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Sommet de l’habitation : les 10 engagements des 10 plus grandes villes du Québec


Les mairesses de Montréal et de Longueuil, ainsi que le maire de Laval, lors du Sommet de l’habitation.
PHOTO : RADIO-CANADA / CHARLES CONTANT

James-Patrick Cannon
Publié à 23 h 23

Taxer la spéculation immobilière et favoriser une densification « douce » du territoire : tels sont quelques-uns des engagements pris par les 10 plus grandes municipalités du Québec pour contrecarrer la crise du logement, à l’issue du premier Sommet de l’habitation tenu vendredi, à Laval.

Coorganisé par le maire de Laval Stéphane Boyer et de la mairesse de Longueuil Catherine Fournier, le sommet, qui portait le thème Notre avenir en tête a réuni les maires des dix villes les plus peuplées du Québec ainsi que des centaines de partenaires du milieu de l’habitation pour réfléchir au manque de logement et à la crise de l’abordabilité au Québec.

Toutes les données tendent à le confirmer : la situation sur le marché locatif, les appartements qui sont disponibles atteignent des prix records, la surchauffe sur le marché immobilier, les problématiques que vont amener la hausse des taux d’intérêt. Vraiment, ça touche tous les Québécois et les Québécoises, a déclaré la mairesse Catherine Fournier, vendredi.

Or, s’il y a urgence d’agir, selon Mme Fournier, les solutions mises de l’avant doivent être adaptées aux réalités locales.

Les prix augmentent partout, mais la situation de Montréal n’est pas pareille que celle de Gaspé où de l’Abitibi, a noté son homologue de Laval, illustrant cette préoccupation de trouver des solutions taillées sur mesure,

La conférence a abouti à une déclaration commune dans laquelle chacune des 10 plus grandes villes de la province s’engage à réaliser ou initier des projets innovants, structurants et adaptés en matière de logement sur leur territoire.

Les engagements pris par les 10 plus grandes villes du Québec au Sommet de l’habitation :

  • Poursuivre les travaux du comité-choc basé sur l’abordabilité, l’accessibilité, l’équité et l’efficacité (Gatineau);
  • Travailler sur la mise en place d’une taxe sur la spéculation foncière afin de financer les initiatives en habitation (Laval);
  • Mobiliser plusieurs leviers pour favoriser une densification douce et différenciée sur son territoire (Longueuil);
  • Poursuivre la mise en œuvre de sa stratégie de développement du logement social et abordable (Lévis);
  • Réaliser un premier projet sans but lucratif de plus de 200 logements qui seront 100 % abordables et pérennes sur le site du futur écoquartier Namur-Hippodrome (Montréal);
  • Mettre en place un programme d’accès à la propriété pour les familles voulant faire l’acquisition d’une habitation écologique (Québec);
  • Poursuivre le projet de construction de logements incluant une mixité d’usages sur la zone ferroviaire du centre-ville de l’arrondissement de Chicoutimi (Saguenay);
  • Mettre en place, en partenariat avec le CIUSS et l’Université de Sherbrooke, une commission d’étude sur le logement (Sherbrooke);
  • Réaliser un projet de logements abordables dans un secteur en revitalisation en mettant en valeur le patrimoine industriel du Vieux-Terrebonne (Terrebonne);
  • Réaliser un projet de milieu de vie communautaire pour les étudiantes et les étudiants autochtones et leurs familles (Trois-Rivières).

Freiner la spéculation

M. Boyer veut, par exemple, se doter d’un nouveau pouvoir de taxation sur la spéculation foncière pour financer des initiatives en habitation.

Selon lui, le cadre légal actuel, qui permet aux villes de taxer les bâtiments en fonction de leur valeur, est trop limitatif.

C’est très dur pour nous, légalement, de taxer […] un terrain qui est vide ou vacant, et c’est très dur de taxer des projets qui sont sous-développés, a-t-il expliqué.

Parmi les avenues qui pourraient être envisagées, le maire de Laval a évoqué une taxe sur les terrains vagues non desservis ou des sites immobiliers sous-utilisés.


Stéphane Boyer critique les spéculateurs qui n’attendent qu’un changement d’un zonage ne fasse exploser la valeur de leur terrain.
PHOTO : RADIO-CANADA / DANIEL COULOMBE

Stéphane Boyer a montré du doigt les fonds d’investissements et les individus fortunés qui achètent des terrains et attendent que le prix monte avant de le revendre à deux, trois, quatre, cinq, six, 10 fois le prix initial pour faire une passe d’argent, une pratique qui n’apporte aucune plus-value à la société.

Si financièrement, ce n’est pas intéressant de garder un terrain et ne rien faire avec pendant 20 ans, les terrains vont devenir plus accessibles pour ceux qui veulent faire de l’habitation, a-t-il fait valoir.

Une densification en douceur

Mme Fournier mise pour sa part sur une densification douce et différenciée du territoire longueuillois.

En bref, il s’agit d’une densification qui se différencie de l’image de la grande tour à condo.

La densification, ça peut se faire à échelle humaine, ça peut se faire de façon douce dans les quartiers de maisons unifamiliales, a-t-elle insisté.

Dans le Vieux-Longueuil, par exemple, il y a des secteurs où l’on peut tout à fait donner la permission aux gens de construire une petite unité accessoire sur leur terrain qu’ils pourraient mettre en vente ou encore louer, a-t-elle illustré, expliquant que cela pourrait favoriser la construction de maisons intergénérationnelles.

La mairesse estime d’ailleurs que les Québécois sont généralement favorables avec le concept de densification, dans la mesure où les projets proposés respectent le patrimoine et l’environnement.

« La clé avec la densification, ce n’est pas de faire du mur à mur, mais de s’attarder aux micro-identités dans nos villes, de respecter le patrimoine, et inclure du verdissement dans les projets. »

— Une citation de Catherine Fournier, mairesse de Longueuil

Il faut aller plus loin

Peu importe la solution qu’ils privilégient, les participants au sommet semblaient d’accord sur un point : le statu quo est intenable.

Les engagements actuels ne sont pas à la hauteur des besoins, a déclaré Mme Fournier au sujet des contributions du gouvernement provincial en matière d’habitation.

Si les villes souhaitent davantage d’autonomie et de flexibilité dans les projets qu’ils peuvent déployer, la mairesse reconnaît que le nerf de la guerre demeure le financement.

Il faut du financement qui soit conséquent et qui nous permet d’acquérir des terrains, mais également de financer des projets de logement social, a-t-elle déclaré.

Son homologue, M. Boyer, a salué certaines initiatives du gouvernement Legault.

Il qualifie notamment de gain l’octroi du droit de préemption à toutes les municipalités, ce qui leur confère un droit de premier achat sur la vente de certains terrains dans le but d’y établir des logements sociaux.

N’empêche, il estime qu’il faut aller plus loin.

Il a notamment insisté sur le besoin de réduire et d’assouplir certaines normes, jugées trop lourdes.

« On aimerait avoir des programmes qui mettent l’argent sur la table, mais qui sont faciles, rapides d’application et qui peuvent être ajustés selon la réalité locale. »

— Une citation de Stéphane Boyer, maire de Laval

En ce moment, les projets d’habitation prennent plusieurs années à lever quand ils reçoivent du financement, a-t-il expliqué.

Les maires ont également réitéré les demandes de l’Union des municipalités du Québec pour le prochain gouvernement, notamment la construction de 4500 logements sociaux par année pour l’ensemble du Québec.

Rappelons que la Coalition Avenir Québec a récemment promis de construire 11 700 logements sociaux et abordables s’il est reporté au pouvoir le 3 octobre prochain.

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