Environnement, biodiversité et transition écologique

Fleurs coupées L’industrie d’ici croît

X PHOTO MAÏTÉ BELMIR, COLLABORATION SPÉCIALE

Les fleurs cultivées au Québec sont rares. On va les chercher aussi loin qu’en Équateur.

Les ventes de fleurs coupées progressent chaque année au Canada. Mais souvent, les fleurs parcourent jusqu’à 10 000 kilomètres avant de se retrouver sur la table de votre salon. Pourtant, de nombreuses cultures existent au pays.

Publié à 5h00

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Maïté Belmir Collaboration spéciale

L’Île-du-Prince-Édouard moins loin que l’Équateur

« Chaque année, on cultive plus de 10 millions de tulipes. Quand on prend notre rythme de croisière, on arrive à planter jusqu’à 250 000 tulipes à la main chaque jour », déclare avec fierté Ann Carrière, responsable du développement des affaires de Vanco Flowers Ltd. L’entreprise se trouve à l’Île-du-Prince-Édouard. Ann Carrière vit à Montréal. Elle connaît bien l’entreprise qu’elle a vu grandir au cours de la dernière décennie.

L’entreprise se situe à 20 minutes de voiture à l’est de Charlottetown, capitale de l’île, autrefois appelée « le jardin du golfe ». Initialement productrice de pommes de terre, Vanco Farms a lancé la culture de tulipes en 2006, avec Vanco Flowers.

Tout est cultivé dans des serres gigantesques, de presque 90 000 pieds carrés. Les bulbes sont plantés puis entreposés au froid pendant six semaines pour simuler l’hiver. On les sort ensuite pour les mettre en serre afin de reproduire le printemps et déclencher la pousse. Les centaines de rangées de fleurs sont complètement automatisées, pour les déplacer à tour de rôle, afin d’être coupées à la main. Les tulipes de Vanco Flowers sont vendues au Québec, en Ontario et même dans le nord des États-Unis, et transportées grâce à un parc de camions géré par l’entreprise elle-même.

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Les cultures de fleurs sont souvent faites en serre. Ici, chez Vanco Farms.

Vanco Flowers a développé un savoir-faire qui lui permet de pallier les enjeux climatiques de la région. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles Bastiaan Arendse, copropriétaire de l’entreprise, est arrivé des Pays-Bas pour apporter son expertise. L’homme est créatif et regorge de nouvelles idées pour développer l’entreprise, comme de cultiver de la paille pour chauffer les serres, ce qui permet à l’entreprise d’être autosuffisante énergétiquement.

Pourtant, en dépit de l’exemple de réussite de Vanco Flowers, l’Île-du-Prince-Édouard n’a pas d’aide consacrée pour soutenir cette industrie, indique Vicky Tse, responsable des communications au ministère du Développement économique, de l’Innovation et du Commerce de l’Île-du-Prince-Édouard.

De la ferme aux grossistes

C’est dans une zone industrielle de Saint-Laurent que se situe l’entreprise FleuraMetz. Il s’agit d’un des neuf grossistes en fleurs au Québec, qui ont pour mission de commander les fleurs, pour ensuite les vendre auprès de 700 fleuristes de la province. Derrière les murs du bâtiment se trouvent les réfrigérateurs où sont conservées les fleurs, des zones de chargement pour les camions et les bureaux administratifs.

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Alex Léveillé, directeur commercial de FleuraMetz

On ne vend pas de fleurs cultivées au Québec. C’est une de nos lacunes. La majorité des fleurs cultivées au Canada ont poussé en Ontario. Cela représente environ 6 % de nos ventes.

Alex Léveillé, directeur commercial de FleuraMetz

L’entreprise est d’ailleurs un des distributeurs des tulipes de Vanco Flowers.

Quelque 30 % des fleurs vendues à FleuraMetz sont importées d’Équateur, explique Alex Léveillé, installé dans une grande salle de réunion qui lui sert de bureau. Au Canada, les importations de fleurs de Colombie et d’Équateur cumulées représentent 70 % des fleurs importées, lesquelles représentent elles-mêmes plus des trois quarts des fleurs vendues. Pour arriver jusqu’au pays, les fleurs sont transportées dans des avions réfrigérés jusqu’à Miami, en Floride. Ensuite, ce sont des camions, eux aussi réfrigérés, qui vont traverser les États-Unis et une partie du pays pour arriver jusqu’aux grossistes du Québec et de l’Ontario.

Avec des exemples de culture en serre à grande échelle dans le pays, on peut imaginer les occasions de développement économique.

Du local aussi pour les fleurs

La région de Niagara, en Ontario, est connue pour sa route des vins, mais on y trouve aussi beaucoup de fermes, dont des cultures de fleurs. Palatine Fruit & Roses cultivait des fruits avant de se lancer dans la culture de roses en champ, au début des années 2000.

Eva Schmitz est la copropriétaire de Palatine Fruit & Roses. Au cours de l’entrevue, elle porte un chandail avec le logo de l’entreprise, et elle a les mains d’une personne qui travaille la terre.

