Fiscalité et économie

Baisser les impôts des plus riches ne stimulerait pas l’économie, conclut une étude

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Selon l’étude, « les baisses d’impôt majeures pour les riches augmentent les inégalités, mais elles ne stimulent pas l’économie ».

Des économistes de droite font valoir que des baisses d’impôt pour les contribuables aisés sont une façon de stimuler la croissance économique. C’est la théorie du ruissellement (trickle-down economics) : si les plus riches paient moins d’impôts, ils investiront et consommeront davantage, ce qui stimulerait l’économie.

Publié le 23 décembre 2020 à 11h00

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Vincent Brousseau-Pouliot Vincent Brousseau-Pouliot
La Presse

Deux chercheurs du King’s College de Londres, David Hope et Julian Limberg, ont voulu vérifier cette théorie. Ils ont mesuré les conséquences sur l’économie des baisses d’impôt majeures pour les riches dans 18 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont le Canada, pendant 50 ans, entre 1965 et 2015. Leur conclusion ? « Les baisses d’impôt majeures pour les riches augmentent les inégalités, mais elles ne stimulent pas l’économie », indiquent-ils par courriel à La Presse.

Voici leurs trois principales conclusions :

1) Les baisses d’impôt majeures pour les riches n’ont pas d’effet sur la croissance économique.

Selon les deux auteurs, l’effet positif sur l’économie sur une période de cinq ans est nul (« près de zéro »). Pour arriver à cette conclusion, ils ont comparé la performance économique des pays qui ont accordé des baisses d’impôt majeures à leurs contribuables les plus riches à celle des pays qui n’en ont pas accordé.

Qu’est-ce qu’une baisse d’impôt majeure pour les riches ? Les deux chercheurs du King’s College de Londres ont adopté une définition complexe à décrire pour les non-initiés. Selon leur définition, le Canada a accordé des baisses d’impôt majeures pour les riches une seule fois durant cette période, soit en 1972-1973. À cette époque, le gouvernement libéral de Pierre Elliott Trudeau a aboli l’impôt sur les successions et fait passer le taux d’imposition maximal (fédéral-provincial) de 80 % à 60 % (ce taux est aujourd’hui de 53 % au Québec). Aux États-Unis, il y a eu deux baisses d’impôt majeures pour les riches, instaurées par le président Ronald Reagan en 1982 puis en 1987-1988.

2) Elles n’ont pas d’effet à long terme sur le taux de chômage.

À court terme, le taux de chômage diminue d’environ 0,5 % sur deux ans après les baisses d’impôt majeures pour les riches. Mais voilà : le taux de chômage était déjà en train de diminuer avant les baisses d’impôt. Et sur cinq ans, il revient au même point qu’au moment des baisses d’impôt.

3) Elles enrichissent le 1 % des plus riches.

Par contre, ces baisses d’impôt ont au moins un effet économique à long terme : elles augmentent les inégalités entre le groupe du 1 % des plus riches et le reste de la population.

Selon l’étude publiée ce mois-ci par l’institut de la London School of Economics sur les inégalités, une baisse d’impôt majeure fait en sorte que le groupe de 1 % des plus riches accroît de 0,8 % sa part du revenu annuel total des contribuables.

Pour consulter l’article de David Hope et Julian Limberg (en anglais)

À titre d’exemple, aux États-Unis, le 1 % des plus riches a gagné 20 % des revenus totaux de tous les contribuables en 2014, comparativement à 10,5 % en 1979.

Reagan et Trump

Pour justifier la théorie du ruissellement, les économistes de droite renvoient souvent aux baisses d’impôt de Ronald Reagan en 1982 et en 1987-1988. Durant son mandat, Ronald Reagan a baissé le taux fédéral maximal des particuliers de 70 % à 28 %. Entre 1982 et 1989, l’économie américaine a crû en moyenne de 3,6 % par an.

C’est beaucoup, mais il faut regarder la situation dans son ensemble.

Premièrement, l’économie américaine se relevait d’une récession importante au début des années 1980.

Deuxièmement, « il n’y a pas de preuve que les baisses d’impôt ont causé la bonne performance de l’économie, seulement que les deux ont eu lieu en même temps. En fait, plusieurs économistes croient que la bonne performance de l’économie américaine dans les années 1980 a été causée par d’autres facteurs, dont la politique monétaire [de la Réserve fédérale] », indiquent Julian Limberg et David Hope.

Troisièmement, la fin des années 1980 a été une période de croissance économique importante pour la plupart des grandes économies du monde, qu’elles aient ou non accordé des baisses d’impôt aux plus riches, mentionnent les deux chercheurs.

Donald Trump est un autre président américain qui s’est inspiré de la théorie du ruissellement. En 2016, il avait promis que ses baisses d’impôt permettraient à l’économie américaine de croître de 3,5 % par an durant son mandat. L’administration Trump a effectivement réduit les impôts. Selon le Tax Policy Center, environ 21 % des baisses d’impôt de Donald Trump ont bénéficié au 1 % des Américains les plus riches, et 65 % des baisses d’impôt ont bénéficié aux 20 % des Américains les plus riches.

L’économie n’a pas crû comme le prédisait Donald Trump : entre 2017 et 2019 (en excluant l’année 2020 marquée par la crise de la COVID-19), elle a progressé en moyenne de 2,5 % par an. Il s’agit de la croissance annuelle moyenne de l’économie américaine depuis 1990.

