébergement transactionnelles de vérifier plus facilement les numéros de certificat soumis par leurs hôtes en effectuant une recherche automatisée dans ses données.
Deux mois plus tard, le déploiement de cette nouvelle technologie n’avait toutefois pas permis de mettre fin aux numéros de licence douteux sur Airbnb – un problème que le registre public du gouvernement pourrait contribuer à régler.
En avril, Québec avait rendu public un rapport produit à partir de données colligées par la firme AirDNA estimant à 90 % le taux de conformité des annonces publiées de manière concomitante sur Airbnb et Vrbo.