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Eva Schmitz, copropriétaire de Palatine Fruit & Roses

Je suis allée en Allemagne plusieurs fois pour comprendre comment fonctionne la culture de roses en champ. C’était un long apprentissage, mais aujourd’hui nous avons des variétés qui se sont adaptées au climat et à la région.

Eva Schmitz, copropriétaire de Palatine Fruit & Roses

Selon Statistique Canada, l’Ontario était le plus grand cultivateur et plus important vendeur de fleurs coupées au pays en 2022.

Consultez le site de Statistique Canada

La ferme d’Eva Schmitz est une des seules à cultiver des roses dans la région de Niagara. Mais la rose est directement en concurrence avec les pays du Sud : « Même si l’on ne sent pas la concurrence à la boutique, on s’en rend vraiment compte lorsque l’on va aux enchères. Les fleurs qui viennent de l’étranger sont un vrai problème. Les gens de Niagara se déplacent à la ferme, mais pour les habitants de Toronto par exemple, c’est plus complexe. Ils font avec ce qu’ils trouvent à proximité de chez eux. »

Malgré les obstacles que le marché rencontre, Eva Schmitz est fière d’avoir réussi à cultiver des roses dans sa région : « Peu importe qui travaille à la ferme, ou quels clients viennent en acheter, toutes les personnes ont le sourire. Les fleurs nous rendent heureuses et heureux. C’est vraiment une chance de travailler avec un produit comme celui-là. »

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Caroline Vouligny, propriétaire de la ferme Pivoine Capano, à Saint-Augustin-de-Desmaures, près de Québec.

Les fleurs coupées du Québec se professionnalisent

Le nombre de fermes florales a triplé en cinq ans au Québec. Dans la majorité des cas, il s’agit de petites entreprises artisanales. Pour autant, l’industrie s’organise et perfectionne son savoir-faire.

« On s’apprête à vivre notre deuxième saison. On sait davantage à quoi s’attendre, on est plus en contrôle et mieux préparés », s’exclame en souriant Caroline Vouligny, propriétaire de la ferme Pivoine Capano, à Saint-Augustin-de-Desmaures, près de Québec. Elle s’est lancée dans l’aventure et a racheté cette ferme en 2021.

La ferme qui se trouve le long du fleuve cultive exclusivement des pivoines. « C’est une fleur hâtive, on a besoin de beaucoup de variétés pour en offrir le plus longtemps possible. » Elle fait pousser plus de 200 variétés, sur un terrain de 1,5 hectare composé de 12 000 plants de pivoine. Au total, la récolte va durer six semaines. Un travail intense accompli dans une courte durée.

Les consommateurs se sont peut-être habitués à trouver des fleurs tout au long de l’année grâce à l’importation, mais Caroline Vouligny ne voit pas la saisonnalité comme une contrainte.

La saison des fraises du Québec, c’est au mois de juin. Le temps des sucres, c’est aussi une courte période. Je pense que ça ajoute quelque chose à l’excitation d’attendre le bon moment. Et on en profite pleinement.

Caroline Vouligny, propriétaire de la ferme Pivoine Capano

Pour elle, l’aspect éphémère d’une fleur locale est synonyme de découvrabilité : « Si on commence à s’intéresser vraiment aux fleurs de saison, on peut en découvrir plein de nouvelles variétés, plutôt que de s’accrocher à une fleur qu’on espère avoir le plus longtemps possible. »

PHOTO MAÏTÉ BELMIR, COLLABORATION SPÉCIALE

Les producteurs de fleurs coupées s’organisent ensemble pour accroître leurs marchés. Ici chez Vanco Farms.

Vers une organisation de l’industrie québécoise

Caroline Vouligny est claire : « Chaque ferme est unique, il n’y a pas un modèle de ferme de fleurs. » Récemment, l’entraide et la solidarité entre les fermes se sont développées. Avec le groupe Facebook Les Fermières-Fleuristes du Québec créé il y a quatre ans et qui compte près de 600 membres, les propriétaires de fleurs échangent, partagent leur réalité respective et s’entraident dans leur activité.

« Les producteurs de fleurs coupées sont en train de s’organiser pour mieux collaborer. Un des objectifs est de sensibiliser les fleuristes et des grossistes pour inciter à l’achat local », explique Caroline Martineau, conseillère régionale en agroenvironnement et horticulture ornementale au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). Quand Caroline Martineau a commencé l’inventaire des fermes de fleurs au Québec il y a quelques années, il y en avait une quarantaine. Aujourd’hui, on compterait plus de 120 productions.

PHOTO MAÏTÉ BELMIR, COLLABORATION SPÉCIALE

Les producteurs qui démarrent peuvent profiter du soutien offert aux entreprises agricoles. Ici, un champ de pivoines de la ferme Pivoine Capano.

Le MAPAQ ne propose pas encore d’aide destinée aux fermes de fleurs coupées. Mais les producteurs qui démarrent peuvent profiter du soutien offert aux entreprises agricoles.

« Ce que je remarque, c’est que le milieu s’organise. Avant, chacun était dans ses petites affaires. Mais je pense qu’en se rassemblant, ça va faire plus parler des fleurs d’ici, les faire connaître aux gens », confie-t-elle d’un ton déterminé.