Pendant la même période (de 2017 à 2019), le Canada, qui n’a pas accordé des baisses d’impôt aux contribuables mieux nantis, a vu son économie croître en moyenne de 2,3 % par an.https://www.lapresse.ca/affaires/economie/2020-12-23/fiscalite/baisser-les-impots-des-plus-riches-ne-stimulerait-pas-l-economie-conclut-une-etude.php

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C’est sur qu’a l’echelle d’un pays comme les Usa qui est déjà un paradis entrepreunarial, l’effet est moins visible et je ne vois pas la necessité de le faire quand on sait que même si les taxes pour les riches augmentaient elle resteraient en deça du niveau des autres pays. Il n’y a pratiquement aucun risque pour les USA de voir des délocalisations massives à cause d’une augmentation des taxes.

Par contre si le Quebec baissait significativement ses taux d’imposition par rapport à l’Ontario ce serait un véritable avantage. On pourrait assister à une relocalisation d’entreprises de labas vers ici. Et ça pourrait inciter beaucoup de compagnies étrangères à établir leur bureau canadien au Québec plutôt qu’en Ontario. Et là ce serait un gros plus pour l’économie de la province, surtout à long terme. Donc je pense qu’il n’y a pas de « one size fits all ». C’est du cas par cas. Ça peut très bien marcher.

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Je pense qu’on parle surtout de l’impôt personnel des ultra-riches, pas nécessairement de l’imposition des entreprises. La réalité du Québec est surtout que ces ultra-riches sont bien plus rares et que nous avons déjà une meilleure répartition fiscale, en général.

Mais globalement, il y a effectivement des fortunes personnelles à un niveau absurde, un phénomène complètement nouveau dans l’histoire humaine, et c’est une richesse qui dort comme l’or sous un dragon. Dragon qui dort sur son or pendant que les responsables de ces richesses font pipi dans des bouteilles par manque de temps et doivent faire la charité pour avoir des vacances ou une assurance santé.

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La fortune de Bezos est immense, on ne se rend pas compte à quel point c’est énorme. Toutefois, je pense que Rockefeller possédait une fortune plus importante. Même si on enlevait la moitié de l’argent de Bezos, il serait encore l’un des homme les plus riche. Même si on lui enlevait 90% de son argent, il serait multimilliardaire.

J’avais lu une étude qui démontrait que le bonheur individuel plafonnait lorsqu’on possède une somme de quelques millions, je crois. Posséder plusieurs milliards n’apporterait donc aucun bonheur à ces gens.

Vient un moment où on atteint les limites à utiliser concrètement cette richesse, et le train de vie ne changerait absolument pas même s’il restait seulement une fraction de la fortune, et ce pour plusieurs générations.

C’est un débat intéressant, cette fortune est méritée par les règles du jeu, mais elle ne sert concrètement à rien et pourrait créer beaucoup de bien si dépensée autrement.

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Par contre il faut pas oublier qu’une grosse partie de leur fortune n’est pas de l’argent en poche. Ces gens peuvent aussi tout perdre. Le 1% n’est jamais jamais le même d’une année à l’autre.

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Ah! la misère des riches surtout qu’aucune somme ne peut acheter ni même une seconde de paix intérieure. Quant à ceux qui profitent véritablement de ce bien-être, qu’ils aient de l’argent ou pas n’y change rien.
Sur ces mots joyeuses Fêtes à toutes et tous. :santa:

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Il a été démontré plusieurs fois que la théorie du ruissellement (trickle-down theory) ne fonctionne pas et que d’enrichir les plus riches n’a pas d’effet notable sur la croissance économique. Mais c’est un peu l’équivalent du Père Noël des gens riches et célèbre, on veut y croire parce que ça fait notre affaire.

Après, il est vrai que les taux d’imposition peuvent avoir un effet sur l’entreprenariat, mais surtout pour les gens moins “riches” (pas le 1% ou le 0,01% comme Jeff Bezos et autres). Quelqu’un qui gagne 75 000$ et qui est en mesure d’économiser grace à des impôts raisonnables pourra lancer son entreprise, acheter des biens de consommations, rénover sa maison, etc. D’où l’importance de bien cibler les paliers d’impôts et les crédits d’impôts. Une baisse d’impôt de 1 point de pourcentage peut coûter très cher à l’État et impacter sa capacité à offrir de bons services publics, mais résulter en une économie d’à peine 100-200$ pour un ménage moyen. Ça bénéficierait surtout aux gens les plus riches.

De plus, le filet social est un facteur majeur. Au Québec, les CPE sont un exemple de mesure sociale qui a grandement bénéficié à l’économie en permettant aux deux parents (surtout les mères), de rester sur le marché du travail et poursuivre leur carrière.

Pour une représentation visuelle intéressante des grandes richesses: Wealth, shown to scale

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Transformation majeure pour rattraper l’Ontario

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Pour orchestrer le rattrapage du Québec par rapport à l’Ontario, la firme McKinsey suggère de créer un « bureau de transformation » économique, formé notamment de membres du bureau du premier ministre et du ministère de l’Économie.

Francis Vailles

Francis Vailles La Presse

Vous connaissez la marotte de François Legault, son objectif ultime, soit que le Québec rattrape le niveau de vie de l’Ontario.

Publié à 6h30

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Or, pour y parvenir, il faudrait transformer notre économie et prendre des décisions difficiles, selon un rapport de la firme de consultants McKinsey, commandé par le ministère de l’Économie et de l’Innovation.

Le volet principal de l’étude, que j’ai obtenue, fait des constats parfois douloureux sur notre modèle économique. Et en résumé, McKinsey juge qu’il faudrait lancer plusieurs chantiers pour rattraper l’Ontario : boom des exportations, dopage des investissements, hausse des heures de travail des employés, réforme de l’aide à la recherche, augmentation du nombre de diplômés universitaires, ciblage des secteurs d’avenir et redressement des industries en retard, comme la construction et l’agroalimentaire.

