Consommation

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RÉCO Un nouveau centre de réemploi des matériaux remplace Éco-Réno

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Après avoir quitté son petit local pour s’installer dans un espace de 10 000 pi⁠2, Éco-Réno devient RÉCO, un centre de rénovation axé sur le réemploi des matériaux.

Mis à jour à 12h00

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Valérie Simard
Valérie Simard La Presse

Fondé en 2002 par la Société de développement environnemental de Rosemont (SODER), le magasin Éco-Réno était bien connu des rénovateurs passionnés du patrimoine. Fragilisée par la pandémie, l’entreprise d’économie sociale, qui avait pignon sur l’avenue Papineau, a été acquise par Architecture sans frontières Québec en 2021. Cette transaction permet à l’organisme sans but lucratif, deux ans plus tard, de concrétiser sa vision : créer une entreprise d’économie sociale centrée sur un centre de matériaux, à l’image des quincailleries existantes, à la différence que l’approvisionnement provient de dons qui sont revendus pour financer le projet.

« C’est une transformation profonde du modèle d’affaires avec un approvisionnement en dons uniquement et en s’ouvrant aux dons de matériaux jetés neufs », a précisé le directeur général d’Architecture sans frontières Québec, Bruno Demers, lundi dernier lors de l’inauguration officielle, dans Ahuntsic-Cartierville, du nouveau centre de matériaux qui porte désormais le nom de RÉCO.

« Éco-Réno devient autre chose, quelque chose de plus grand et de qualitativement différent. Il faut s’affranchir de la perception que la clientèle a d’Éco-Réno, soit un petit magasin, principalement d’antiquités architecturales », a expliqué Bruno Demers.

Moulures, planchers de bois, lavabos, luminaires, robinetterie, briques, fenêtres et portes : en déménageant dans ce nouveau local, le magasin a pu augmenter considérablement son offre de matériaux patrimoniaux, mais aussi l’élargir aux articles usagés de toutes sortes et même aux produits neufs qui auraient été destinés à l’enfouissement.

Comme ces luminaires encastrés, modèle 2022, invendus par le fabricant. « Si on ne les avait pas repris, ce sont 11 000 unités qui auraient été mises à la poubelle », a souligné le directeur ventes et opérations de RÉCO, Sylvain Lessard, lors d’une visite guidée du nouvel espace. Dans un coin reposent un lot de fenêtres de différentes couleurs et dimensions, neuves pour la plupart : des erreurs de commande provenant d’un manufacturier.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Bruno Demers, directeur général d’Architecture sans frontières Québec, et Sylvain Lessard, directeur ventes et opérations de RÉCO

Des reçus de charité pour les dons de matériaux

En faisant un don à RÉCO, les entreprises et les particuliers qui le désirent peuvent obtenir un reçu de charité déductible d’impôts pour la valeur de leurs dons de matériaux (500 $ et plus), une manière de compenser en partie les frais supplémentaires qui peuvent être occasionnés par la déconstruction et la manutention. Il n’existe pour le moment aucune autre incitation financière ou obligation concernant le réemploi des matériaux dans le secteur de la construction. Dans son plan de transition Bâtir un Québec plus vert, publié en septembre 2022, la FTQ-Construction recommandait notamment la mise en place d’incitations financières pour encourager l’utilisation de matériaux recyclés et l’adoption d’une mesure fiscale sur la quantité de déchets produits durant le chantier de construction et envoyés au lieu d’enfouissement.

« En ce moment, il n’y a pas de subventions pour l’évitement de déchets de la construction comme il y en a pour la rénovation écoénergétique, par exemple », déplore Bruno Demers.

Actuellement, ce qui guide l’achat de matériaux usagés, c’est le critère environnemental, en plus du critère design, originalité, historique et patrimoine.