C’est d’ailleurs dans cette démarche qu’est organisée la troisième édition de la Semaine des fleurs cultivées au Québec partout dans la province, qui se termine le 16 juillet. Une belle occasion de valoriser les fleurs d’ici.

Consultez la page Facebook de la Semaine des fleurs cultivées au Québec

Vers une certification Fleurs du Québec

Le logo Aliments du Québec permet de facilement identifier les produits d’ici. Mais selon Caroline Martineau, le marché n’est pas encore assez à maturité pour une certification Fleurs du Québec : « Il faudrait créer un bureau de vérification. Cela engendre des coûts et un cahier des charges contraignant. »

L’identification des fleurs du Québec est aussi une des cinq recommandations proposées par Les producteurs en serre du Québec, dans un rapport publié en décembre 2022.

Consultez le rapport des Producteurs en serre du Québec

La représentante du MAPAQ concède toutefois qu’une valorisation des fleurs du Québec, comme cela est fait pour les fraises du Québec par exemple, est une idée à considérer. Quant à la certification, il faudra encore attendre.

Ce reportage a été rendu possible grâce à une bourse d’excellence de l’Association des journalistes indépendants du Québec.

Énergie thermique et éolienne Une catastrophe écologique méconnue… aux Îles-de-la-Madeleine

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

L’île du Havre aux Maisons, aux Îles-de-la-Madeleine

Me voilà enfin arrivé aux Îles-de-la-Madeleine, véritable paradis sur Terre. Avec ses immenses plages immaculées, ses couchers de soleil à couper le souffle, ses habitants chaleureux, son eau de mer cristalline… et bien sûr, son vent perpétuel qui en font un eldorado pour les amateurs de kitesurf.

Publié à 1h22 Mis à jour à 13h00

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Ugo Monticone Écrivain et conférencier

Mais à peine débarqués du traversier, une vision moins idyllique s’offre à nous : l’immense centrale thermique d’Hydro-Québec et ses six énormes cheminées « éternelles comme l’enfer ».

Le dépliant touristique la présente comme la plus grande centrale thermique à moteurs diesel du Québec. Mais la vérité est tout autre : c’est du mazout lourd qui y est brûlé. Et vous ne devinerez jamais la quantité… 40 millions de litres de mazout lourd brûlés chaque année, pour subvenir aux besoins des 13 000 habitants des îles. C’est plus de 3000 litres par habitant par an !

Cette centrale électrique est non seulement la plus polluante de tout le Québec, émettant chaque année 125 000 tonnes de gaz à effet de serre, mais elle rivalise également avec nos alumineries et cimenteries comme plus grande pollueuse de la province, tous secteurs confondus.

Quarante millions de litres de mazout, ce n’est pas donné, et les prix ne cessent d’augmenter. Le coût de production de cette centrale s’élève actuellement à 47 cents par kilowattheure (kWh), alors que les résidants des îles ne paient qu’environ 7 cents par kWh. Le reste de la facture est refilé à l’ensemble des Québécois, c’est donc nous tous qui finançons, à notre insu, ce cancre de la production électrique.

Le paradis du vent

Mais où sont les éoliennes dans ce paradis du vent perpétuel ? À ce jour, on n’en dénombre que deux sur tout l’archipel, fournissant à peine 15 % de la production totale d’énergie. Hydro-Québec prévoit en installer jusqu’à quatre supplémentaires d’ici 2027, avec comme objectif de couvrir 40 % de la production des îles. Or, 40 % de la production, cela laissera toujours des dizaines de millions de litres de mazout lourd brûlés chaque année.

Les six énormes moteurs, dont la durée de vie était estimée à 80 000 heures lors de l’inauguration en 1991, continuent de tourner malgré leurs 120 000 heures d’utilisation, avec les coûts de maintenance que cela implique.

Bien sûr, l’arrivée des éoliennes suscite des débats parmi les Madelinots. Certains s’inquiètent pour les 80 emplois très bien rémunérés de la centrale, alors qu’Hydro-Québec s’est engagée à les maintenir. Et la Régie de l’énergie distribue actuellement deux millions de dollars par éolienne par an aux MRC des Îles pour compenser les éventuels effets néfastes.

PHOTO TIRÉE DE WIKIPÉDIA

La centrale thermique de Cap-aux-Meules, aux Îles-de-la-Madeleine

D’autres ont peur que les éoliennes ne nuisent à la nature fragile des Îles, malgré les études environnementales requises, ou même qu’elles rebutent les touristes, principale source de financement de l’archipel.

Virer de bord

En tant que visiteur, je peux les rassurer en avouant que je préférerais largement voir des éoliennes tourner gracieusement au vent plutôt que de croiser ce monstre thermique de pollution. Malheureusement, en visitant les îles, je contribue malgré moi à nourrir cette bête qui pourrait un jour nous engloutir.

Mais de combien d’éoliennes parle-t-on ?