Pour orchestrer le rattrapage, McKinsey suggère de créer un « bureau de transformation » économique, formé de membres du bureau du premier ministre, du ministère de l’Économie et d’autres ministères concernés. Un suivi serré de la progression devrait être fait chaque trimestre par le comité au moyen d’une quarantaine d’indicateurs clés comparant le Québec à l’Ontario, notamment.

Le rapport de 281 pages que j’ai obtenu a été remis en décembre 2021 au ministère de l’Économie. Il est fouillé, avec des exemples de gestes concrets faits dans d’autres pays, mais pas nécessairement renversants sur certains des constats de notre économie.

Pour son travail de six mois, dois-je préciser, McKinsey a reçu 4,9 millions de dollars du gouvernement. C’est l’équivalent de 20 consultants travaillant six mois à temps plein à raison de 250 $ l’heure, selon un petit calcul rapide. Hum…

Lisez l’article « Québec débourse 5 millions pour un “regard externe” »

Depuis cinq ans, le Québec a diminué son retard de niveau de vie par rapport à l’Ontario, le faisant passer de 16,4 % à 12,9 %. Pour réduire complètement l’écart, estime le rapport, le PIB du Québec doit passer de 44 000 $ par habitant en 2019 à plus de 64 000 $ en 2036.

Ce bond de 20 000 $ en une quinzaine d’années passe par une augmentation du nombre de travailleurs prévus de 630 000, notamment immigrants, ainsi que par un allongement des heures de travail des Québécois de l’équivalent de 1,5 semaine par année, entre autres.

Surtout, McKinsey calcule, comme bien d’autres études, que l’essentiel du rattrapage (78 % des 20 000 $) doit se faire par une croissance nettement plus forte de notre productivité. Le taux de croissance devrait passer d’environ 1 % par année à 1,7 %, ce qui est majeur. Ce boom serait possible avec une intensification de la recherche, mais aussi un boom des exportations et des investissements et une meilleure formation des travailleurs.

Douloureux constats

Chacun des éléments est analysé en détail, avec des stratégies visant une amélioration. Il est question, par exemple, du taux d’emploi des immigrants, des immigrants qui s’installent en région, de la part des femmes en génie, de la part des emplois à plus de 100 000 $, du taux d’absentéisme pour maladie, du capital de risque par habitant, de la recherche en proportion du PIB et du carcan réglementaire du gouvernement et des municipalités.

Les constats sont parfois durs. Dans le secteur agroalimentaire, le retard de productivité du Québec par rapport à l’Ontario est de 22 % pour la fabrication d’aliments. Toute proportion gardée, les exportations de ces aliments sont inférieures de 40 % au Québec et les investissements, inférieurs de 34 %. Le rapport donne des exemples d’initiatives porteuses en Israël (recherche), en France (marketing), aux Pays-Bas (port) et à Singapour (capital-risque).

Dans la construction, la productivité décline au Québec depuis 2012 (- 1 % par année), comme aux États-Unis (- 1,3 %), tandis qu’elle progresse en Colombie-Britannique (+ 2 % par année), en France (+ 0,7 %) ou en Allemagne (+ 0,5 %), par exemple.

Le rapport estime que le Québec réduirait notablement son retard face à l’Ontario en rehaussant sa productivité dans la construction au niveau de la Colombie-Britannique. Parmi les initiatives proposées, il est question de mieux former les travailleurs, de décloisonner les métiers réglementés, de financer l’automatisation et de rationaliser les processus d’approbation et de permis.

Autre constat douloureux : le Québec est maintenant en queue de peloton au Canada pour la création d’entreprises, et ce retard est manifeste dans les services professionnels, scientifiques et techniques. Consolation : le Québec est en avance sur l’Ontario pour les investissements dans les technologies vertes, toute proportion gardée.

Pour redresser la barre, il est proposé de faire la promotion de l’entrepreneuriat dans le système d’éducation, notamment dans les universités. À Boston, par exemple, des programmes existent pour faciliter la collaboration entre des étudiants des programmes techniques et des autres programmes (administration, etc.).

Recherche : le modèle allemand

En ce qui concerne la recherche et développement (R et D), le rapport constate que notre système de crédit d’impôt est complexe, et sert surtout les grandes entreprises. Ainsi, 3 % des entreprises québécoises absorbent à elles seules 90 % des crédits fiscaux.

Dans le système canadien, 83 % du financement de la R et D vient des crédits d’impôt plutôt que d’une aide directe, contre 38 % aux États-Unis et 9 % en Suède. Au Québec, cette proportion est de 74 %. « L’aide directe permet de cibler les champions dans des secteurs clés ainsi que les projets avec le plus fort potentiel d’apport économique », fait valoir McKinsey.

Le rapport vante le modèle allemand des Fraunhofer, qui fonctionne par contrats de recherche venant des entreprises. Le système allemand est bien mieux coordonné que celui du Québec, où la taille des organismes d’appui à la R et D est beaucoup trop petite.

Autre talon d’Achille du Québec, selon le rapport : sa rigidité pour le monde des affaires. L’indice de liberté économique, de liberté du marché du travail et de facilité à faire des affaires est parmi les plus bas parmi ses principaux concurrents. Le régime fiscal coûteux pour les entreprises et ce qui touche à notre filet social (congé de maladie, de maternité, etc.) est écorché.

Selon l’analyse de McKinsey, les pays où il est facile de faire des affaires ont une plus forte création d’entreprises. C’est le cas de pays plus sociaux auxquels on aime se comparer, comme le Danemark et la Suède, mais aussi du Royaume-Uni. La productivité s’en trouve aussi améliorée.

Le rapport traite de cinq des secteurs à privilégier, soit l’énergie, l’hydrogène, l’intelligence artificielle, les sciences de la vie et l’agriculture.

