Québec - Édifices patrimoniaux

Discussion et actualités sur les édifices patrimoniaux de la ville de Québec


Hôtel de ville de Québec (source: Wikipedia)


Monastère des Augustines | Gérer comme une augustine

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Les cinq Augustines du Monastère du Vieux-Québec. Leur présence est très discrète pour la clientèle de l’hôtel, mais elle est là et contribue assurément à cette ambiance de bien-être que l’on sent dès que l’on passe la porte.

Il y a huit ans, le Monastère des Augustines a modifié sa vocation. L’entreprise est désormais aux prises avec les mêmes préoccupations que celles œuvrant dans le même créneau : pénurie de main-d’œuvre, inflation… Mais dans cet endroit hors du commun, on s’inspire de la philosophie des Augustines pour gérer les affaires et les gens.

Publié à 0h55 Mis à jour à 5h00

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Texte : Stéphanie Bérubé
Texte : Stéphanie Bérubé La Presse


Photos : Edouard Plante-Fréchette
Photos : Edouard Plante-Fréchette La Presse

« Les Augustines sont considérées comme une des premières communautés de femmes entrepreneures au pays », lance Isabelle Duchesneau, directrice générale du Monastère des Augustines. « Elles ont fondé, bâti, géré les hôpitaux, poursuit-elle. Elles faisaient tout. »

Il y a une dizaine d’années, les Augustines ont entrepris la transformation de leur immense monastère du Vieux-Québec. Elles voulaient assurer la pérennité des lieux, parce que le groupe déclinait et la relève se faisait rare. La réflexion sur la conservation de leur patrimoine, précurseure à ce changement, avait duré plus de 20 ans.

« Elles se sont posé la question, poursuit la directrice générale : qu’est-ce qu’on fait avec ce patrimoine de près de 400 ans ? »

Les sœurs n’ont jamais réfléchi en silo. Leur objectif est de s’installer dans une communauté, la faire prospérer, en prendre soin. Elles prennent soin de l’individu, mais elles prennent soin du collectif.

Isabelle Duchesneau, directrice générale du monastère des Augustines

Un modèle innovant

Avant de décider de la suite des choses, les sœurs ont commandé des études, des ateliers, des consultations pour comprendre comment elles pouvaient continuer de servir la communauté, autrement. Et éventuellement, sans elles.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

L’hôtel de 65 chambres est le cœur des activités commerciales et finance la mission des Augustines. L’entreprise compte maintenant 130 employés.

Cela a mené à la création de deux organismes en 2009, un OBNL (le Monastère des Augustines) et une fiducie dont le mandat est de protéger le patrimoine des Augustines, dont cet incroyable monastère, ses artefacts et les archives. La fiducie, propriétaire du bâtiment, s’occupe de son entretien. Elle est aussi la gardienne des intentions des Augustines. « Elles se sont assurées que tout ce qui allait se faire au monastère éventuellement serait fait avec l’intention de protéger leur mémoire, précise Isabelle Duchesneau. C’est dans la constitution. C’est à vie. »

Isabelle Duchesneau est au Monastère depuis 2012, au début de la conversion. Son rôle : mettre en place un modèle d’affaires pour cette entreprise atypique, qui avait des intentions très claires.

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« Les sœurs nous ont légué leur patrimoine matériel et immatériel. Et dans le patrimoine immatériel, il y a leur façon de gérer. C’est extraordinaire d’aller piger là-dedans », dit Isabelle Duchesneau, directrice générale du Monastère.

Le Monastère est reconnu comme un modèle d’affaires innovant, particulièrement dans le monde de l’économie sociale. On voit souvent les OBNL comme étant des organismes uniquement subventionnés.

Isabelle Duchesneau, directrice générale du Monastère

Or, ce n’est pas le cas ici, puisque 80 % des ressources proviennent des revenus autonomes, dont la plus grande partie vient des chambres. Une autre part de 15 % provient de fonds publics, particulièrement sur des projets précis, et les 5 % restants, de fonds philanthropiques. Cela exclut les investissements publics nécessaires à la transformation, au tout début du projet.

Prendre soin

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Un contexte difficile

Le créneau du tourisme de santé globale et bien-être a été choisi pour cadrer avec la philosophie des Augustines, mais il tombait aussi au bon moment : ce qu’on appelle en anglais le tourisme du « wellness » est en plein essor.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Le Monastère a bâti sa culture d’entreprise afin de poursuivre les valeurs des sœurs, maintenant et le jour où il n’y en aura plus au monastère. Le défi sera de passer cette philosophie aux générations futures.

Les gens voyagent pour être mieux. Ils incluent des traitements ou du mouvement dans leurs vacances. On veut se ressourcer. L’environnement des Augustines propose exactement ça.

Dès le départ, c’était indéniable pour moi que le Monastère avait le potentiel d’un rayonnement international.

Isabelle Duchesneau, directrice générale du Monastère

En 2020, le Monastère a atteint son équilibre budgétaire, explique la directrice générale. Et malgré la pandémie, qui a fait mal au secteur de l’hôtellerie, les années suivantes, 2021 et 2022, ont permis de dégager des surplus.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Il reste cinq Augustines au monastère de Québec. De gauche à droite, sœur Carmelle Bisson, sœur Lise Tanguay, sœur Sylvie Morin, sœur Berthe Lemay et sœur Sarah Mc Donald.

Cette année, les choses sont différentes : l’inflation rattrape le Monastère. Même pour un créneau de bien-être. Le taux d’occupation se maintient, autour de 70 %, mais les dépenses ne suivent pas. Les gens choisissent des chambres moins chères et achètent moins à la boutique, explique la directrice, qui travaille sur une révision du plan d’affaires.