La consommation d’électricité des îles est d’environ 20 MW en été et 30 MW en hiver. Avec une capacité de 4 MW par éolienne, il suffirait d’en construire 8 au total dans tout l’archipel pour répondre à 100 % des besoins.

De plus, la nouvelle filiale d’Hydro-Québec, EVLO, propose déjà à travers le monde sa technologie de stockage de l’énergie éolienne par batterie, ce qui pourrait compenser pour les rares jours sans vent. Mais soyons réalistes, ces jours-là sont extrêmement rares aux Îles-de-la-Madeleine. Comme le disent les Madelinots : « Ici, le seul moment où il n’y a pas de vent, c’est lorsqu’il vire de bord. »

La centrale thermique des îles représente à elle seule 40 % des émissions totales de gaz à effet de serre d’Hydro-Québec, même si l’on prend en compte les autres centrales thermiques et tout son parc de camions. Il est grand temps de ne plus considérer ce problème comme une simple question régionale, mais bien de le placer au rang des priorités nationales.

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Pour illustrer cette consommation, c’est l’équivalent de 4 bouteilles comme celle-ci:

De mazout lourd, par jour, par personne! Ça me semble vraiment beaucoup, normalement est-ce qu’une centrale thermique brûle moins que cela?

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Transition énergétique à Lac-Mégantic Une caserne alimentée par le soleil

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La municipalité de Lac-Mégantic, avec sa nouvelle caserne (portes rouges)

Avec ses six immenses portes de garage rouge pompier, la nouvelle caserne de Lac-Mégantic est l’un des bâtiments les plus impressionnants de la municipalité. Ses attraits les plus époustouflants sont pourtant invisibles de la rue, puisqu’il s’agit de la première caserne coiffée de panneaux solaires au Québec. Visite guidée.

Publié à 1h24 Mis à jour à 5h00

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Ariane Krol
Ariane Krol La Presse


Robert Skinner
Robert Skinner La Presse

(Lac-Mégantic) Dans ce bâtiment à l’usage des pompiers, c’est par une échelle qu’on accède au sommet de l’édifice. En sortant par la trappe qui débouche sur le toit, on se retrouve dans une petite mer de panneaux solaires – 144 plaques sombres miroitant même par temps couvert.

Ce sont des panneaux bifaciaux, les premiers à Lac-Mégantic, souligne Mathieu Pépin, chargé de projet en transition énergétique à la Ville de Lac-Mégantic.

Si la membrane de la toiture est claire, ce n’est pas seulement pour éviter de créer un îlot de chaleur. Elle réfléchit les rayons solaires, qui viennent ainsi frapper le dessous des panneaux, également générateurs d’électricité. En comparaison des panneaux monofaciaux traditionnels, dont seule la face supérieure peut s’activer, « l’efficacité est améliorée d’environ 30 % », explique M. Pépin.

Un étage plus bas, dans une petite pièce ressemblant à une salle de serveurs, des batteries permettent d’emmagasiner cette énergie captée du ciel.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Le système de gestion, de contrôle et de stockage d’énergie de la caserne.

Si un tel système combinant panneaux solaires et batteries frappe l’imagination, ce n’est pas la mesure la plus rentable dans le contexte québécois, précise le spécialiste en transition énergétique. « Le coût de l’électricité est tellement bas qu’on peut parler d’un retour sur l’investissement de plus de 15 ans sur le panneau solaire [alors que] sa durée de vie est de 15 à 20 ans. »

Efficacité énergétique

Pour augmenter l’efficacité énergétique, il faut commencer par rehausser l’enveloppe du bâtiment. « La meilleure économie d’énergie, c’est l’énergie qu’on ne consomme pas. Meilleure est l’isolation, moins on a besoin de chauffer les lieux », illustre M. Pépin, en attirant notre attention sur l’épaisseur des murs.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Le chargé de projet en transition énergétique à la Ville de Lac-Mégantic, Mathieu Pépin, devant les panneaux solaires de la nouvelle caserne

La mécanique de ce bâtiment contribue aussi à sa performance. Le vaste garage est équipé d’un plancher radiant. « Cela rehausse la sensation de chaleur et permet même de l’abaisser un peu sans avoir l’impression que c’est moins confortable. »

Un système de récupération de la chaleur et des thermopompes permettent aussi de réduire la quantité d’énergie requise pour tempérer l’air frais amené de l’extérieur pour ventiler la bâtisse. Des systèmes de contrôle aident aussi à gérer les appels de puissance (la consommation d’énergie à des moments précis), qui ont un impact sur la facturation.

En comparaison avec un bâtiment répondant aux exigences minimales, cette caserne pourrait consommer jusqu’à 20 % moins d’énergie, et la facture d’électricité s’en trouverait allégée de plusieurs milliers de dollars par an, suggèrent des estimations préliminaires.

Quant à sa production d’énergie solaire, elle atteindrait 82,35 mégawattheures (MWh) par an, avec un pic mensuel de 9,6 MWh en juillet.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Le garage, dont l’ouverture des portes entraîne d’importantes pertes de chaleur, est équipé d’un plancher radiant.

