Festivals à Montréal - Discussion générale et actualités

Le reportage au Téléjournal

Au bord de la faillite, Juste pour rire annule son festival

La nouvelle a eu l’effet d’une bombe dans le milieu des festivals et de l’humour : il n’y aura pas de festival Juste pour rire cet été à Montréal, du moins, tel qu’on le connaît. Le groupe se place sous la protection de ses créanciers et congédie les deux tiers de ses employés.

Juste pour rire, c’est le plus grand festival d’humour au monde : 1 200 000 visiteurs, 750 spectacles et 500 artistes.

Le reportage de Louis-Philippe Ouimet

Et entrevue

Juste pour rire au bord de la faillite : entrevue avec Patrick Kearney

Le Groupe Juste pour rire se trouve au bord de la faillite. La situation financière est tellement difficile que l’entreprise a dû mettre à pied 70% de ses effectifs.

Il n’y aura pas de festival cet été, une vitrine en moins pour Montréal et ses humoristes.

Véronique Prince en discute avec Patrick Kearney, Fondateur du Regroupement des festivals régionaux artistiques indépendants et directeur général du festival Santa Teresa.

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Je ne suis pas certain de comprendre pourquoi M. Kearney est la meilleure personne pour commenter le dossier d’une faillite d’entreprise. Juste pour rire est beaucoup plus qu’un festival et il ne semble pas vraiment maîtriser la question.

les médias ont le focus sur la partie festival de Juste pour rire

Une entrevue avec le PDG du RÉMI à RDI

Juste pour rire au bord du gouffre | Zone Économie

« Les coûts d’opération ont augmenté de 30-45% depuis la pandémie, mais les subventions et les commandites n’ont pas suivi. Il est là, le problème. » - Martin Roy, PDG du Regroupement des événements majeurs internationaux, en entrevue à #Zoneéconomie.

Il va voir un trou en juillet. Le Quartier des spectables a déjà mis le calendrier à jour

Le Festival Juste pour rire devait avoir lieu du 18 au 27 juillet

Pour les spectacles gratuits de Juste pour rire, j’ai aimé leur formule payante quand c’était dans le Vieux-Port. Il y avait un prix à l’entrée du site et après on pouvait aller voir les shows gratuitement. J’avais vu plusieurs humoristes à leur début de cette façon.

Quand le Festival a déménagé dans le Quartier latin, ce n’était plus la même chose.

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Du côté anglo

Comedian set to audition for Just For Laughs festival reeling after cancellation | Canada Tonight

Ryan Dillon, a Canadian comedian who was set to audition for the Just For Laughs festival in two weeks, says he’s ‘still reeling’ after hearing the news about the cancellation of this year’s event. Dillion says people work so hard for the chance to perform at the festival, ‘and now it’s not gonna be there for them.’

Just For Laughs comedy festival cancelled amid bankruptcy fears

Comedian Cassie Cao shares reaction to the cancellation of Canada’s iconic comedy festival Just For Laughs amid bankruptcy fears.

Just for Laughs comedy festival cancels upcoming shows in Montreal, files for bankruptcy protection

Montreal’s premier comedy festival has cancelled all its performances this summer and has filed for bankruptcy protection.

Just for Laughs is citing the effects of the pandemic and increasing costs as reasons to close the curtain on the festival.

A spokesperson with Just For Laughs told Global News that 75 employees lost their jobs, adding that increasing competition from streaming services also added to the financial strain on the festival.

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J’espère vraiment que du moins pour cet été, quelque chose de plus informel saura au moins prendre un peu la place, même sous forme déstructurée (comme des artistes qui continuent de se produire). J’allais parler de Zoofest mais selon Tourisme Montréal, c’est annulé aussi? Je ne savais pas que ça faisait partie du Groupe JPR

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Le visage du Groupe Juste pour rire tel qu’on le connaît risque de changer. Ce fleuron québécois de l’humour, qui s’est placé à l’abri de ses créanciers, doit plusieurs dizaines de millions à ses prêteurs et fournisseurs, dont 15 millions à son ex-dirigeant et fondateur, Gilbert Rozon. Rien ne garantit que l’homme d’affaires déchu récupérera cette somme.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Les divisions du Groupe Juste pour rire

Résumé

Juste pour rire se protège de ses créanciers Un visage appelé à se transformer

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Avec des coffres à sec, le Groupe Juste pour rire se protège de ses créanciers. Son festival prévu à l’été est annulé.

Le visage du Groupe Juste pour rire tel qu’on le connaît risque de changer. Ce fleuron québécois de l’humour, qui s’est placé à l’abri de ses créanciers, doit plusieurs dizaines de millions à ses prêteurs et fournisseurs, dont 15 millions à son ex-dirigeant et fondateur, Gilbert Rozon. Rien ne garantit que l’homme d’affaires déchu récupérera cette somme.

Mis à jour à 5h38

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Julien Arsenault
Julien Arsenault La Presse

L’entreprise fondée en 1983, qui a perdu plus de 5 millions en 2023 d’après nos informations, s’est placée sous la protection de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, mardi, en invoquant les interruptions attribuables à la pandémie de COVID-19, les pressions inflationnistes et les difficultés dans l’industrie des médias. Cela a provoqué une avalanche de réactions dans les sphères politique et culturelle. Dans l’immédiat, le groupe supprime 70 % de son effectif – 70 personnes – en plus d’annuler le festival Juste pour rire/Just For Laughs prévu l’été prochain et sept autres spectacles.

INFOGRAPHIE LA PRESSE

Les divisions du Groupe Juste pour rire

L’annonce met aussi la table pour un processus de sollicitation d’investissement et de vente (PSIV), ce qui signifie que l’entreprise, présente dans des créneaux comme l’organisation de festivals et la production télévisuelle, pourrait être vendue en totalité ou en pièces détachées.

« Les activités commerciales devraient survivre, mais pas dans cette entité corporative qui traîne beaucoup trop de dettes », confirme le syndic Christian Bourque, de la firme PwC, responsable de la restructuration judiciaire, dans un entretien téléphonique avec La Presse.