Bruno Demers, directeur général d’Architecture sans frontières Québec

Afin d’être en mesure d’accepter davantage de dons, l’entreprise devra relever le défi d’élargir sa clientèle. « Ce qui est le plus difficile actuellement, c’est de convaincre la clientèle de faire du réemploi, dit Sylvain Lessard. C’est une façon différente de consommer. Les gens viennent chercher une porte qui doit avoir une dimension spécifique. Le réemploi, ce n’est pas ça. Ça prend un peu de jus de bras. On fait beaucoup plus d’éducation que de vente. »

Dans certains cas, le client doit accepter de se priver d’une garantie sur le produit. Or, fait valoir M. Lessard, puisque le prix payé est moindre et que les ventes sont sans taxes, plusieurs sont prêts à l’accepter.

Un modèle pour d’autres quincailleries ?

RÉCO devient le premier membre de l’Association québécoise de la quincaillerie et des matériaux de construction (AQMAT) à faire une place au réemploi. Son président, Richard Darveau, espère que l’entreprise inspirera ses membres qui évoluent dans une industrie « conservatrice et gaspilleuse ». « Dans le vêtement et l’épicerie, on s’ouvre à l’économie circulaire, mais dans le secteur des matériaux, on n’est pas en queue de peloton, on n’est même pas sur le terrain de jeu, a-t-il déclaré. On attend encore de se faire pousser. » M. Darveau dit souhaiter voir RÉCO s’implanter dans différentes municipalités du Québec ou voir des quincailleries traditionnelles consacrer une partie de leur espace à la récupération et à la revente de matériaux usagés.

« Une fois qu’on aura rodé notre modèle, on va avoir de l’intérêt pour ouvrir ailleurs, peut-être dans d’autres arrondissements, d’autres villes », a affirmé Sylvain Lessard.

Dans notre vision, presque toutes les villes de moyenne importance pourraient avoir un centre de réemploi pour soutenir la transition écologique. L’offre et la demande sont là.

Sylvain Lessard, directeur ventes et opérations de RÉCO

RÉCO dispose d’un inventaire numérique de ses stocks, qui sera rendu disponible prochainement sur son site web.

Présent à la conférence de presse, le ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada, Steven Guilbeault, lui-même client d’Éco-Réno, a exprimé le souhait de voir ce type de projet fleurir partout au pays. « Le secteur de la construction est le plus grand consommateur de matières premières au monde. Il génère à lui seul un tiers des déchets solides au Canada, soit plus de 4 millions de tonnes par an. Les projections démontrent que la quantité de ces déchets devrait continuer d’augmenter si nous ne mettons pas en place rapidement davantage d’initiatives d’économie circulaire comme celle-ci. »

Consultez le site de RÉCO

En savoir plus

  • 118 kg
    Équivalent du poids par habitant des résidus provenant du secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition (CRD) envoyés directement à l’élimination en 2021 au Québec

Source : Recyc-Québec

21 %
Hausse de la quantité de résidus provenant du secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition envoyés directement au dépotoir ou à l’incinérateur en 2021 par rapport à 2018

Source : Recyc-Québec

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Consommation Les mentions « vente finale » se multiplient en ligne

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Acheter un vêtement en ligne en vente ferme demeure risqué, car s’il ne vous va pas ou ne vous plaît pas, vous ne serez pas remboursé.

À la recherche de sensations fortes ? Achetez un produit cher en ligne accompagné de la mention « vente finale ». Parce que si le manteau d’hiver ou les bottes ne vous vont pas, il n’y a, en général, aucun recours possible. Conseils.

Publié à 1h23 Mis à jour à 6h00

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Isabelle Dubé
Isabelle Dubé La Presse

Des manteaux d’hiver vendus en ligne avec la mention « vente finale » à 400 $, 500 $, voire 1000 $, c’est courant en ce Vendredi fou. Pas besoin d’aller jusqu’en Chine pour en trouver. Ils sont vendus ici au Québec chez des commerçants bien connus.

Un survol rapide nous a permis de trouver des manteaux offerts en ligne en vente ferme à 507 $ chez Soia & Kyo, à 534 $ chez Mackage, à 595 $ chez Kanuk, et à 1019 $ chez Altitude Sports (de marque Toni Sailer).

L’entreprise québécoise Altitude Sports, par exemple, est présente exclusivement en ligne. Impossible de passer en magasin pour vérifier si la coupe du manteau à 1000 $ épouse votre silhouette ou vous donne des airs de « poche de patates ».