Reliée au microréseau

Cette caserne est le plus récent ajout au microréseau électrique du centre-ville de Lac-Mégantic, mis en service par Hydro-Québec à la fin de 2020. Ce projet intègre une trentaine de bâtiments coiffés de quelque 2200 panneaux solaires, dont environ 1700 sur le toit du centre sportif.

Ce parc solaire en hauteur totalise près de 800 kW de puissance installée, auquel s’ajoute un système de stockage pouvant emmagasiner environ 700 kWh. Toute cette énergie contribue à alimenter les bâtiments et installations reliés au microréseau, dont l’éclairage urbain situé à l’intérieur du périmètre.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La nouvelle caserne de Lac-Mégantic, inaugurée au printemps.

Même par temps pluvieux, le solaire fournit jusqu’à 31 % de l’énergie consommée par les bâtiments du réseau, avons-nous pu constater sur l’écran de données en temps réel installé au centre-ville. Par beau temps estival, ça peut atteindre 100 %.

Dans la semaine précédant notre visite, au début de juin, « il y a eu deux belles journées où on a été en opération d’îlotage, donc complètement déconnectés du réseau principal d’Hydro-Québec », s’enthousiasme M. Pépin.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Plaque commémorative installée sur un mur de la nouvelle caserne rendant hommage aux pompiers ayant combattu le tragique incendie provoqué par le déraillement d’un train pétrolier, en 2013.

Par l’une des fenêtres de la caserne, il nous montre une puissante borne de 180 kW pour les véhicules électriques, près de la vieille gare. Une borne de recharge rapide connectée, elle aussi, au microréseau.

« Donc quand on est en îlotage, on peut dire que l’énergie que tu mets dans ta voiture provient du soleil. Je trouve ça génial ! », s’exclame le chargé de projet.

Le Circuit électrique d’Hydro-Québec compte seulement une vingtaine de ces bornes de 180 kW dans toute la province. Et Lac-Mégantic a été la troisième ville à en avoir une, après Trois-Rivières et Stoneham, dans la région de Québec.

« Nous, dans le fond du creux du Québec, on vient de prouver que tu peux te rendre sans problème. C’est un symbole fort ! »

Consultez le site web d’Hydro-Québec dédié au microréseau de Lac-Mégantic

Dépôts à neige à Montréal Les avalanches causent de l’inquiétude

PHOTO FOURNIE PAR LA CNESST

Le dépôt à neige Angrignon lors du passage de la CNESST

Les avalanches ne se produisent pas seulement en haute montagne. Les dépôts à neige de la Ville de Montréal présentent aussi de tels risques, a analysé un inspecteur du travail après une avalanche qui a endommagé cinq poids lourds et les a poussés sur plusieurs mètres.

Mis à jour hier à 7h00


Philippe Teisceira-Lessard
Philippe Teisceira-Lessard La Presse

L’incident est survenu au site Angrignon, à LaSalle, le 3 mars dernier, selon des rapports de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) obtenus par l’entremise d’une demande d’accès à l’information.

Personne n’a été blessé dans cet évènement, qui ne doit pas être minimisé pour autant : une avalanche semblable a coûté la vie à un camionneur, en 2017, dans un dépôt à neige de Trois-Rivières.

Le sous-traitant de la Ville de Montréal chargé de gérer le site, Béluga Construction, « n’utilise pas les méthodes et techniques visant à identifier, contrôler et éliminer les risques », a écrit l’inspecteur du travail Érik Pichette dans un rapport du printemps dernier. « Sa méthode de travail concernant l’empilement de la neige est incomplète par rapport à la façon de procéder et à la délimitation des zones de sécurité. Cela occasionne un risque de blessure en cas d’avalanche. »

M. Pichette a notamment reproché à Béluga Construction de laisser les camions circuler très près d’un monticule de plus de 20 mètres de neige. La pente de ce monticule était aussi trop raide, selon l’inspecteur.

Béluga Construction n’a pas voulu commenter la situation.

La Ville de Montréal a souligné que l’hiver 2022-2023 avait été particulièrement neigeux, posant des défis de stockage de la neige dans ses dépôts.

« La Ville de Montréal, de concert avec la CNESST et le fournisseur externe, s’assure que les éléments problématiques soient précisés et corrigés afin d’assurer la mise en œuvre pour l’hiver 2023-2024 », a indiqué le relationniste Gonzalo Nuñez.

« Plusieurs avalanches se produisent chaque année »

Le phénomène dans les dépôts à neige est encore peu étudié, a expliqué le professeur de géographie Daniel Germain, de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Lui-même a été chargé par un consortium de villes en 2018-2019 de mener une étude exploratoire du phénomène.

« Plusieurs avalanches se produisent chaque année sur des sites de neige usée au Québec, allant parfois même jusqu’à causer un accident mortel », indiquait-il dans ce document, rendu public en 2021. L’équipe du professeur Daniel Germain a d’ailleurs étudié une « avalanche majeure » survenue au dépôt à neige Angrignon en 2019.

