Un témoignage émouvant sur l’institution elle-même, ici rue Hutchison à Montréal.
«Ça a changé ma vie d’habiter ici»
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Photo: Jacques Nadeau Le Devoir Christopher Mixco-Lobo, 30 ans, est un ancien résident d’Héberjeune qui est maintenant gérant d’un restaurant St-Hubert. Il vit aujourd’hui en appartement avec son garçon de 10 ans.
2 septembre 2023
C’est un immeuble comme les autres sur la paisible rue Hutchison, dans le quartier montréalais Parc-Extension. Des arbres matures et une pelouse bien entretenue ornent la façade de briques rouges. Mais les 13 locataires sont différents de leurs voisins. Ce sont des jeunes en difficulté qui occupent des logements supervisés.
Une équipe d’intervenantes qui a ses bureaux au sous-sol aide ces jeunes adultes à trouver un emploi, à retourner aux études. À tourner le dos à la drogue ou à l’alcool, dans bien des cas.
« Ça a changé ma vie, d’habiter ici », dit Christopher Mixco-Lobo, qui a vécu deux ans dans un de ces logements supervisés par l’organisme Héberjeune.
Avec l’aide de son intervenante, ce père de famille aujourd’hui âgé de 30 ans a réussi à renouer avec son garçon de 10 ans. Il en a maintenant la garde exclusive. Il a trouvé un emploi de gérant dans un restaurant Saint-Hubert.
Christopher avait atteint le fond du baril quand il est arrivé chez Héberjeune : il consommait des drogues et abusait de l’alcool. Incapable de payer le loyer, il s’était retrouvé à la rue. Il était en dépression.
« Je suis fière de toi. Tu as mis tellement d’efforts pour t’en sortir », dit Andréane Proulx, l’intervenante sociale qui a accompagné Christopher chez Héberjeune. Elle a elle-même séjourné ici avec sa fillette, en 2007. La mère et la fille mènent désormais des vies bien remplies. Christopher aussi.
« Si je pouvais, je reviendrais habiter ici », dit le jeune papa, qui vit confortablement en appartement avec son garçon.
C’est le genre de pensionnaire qui aurait été susceptible de se retrouver dans l’immeuble qu’Héberjeune est en voie de faire construire dans le quartier Ahuntsic — où des résidents craignent pour leur quiétude. Des jeunes qui « se sont pris en main » et qui sont devenus autonomes, explique Andréane Proulx.
Après le party, les études
Mathis fait partie des résidents d’Héberjeune, rue Hutchison. Le jeune homme de 20 ans est arrivé il y a deux mois, après s’être disputé avec ses parents. « J’ai une phase de party. Je sors dans les clubs. J’ai besoin d’être stimulé », dit-il. Son t-shirt des Beastie Boys correspond à son état d’esprit du moment.
Quand ses parents ont cessé de l’aider à payer sa chambre dans une résidence étudiante, Mathis s’est retrouvé dans des refuges d’urgence. Il n’aimait pas le couvre-feu et les horaires rigides, entre autres pour les repas. « Ici, j’ai ma propre clé. Je ne suis pas obligé de sonner pour entrer. »
Il compte faire des études professionnelles en soutien informatique, puis continuer au collégial et sans doute à l’université. « Les jeunes viennent ici sur une base volontaire, mais ils ont l’obligation de se mettre en action », explique Coralie Le Doaré, intervenante sociale chez Héberjeune.
L’organisme offre une série de services dans le quartier Parc-Extension : des intervenants aident les personnes itinérantes qui se tiennent autour de la station de métro Parc. Deux immeubles de logements supervisés, sur les rues Jarry et Hutchison, accueillent un total de 33 pensionnaires — qui ne sont pas des personnes itinérantes. Et la drogue est interdite ici.
« Ça a changé ma vie d’habiter ici » | Le Devoir?