Depuis la remise du rapport, en décembre 2021, le gouvernement caquiste a modéré ses attentes face à l’hydrogène vert. Et une entreprise pharmaceutique a choisi de s’implanter à Montréal pour la fabrication de ses vaccins, soit Moderna, ce qui va dans le sens des objectifs évoqués pour les sciences de la vie.

Dans la foulée du rapport, le gouvernement caquiste n’a pas créé un « bureau de transformation » comme le suggère McKinsey, selon mes renseignements.

Néanmoins, le gouvernement aurait ajusté ses indicateurs phares qui feraient désormais l’objet d’un suivi lors de rencontres, tous les deux mois, de hauts fonctionnaires du bureau du premier ministre, du ministère de l’Économie et du ministère des Finances, m’apprend-on.

Ce que j’en pense ? Que le Québec a fort à faire pour doper sa productivité, tel que proposé, et ainsi rattraper l’Ontario. Sur 15 ans, ce sera pratiquement mission impossible, surtout dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre, de vieillissement de la population et de politique d’immigration bancale. Mais bon, toute avancée qui permettrait de réduire l’écart est bienvenue…

Revenu médian des particuliers Surprise, le Québec dépasse l’Ontario

PHOTO BRENT LEWIN, ARCHIVES BLOOMBERG

L’avancée spectaculaire des femmes au Québec, notamment grâce au programme de garderies, est l’une des raisons qui expliquent le rattrapage du revenu total moyen des 25-54 ans du Québec, comparé à l’Ontario.

Francis Vailles

Francis Vailles La Presse

Et si je vous disais que le Québécois type gagne maintenant davantage que son voisin ontarien, me croiriez-vous ? Que le rattrapage souhaité par François Legault est déjà fait, à certains égards ? Sceptique ?

Publié à 6h30

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C’est pourtant vrai : le revenu total médian des Québécois excède maintenant celui des Ontariens. Après des années de lente progression, ce revenu médian des particuliers a dépassé celui de nos voisins en 2019 chez les 25-54 ans, ce groupe qui constitue le repère de bien des comparaisons.

Il faut lever notre chapeau aux femmes du Québec, en particulier, qui sont responsables d’une bonne part de ce rattrapage, selon les données de Statistique Canada, basées sur les déclarations de revenus au fédéral. L’année 2020 est la plus récente disponible⁠1.

En 2020, donc, le revenu médian des 25-54 ans a atteint 51 560 $ au Québec, ce qui est près de 3 % de plus que celui des Ontariens. L’écart n’est pas grand, mais il faut savoir qu’il y a 10 ans, ce sont les Ontariens qui faisaient 6 % de plus. Le revenu médian est le point milieu de la distribution des revenus. Il sépare en deux parts égales ceux qui font moins de revenus et ceux qui en font plus.

Sous l’angle du revenu médian, les Québécois de toutes les tranches d’âge dépassent les Ontariens et les Britanno-Colombiens, sauf chez les 45 ans et plus et encore davantage chez les 55 ans et plus, où le retard du Québec était de 10 % sur l’Ontario et de près de 7 % sur la Colombie-Britannique en 2020.

Parmi les grandes provinces, l’Alberta continue de dominer : le revenu des 25-54 ans était de 53 750 $ en 2020, soit 4,2 % de plus qu’au Québec. L’avantage albertain était cependant de 26 % il y a 10 ans.

L’écart qui persiste chez les 55 ans et plus s’explique par la proportion plus faible des Québécois de cet âge qui travaillent ou, dit autrement, par les retraites hâtives⁠2. Ce n’est pas pour rien qu’à peu près tous les partis ont prévu des mesures pour inciter les travailleurs expérimentés à rester sur le marché du travail.

Le retard pour ces cohortes fait en sorte que pour l’ensemble de la population (les 15 ans et plus), le Québec maintient un léger retard de 1 % pour le revenu médian (40 320 $ au Québec) face à l’Ontario. Ce retard était de 7 % en 2009.

Fini le complexe d’infériorité

Cette comparaison de François Legault avec l’Ontario — la province économiquement la plus semblable –, plusieurs économistes québécois la font depuis très longtemps. À chaque décennie depuis 1960, il en est question dans les budgets du Québec, à divers degrés, ai-je constaté en consultant les archives⁠3.

Pour une raison bien simple, de nos jours : rattraper l’Ontario signifierait que le Québec a inversé le lent déclin économique qui a eu cours depuis les années 1950, que les Québécois ne seraient plus parmi les « pauvres » du Canada, que nous pourrions enfin nous débarrasser de ce complexe d’infériorité de Canadiens français nés pour un petit pain, qui a marqué la génération X, les baby-boomers et les plus vieux, notamment.

Pour se comparer, François Legault, comme bien des économistes, préfère utiliser le produit intérieur brut (PIB) par habitant, qui est le reflet non seulement des revenus des particuliers, mais aussi de toutes les composantes de l’activité économique.

En 2022, le PIB par habitant du Québec est 13,6 % plus bas que celui de l’Ontario, mais il faut savoir que cet écart était de 16,4 % en 2018, est-il indiqué au dernier budget du Québec, et souvent répété par Francois Legault pendant la campagne électorale.

Peu importe l’angle, le rattrapage des Québécois sur les autres provinces canadiennes est manifeste.

Il a débuté il y a plusieurs années, avant l’arrivée de la CAQ au pouvoir.

Merci aux femmes !

Le revenu médian ne dit pas tout. Quand on utilise plutôt le revenu moyen, les Québécois continuent d’avoir un certain retard, mais il est en décroissance constante depuis 2009. Ce signal différent entre le revenu médian et moyen s’explique par le fait que les inégalités de revenus sont plus grandes en Ontario qu’au Québec, entre autres.