« Certaines pratiques à risque peuvent être rapidement identifiées (p. ex. : camions roulant longuement au pied des amas) », concluait l’étude exploratoire, qui souligne que le comportement de la neige soufflée est bien différent de la neige en montagne. « Dans tous les cas, il sera nécessaire de poursuivre les analyses et réflexions pour étudier des alternatives pertinentes à ces pratiques. »

Par courriel, le géographe a ajouté que la suite du projet de recherche était en veilleuse depuis la pandémie de COVID-19. « La volonté de poursuivre et de relancer le projet est toujours présente autant chez les partenaires qu’au sein de mon équipe de recherche à l’UQAM », a-t-il indiqué.

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Planète bleue, idées vertes Des serres en poupées russes pour des légumes en hiver

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, ARCHIVES LA PRESSE

Jean-Martin Fortier, jardinier-maraîcher, à la tête de l’Espace Old Mill

Comment ils sont passés de la parole aux actes

Publié à 1h24 Mis à jour à 8h00


Simone Caron
Simone Caron La Presse

En théorie, les serres sont une excellente idée pour renforcer notre autonomie alimentaire pendant l’hiver, quand les champs du Québec sont moins généreux qu’en ce moment. En réalité, cultiver des fruits et légumes en saison froide est souvent très énergivore… Pas pour l’agriculteur Jean-Martin Fortier, qui approvisionne son restaurant en plein hiver grâce à une serre écoresponsable.

Jean-Martin Fortier, à qui l’on doit la Ferme des Quatre-Temps et qu’on connaît aussi sous le nom du jardinier-maraîcher, croit fermement à l’agriculture durable. Son dernier projet, l’Espace Old Mill, est un restaurant fermier situé à Stanbridge East, dans les Cantons-de-l’Est. Ouvert depuis le printemps, ce commerce offre des plats du terroir cuisinés uniquement avec des produits locaux. Et tous les légumes du menu poussent sur le domaine… même en plein hiver !

Pour y arriver sans consommer trop d’énergie, le jardinier-maraîcher a conçu une serre un peu spéciale.

Un système de chauffage carboneutre

Le nerf de la guerre, c’est le chauffage. Le besoin énergétique est tellement important que le courant électrique standard n’est pas assez puissant. Ainsi, la majorité des serres qui fonctionnent en hiver au Québec doivent être chauffées au propane.

On est chanceux au Old Mill, parce qu’on a accès au courant électrique triphasé [600 volts]. On a installé la serre juste à côté du chemin, alors on peut se connecter au réseau. On n’a pas besoin de combustibles fossiles.

Jean-Martin Fortier, jardinier-maraîcher

En effet, le bâtiment utilise un appareil de chauffage 100 % électrique. Il est connecté à un ventilateur qui diffuse l’air chaud à travers des ballons perforés placés au sol. De cette manière, la chaleur reste davantage autour des plants, au lieu d’être perdue dans l’air ambiant.

« Jusque-là, ce n’est rien de trop innovant », explique le jardinier-maraîcher, qui utilise la méthode des tubes d’air chaud dans plusieurs projets. « Le plus intéressant au Old Mill, c’est que j’ai une serre dans une serre ! »

Les serres en poupées russes

Dans sa serre, Jean-Martin Fortier a en effet installé deux autres serres, plus petites, pour recouvrir les plants de légumes et les tubes d’air chaud. En hiver, il suffit de chauffer ces compartiments et non l’espace au complet, ce qui représente une importante économie d’énergie.

De plus, le principe d’une serre est de laisser entrer la lumière tout en emprisonnant la chaleur. Ainsi, en installant une deuxième couche pendant l’hiver, on peut doubler cet effet qui garde les légumes au chaud.

« Le jour, le sol absorbe de la chaleur. Et le soir, quand on ferme la membrane, toute cette chaleur accumulée dans le sol est relâchée et reste contenue dans la petite serre », indique Jean-Martin Fortier. Le simple fait d’ajouter la petite serre augmente la température interne de 6 ou 7 °C.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, LA PRESSE

Les arches qui forment la structure des petites serres

Grâce à cet ajout, Jean-Martin Fortier estime qu’il économise environ 30 % d’énergie en hiver.

En été, il enlève complètement la membrane de la petite serre pour faire pousser des plants plus hauts, comme des tomates et des petits pois.

Choisir ses légumes

Ce n’est pas qu’une histoire de design de serre ; le succès de cette culture hivernale carboneutre réside aussi dans le choix des légumes.

D’une part, parce que le maraîcher doit planter des cultures basses pour qu’elles puissent être recouvertes par la petite serre. Mais surtout, parce qu’il tient à cultiver des légumes résistants au froid. Il chauffe la serre à seulement 5 °C pour économiser le maximum d’énergie.

« Je ne veux pas chauffer à 18 °C la nuit en hiver, souligne le maraîcher. Je ne crois pas que c’est un modèle adapté au Québec. »

PHOTO ALEX CHABOT, FOURNIE PAR L’INSTITUT JARDINIER-MARAÎCHER

L’hiver, on referme la membrane de plastique sur la petite serre pour enfermer la chaleur pendant la nuit.