À vos risques

Acheter un vêtement en ligne en vente ferme est donc risqué à moins de l’avoir déjà essayé en boutique ou de bien connaître la confection de la marque. Car s’il ne vous va pas ou ne vous plaît pas, vous ne serez pas remboursé.

Même scénario pour les bottes d’hiver trop étroites, inconfortables, trop grandes ou trop petites : aucune loi n’oblige le commerçant à vous permettre de les échanger.

Et le choix de la couleur ? Si vous avez vu sur votre écran un bleu des Caraïbes et que dans votre salon vous voyez plutôt un bleu de la Floride, c’est « vente finale ».

« Les gens qui achètent des choses chères sont habitués à magasiner en ligne et connaissent leur taille », assure au téléphone Véronique Blais, directrice du marketing, des relations publiques et de l’image de marque chez Kanuk.

« Pour les autres, quand ils n’ont pas essayé le manteau en magasin, certains nous contactent par courriel ou par téléphone pour s’assurer qu’ils font un bon choix. Une conseillère va les aider à déterminer la bonne taille et aussi la bonne couleur, parce que ce n’est pas toujours facile de la choisir sur un écran. »

Toujours lire les politiques du commerçant

Depuis l’avènement de la vente en ligne, les consommateurs se sont habitués à certaines normes. Ils s’attendent à ce que les sous-vêtements, les accessoires et certains bijoux ne soient ni échangeables ni remboursables.

La plupart du temps, des lettres rouges majuscules s’affichent pour alerter le consommateur. Une note peut aussi apparaître lorsque vous cliquez sur « Passer à la caisse ». Mais ce n’est pas toujours le cas.

Afin d’éviter de coûteuses déceptions, Option consommateurs recommande de toujours bien lire les politiques de retour et de remboursement sur les sites des commerçants avant d’acheter quoi que ce soit.

« Il n’y a pas d’obligation légale pour les commerçants d’avoir une politique d’échange et de remboursement, avertit Sara Eve Levac, avocate et conseillère juridique chez Option consommateurs. Il faut bien vérifier sur les sites des commerçants pour ne pas se faire avoir, car il peut y avoir des exclusions. »

Rudsak, qui vend aussi des manteaux luxueux, précise sur son site que les articles portant la mention « vente finale » achetés en ligne ne sont pas remboursables, mais peuvent être échangés par la poste.

Produit défectueux : recours possible

Si vous recevez un manteau acheté en ligne déchiré, mal cousu ou avec une fermeture éclair qui ne fonctionne pas bien, vous avez des recours même si la facture indique « vente finale », assure Option consommateurs.

« La loi prévoit que quand j’achète un produit, il doit fonctionner convenablement. Dans le cas où le bien est défectueux, je peux avoir un recours pour demander au commerçant de le remplacer, le réparer ou le rembourser », soutient Sara Eve Levac.

La première démarche à faire, c’est de contacter le commerçant pour régler le problème directement avec lui, explique l’avocate. Si ça ne fonctionne pas, il faut lui envoyer une lettre de mise en demeure. Si vous n’avez pas de réponse de sa part, vous devez aller à la Cour des petites créances. À moins que le commerçant soit inscrit à la médiation gratuite sur le site de l’Office de la protection du consommateur.

« On produit les manteaux ici à Montréal, explique Véronique Blais chez Kanuk. S’il y a un défaut de manufacture, on va trouver une solution. La garantie ne change pas même si le manteau est en liquidation, même s’il est “vente finale”. La fabrication et les coutures sont garanties à vie. »

Et la rétrofacturation ?

La demande de rétrofacturation auprès de votre fournisseur de carte de crédit sera acceptée si le produit reçu n’est pas conforme à ce que vous aviez commandé (mauvaise taille, par exemple) ou que vous ne le recevez jamais. Il y a des délais à respecter et des démarches à entreprendre selon le fournisseur de carte, mais la vente peut être annulée.

Et si les bottes ou le manteau sont conçus pour vous tenir au chaud jusqu’à une température de -30 °C et qu’ils ne remplissent pas cette promesse ? Peut-on faire une demande de rétrofacturation ?