La mission demeure : le bien-être, celui qui commence par soi. En ce sens, les Augustines étaient des précurseures. Elles vivaient le moment présent bien avant que le discours soit récupéré par l’industrie du mieux-être.

Aujourd’hui, cette mission est toujours remplie notamment en permettant à une certaine clientèle de trouver un répit au Monastère, qui offre un tarif solidaire aux proches aidants, aux soignants ou aux gens qui doivent aller à Québec pour accompagner un malade. Les surplus des dernières années ont été redistribués pour ces programmes sociaux.

« Les sœurs ont fait ça dans le passé. Pour gérer leurs hôpitaux, elles offraient aux richissimes de la vraie vaisselle, de la coutellerie de luxe, rappelle Isabelle Duchesneau. Elles les mettaient dans des chambres privées payantes. Avec cet argent, elles accueillaient les plus pauvres, gratuitement. »

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Et la religion ?

« La religion est expérimentée dans un volet historique, dit Isabelle Duchesneau. On ne retrouve pas des bouddhas au Monastère. On va retrouver des statues de la Vierge et de Jésus. C’est notre patrimoine, c’est notre histoire collective. Mais on ne prône pas la religion, on prône la spiritualité, au sens large. »

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Peut-être un bon exemple à suivre pour le musée des hospitalières/Hôtel-Dieu ou pour l’ancien hôpital de la miséricorde ?

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Un bon exemple à suivre, cependant les augustines ont toujours été à la barre de leur institution et ont su prendre le virage affaires au bon moment. Tandis que les autres bâtiments, à Montréal, sont dans une autre situation et dépendent d’autorités plus ou moins impliquées dans leur avenir immédiat. Or l’Hôpital de la Miséricorde notamment peut être considérée comme orpheline et représente le même défi que bien d’autres édifices institutionnels majeurs qui se cherchent eux aussi désespérément une nouvelle vocation.

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Un moulin à eau français… malgré les Anglais

Par Francis Higgins, Le Soleil

8 avril 2024 à 08h30

Le moulin de La Chevrotière à Deschambault-Grondines|800x0

Le moulin de La Chevrotière à Deschambault-Grondines formait le cœur de la seigneurie locale aux 18e et 19e siècles, avec l’église et le manoir. (Pierre Lahoud)

VU DE LÀ-HAUT / «L’historien volant» Pierre Lahoud fait de la photo aérienne depuis près de 50 ans. Son objectif : immortaliser la beauté et l’histoire du Québec. Il partage gracieusement avec les lecteurs du Soleil ses meilleurs clichés pris du haut des airs.


Dans la chronique-entrevue d’aujourd’hui, un vol au-dessus du moulin de La Chevrotière, à Deschambault-Grondines, dans la région de Portneuf, à environ une heure à l’est de Québec. Il s’agit du premier d’une série de trois articles sur des bâtiments historiques et patrimoniaux.

Résumé

Un moulin à eau français… malgré les Anglais

Par Francis Higgins, Le Soleil

8 avril 2024 à 08h30

Le moulin de La Chevrotière à Deschambault-Grondines|800x0

Le moulin de La Chevrotière à Deschambault-Grondines formait le cœur de la seigneurie locale aux 18e et 19e siècles, avec l’église et le manoir. (Pierre Lahoud)

VU DE LÀ-HAUT / «L’historien volant» Pierre Lahoud fait de la photo aérienne depuis près de 50 ans. Son objectif : immortaliser la beauté et l’histoire du Québec. Il partage gracieusement avec les lecteurs du Soleil ses meilleurs clichés pris du haut des airs.


Dans la chronique-entrevue d’aujourd’hui, un vol au-dessus du moulin de La Chevrotière, à Deschambault-Grondines, dans la région de Portneuf, à environ une heure à l’est de Québec. Il s’agit du premier d’une série de trois articles sur des bâtiments historiques et patrimoniaux.


À voir aussi

«Ce superbe moulin à eau a été construit par le seigneur Joseph Chavigny de La Chevrotière à Deschambault au début du 19e siècle, vers 1802 si je me souviens bien. Ce moulin — l’un des plus beaux du Québec — est remarquable à bien des égards, notamment en raison de son immense taille», raconte l’historien, auteur et photographe Pierre Lahoud.



«À cette époque, les seigneurs avaient des obligations envers leurs censitaires. L’une d’elles était de construire un moulin à farine. Le seigneur de La Chevrotière était clairement assez fortuné pour faire bâtir un édifice de cette ampleur.»

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«L’architecture de ce bâtiment patrimonial rappelle exactement les monuments français de la période : le toit est pentu, à versants droits, il n’y a pas de larmiers, ces avant-toits qui se dégagent des murs, entre autres. Encore en 1802, sous le régime britannique, on construisait à la façon des Français», poursuit-il.

«Même si les Anglais avaient gagné la guerre en 1760, la présence française était toujours bien présente à travers l’architecture et dans les façons de construire.»

— Pierre Lahoud

«Moi, j’ai connu ce bâtiment en ruines au milieu des années 1970. Il avait été pratiquement abandonné. Parfois, la volonté politique peut-être manquante ou désagréable, disons.»

«Dans ce cas-ci, [l’ancien maire de Québec] Jean-Paul L’Allier était ministre de la Culture à ce moment. Si je me rappelle, il aurait insisté pour qu’on restaure le moulin. C’est la preuve que certaines volontés politiques peuvent parfois avoir du sens», selon M. Lahoud.



«Grâce à ces efforts, ce monument historique est depuis repris par un organisme nommé Culture et Patrimoine Deschambault-Grondines, qui tient au moulin des expositions avec des artistes et des artisans.»

Propos recueillis par Francis Higgins

Info : pierrelahoud.co­m

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