Plutôt que de faire pousser des poivrons et des aubergines, Jean-Martin Fortier se concentre sur des plants qui tolèrent une chaleur minimale, comme les légumes-feuilles et les échalotes.

Il suffit d’adapter le menu en fonction des saisons, indique le jardinier-maraîcher en rappelant qu’il est tout de même possible d’avoir une diversité d’aliments. « J’arrive à faire pousser une quinzaine de légumes différents dans la serre en hiver. Puis, avec les réserves de légumes racines et de choux dans le caveau, on arrive vraiment à cuisiner des plats intéressants. »

Jean-Martin Fortier souhaite montrer aux gens qu’on peut manger local toute l’année. Il invite donc les clients du restaurant à visiter la serre. Car l’objectif de l’Espace Old Mill est de valoriser les tables de saison.

« Si je suis capable de le faire dans mon restaurant, on est tous capables de le faire à la maison ! »

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Première moitié de 2023 Les parts de marché des grands VUS grimpent fortement au Canada

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Les ventes totales de véhicules neufs ont crû de 7,6 % lors de la première moitié de 2023.

Malgré des hausses marquées des taux d’intérêt et des prix des véhicules neufs, les consommateurs canadiens semblent toujours enclins à dépenser de plus en plus pour faire l’acquisition d’un véhicule neuf. Un dernier coup de sonde de la firme spécialisée DesRosiers Automotive montre que les grands VUS ont plus que jamais le vent dans les voiles au pays.

Publié le 17 juillet


Charles René
Charles René La Presse

Ces mastodontes des routes ont vu leurs parts de marché augmenter au Canada de 37,3 % lors de la première moitié de l’année pour atteindre un niveau record, précise DesRosiers. Leur empreinte demeure petite toutefois, à seulement 2,3 % de tous les types de véhicules vendus lors de cette période.

À l’opposé, ce sont les voitures sous-compactes qui essuient la plus forte baisse avec des pertes de 27,3 % de leur part de gâteau à l’échelle canadienne. Cette performance est sans doute attribuable à l’étiolement de l’offre, puisque bien des constructeurs ont carrément abandonné ce segment.

Précisons que les ventes totales de véhicules neufs ont crû de 7,6 % lors de cette première moitié de 2023, ce qui expose une reprise progressive des livraisons.

Les petits véhicules prisés sur le marché de l’occasion

Cette faiblesse de l’offre de voitures neuves sous-compactes et compactes ainsi que les pénuries des semi-conducteurs continuent de mettre en parallèle une forte pression sur les prix des véhicules d’occasion, a également constaté DesRosiers.

En mai, la valeur résiduelle des voitures sous-compactes vieilles de 48 mois était de 103,7 au Canada, soit 22 % de plus que la moyenne de tous les segments de voitures.

Les voitures compactes se situent tout juste derrière avec une valeur résiduelle chiffrée à 95,3 % sur 48 mois. Les diverses catégories de voitures maintiennent d’ailleurs mieux leur valeur résiduelle à 81,7 % en moyenne comparativement à 77,4 % pour l’ensemble des camions légers au pays.

Il y a de quoi s’inquiéter sérieusement car ces véhicules énergivores annulent une grande partie des efforts accomplis individuellement par un grand nombre de citoyens concernant notre bilan CO2 au pays. À noter que ces nouveaux camions légers rouleront au moins une bonne décennie sur nos routes avant d’en être retirés.

Il faut arrêter l’hypocrisie des gouvernements qui refusent de taxer ces gros cylindrés afin de ménager leur popularité. Ici ce sont les jeunes qui hériteront des pots cassés par le manque de courage du fédéral et des provinces. Car ces derniers ménagent les susceptibilités des électeurs en ignorant honteusement leur propre engagement vis à vis du développement durable et des changements climatiques. :rage:

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Un petit cours rapide sur la sylviculture qui nous permet de mieux comprendre les enjeux des changements climatiques sur nos forêts.


Après le feu

ILLUSTRATIONS JUDITH LACHAPELLE, LA PRESSE

Qu’arrivera-t-il quand les incendies dans le nord du Québec seront éteints ? Que la fumée se sera dissipée ? Une nouvelle génération d’arbres devrait repousser naturellement… mais dans certains cas, la forêt pourrait disparaître. Peut-on l’aider à s’enraciner ?

Publié à 1h15 Mis à jour à 5h00


Judith Lachapelle
Judith Lachapelle La Presse

ILLUSTRATIONS JUDITH LACHAPELLE, LA PRESSE

ILLUSTRATIONS JUDITH LACHAPELLE, LA PRESSE

ILLUSTRATIONS JUDITH LACHAPELLE, LA PRESSE

ILLUSTRATIONS JUDITH LACHAPELLE LA PRESSE

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Planète bleue, idées vertes Estrie Un parc sur des résidus miniers

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Le parc récréotouristique Héritage (à l’avant-plan) a été construit sur les haldes de la carrière Graymont, à Bedford, en Estrie.