« On est un peu sur la ligne, affirme l’avocate d’Option consommateurs. Si je soumettais ça devant un tribunal, je ne sais pas ce qui serait décidé.

« Si je commande des bottes qui me garantissent d’être au chaud à - 30 degrés et que je vois qu’à - 5 degrés, finalement, ça ne fonctionne pas, peut-être que je pourrais démontrer que le bien n’est pas conforme. »

Prix de l’essence à Québec Fitzgibbon demande des comptes aux essenceries de la capitale

PHOTO ERICK LABBÉ, LE SOLEIL

Le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, au sortir d’une rencontre d’une heure avec les détaillants d’essence de la capitale

(Québec) Le gouvernement va embaucher un consultant chargé de comprendre pourquoi les gens de Québec paient souvent plus cher à la pompe, a annoncé mardi soir Pierre Fitzgibbon au sortir d’une rencontre d’une heure avec les principaux détaillants d’essence de la capitale.

Publié hier à 19h57

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Gabriel Béland
Gabriel Béland La Presse

« C’est quelqu’un qui va aller voir chaque essencerie et comprendre mieux la dynamique qui pourrait faire que le prix est plus élevé à Québec », a indiqué le ministre de l’Économie à la sortie de cette rencontre qu’il avait lui-même sollicitée.

Un avis de la Régie de l’énergie notait le 18 octobre dernier que les marges de détail estimées dans les stations d’essence de la Capitale-Nationale sont au-dessus de la moyenne du reste du Québec depuis 2021. Elles sont passées de 4,37 cents le litre en 2018 à près de 15 cents le litre en 2023.

Seules « trois régions présentaient des marges de détail estimées plus élevées, soit le Nord-du-Québec, la Côte-Nord et le Bas-Saint-Laurent ». Un second avis publié mardi constatait une situation similaire dans Chaudière-Appalaches.

M. Fitzgibbon avait donc convoqué exceptionnellement les cinq plus grands détaillants d’essence de la capitale pour tenter de comprendre. Quatre d’entre eux ont rencontré le ministre mardi en début de soirée, soit Couche-Tard, Pétroles Cadeko (filiale du Groupe F. Dufresne), Harnois Énergies et Sobeys. Costco doit rencontrer le ministre le 14 décembre.

Les représentants des quatre essenceries ont quitté la rencontre d’une heure en vitesse sans répondre aux questions des médias.

Le ministre a indiqué que la rencontre n’avait pas mené à « de grandes révélations ». Mais les détaillants se sont montrés ouverts à collaborer avec le gouvernement. « Ils nous ont offert tous de nous rencontrer individuellement pour nous montrer leurs livres, ce qu’ils ne peuvent pas faire avec le groupe. C’est positif. Ils veulent coopérer. Ils réalisent que les Québécois ont des raisons de poser des questions », a indiqué le ministre.

Des pistes, mais pas de réponse définitive

Certains détaillants ont expliqué au ministre que les essenceries à Québec étaient davantage qu’ailleurs dépendantes de la vente d’essence pour assurer leur rentabilité.

« Une essencerie, dépendamment des régions, va vendre beaucoup d’autres produits que l’essence, ce qui va faire que l’essence peut être vendue moins cher. Certains ont indiqué qu’à Québec, c’est peut-être moins facile de faire du commerce plus élargi que juste de l’essence, conséquemment, il faut qu’ils se reprennent sur l’essence. »

Le ministre a aussi laissé entendre que les marges plus hautes à Québec pourraient s’expliquer par le nombre élevé de détaillants.

« C’est un peu paradoxal, parce que plus il y a d’essenceries, plus le prix devrait baisser, mais en même temps, s’il y en a trop dans une région à moment donné, ils ne font pas de profit, alors il faut qu’ils montent le prix de l’essence, dit-il. Ce n’est pas de la collusion, mais ça se fait de façon globale pour avoir de la profitabilité. »

Or, selon des données de la Régie de l’énergie, il y a moins d’essenceries par 5000 habitants dans la Capitale-Nationale (1,47) qu’en Montérégie (1,49) ou encore en Estrie (2,06).