Plus précisément, le revenu total moyen des 25-54 ans a été de 61 070 $ en 2020, soit 5 % de moins que les 64 420 $ de l’Ontario. L’écart était de 12 % il y a 10 ans.

L’avancée spectaculaire des femmes au Québec, notamment grâce au programme de garderies, est l’une des raisons qui expliquent le rattrapage.

Ainsi, le revenu moyen des Québécoises de 25-54 ans en 2020 (54 490 $) a non seulement rejoint celui des Ontariennes, mais il dépasse maintenant de 1 % celui des Albertaines et de 6 % celui des Britannico-Colombiennes.

De leur côté, les hommes du Québec, dans la même tranche d’âge, ont un revenu moyen de 10 % sous celui de l’Ontario, mais cet écart était de 15 % il y a 10 ans.

La progression des femmes du Québec de 25-54 ans peut être vue sous un autre angle. Aujourd’hui, elles gagnent 83 % du revenu des hommes, contre 74 % en 2009. Ce rapport n’était que de 75 % en Ontario en 2020 et de 67 % en Alberta. Dit autrement, les femmes du Québec ont encore un écart à combler, mais les autres grandes provinces sont en retard d’au moins 10 ans sur le Québec à ce chapitre⁠4.

Qu’est-ce qui explique le rattrapage du Québec ? Plusieurs facteurs. En plus de l’avancée des femmes, il y a le dynamisme de nos entrepreneurs, comme l’atteinte de l’équilibre budgétaire, au milieu des années 2010, qui a assaini notre économie.

Difficile de nier que la fin du débat sur l’indépendance ait pu avoir un effet, tant sur l’attrait des investissements et du personnel étrangers que sur le changement d’intérêts des forces vives du Québec. L’effet de la pénurie de main-d’œuvre plus grand au Québec a pu jouer, quoique son impact sur les salaires est somme toute assez récent.

Mais il y a aussi le recul de nos « concurrents » que sont l’Ontario et l’Alberta, qui ont durement subi les crises financière et pétrolière de 2008 et de 2014, respectivement. Soyons avertis : leur retour en force pourrait rendre la tâche plus difficile au Québec au cours des prochaines années.

  1. Les transferts gouvernementaux durant l’année pandémique ont fait grimper le revenu médian et moyen de 2020 par rapport à 2019, mais les écarts avec les autres provinces sont restés semblables, selon les données de Statistique Canada.

  2. Au Québec, le taux d’emploi des 55 ans et plus est de 32 %, contre 35 % en Ontario et 38 % en Alberta. En comparaison, le taux d’emploi des 25-54 ans est de 86,5 % au Québec, un sommet au Canada.

3. Consultez les archives des budgets du Québec

  1. Ce rapport du revenu femme/homme ne tient pas compte de la nature de l’emploi (santé, sciences, tourisme, etc.) ni du nombre d’heures travaillées. Si on en tenait compte, l’écart serait réduit, mais sans être comblé.
    Revenu médian des particuliers | Surprise, le Québec dépasse l’Ontario | La Presse
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Avant de parler de prochaines baisses d’impôt

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

« Une majorité de Québécois est favorable à payer plus de taxes à la consommation si on baisse les impôts sur le revenu dans la même proportion », souligne notre éditorialiste.

Philippe Mercure

Philippe Mercure La Presse

François Legault reconduit au pouvoir, il mettra en branle l’une de ses principales promesses : réduire les impôts des particuliers dès l’an prochain.

Publié à 5h00

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Coût de la mesure : 2 milliards de dollars par année. Les versements au Fonds des générations en seront réduits d’autant. Nous avons déjà qualifié ces baisses d’impôt d’« irresponsables ».

Lisez notre éditorial à ce sujet

Bien sûr, François Legault serait mal avisé de trahir sa promesse de baisser les impôts. Ce n’est pas ce que nous lui demandons.

Mais il est plus que temps de remettre le sujet d’une véritable réforme fiscale à l’ordre du jour. C’est d’autant plus important que la CAQ a déjà promis des baisses d’impôt supplémentaires si elle est réélue en 2026.

Si l’idée lui venait de devancer cette promesse lors de son mandat actuel, il serait bien d’avoir quelques éléments de réflexion en tête.

Ça tombe bien : une étude publiée vendredi par la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke vient apporter de l’eau au moulin.

On y trouve un constat particulièrement intéressant : une majorité de Québécois est favorable à payer plus de taxes à la consommation si on baisse les impôts sur le revenu dans la même proportion. Il se trouve que les experts proposent cette avenue depuis longtemps. Et le contexte y sera particulièrement favorable au cours des prochaines années.

Consultez l’étude de la Chaire en fiscalité et en finances publiques

Pourquoi hausser la taxe de vente du Québec (TVQ) et baisser les impôts d’autant ? Ça peut avoir l’air de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Mais ce recalibrage comporte plusieurs avantages qu’on pourrait résumer simplement : moins décourager le travail et pénaliser un peu plus la consommation.

Ça n’a sans doute jamais été autant d’actualité.

Si vous croyez que la pénurie de main-d’œuvre fait mal actuellement, attachez vos tuques. Le vieillissement de la population s’accentuera jusqu’en 2030, faisant chuter la proportion de la population active. Il faudra trouver toutes sortes de façons d’inciter les gens à travailler. Moins imposer les revenus en fait partie.

En parallèle, nous affrontons une crise écologique largement alimentée par nos modes de vie axés sur la consommation. Les coûts environnementaux et même sociaux du t-shirt fabriqué au Bangladesh et vendu à 6,99 $ chez H&M sont très mal reflétés dans son prix. Hausser légèrement la TVQ permettrait de capter une partie de ces coûts indirects. Les Européens parlent beaucoup de « sobriété » pour lutter contre la crise climatique. Il faudra y venir nous aussi.