À ce stade-ci, la possibilité que quelqu’un recapitalise l’entreprise dans sa forme actuelle m’apparaît improbable.

Christian Bourque, de la firme PwC

M. Bourque et son équipe superviseront le PSIV.

Avant la pandémie, le festival Juste pour rire et son volet anglophone généraient des retombées économiques d’environ 34 millions ainsi que des recettes fiscales de 6 millions pour les gouvernements.

Des millions en souffrance

Juste pour rire traîne des créances d’environ 42 millions auprès de plusieurs dizaines de fournisseurs, d’après des documents préparés par PwC que La Presse a pu consulter. On compte trois créanciers garantis : la Banque Nationale (17 millions), la Banque de développement du Canada (1,9 million) et la Société de développement des entreprises culturelles (2,5 millions). Les sommes récoltées en vendant des actifs de l’entreprise serviront à rembourser ces trois organisations en priorité.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Le siège social de Juste pour rire, boulevard Saint-Laurent, à Montréal

Les autres créances sont non garanties. Cela signifie que plusieurs fournisseurs risquent de laisser de l’argent sur la table. D’après des documents judiciaires consultés par La Presse, les sommes en souffrance les plus élevées concernent l’agence Cartier Communication Marketing (720 350 $) et l’Équipe Spectra (611 000 $).

Cette débâcle de Juste pour rire pourrait aussi faire perdre de l’argent à Gilbert Rozon, même s’il n’est plus dans le portrait depuis 2018, après qu’il eut vendu son entreprise pour 65 millions dans la foulée d’accusations d’inconduites sexuelles ayant déclenché une vive controverse en plus d’éclabousser le groupe qu’il avait fondé.

Selon nos informations, l’homme d’affaires attend toujours de recevoir 15 millions – une créance non garantie – à la suite de la vente d’il y a cinq ans.

Il s’agit d’une balance de paiement. C’est le processus de vente qui déterminera ce que M. Rozon pourra récupérer. Dans une réponse envoyée à La Presse, l’homme d’affaires dit n’avoir « aucun commentaire » à formuler sur ce dossier.

Gilbert Rozon a dirigé nos questions vers Bell et evenko, qui détiennent respectivement 26 % et 25 % de Juste pour rire. Les 49 % restants avaient été acquis par ICM Partners, rachetée depuis par Creative Artists Agency. Les actionnaires n’ont pas commenté la tournure des évènements. En 2018, La Presse rapportait que la moitié du prix de vente avait été partagée en parts égales entre Bell et evenko, propriété du Groupe CH. Cela représente un peu plus de 16 millions pour chacun des actionnaires québécois.

Lisez l’article « Bell et le Groupe CH deviennent partenaires de Juste pour rire »

Sous pression

Les coffres du géant québécois de l’humour étaient à sec. Son conseil d’administration a dit avoir « envisagé toutes les possibilités », ajoutant que la restructuration était inévitable en raison de l’état des finances de l’entreprise.

« La décision […] a été prise après un examen approfondi de toutes les options disponibles, en tenant compte de la situation financière très difficile de [Juste pour rire], et considérant les changements importants survenus dans le secteur du divertissement au cours des dernières années », affirme l’entreprise, dans une déclaration.

Juste pour rire impute sa débâcle à la flambée inflationniste ayant suivi la pandémie – durant laquelle elle a été contrainte de « cesser [ses] activités pendant deux ans » –, ce qui a fait considérablement augmenter ses dépenses. De plus, le changement dans le secteur des médias s’est traduit par une baisse des budgets et « des plateformes de diffusion en continu ont rendu la production télévisuelle plus difficile », affirme l’entreprise.

Il n’a pas été possible de s’entretenir avec des membres de la haute direction, qui reste en place pendant la restructuration supervisée par les tribunaux. Patrick Rozon, chef de la direction de la création, a décliné notre demande d’entrevue en nous invitant à poser nos questions à la firme de relations publiques National. Joint au téléphone, l’ancien président-directeur général Charles Décarie, qui dit avoir quitté l’organisation « il y a plusieurs mois déjà », a répondu qu’il préférait ne pas commenter la situation.

Rappelons que Juste pour rire avait reçu 3,25 millions en subventions des gouvernements Legault et Trudeau pour organiser son festival l’été dernier. Le groupe espère pouvoir présenter son évènement phare l’an prochain, mais ne peut le garantir pour le moment.

L’histoire jusqu’ici

  • Octobre 2017 : Gilbert Rozon est accusé d’inconduites sexuelles par une dizaine de femmes. Il a par la suite obtenu une absolution inconditionnelle.
  • Décembre 2017 : Des négociations infructueuses ont lieu avec Québecor.
  • Mars 2018 : ICM Partners – qui appartient désormais à Creative Artists Agency – et le producteur Howie Mandel achètent Juste pour rire.
  • Mai 2018 : Bell et evenko deviennent actionnaires. Ensemble, ils détiennent 51 % du groupe.
  • 5 mars 2024 : Juste pour rire se place à l’abri de ses créanciers et sabre 70 % de son effectif.

Avec la collaboration de Stéphanie Morin, La Presse

En savoir plus

  • 1985
    Année où le volet anglophone s’est ajouté à au festival Juste pour rire.

juste pour rire

JPR a attiré plus de 1,2 million de visiteurs l’an dernier, dont 120 000 ont payé pour aller voir des spectacles en salle. Les retombées économiques se sont calculées en dizaines de millions. L’annulation du festival laissera un trou béant dans la programmation estivale montréalaise de l’été prochain.

Résumé

Temps gris pour le Montréal festif

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

« La place de Montréal comme capitale nord-américaine des festivals est fragilisée », écrit notre chroniqueur.


Maxime Bergeron
Maxime Bergeron La Presse

La faillite du Groupe Juste pour rire (JPR) n’aurait pu tomber à un moment plus déprimant pour Montréal.

Publié à 0h55 Mis à jour à 5h00

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Les rues sont sales et grises. Les parcs ont des allures apocalyptiques. Les patinoires sont devenues des mers de boue. Les restaurants ferment les uns après les autres. Une morosité lancinante plane sur la ville, plongée dans un inquiétant entre-deux climatique.