En somme, le ministre n’avait pas de réponse définitive à offrir à la population de Québec à l’issue de sa rencontre, d’où l’annonce de l’embauche d’un consultant chargé de faire la lumière sur ces disparités régionales.

M. Fitzgibbon a par ailleurs demandé au Bureau de la concurrence du Canada d’enquêter sur le marché de l’essence dans la région de Québec.

Il pense que dans quelques mois, ces démarches pourraient porter leurs fruits. Il espère « une meilleure transparence pour que la population soit éclairée et comprenne ».

Mais le ministre n’exclut pas la solution nucléaire, soit d’intervenir pour fixer un prix plafond à la vente de l’essence, comme il le peut.

« En 1987, ç’avait été fait. Mais honnêtement, ce n’est pas la solution que je privilégie. Je préfère avoir un marché privé avec une bonne concurrence », a-t-il dit mardi. « J’espère qu’on ne s’en va pas là. »

Bouteilles vendues en épicerie Les vignerons québécois paient désormais 40 % à la SAQ

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

À partir du 1er décembre, les vignerons québécois doivent remettre à la Société des alcools du Québec (SAQ) un montant équivalent à 40,3 % du prix des bouteilles qu’ils vendent en épicerie, afin de régler un litige commercial avec l’Australie. Des vignerons et propriétaires d’épicerie fine accusent Québec, qui avait fait miroiter une aide en 2021, de traîner les pieds.

Publié hier à 11h26

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Stéphane Rolland La Presse Canadienne

La ponction financière est considérable pour les vignerons qui vendent leurs produits en épicerie, souligne Sébastien Daoust, propriétaire du vignoble Les Vignes Des Bacchantes, situé à Hemmingford, en Montérégie.

Les épiceries fines représentent 40 % de son volume de vente. « C’est sûr que si, du jour au lendemain, on mange la moitié des marges qu’on fait, ça va avoir énormément d’impact », répond l’entrepreneur qui enseigne aussi à HEC Montréal.

Avec cette taxe, il est tout simplement impossible pour un vigneron de faire un profit, ajoute Fred Tremblay, du Vignoble Camy à Saint-Bernard-de-Lacolle. En réaction, son entreprise a tout simplement cessé de vendre ses vins aux épiciers pour se concentrer sur les restaurateurs. « Il faut donner 40 % du prix de vente à la SAQ. C’est clair qu’on ne fait pas 50 % de profit sur les produits qu’on vend. Si je donne 40 %, je suis largement déficitaire. »

La mesure avait été annoncée au printemps 2021 pour dénouer un litige commercial avec l’Australie. Le pays plaidait que les producteurs locaux québécois profitaient d’un avantage concurrentiel en vendant directement leurs bouteilles en épicerie.

Le Québec « a tenu son bout », mais il n’a pas eu le choix de plier en 2021 lorsque les autres provinces ont trouvé un accord, raconte le président du Conseil des vins du Québec (CVQ), Louis Denault. « On savait qu’on était un peu dans le tort, admet-il. On a réussi à garder un accès direct aux épiceries, mais on a accepté de payer une majoration. »

Il reste que Vignoble Camy n’obtient rien contre ce paiement, dénonce M. Tremblay. « En retour, la SAQ, ils ne font rien. Ils ne font pas les livraisons. Ils ne font absolument rien de tout ça. Il faut qu’on fasse le même travail, puis tout d’un coup, on a 40 % moins de revenus. »

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Fred Tremblay

Près de 31 % des bouteilles de vins québécois étaient vendues en épicerie en 2022, selon le plus récent bilan du CVQ. Cette proportion est en croissance depuis que la pratique a été autorisée en décembre 2016.

Des propriétaires d’épiceries fines sont également inquiets des effets qu’aura la majoration sur leur entreprise. Au moment où l’inflation gruge le portefeuille des ménages, Pascale Rémond, cofondatrice de l’épicerie fine Les Minettes à Laval, ne voit pas comment il serait possible de refiler la note aux consommateurs.