Vous voulez d’autres arguments ? Les économistes affirment que les taxes à la consommation sont moins dommageables à la croissance économique que les impôts sur le revenu.

Elles permettent aussi moins d’évasion fiscale. C’est pour ça que la Commission d’examen sur la fiscalité québécoise recommandait en 2015 une hausse de la TVQ couplée à une baisse des impôts sur le revenu.

Attention : personne ne suggère de baisser brutalement les impôts de 10 % et de hausser la TVQ du même pourcentage. L’idée n’est pas de pousser les Québécois à aller magasiner à Plattsburgh, où les taxes à la consommation ne sont que de 8 %.

On parle d’un léger et graduel rééquilibrage afin que la fiscalité du Québec se rapproche de celles des pays comparables. Le Québec fait partie des États qui comptent le plus sur l’impôt sur le revenu des particuliers pour financer leurs services publics (35 % des recettes fiscales, contre 25 % dans la moyenne des pays de l’OCDE).

Les taxes à la consommation, au contraire, représentent une faible proportion des recettes fiscales (24 % ici, contre 32 % pour la moyenne de l’OCDE).

Bien sûr, il faudrait aider les moins nantis à affronter une TVQ plus gourmande. Mais le crédit à la solidarité existe déjà pour ça. On n’aurait qu’à le rehausser. Ceux qui s’inquiètent des injustices sociales doivent garder en tête que les riches consomment beaucoup plus que les pauvres et paieraient donc plus de taxes. C’est sans compter qu’une taxe donne plus de flexibilité au contribuable. S’il est difficile d’éviter l’impôt sur le revenu, il est possible de contourner les taxes en consommant moins, en épargnant ou en remboursant plus rapidement son hypothèque, par exemple.

Les fiscalistes le proposent. La population est prête. À quand un réajustement de notre assiette fiscale ?

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La CAQ, la soupe et le dessert

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre des Finances, Eric Girard, déposera le prochain budget du Québec le 21 mars.


Stéphanie Grammond
Stéphanie Grammond La Presse

Les affiches de la CAQ pour l’élection partielle dans Saint-Henri–Sainte-Anne laissent très peu de doute sur les intentions du gouvernement. On y voit François Legault, tout sourire, au-dessus du slogan : « Des baisses d’impôt dès 2023. »

Publié à 5h00

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Mais le slogan de la Coalition avenir Québec (CAQ) pourrait aussi bien être : Au diable la dépense !

L’an dernier, la CAQ a offert trois séries de chèques d’une valeur totale de 7,5 milliards et présenté plusieurs autres mesures pour lutter contre l’inflation. Le soutien offert au Québec pour le coût de la vie a atteint 1,8 % du PIB, plus de trois fois celui offert dans les autres provinces, détaille le Bilan de la fiscalité au Québec 1.

Dans son prochain budget le 21 mars, on aimerait donc que le ministre des Finances, Eric Girard, fasse preuve de retenue et mette en veilleuse sa promesse de baisser les impôts des particuliers, un engagement qui coûterait 1,7 milliard par année.

Bien sûr, on voudrait tous payer moins d’impôt. Après tout, le poids de la fiscalité est très lourd au Québec. Plus lourd qu’il ne l’a jamais été depuis 2000. Plus lourd que n’importe où ailleurs en Amérique du Nord.

Mais on ne peut pas réduire les impôts de manière permanente alors que le budget du Québec reste dans le rouge. Et on ne peut pas financer cette baisse avec une réduction des versements au Fonds des générations, comme l’envisage la CAQ.

Des baisses d’impôt sur la carte de crédit, non merci ! C’est irresponsable. Et inéquitable envers les jeunes.

Commençons par faire le ménage de nos finances publiques, par réparer nos infrastructures qui tombent en ruine, par livrer des services publics à la hauteur des attentes des Québécois… et on verra après pour l’allégement fiscal.

La soupe avant le dessert !

Depuis son arrivée au pouvoir, la CAQ a eu le vent dans le dos, grâce à la vigueur de l’économie et à l’inflation qui ont garni ses coffres au-delà des attentes. Mais la CAQ a dépensé allégrement cette manne.

De 2018-2019 à 2021-2022, les dépenses de programmes par habitant ont gonflé de 27 % au Québec, indique l’avis prébudgétaire de l’Association des économistes québécois2.

C’est plus que le double de la hausse des dépenses en Ontario (11 %) avec lequel le gouvernement Legault aime tant se comparer. Et c’est largement supérieur à croissance moyenne des provinces (17 %).

Quand on regarde 30 ans en arrière, on réalise que le Québec n’a jamais été aussi dépensier, par rapport aux autres provinces.

Aujourd’hui, nos dépenses par habitant sont 13 % au-dessus de la moyenne des provinces, alors qu’elles étaient autour de 4 % au-dessus de la moyenne les années avant que la CAQ prenne le gouvernail.

Bref, la CAQ a beaucoup étiré l’élastique des dépenses publiques, ce qui est pour le moins étonnant de la part d’un gouvernement dirigé par des comptables qui se targue d’être le parti de l’économie.

Pendant ce temps, le Québec reste l’une des provinces les plus endettées, malgré les efforts qui ont permis de réduire notre dette de façon marquée, il faut le souligner.

Si on poursuit sur ce bel élan, la dette nette du Québec qui représente actuellement 38,1 % du PIB pourrait revenir assez facilement vers la moyenne canadienne de 31,3 %

Or, des simulations du Conference Board indiquent que les baisses d’impôt envisagées par la CAQ augmenteraient le ratio d’endettement du Québec de façon marquée et mettraient en péril le rattrapage de la moyenne canadienne, comme le souligne le mémoire prébudgétaire de l’Institut du Québec3.