La mort de JPR, annoncée comme une bombe en ce faux printemps hâtif, fera mal à l’image de la métropole.

À son économie, aussi et surtout.

JPR a attiré plus de 1,2 million de visiteurs l’an dernier, dont 120 000 ont payé pour aller voir des spectacles en salle. Les retombées économiques se sont calculées en dizaines de millions. L’annulation du festival laissera un trou béant dans la programmation estivale montréalaise de l’été prochain.

La place de Montréal comme capitale nord-américaine des festivals est fragilisée, mais un pas de recul s’impose avant de déclarer la catastrophe totale et absolue.

Commençons par regarder la situation du Groupe JPR lui-même. L’entreprise avait du plomb dans l’aile depuis au moins 2017, quand son fondateur Gilbert Rozon a fait l’objet d’une pluie d’accusations d’agressions sexuelles sordides.

L’image de marque de JPR a souffert du scandale, et malgré le départ de Rozon, puis la vente de la société, plusieurs partenaires ont refusé de s’y associer par la suite, a révélé Le Devoir la semaine dernière. La pandémie et l’inflation ont ajouté une couche de difficultés supplémentaires à ce bourbier.

La faillite de JPR fera très mal à court terme, bien entendu. Aux dizaines d’employés licenciés, aux milliers de spectateurs déçus, aux créanciers qui perdront des dizaines de millions, à tous les artistes qui subiront des dommages collatéraux.

C’est un gâchis, mais on peut très bien s’attendre à ce que le groupe soit revendu en pièces détachées – y compris le volet spectacles – au cours des prochains mois. Je ne serais pas surpris de voir JPR réapparaître sous une forme ou une autre à l’été 2025, en plein Quartier des spectacles.

Il ne faut surtout pas sous-estimer l’appétit des repreneurs potentiels pour les actifs les plus précieux du groupe. Plusieurs noms circulent déjà.

Quel est l’état de santé des autres festivals montréalais ? On nage ici dans un grand paradoxe.

Plusieurs rencontrent des difficultés financières, même s’ils sont plus populaires que jamais. Le Quartier des spectacles a connu l’an dernier un été record, avec 4,9 millions de visiteurs qui ont fréquenté sa trentaine de festivals.

Cette enfilade de festivals gratuits fait partie de l’ADN de Montréal. Mais cette gratuité a un coût, et il devient de plus en plus difficile à assumer pour les groupes organisateurs.

Déjà en 2019, bien avant la pandémie et la poussée inflationniste qui s’en est suivi, les organisateurs de plusieurs grands festivals, dont le Jazz, Nuits d’Afrique et Montréal complètement cirque, se plaignaient d’une baisse continuelle de leurs revenus1.

Leur situation a continué de se détériorer.

Nuits d’Afrique, par exemple, a pris une ampleur considérable à la place des Festivals depuis 2022. Une deuxième scène s’est ajoutée, permettant d’accueillir davantage d’artistes, de même qu’un volet culinaire, des boutiques d’artisanat, bref, une offre foisonnante. Ça marche du tonnerre, mais le financement ne suit pas.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

Nuits d’Afrique a pris une ampleur considérable à la place des Festivals depuis 2022.

« On est en expansion, mais les gouvernements n’ont plus d’argent, on est revenu aux niveaux [de subvention] de 2019 », m’a fait valoir la directrice générale, Suzanne Rousseau.

Nuits d’Afrique s’est regroupé avec une quinzaine de festivals de taille intermédiaire, comme Pop Montréal, le Festival du nouveau cinéma, Fantasia et Montréal complètement cirque, pour essayer de convaincre les différents ordres de gouvernement de réinvestir dans la programmation gratuite qui fait la force de la métropole.

On veut sensibiliser les gouvernements à faire attention à ce qui est une richesse. Elle est à risque si le gouvernement ne se réveille pas. On ne peut pas attendre deux ou trois ans.

Suzanne Rousseau, directrice générale de Nuits d’Afrique

La débandade de JPR pourrait agir comme un électrochoc auprès des pouvoirs publics. Un coup de tonnerre qui leur rappellera non seulement l’importance, mais aussi la grande fragilité de ces festivals gratuits que bien des Montréalais tiennent pour acquis.

C’est en tous cas ce qu’espère Éric Lefebvre, directeur général du Partenariat du Quartier des spectacles (PQDS), l’organisation qui gère toute la programmation autour de la place des Festivals.

« Parfois, il faut des crises pour que tu sentes que les partenaires sont prêts à changer, m’a-t-il dit. Il y a une dizaine d’années, il a été question de perdre la F1. Qu’on soit d’accord ou pas, il y a eu une mobilisation qui a permis de sauver le modèle. »

Éric Lefebvre et plusieurs autres plaident pour une diversification des sources de revenus des festivals gratuits, afin, justement, de pouvoir maintenir leur gratuité.

Parmi les options envisagées : une redevance spéciale imposée aux propriétaires des environs, soit ces dizaines de tours de condos et immeubles de bureaux qui bénéficient directement de la vitalité du secteur. Il pourrait s’agir d’un petit pourcentage de l’impôt foncier, que la Ville de Montréal accepterait de rediriger spécifiquement pour la tenue des festivals. Pas d’une surtaxe.

L’idée, déjà appliquée dans plusieurs quartiers à vocation spéciale partout en Amérique du Nord, mérite d’être au moins considérée.

Les prochains mois nous diront si les différents ordres de gouvernement prennent le sort des festivals gratuits au sérieux. Le temps presse, et il ne faudrait pas que la déroute de JPR produise un effet domino.

L’été sera malgré tout occupé au Quartier des spectacles. Il y aura 29 festivals de fin mai à septembre. Et en juillet, au moment où aurait dû se tenir Juste pour rire sur la place des Festivals, le PQDS activera… ses fontaines.

Au moins, ce sera gratuit.