« C’est sûr que les clients ne voudront plus acheter des vins avec une augmentation de 40 % sur le prix de la bouteille, répond-elle. Sans aide gouvernementale, c’est sûr qu’il n’y aura plus de vin québécois sur nos tablettes. »

Les Minettes continueront de vendre des vins québécois au même prix durant la période cruciale des Fêtes, car la boutique spécialisée en produits alimentaires québécois a fait des approvisionnements avant la date butoir du premier décembre. À moyen terme, la majoration fait planer une ombre sur l’avenir de l’entreprise. « Ça représente 50 % des ventes de la boutique. »

Dans l’attente d’une aide

Les entrepreneurs interrogés par La Presse Canadienne sont impatients de savoir si le gouvernement Legault les aidera à encaisser le coup.

Lorsque la majoration avait été annoncée au printemps 2021, le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, avait promis de trouver une façon « de limiter le plus possible les effets négatifs. »

Plus de deux ans se sont écoulés depuis. M. Denault avait plaidé auprès du gouvernement pour que les modalités de ce soutien soient connues six mois avant l’entrée en vigueur de la majoration.

« On redoutait beaucoup ce qui arrive présentement, confie le président du CVQ, qui est aussi propriétaire-vigneron du Vignoble Sainte-Pétronille sur l’île d’Orléans. L’inefficacité du gouvernement dans ce dossier-là, c’est atroce. »

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Louis Denault

Au ministère de l’Économie, on assure vouloir collaborer avec l’industrie pour garantir sa compétitivité et limiter une potentielle hausse de prix pour les consommateurs. « Les discussions se poursuivent afin de traduire cette ouverture du gouvernement en nouveaux gestes qui répondront aux attentes du milieu », répond son porte-parole Jean-Pierre d’Auteuil.

Plutôt qu’une aide financière, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) juge qu’il faudrait tout simplement abolir la majoration. Si des restrictions n’étaient pas imposées sur les vins étrangers, les vignerons québécois en seraient aussi exemptés sans contrevenir aux règles du commerce international.

« On est très bon au Québec à mettre trop de taxe et, après ça, essayer de pointer dans les autres directions plutôt que de trouver la problématique de fonds qui est la surtaxation », dénonce son vice-président pour le Québec, François Vincent.

En attendant l’intervention du gouvernement, l’entreprise de Paul Jodin, du Vignoble Saint-Gabriel dans la région de Lanaudière, continue de livrer des bouteilles aux épiciers pour la saison des Fêtes, mais son propriétaire veut y aller avec prudence. « On va être obligé de “breaker un peu”, comme on dit en français, parce qu’on ne sait pas s’il va y avoir une compensation. Puis, la compensation sur le 40 %, vont-ils nous remettre 15 %, 20 % ? »

De la confusion

Certains vignerons trouvent que la communication est déficiente de la part de la SAQ et du gouvernement.

Les membres du CVQ ont reçu de l’information « cette semaine » par l’entremise de leur association qui fait le pont entre la société d’État et les vignerons, explique-t-on à la SAQ.

Les détails sur les déclarations à remplir seront envoyés à la mi-décembre. Le formulaire sera « simple » et « complet », assure la porte-parole de la société d’État, Linda Bouchard. « Il n’y a pas d’intérêt de la part de personne de rendre ça compliqué. »

Il reste que certains vignerons qui ne sont pas membres du CVQ se trouvent dans le noir, constate Mme Rémond. « Encore mercredi (à deux jours de l’entrée en vigueur de la majoration), je parlais à un vigneron qui en avait entendu parler, mais il n’y a pas eu de communication à cet effet-là parce qu’il n’est pas membre », raconte l’entrepreneur qui s’implique dans l’association.

Épicerie Des hausses de prix de 4,5 % à prévoir en 2024

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Le pain, les légumes ainsi que la viande contribueront essentiellement à faire gonfler le prix du panier d’épicerie.

Facture plus salée et guerre de prix dans les supermarchés. Faire l’épicerie en 2024 ne sera visiblement pas une sinécure alors qu’une famille composée de quatre personnes pourrait débourser en moyenne 313,40 $ par semaine pour un montant annuel de 16 297,20 $, une augmentation de 701,79 $ par rapport au total prévu pour 2023.