Est-ce vraiment ce qu’on veut léguer aux générations qui nous suivent ? Non ! Surtout que notre ratio d’endettement officiel ne dit pas tout.

À la grandeur de la province, le déficit d’entretien de nos infrastructures s’élève à 30 milliards, un montant qui a doublé depuis sept ans.

Ce ne sont pas seulement nos routes qui ont besoin d’amour. Pensez seulement aux écoles, dont 60 % sont dans un état lamentable, selon le dernier Plan québécois des infrastructures.

Il s’agit d’une dette cachée qui est refilée aux générations futures.

Ici, deux observations s’imposent.

D’abord, il faut mettre la pédale au fond sur l’entretien des infrastructures existantes, avant de lancer de nouveaux projets, même si cette dernière option est plus payante politiquement.

Ensuite, il faut intégrer le déficit d’entretien de nos infrastructures dans notre objectif global de réduction de la dette.

Ça tombe bien : nous sommes mûrs pour une modernisation de la Loi sur l’équilibre budgétaire et de la Loi sur la réduction de la dette et instituant le Fonds des générations.

Alors donnons-nous une cible de retour rapide à l’équilibre budgétaire.

Fixons-nous un nouvel objectif de réduction de la dette en incluant le déficit d’infrastructure.

Et établissons de nouveaux paramètres pour le Fonds des générations qui pourrait éventuellement servir à la lutte contre les changements climatiques ou d’autres utilisations qui prendraient en considération l’équité intergénérationnelle, l’objectif même de la création de ce fonds.

Mais certainement pas à financer des baisses d’impôt.

1. Consultez le Bilan de la fiscalité au Québec de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques

2. Consultez l’avis prébudgétaire de l’Association des économistes québécois

3. Consultez le mémoire prébudgétaire de l’Institut du Québec

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Vers le budget du Québec Non aux baisses d’impôt !

PHOTO PATRICE LAROCHE, ARCHIVES LE SOLEIL

Des baisses d’impôt ont été promises par le premier ministre François Legault, ici accompagné par le ministre des Finances Eric Girard, lors de la dernière campagne électorale.

De nombreuses voix s’élèvent pour convaincre Québec de ne pas aller de l’avant avec son projet de réduire les impôts

Publié à 5h00

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Hélène Baril
Hélène Baril La Presse

Le budget du Québec qui sera déposé le 21 mars devrait contenir les baisses d’impôt promises par le gouvernement Legault en campagne électorale. Dans les consultations qu’il mène chaque année avant de préparer son budget, le ministre des Finances du Québec a entendu un nombre étonnant de voix qui réclament de ne pas réduire les impôts des Québécois cette année.

Même le Conseil du patronat du Québec (CPQ) ne parle pas de réduction du fardeau fiscal des Québécois cette année dans son mémoire au ministre des Finances. Il trouve même que ce n’est pas une bonne idée.

« C’est vrai que c’est étonnant », convient en riant Norma Kozhaya, vice-présidente à la recherche et économiste en chef de l’organisation patronale.

Le CPQ n’est pas contre les baisses d’impôt, on s’en doute. « C’est tout le contexte qui fait que ce n’est pas la meilleure idée actuellement », dit l’économiste.

« Si on était à l’équilibre budgétaire et si on avait des surplus, on pourrait penser à les allouer à des baisses d’impôt, mais ce n’est pas le cas. »

Le gouvernement a prévu de financer ses baisses d’impôt à venir dont le coût est estimé à environ 2 milliards par année en puisant dans le Fonds des générations.

Le CPQ est d’avis que financer des baisses d’impôt à même un fonds mis sur pied pour assurer l’équité générationnelle n’est pas non plus une bonne idée, une opinion maintes fois exprimée dans les consultations prébudgétaires.

L’Institut du Québec est un autre organisme qui émet des réserves sur l’intention du gouvernement de se servir du Fonds des générations pour financer des baisses d’impôt. En plus d’augmenter l’hypothèque des prochaines générations, elle compromet l’objectif de ramener la dette du Québec à un niveau comparable à celui des autres provinces canadiennes, fait valoir l’équipe de l’Institut du Québec sous la direction de Luc Belzile.

Mais l’inflation ?

Une réduction du fardeau fiscal des Québécois, le plus lourd au Canada, pourrait être justifiée par l’inflation et la hausse du coût de la vie qui coupe les ailes des contribuables. Or, le gouvernement québécois a déjà fait beaucoup pour réduire l’impact de l’inflation sur les familles québécoises. En 2022, de nombreuses mesures de soutien ont été ajoutées au filet social québécois, dont deux versements en argent comptant, l’un de 500 $ et l’autre variant entre 400 $ et 600 $. Au total, cette aide destinée à aider les Québécois à faire face à l’inflation a coûté 7,5 milliards et elle est la plus généreuse de toutes les provinces canadiennes, selon la Chaire en fiscalité de l’Université de Sherbrooke.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre des Finances Eric Girard

De l’huile sur le feu

L’économie ralentit et les risques de récession augmentent, mais la situation financière des Québécois reste enviable, même le ministre des Finances le reconnaît. Le taux d’épargne est plus élevé au Québec qu’ailleurs au Canada, ce qui place les Québécois en meilleure position pour traverser le ralentissement économique, soulignait le ministre Eric Girard dans sa mise à jour économique de décembre.

Pour l’Association des économistes du Québec, réduire les impôts revient à mettre de l’huile sur le feu.

L’économie est en surchauffe, le taux de chômage est à un niveau historiquement bas et le nombre de postes vacants n’a jamais été aussi élevé. Et on ajouterait encore plus d’argent ?