1. Lisez la lettre « Quartier des spectacles : le volet gratuit des festivals en péril »

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Un article de la Presse canadienne

Texte complet : La vulnérabilité des festivals menace la réputation de Montréal

La vulnérabilité des festivals menace la réputation de Montréal

Une foule sur la place des Festivals devant une scène hors champ.
Une cascade incessante d’événements estivaux déferle sur Montréal, dès le mois de mai, entre autres à la place des Festivals.
PHOTO : GRACIEUSETÉ : SPECTRA/FRÉDÉRIQUE MÉNARD AUBIN

La Presse canadienne
Publié à 9 h 18 HNE

L’annulation des festivals Juste pour rire de Montréal et de Toronto cette année souligne la vulnérabilité d’une industrie qui lutte pour gérer la hausse des coûts au moment où les gouvernements sont de plus en plus sollicités.

Certains événements envisagent donc une diminution de leur offre. À Montréal, la situation inquiète les organisations culturelles, qui craignent de ne pouvoir préserver l’esprit festif de la ville.

Ce n’est pas facile de proposer des (événements) gratuits, mais c’est important pour Montréal et sa réputation, c’est son image de marque, a déclaré Suzanne Rousseau, directrice du Festival international Nuits d’Afrique, une vitrine importante pour la musique de l’Afrique, des Caraïbes et de l’Amérique latine. Nous devons réfléchir à la façon de maintenir cela en vie et de ne rien perdre, a-t-elle plaidé. C’est urgent.

Personnes marchant près de l'entrée du festival.
Le 37e Festival Nuits d’Afrique s’est déroulé en juillet 2023.
PHOTO : RADIO CANADA INTERNATIONAL / MARÍA GABRIELA AGUZZI

Dès la première piste musicale lancée au premier Piknic Électronik de l’année, en mai, une cascade incessante d’événements estivaux déferle sur Montréal, du Grand Prix de formule 1 en juin au festival de musique Osheaga en août. Une douzaine d’événements plus petits font vibrer les rues d’activités et d’animations, et beaucoup sont gratuites.

Une foule danse en plein air devant une scène.
Le Piknik Électronik existe depuis 2003.
PHOTO : PIKNIC ÉLECTRONIK MONTRÉAL/CANNELLE WIECHERT

La multiplication des festivals à travers le Canada au fil des années a conduit à une demande accrue de financement.

Et ce sont les événements gratuits qui sont particulièrement menacés, car ils dépendent des revenus de commandites, qui n’ont pas suivi le rythme des coûts de production et de main-d’œuvre. Ceux-ci ont grimpé en flèche pour atteindre les 40 % depuis la pandémie de COVID-19, a déclaré Martin Roy, président du Regroupement des événements majeurs internationaux (REMI).

Financement stagnant

Pendant ce temps, les deux principales sources d’aide financière fédérale pour les festivals ont largement stagné, dit-il. Alors que Québec a augmenté le financement de son programme d’aide aux festivals en 2022 – 85 millions de dollars sur 3 ans – les budgets de base du gouvernement fédéral n’ont pas progressé depuis plus de 15 ans selon Martin Roy.

Pendant ce temps, le nombre d’événements admissibles aux programmes fédéraux n’a fait qu’augmenter, ce qui signifie que de nombreux bénéficiaires de financement de longue date ont vu leurs subventions diminuer au fil du temps.

Selon les observations de Martin Roy, le nombre croissant de festivals au Canada a longtemps été vu comme un signe de force industrielle et culturelle, mais il croit que l’abondance aggrave le problème. À un moment donné, si les ressources n’augmentent pas, le nombre de festivals doit cesser d’augmenter, a-t-il déclaré.

Des rayons lumineux éclairent la scène dans une salle obscure, bondée de silhouettes noires.
MUTEK est un Festival international de créativité numérique et musiques électroniques.

Suzanne Rousseau et Alain Mongeau, qui ont fondé MUTEK et qui en assurent la direction, aimeraient que les programmes de financement donnent la priorité aux événements qui ont une valeur culturelle significative.

Alain Mongeau décrit l’inflation post-pandémie comme un mini-choc pour l’industrie des festivals montréalais. Nous allons devoir faire des choix radicaux, a-t-il déclaré. Nous allons peut-être réduire considérablement notre programmation. Je pense que tous les festivals se disent ça.

Un effet sur la santé économique de la ville

De telles réductions pourraient rendre les festivals canadiens moins attrayants pour les touristes, croit Martin Roy, qui prévoit que ceux-ci auront un effet plus dilué sur l’économie.

Éric Hamel, PDG de l’Association hôtelière du Grand Montréal, attribue en partie aux festivals et aux événements de la région la forte hausse du taux d’occupation des hôtels de la ville pendant les mois d’été.

Il fait remarquer que si ces événements ne se produisent pas, les personnes qui voyagent ici pour les affaires pourraient cesser de prolonger leurs visites, et les touristes auraient moins de raison de rester en ville. Selon lui, les gens d’affaires viendront pour leurs conférences, ils feront ce qu’ils ont à faire, puis ils rentreront à la maison.

Martin Roy affirme que l’effet d’entraînement économique des festivals représente un solide retour sur investissement pour les gouvernements : Je pense que c’est une bonne affaire.

Le festival Juste pour rire a rapporté des dizaines de millions de dollars à Montréal chaque année, a soutenu Andy Nulman, ancien PDG de l’événement, dans une récente entrevue. Il soupçonne que des difficultés de gestion sont derrière la situation financière désastreuse qui a amené Juste pour rire à annuler ses événements de 2024 et à se mettre à l’abri de ses créanciers. L’entreprise a cependant déclaré qu’elle espérait organiser à nouveau les festivals en 2025.

Un avertissement

Andy Nulman a expliqué que la situation du festival d’humour devrait servir d’avertissement à l’ensemble du secteur de l’événementiel. C’est une sonnette d’alarme qui signifie : réglez vos affaires et ne pensez pas que vous êtes invulnérables et que cela ne vous touchera pas, a dit celui qui siège également au conseil d’administration de Tourisme Montréal. Cela peut vous toucher et ça peut être encore pire que ça l’a été pour Juste pour rire.