Publié à 6h00

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Nathaëlle Morissette
Nathaëlle Morissette La Presse

Aller au supermarché engendrera encore des dépenses supplémentaires avec une hausse du prix des aliments pouvant aller jusqu’à 4,5 % à travers le pays, selon les prédictions contenues dans le Rapport sur les prix alimentaires au Canada 2024, publié ce jeudi.

Le pain, les légumes ainsi que la viande contribueront essentiellement à faire gonfler le prix du panier d’épicerie. Ils représentent les catégories d’aliments qui devraient enregistrer la plus forte hausse de prix avec une augmentation variant entre 5 % à 7 %.

« Cette hausse anticipée des prix alimentaires peut être principalement attribuée à l’augmentation du coût des intrants, à l’accroissement des frais de transport et aux effets néfastes du changement climatique sur le rendement des cultures », peut-on lire dans l’étude réalisée conjointement par l’Université Dalhousie, l’Université de la Colombie-Britannique, l’Université de Guelph et l’Université de la Saskatchewan.

Guerres de prix à prévoir au Québec

Dans la Belle Province, où la hausse anticipée sera inférieure à la moyenne canadienne — avec une augmentation des prix variant entre 2,5 % et 3,5 % — les différentes enseignes risquent de se livrer une féroce bataille de prix, croit Sylvain Charlebois, directeur principal du laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie.

J’ai l’impression qu’en 2024, il va avoir des guerres de prix. Il y a vraiment un vent d’économie qui souffle partout au Québec. Les consommateurs sont programmés pour épargner.

Sylvain Charlebois, directeur principal du laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie

« Si on retourne aux années 1980 où les gens n’achetaient rien si ce n’était pas en solde, c’est un peu ça qui va se passer en 2024, ajoute-t-il. On voit que les épiciers se préparent pour combattre le chef de file de la déflation qui est Walmart. »

Les auteurs du rapport indiquent d’ailleurs que cette « déflation légère » pourrait se traduire par des prix plus bas pour de nombreux produits alimentaires essentiels.

Depuis la dernière année, 6 aliments sur 10 vendus en épicerie sont en promotion, révélait la semaine dernière Francis Parisien, vice-président principal, ventes PME Canada pour NielsenIQ, au cours d’une conférence intitulée Le consommateur à l’heure des choix, présentée dans le cadre d’un évènement organisé par le Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ).

« Une proportion de 57,7 %, on n’a jamais vu ça ! On n’a jamais vu autant d’activités promotionnelles », avait-il alors affirmé.

Moins de dépenses en 2023… malgré les hausses de prix

Fait intéressant : si les prix ont augmenté cette année, les consommateurs ont dépensé moins à l’épicerie que ce qu’avaient prédit les experts. « Sur la base des prévisions pour 2023 et des données du rapport de l’année dernière, les dépenses annuelles totales d’une famille (…) devaient à l’origine s’élever à 16 288,40 $, sur la base de ce que nous considérions comme un régime alimentaire sain, ont-ils écrit. Toutefois, cette année, compte tenu des habitudes de consommation réduites des Canadiens, une estimation plus précise des dépenses annuelles d’une famille de quatre personnes au cours de l’année écoulée est de 15 595,40 $. En d’autres termes, les ménages ont dépensé 693 $ de moins en raison des changements dans leurs habitudes d’achat, malgré la hausse des prix des denrées alimentaires. »

Que s’est-il passé ? Les consommateurs se sont-ils privés en arpentant les allées d’épicerie ? Pas nécessairement, répond M. Charlebois. « Soit que les gens gaspillent moins, ou qu’ils trouvent d’autres canaux d’approvisionnement », dit-il en rappelant qu’un grand nombre de Canadiens ont eu recours aux banques alimentaires pour compléter leur épicerie.

Sur la chaîne YouTube de CBC News

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More and more people are calling out the accuracy of food weight labels versus what’s actually in a package. The Canada Food Inspection Agency shares with CBC the consequences a company can face when there’s a discrepancy.

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