La guerre commerciale sans merci que les États-Unis ont déclarée au monde entier pourrait lui porter un coup fatal, commence-t-on maintenant à entendre. Quand la première économie mondiale décide de se barricader dans son territoire, ça change certes la donne. Mais ça ne signifie pas pour autant que les échanges commerciaux qui ont enrichi le monde depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale vont cesser.
Il y a les États-Unis, et il y a le reste du monde, toujours prêt à faire du commerce au bénéfice mutuel des autres nations, rappelait la semaine dernière l’économiste Pierre Fortin dans un texte publié dans le magazine L’actualité.
L’économie américaine ne représente plus que 15 % de l’économie mondiale, soulignait-il, et cette proportion est en décroissance constante depuis 25 ans.
L’Union européenne, dont le produit intérieur brut des pays membres représente 18 % de l’économie mondiale, pèse déjà plus lourd que les États-Unis. La Chine compte pour 19 % du PIB mondial et les 15 pays de l’Asie de l’Est et de l’Asie du Sud, dont les économies sont en forte croissance, représentent 23 % du PIB mondial.
Ensemble, ces pays ont un déjà poids économique quatre fois plus important que celui des États-Unis. Ça fait beaucoup de gens qui ont encore intérêt à commercer entre eux.
Et qui vont continuer à le faire, estime le professeur de l’Université Laval Jean-Michel Marcoux, spécialiste du commerce international et du droit international économique.
Lui aussi est d’avis que le commerce international peut survivre sans les États-Unis. Il va se réorganiser autour de nouveaux axes, prévoit-il. Le Canada et l’Europe vont resserrer leurs liens commerciaux, de même que la Chine avec le Japon et la Corée du Sud.
Commercer selon les règles
Le Canada a des ententes de libre-échange avec 50 pays, dont l’Accord de partenariat transpacifique global, avec 10 pays, dont le Mexique, qui pourrait être un trait d’union entre les deux blocs.
Contrairement aux États-Unis, tous ces pays semblent prêts à jouer selon les règles qui encadrent le commerce international.
Ils continuent d’ailleurs à le faire, rappelle le professeur, qui souligne que la Chine a déposé officiellement une plainte à l’Organisation mondiale du commerce sur les droits de douane dits réciproques imposés par l’administration américaine, tout comme l’ont fait le Canada et l’Union européenne sur d’autres enjeux litigieux.
Le mécanisme de règlement des différends de l’OMC est paralysé depuis 2019 par les États-Unis qui lui reprochent d’être trop utilisé inutilement et trop souvent.
Mais l’OMC n’est pas morte. Elle continue de régler les litiges qui lui sont soumis et pourra continuer à le faire pour les pays qui croient toujours que des règles claires sont préférables au Far West en matière de commerce international.
La fin de la mondialisation a été annoncée tellement de fois qu’on peut la croire déjà morte. Ce n’est pas le cas. Les échanges commerciaux entre les pays continuent et ils devraient continuer, avec ou sans les États-Unis, parce qu’ils créent de la richesse et que les vendeurs et les acheteurs y trouvent leur intérêt.