Dans un communiqué, le cabinet de la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a souligné les centaines de millions de dollars que le gouvernement fédéral a consacrés à des programmes d’aide d’urgence aux festivals et événements majeurs depuis 2019, ainsi que des investissements supplémentaires pour des projets touristiques. Nous surveillerons la situation de près, a déclaré son bureau.

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Un producteur Suisse propose d’étendre un festival d’humour qu’il a créé en 2023, Exclam

Texte complet : Un festival d’humour cet été à Montréal serait encore possible

Un festival d’humour cet été à Montréal serait encore possible


Photo: Sameer Al-Doumy, Agence France-Presse
Déjà promoteur de festivals d’humour en France et en Afrique francophone, Grégoire Furrer et sa conjointe et partenaire d’affaires, Chloée Coqterre Bernier, ont débarqué au Québec l’an dernier avec Exclam, un événement qui demeure très modeste pour l’instant par rapport à Juste pour rire ou ComediHa!.

Étienne Paré
11 mars 2024
Culture

Acteur de premier plan dans l’industrie du rire, le Suisse Grégoire Furrer juge « catastrophique » qu’il n’y ait pas de festival d’humour cet été à Montréal. Pour remplacer Juste pour rire, le producteur propose d’organiser en juillet une édition bonifiée d’Exclam, un petit festival d’humour qu’il a mis sur pied ici l’an dernier dans la métropole. Pour y parvenir en si peu de temps, il tend aujourd’hui la main au milieu de l’humour québécois.

« Il ne faut pas laisser passer un été sans événement d’humour à Montréal. Ce serait catastrophique pour Montréal, pour le Québec, mais aussi pour toute l’industrie de l’humour dans le monde. Trop de gens seraient laissés sur le carreau. Il y en a qui risquent de perdre bien plus qu’un été s’il n’y a pas de festival. Ils risquent de perdre un job, de perdre une vocation. En effet, arrêter un événement, ça ne prend que quelques minutes, mais en rebâtir un à partir de rien ensuite, ça peut prendre des décennies », a fait valoir Grégoire Furrer, en entrevue au Devoir.

Il y a 35 ans, Grégoire Furrer a fondé le Festival du rire de Montreux, devenu depuis le Montreux Comedy Festival, l’un des événements phares dans l’industrie, qui réunit chaque année des humoristes des quatre coins de la francophonie. Plusieurs Québécois s’y sont déjà produits, comme Mike Ward, Virginie Fortin, Mehdi Bousaidan ou encore Maude Landry. Grégoire Furrer a toujours entretenu des liens étroits avec la Belle Province, d’autant que sa conjointe et partenaire d’affaires, Chloée Coqterre Bernier, est québécoise.

Déjà promoteur de festivals d’humour en France et en Afrique francophone, le couple a débarqué au Québec l’an dernier avec Exclam, un événement qui demeure très modeste pour l’instant par rapport à Juste pour rire ou ComediHa !. La seconde édition d’Exclam était prévue en mai, et la programmation devait être annoncée sous peu.

Mais les plans ont changé la semaine dernière, quand le Groupe Juste pour rire s’est mis à l’abri de ses créanciers, annonçant du même coup qu’il n’y aurait pas de festival cet été. Grégoire Furrer propose maintenant de déplacer son événement à la fin juillet, la période durant laquelle Juste pour rire a lieu normalement.

« Il faut absolument qu’il y ait un festival cet été à Montréal. C’est clair qu’en trois mois, on ne réussira pas à offrir quelque chose d’aussi important que Juste pour rire. Mais si on peut compter sur la collaboration du milieu, on peut espérer proposer une édition d’Exclam disons vitaminée par rapport à celle que l’on avait prévue en mai », croit Grégoire Furrer, joint depuis chez lui, à Los Angeles.

« C’est un risque énorme », convient-il. « Le risque est sûrement plus grand pour nous que le bénéfice qu’on pourrait en tirer. Mais c’est ça la différence entre un gestionnaire et un entrepreneur. Un gestionnaire ne prendrait jamais un risque comme celui-là à quelques mois d’avis dans un pays étranger. Il attendrait que la crise passe. Pas un entrepreneur. »

Pas de programmation gratuite

Pour essayer de convaincre les institutions et le milieu de déplacer Exclam en été, Grégoire Furrer peut compter sur l’appui de l’ancienne ministre caquiste de l’Environnement, MarieChantal Chassé, la présidente du conseil d’administration de l’organisme sans but lucratif à l’origine du jeune festival.

Il est également conseillé dans ce dossier par Jacques-André Dupont, ancien président-directeur général de Spectra, l’entité qui gère les Francos et le Festival international de jazz. « Nous avons déjà commencé à parler à des gens dans le milieu. La réponse est très bonne jusqu’ici. Grégoire a très bonne réputation », indique ce vieux routier de l’événementiel.

Jacques-André Dupont aura passé en tout 31 ans chez Spectra. Il a quitté l’entreprise, qui fait partie du Groupe CH depuis 2013, il y a quatre ans. Autant dire qu’il connaît très bien le modèle d’affaires des festivals extérieurs.

Mais si jamais Exclam a lieu en juillet, il n’y aura pas de programmation gratuite sur l’esplanade du Quartier des spectacles, comme d’ordinaire durant le festival Juste pour rire. Pour Jacques-André Dupont, le modèle d’affaires des festivals gratuits est en crise, et une réflexion sur sa viabilité s’impose.

« Quand Alain Simard a créé le Festival de jazz, en 1980, il n’y avait rien dans ce secteur-là. La Place des Arts était fermée en été et il n’y avait même pas de porte pour rentrer dans le Complexe Desjardins à partir de la rue Sainte-Catherine. Aujourd’hui, il y a des commerces partout. Eux profitent des Francos et du Jazz. Mais ça, ça veut aussi dire que les festivals vendent moins de bières et de t-shirts. Les revenus ont donc diminué, mais les coûts de production n’ont cessé d’augmenter » explique M. Dupont.

Un investisseur potentiel pour Juste pour rire ?