Louis Lévesque, président du Comité des politiques publiques de l’Association des économistes du Québec

Comme le Conseil du patronat, les économistes québécois sont d’avis que baisser les impôts des Québécois est souhaitable, mais pas maintenant. Ce n’est pas le bon temps pour stimuler la demande, selon Louis Lévesque.

« Le plus gros problème de l’économie québécoise, ce n’est pas la demande, c’est la pénurie de main-d’œuvre. Si on veut baisser les impôts, il faudrait cibler ce problème avec des mesures qui ont un impact sur les revenus de travail, comme une augmentation des déductions pour les travailleurs », dit-il.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, ARCHIVES LA PRESSE

Les dépenses en santé, qui représentent actuellement 50 % de toutes les dépenses de l’État, devraient être augmentées d’un milliard supplémentaire pour faire de la prévention, selon l’Association pour la santé publique du Québec.

Des besoins plus criants

Plutôt que de réduire les impôts, le gouvernement serait mieux avisé de consacrer cet argent à la santé et aux hôpitaux, dont les besoins sont criants, aux écoles en ruine ou aux routes défoncées. C’est ce que réclament bon nombre de groupes qui constatent la détérioration généralisée des services publics.

L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, qui regroupe 65 000 employés du réseau de la santé, veut que le gouvernement cesse complètement ses versements au Fonds des générations et redirige cet argent dans le réseau de la santé et des services sociaux.

Les dépenses en santé, qui représentent actuellement 50 % de toutes les dépenses de l’État, devraient être augmentées d’un milliard supplémentaire pour faire de la prévention, selon l’Association pour la santé publique du Québec, un regroupement autonome de citoyens et d’organisations préoccupés par le retard du Québec en matière de prévention des maladies.

Ne pas réduire les impôts pour pouvoir dépenser plus est une fausse bonne idée, selon l’économiste Louis Lévesque.

D’abord, explique-t-il, que l’argent vienne des poches des consommateurs ou du Trésor public, les dépenses supplémentaires contribuent à alimenter l’inflation.

Ensuite, les dépenses publiques ont augmenté énormément au cours des dernières années et on se retrouve à payer plus cher pour avoir moins de services. « On dépense plus et les résultats ne sont pas à la hauteur. Il y a des enjeux d’organisation et de productivité à régler », constate-t-il.

Selon lui, l’élimination du déficit devrait être la priorité pour un gouvernement qui vient d’être réélu pour un nouveau mandat, dont la situation financière est confortable et alors que l’économie surchauffe. « C’est l’occasion de se tourner vers l’avenir. C’est le bon timing. »

Un but atteint ?

Même si elle ne fait pas l’unanimité, la perspective d’une réduction des impôts a de quoi en réjouir plusieurs, dont la Fédération canadienne des contribuables qui espère que son discours soit enfin entendu dans le prochain budget.

Des baisses d’impôt sont nécessaires pour donner une marge de manœuvre aux contribuables face au ralentissement de l’économie, plaide le regroupement dans son mémoire au ministre des Finances.

En réduisant le fardeau fiscal des particuliers et des entreprises, le gouvernement du Québec peut accomplir ses deux objectifs : protéger le pouvoir d’achat des Québécois et soutenir la croissance de l’économie québécoise.

La Fédération canadienne des contribuables

Une pétition a été mise en ligne sur le site de l’organisation afin de presser le gouvernement Legault de respecter ses engagements électoraux et de baisser les impôts.

« Notre pétition a pour le moment reçu l’appui de 9000 signataires et nous comptons mener une campagne jusqu’à la veille du budget pour que tous les Québécois en faveur d’une baisse d’impôt soient entendus », a fait savoir Nicolas Gagnon, directeur Québec de la Fédération canadienne des contribuables.

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En complément, Québec dit que le Québec ne peut pas augmenter le fardeau fiscal des Québécois, et suggère donc aux villes… D’augmenter le fardeau fiscal des Québécois:

« Il n’y a pas juste la taxe foncière pour les municipalités. Les municipalités ont droit de diversifier leurs revenus. Maintenant, plusieurs municipalités n’utilisent pas ce droit de diversification. Donc, c’est à elles aussi de bien gérer leur municipalité », a-t-elle lancé lors d’une mêlée de presse.

Les villes ne sont pas contentes:

La fin de non-recevoir du gouvernement Legault a été mal reçue au Centre des sciences de Montréal, où quelque 200 élus et acteurs du monde municipal sont réunis pour discuter de leurs demandes.

La mairesse de Gatineau se fâche devant l’inaction devant l’itinérance, avec tout un exemple (encore à confirmer):

Et Québec rétorque que ce n’est pas gentil de se fâcher:

Bref, je sens qu’il y a une certaine impasse entres les villes et le gouvernement. Ça fait quelques années qu’il y a des frictions, mais j’ai l’impression que ça ne prend pas du mieux avec le temps.

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Honnêtement, je comprends le point de vue de la mairesse de Gatineau. Les municipalités reçoivent le gros du blâme de la part des citoyens sur les enjeux comme l’itinérance, mais dans les faits leurs pouvoirs sont limités pour les actions qui ont vraiment un impact, à commencer par le logement.

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Il y a un chroniqueur à la radio qui donnait comme exemple dans la liste des responsabilités que les municipalités ont maintenant dans plus de budget : l’intégration des personnes immigrantes dans leur société d’accueil. Les personnes ne s’installent pas au Canada ou au Québec, mais dans un quartier.

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La mairesse était en entrevue avec Gérald a Zone économie

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Les employés municipaux sont les fonctionnaires les mieux payés plus que le federal et le provincial.

La semaine de 4 jours ca fait tres longtemps que c’est établi a Montreal.

Beaucoup trop de conseiller municipaux.

Ya du gras a coupé.

Ah oui? Source? Je ne savais pas ça.