Le déclin des revenus est une des raisons parmi celles qui ont plombé le festival Juste pour rire. En lançant Exclam l’an dernier, Grégoire Furrer était-il déjà en train de placer ses pions en vue de la fin des activités du fleuron québécois ? L’entrepreneur helvète jure qu’il ne savait rien de l’état des finances de l’entreprise.

Nous avons déjà commencé à parler à des gens dans le milieu. La réponse est très bonne jusqu’ici. Grégoire a très bonne réputation.

— Jacques-André Dupont

« J’ai été surpris comme tout le monde en apprenant la nouvelle. Quand nous sommes arrivés au Québec avec Exclam l’an passé, c’était très clair dans notre plan d’affaires : nous arrivions dans un marché où l’on serait le troisième joueur. Notre but était d’être complémentaires à Juste pour rire et ComediHa !. Ça n’a jamais été notre intention de les remplacer », assure le président de GF Productions.

Sa société s’est démarquée de ses concurrents dans les dernières années par sa présence accrue sur les différentes plateformes numériques, comme Instagram et YouTube. Grégoire Furrer vient de mettre fin à un festival d’humour à Cannes qu’il avait récemment repris en main, mais il insiste pour dire que ses affaires vont plutôt bien.

Au moment de la chute de Gilbert Rozon, il avait démontré un intérêt à l’idée de reprendre Juste pour rire, avant de se désister. Pourrait-il cette fois participer au redressement du groupe ? « Il est encore trop tôt pour parler de ça. Si quelqu’un nous appelle pour regarder le dossier, on le regardera. Mais ce n’est pas la raison de notre sortie aujourd’hui », réitère Grégoire Furrer.

Le président de GF Productions n’a pas par ailleurs souhaité s’avancer sur ce qui, selon lui, pourrait expliquer les raisons des déboires de Juste pour rire. « Ce n’est pas à moi de juger de ce que Juste pour rire a fait de bien ou de mal. Après, ce que je peux dire, c’est que l’on doit réinventer notre modèle d’affaires continuellement. Notre industrie a changé. Il faut faire des choix, qui sont parfois difficiles », souligne-t-il.

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Permettez-moi de sortir de ma retraite pour rectifier les erreurs factuelles contenues dans la lettre d’opinion publiée jeudi par le titulaire de la Chaire de gestion des arts de HEC. Étonnamment, ce dernier semble mal informé sur la structure de financement des festivals et des émissions de télévision canadiennes, ce qui l’amène à porter des jugements qui remettent en question la pertinence des grands événements gratuits qui font la réputation de Montréal. Je reprends ici des passages de cette lettre que je souhaite rectifier.

Résumé

Réplique Nos festivals gratuits méritent plus de soutien

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

Concert présenté au Festival international de jazz de Montréal dans le Quartier des spectacles, en 2022

L’auteur réplique à la lettre d’opinion « Le festival Juste pour rire… et après ? », publiée le 7 mars dernier

Publié à 1h49 Mis à jour à 13h00

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Alain Simard

Alain Simard Fondateur du Festival international de jazz de Montréal, des Francos, de Montréal en lumière et de Nuit blanche à Montréal

Permettez-moi de sortir de ma retraite pour rectifier les erreurs factuelles contenues dans la lettre d’opinion publiée jeudi par le titulaire de la Chaire de gestion des arts de HEC. Étonnamment, ce dernier semble mal informé sur la structure de financement des festivals et des émissions de télévision canadiennes, ce qui l’amène à porter des jugements qui remettent en question la pertinence des grands événements gratuits qui font la réputation de Montréal. Je reprends ici des passages de cette lettre que je souhaite rectifier.

« La structure de Juste pour rire, du Festival international de jazz de Montréal et des Francos est la même […] Les profits sont gardés dans l’entreprise à but lucratif et les dépenses sont affectées à l’OBNL. »

C’est absolument faux. Sur quelle légende urbaine se base-t-il pour affirmer cela ? Désolé, monsieur Colbert, les organismes subventionneurs ont accès aux bilans vérifiés des festivals sans but lucratif, comme de ceux de leurs compagnies apparentées, et sont très stricts sur leurs potentiels conflits d’intérêts. Ils subventionnent une partie de leurs dépenses de développement touristique et culturel, d’infrastructures et de sécurité publique.

« L’entreprise à but lucratif récupère tout ce qui fait de l’argent (captation de télévision, vente de boisson sur le site, etc.). »

Tout d’abord, comment un économiste peut-il ignorer qu’un OBNL ne peut pas produire lui-même de télévision au Canada, puisque la production télévisuelle se finance en majeure partie par les crédits d’impôt provinciaux et fédéraux qui ne sont pas accessibles aux OBNL puisqu’ils ne paient pas d’impôt ?

D’ailleurs, les festivals que j’ai fondés ne reposent pas du tout sur le même modèle d’affaires que Juste pour rire, ne pouvant bénéficier d’opérations de télévision rentables. Le jazz et la chanson francophone ne font pas 10 % des cotes d’écoute des émissions d’humour. En passant, cela fait près de 20 ans que Spectra s’est retiré de la production de télévision qui s’avérait non rentable…

Le modèle d’affaires de JPR est totalement différent, puisqu’il s’agit d’abord d’une grosse machine de télévision internationale qui dépasse le seul festival, notamment avec ses captations de gros noms américains et ses capsules humoristiques qu’on voit partout dans le monde, même dans les avions. J’espère vraiment que le festival Juste pour rire pourra revenir l’an prochain, car c’est une grande perte pour Montréal.

Ensuite, contrairement aux affirmations de M. Colbert, les ventes de boissons et de souvenirs étaient effectuées par nos festivals, qui en gardaient tous les surplus pour le financement de leurs spectacles gratuits. Le seul Festival de jazz pouvait générer des revenus autonomes allant jusqu’à 4 millions par année avec ses ventes quand il n’y avait pratiquement aucun restaurant sur le site et que le Complexe Desjardins et la Place des Arts offraient deux murs aveugles sur Sainte-Catherine.

Avec le succès de nos festivals, les trois seuls à se tenir alors gratuitement autour de la Place des Arts, le Quartier des spectacles s’est développé avec ses places publiques, attirant plusieurs autres évènements qui ont repris la formule pour faire de Montréal « la ville des festivals », générant plus d’un milliard de dollars de développement immobilier. Cela devrait sonner une cloche aux oreilles d’un économiste.

On y trouve maintenant des centaines de nouveaux commerces, restaurants et bars qui refusent malheureusement de contribuer au financement des spectacles gratuits qui leur rapportent tant, alors que les ventes des festivals sur le site ont fondu sous la barre du demi-million. Il faut absolument trouver une façon de corriger cette injustice qui met en péril les festivals, dont la mission première n’est pas de vendre de la bière et des t-shirts.

« Ceux qui ont vendu leurs festivals pour des dizaines de millions. »

Personne n’a pu vendre des OBNL qui ne leur appartenaient pas, mais seulement leur contrat de maîtrise d’œuvre assorti d’un code d’éthique approuvé par les gouvernements pour assurer que les OBNL étaient bien les seuls bénéficiaires de leurs subventions et leurs surplus. Et ces contrats de gestion ne valaient certainement pas des dizaines de millions !

Quand L’Équipe Spectra a été vendue au Groupe CH, ce dernier achetait aussi ses filiales de production de spectacles, d’expositions, son agence d’artistes, sa maison de disques Spectra Musique et surtout ses salles de spectacle comme le Métropolis, pour lequel nous avions déjà reçu des offres de plus de 10 millions.

« Pour ce qui est de l’argument des retombées économiques, c’est de la foutaise. »

Demandez donc aux hôteliers, restaurateurs, compagnies aériennes, Tourisme Montréal et la Chambre de commerce s’ils pensent que c’est de la foutaise. En affirmant que les retombées économiques sont calculées selon les participants qui viennent de plus de 40 km de Montréal alors qu’ils sont comptabilisés séparément des touristes hors Québec – de qui provient la majorité des dépenses touristiques –, il fait fi du fait que le ministère du Tourisme a depuis longtemps resserré ses règles. D’ailleurs, lorsque j’étais président du Festival de jazz, je me faisais un point d’honneur d’annoncer uniquement les dépenses en argent « neuf » provenant des touristes étrangers venus principalement à Montréal pour y assister.

Contrairement aux festivals à but lucratif tenus partout dans le monde sur un site fermé payant, nos festivals urbains gratuits – qui sont les plus importants dans leur catégorie – ne peuvent profiter d’une clientèle captive pour vendre en exclusivité boissons, nourriture et souvenirs. Et ils n’ont aucun revenu provenant d’un prix d’entrée, puisqu’ils se tiennent sur la place publique.

Heureusement, les achalandages record générés par cette formule unique d’évènements urbains gratuits leur permettent encore d’aller chercher de grands commanditaires qui les appuient à coups de millions pour financer leurs spectacles gratuits et l’aménagement du site extérieur du Quartier des spectacles.

Reste que les évènements gratuits du Quartier des spectacles souffrent forcément d’un vice structurel de financement, même s’ils enrichissent toute la société, tant culturellement, socialement qu’économiquement.

Sans compter l’impact sur la réputation de notre ville et sa qualité de vie. L’accès des jeunes, des moins fortunés et des communautés culturelles aux différentes formes d’art vaut certainement l’investissement essentiel de nos gouvernements.

Force est de constater que leur structure de financement ne peut être comparée avec les « festivals normaux », comme le fait M. Colbert. Déménager tous les festivals gratuits sur un site payant n’est pas une solution. Juste pour rire l’a déjà fait au Vieux-Port et n’attirait pas 5000 personnes par jour à seulement 3 $ le billet quotidien.

Néanmoins, les malheurs de Juste pour rire provoquent aujourd’hui une prise de conscience sur la nécessité de trouver une solution pérenne pour assurer l’avenir de nos grands événements d’animation urbaine. Même s’ils bénéficient toujours de l’amour du public montréalais, je demeure inquiet pour la survie de la « poule aux œufs d’or » pour les marchands de notre ville, surtout si on continue de la tenir pour acquise et oublions de la nourrir.

Lisez la lettre « Le festival Juste pour rire… et après ? »

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Jacques Primeau ne pouvait quitter la direction de Montréal en lumière sans lancer un cri d’alarme pour protéger les grands festivals de la métropole qui traversent actuellement une crise majeure.
Publié à 0h47 Mis à jour à 7h15

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Sauver nos festivals comme on l’a fait avec le Grand Prix

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Jacques Primeau quitte la direction de Montréal en lumière.


Mario Girard
Mario Girard La Presse

Jacques Primeau ne pouvait quitter la direction de Montréal en lumière sans lancer un cri d’alarme pour protéger les grands festivals de la métropole qui traversent actuellement une crise majeure.

Publié à 0h47 Mis à jour à 7h15

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« Il y a quelques années, on a vu une incroyable mobilisation pour éviter que le Grand Prix nous échappe. Là, c’est plus que ça. On pourrait perdre une partie de l’ADN de Montréal. Le centre-ville est le poumon de Montréal. Il faut s’en occuper. »

Je me suis entretenu avec celui qui s’est fait connaître comme le « gérant de RBO » alors qu’il venait de vivre sa dernière édition de Montréal en lumière. L’homme en avait long à dire.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

La Nuit blanche de Montréal en lumière, au début du mois, a attiré des milliers de festivaliers au centre-ville de Montréal.

Avec les effets du télétravail, les activités culturelles deviennent une source de revenus majeure pour le centre-ville. Les festivals sont une incroyable attraction. Il faut être conscient de ça.

Jacques Primeau

Jacques Primeau tire sa révérence au moment où un fleuron montréalais, le festival Juste pour rire, bat sérieusement de l’aile. À ce sujet, il tient à préciser une chose. « Il faut faire une distinction entre la problématique de Juste pour rire et la situation qui touche les autres festivals. Ce qui se passe actuellement, c’est que le Quartier des spectacles s’est développé, les gens viennent autant, sinon plus, mais ils dépensent moins. Il y a donc une perte de revenus. »

Parmi les solutions qui pourraient permettre la survie des festivals montréalais, Jacques Primeau cible une aide financière provenant de ceux qui « bénéficient des retombées » du Quartier des spectacles : les commerçants, les propriétaires de bar, les restaurateurs et même les promoteurs immobiliers.

« Il faut analyser les retombées économiques des festivals et voir à qui ça profite, dit-il. Il faut ensuite se demander si on est appuyé de façon équitable par ceux-ci. Selon moi, il y a un effort de plus qui peut être fait. Est-ce que ça peut venir des propriétaires immobiliers qui ont énormément profité du boom du Quartier des spectacles ? Est-ce qu’on doit regarder du côté de la valeur immobilière de ce secteur qui a grandement augmenté ? Je n’ai pas la réponse. Il faut tout scruter. »

Beaucoup de discussions entre la Ville de Montréal, le Partenariat du Quartier des spectacles, Tourisme Montréal, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Montréal centre-ville et de nombreux festivals ont lieu depuis quelques mois.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Jacques Primeau, directeur général sortant du Quartier des spectacles

Je peux vous assurer que tout le monde se parle en ce moment. Il faut avoir de l’envergure et de l’ambition. Il ne faut pas juste maintenir les festivals en vie, il faut les développer davantage.

Jacques Primeau

La chose m’a été confirmée par Ericka Alneus, responsable de la culture au comité exécutif de la Ville de Montréal. « Il est trop tôt pour annoncer un plan, mais chose certaine, on est dans un nouveau paradigme et il faut ajuster les choses en conséquence. […] Concernant une taxe spéciale, il nous manque plein de données pour prendre une décision éclairée. »

Si le public vient en si grand nombre dans les festivals, c’est parce que de nombreux grands évènements sont gratuits. Serions-nous prêts à revoir ce modèle ? En entrevue samedi dernier à l’émission Les faits d’abord, Jacques Primeau a reconnu que le système payant mis de l’avant par le Festival d’été de Québec est une bonne chose, mais estimé que cela serait difficilement réalisable sur le site de la place des Festivals.

« Je défends la gratuité parce qu’elle joue un rôle important dans le développement du public et la démocratisation de la culture. Et puis, il faut se le dire, ça favorise les rassemblements sociaux à une époque où l’on s’envoie des invectives sur les réseaux sociaux. »

Un autre aspect qui pourrait améliorer le sort des festivals montréalais est la piétonnisation permanente de la rue Sainte-Catherine (tronçon De Bleury–Saint-Laurent). Vous me direz que c’est déjà pas mal le cas depuis quelques années, mais Jacques Primeau croit qu’une fermeture durable offrirait plus de latitude aux organisateurs.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Le sentier de patin lors de la Nuit blanche

« Avec la création d’une immense place publique, on pourrait entrevoir une pérennisation, imaginer autrement le mobilier urbain et les installations. On pourrait avoir une vision artistique plus audacieuse. »

Ericka Alneus hésite à confirmer la chose, se contentant de dire qu’il y a un « appétit » pour la piétonnisation. « Pour le moment, on applique la formule du renouvellement chaque année. » Mais quand je lui ai soumis l’idée de raccorder le tronçon de la place des Festivals à celui du Village gai (Saint-Hubert–Papineau), elle m’a dit ceci : « J’écoute votre suggestion avec attention. »

L’aménagement de l’esplanade Tranquille est venu compléter le vaste tableau du Quartier des spectacles rue Sainte-Catherine. Du travail reste maintenant à faire du côté de la rue Saint-Denis. Les projets de l’École de l’humour et de la Maison de la chanson seront des atouts importants. « C’est ce qu’on voulait au départ, créer une concentration d’organismes culturels, dit Jacques Primeau. Mais la chose la plus importante à réaliser, c’est la qualité du contenu. Il faut avoir les moyens de s’offrir ça. »

Je ne peux pas croire qu’avec son riche bagage (président de l’ADISQ de 2000 à 2003, président et vice-président du conseil du Partenariat du Quartier des spectacles de 2012 à 2019, membre du conseil d’administration de la Société de développement des entreprises culturelles), Jacques Primeau ira maintenant gérer la carrière de ses artistes tout en cultivant des tomates ?

« Je serai franc, je n’ai rien contre le concept de retraite, mais pour le moment, je ne suis pas pratiquant. Je vais continuer à m’occuper de mes artistes, mais pour le reste, on verra bien ! »

Les retombées de Montréal en lumière (édition 2023)

  • 88 435 nuitées à Montréal attribuables à l’évènement
  • 96 % : taux d’occupation des 40 restaurants participants des Bonnes Tables
  • 70 000 visites aux patinoires
  • 30 000 spectateurs aux 19 concerts
  • 3642 mentions dans des médias du Canada, de la France, des États-Unis et de la Belgique
  • 100 journalistes, dont 37 provenant de l’international
  • 445,94 $ : dépense moyenne par personne provenant de l’extérieur de Montréal

Étude réalisée par KPMG en 2023

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La Ville prépare déjà les événements des fêtes avec un appel à projets!

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La programmation du Festival de jazz a été dévoilée hier

La programmation sur le site Web :

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Même si au final la somme était relativement petites face à toutes les dettes, c’est quand même plutôt surprenant qu’une entreprise de cette taille n’avait pas de balises en place pour éviter une fraude aussi simple

Dévoilement de la programmation des Francos

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Nouveau festival au parc Jean-Drapeau 6 et 7 septembre : Palamosa

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Le volet musical, les block parties, du festival Mural se passe au Bassin Peel cette année

J’entendais des rumeurs depuis l’an dernier que le festival visait le bassin Peel comme emplacement pour les concerts puisque l’ancien site sur Saint-Laurent est maintenant le futur Musée de l’Holocauste

https://muralfestival.com/fr/festival/programmation/

ce serait bien que le festival en profite pour faire une murale sur le viaduc de l’autoroute Bonaventure… c’est juste des tags actuellement :expressionless:

je pense que je suis rendue trop vieille, je ne connais aucun des artistes… :woman_shrugging:t2:

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