Comment ils sont passés de la parole aux actes

Publié à 0h45 Mis à jour à 6h00

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Jean-Thomas Léveillé
Jean-Thomas Léveillé La Presse

(Bedford) Les grenouilles coassent, les carouges à épaulettes volettent et quelques cerfs broutent derrière la butte… sous laquelle se cachent des millions de tonnes de pierre inerte.

Ce qui aurait pu n’être qu’un immense monticule rocailleux, sans végétation et sans vie, est depuis peu un « parc récréotouristique » qui fait la fierté de Bedford et des municipalités voisines, en Estrie.

Inauguré le 21 juin après cinq ans de travaux, le parc Héritage est construit sur les haldes de la carrière Graymont, qui extrait à quelques battements d’ailes de là de la pierre calcaire pour fabriquer de la chaux vive.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Alexandre Renaud, directeur des opérations pour les Cantons-de-l’Est de Graymont

« Sans le projet Héritage, l’usine serait fermée aujourd’hui », affirme catégoriquement le directeur des opérations pour les Cantons-de-l’Est de l’entreprise, Alexandre Renaud.

Car pour poursuivre ses activités au-delà de 2020, Graymont a réalisé une décennie plus tôt qu’elle devait trouver un endroit où déposer 32 millions de tonnes de « pierre non valorisable ». Cette ardoise friable de mauvaise qualité, pour laquelle aucune utilité n’a été trouvée, se trouvait au-dessus de son gisement de calcaire.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

La première phase du projet, maintenant terminée, consistait donc à aménager deux premières buttes avec environ 20 % du volume total de pierre.

Toutes les idées ont été étudiées, de la mine souterraine – jugée non rentable – à l’expédition de la pierre dans des fosses existantes, situées à des kilomètres à la ronde.

« On a fait la cartographie des trous disponibles [et] il fallait aller loin », raconte M. Renaud. Sans compter qu’une telle opération aurait nécessité plus de deux millions de transports par camion, avec les émissions de gaz à effet de serre (GES) que cela aurait impliqué.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

La veille de l’inauguration, des gens fréquentaient déjà le nouveau parc même si les lieux n’étaient pas encore officiellement ouverts.

L’idée d’aménager des haldes à la périphérie de la propriété de l’entreprise, sur des terrains lui appartenant et sur d’autres appartenant aux municipalités de Bedford, du canton de Bedford et de Stanbrige Station, a plutôt été retenue.

Et pour que tous y trouvent leur compte, Graymont a proposé d’y aménager un parc, dont elle cédera sous peu la propriété à une fiducie qui en assurera la gestion.

10 000 arbres

La première phase du projet, maintenant terminée, consistait donc à aménager deux premières buttes avec environ 20 % du volume total de pierre.

Dix mille arbres y ont été plantés, des sentiers de randonnée ainsi qu’un amphithéâtre extérieur y ont été aménagés, et un pavillon d’accueil, des jeux d’eau et un stationnement y ont été construits.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Un amphithéâtre extérieur a été aménagé.

Une troisième butte, beaucoup plus grosse, sera aménagée au cours des 15 prochaines années avec les 80 % de pierre restants ; celle-ci sera aussi végétalisée, mais elle ne sera pas ouverte au public, servant plutôt de mur-écran avec la carrière.

Au total, le site aura une superficie de 70 hectares.

Un tel projet n’est toutefois pas sans impact environnemental, reconnaît Alexandre Renaud, qui soutient que l’entreprise a fait ses devoirs, notamment en compensant in situ la totalité des milieux naturels détruits, en plus d’en recréer ailleurs dans la région.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

De la pierre de la carrière

Deux ruisseaux ont été déplacés, deux autres ont été créés, et des bassins de sédimentation ont été aménagés pour gérer les eaux de ruissellement provenant des monticules de pierres.

Avant d’aménager ces monticules, qui atteignent 45 mètres de hauteur, l’argile « de bonne qualité » qui s’y trouvait a été retirée et entreposée, puis utilisée pour recouvrir la pierre inerte et favoriser la végétalisation du site, explique Maxime Descôteaux, spécialiste principal en santé, sécurité et environnement de l’entreprise.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Maxime Descôteaux, spécialiste principal en santé, sécurité et environnement de Graymont

Graymont finance la totalité de ce projet qu’elle qualifie de « titanesque », qui devrait lui permettre de poursuivre ses activités pendant 20 à 30 ans, mais ne dévoile pas l’ampleur de l’investissement.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Le projet a été réalisé en tenant compte de l’avis de la population.

Attrait régional

Le nouveau parc fait « une grosse différence pour la communauté », estime le maire de Bedford, Claude Dubois – « pas le chanteur », précise-t-il –, qui y voit un attrait régional.

« Les gens viennent déjà », disait-il à La Presse le jour de l’inauguration, alors que les lieux n’étaient pas encore officiellement ouverts.

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Graymont a aménagé un parc dont elle cédera sous peu la propriété à une fiducie qui en assurera la gestion.

La solution proposée par Graymont permet de « sécuriser des emplois bien rémunérés » – la carrière emploie quelque 70 personnes – tout en limitant les nuisances et en apportant un bénéfice pour les résidants de la région, estime-t-il.

Surtout, le projet a été réalisé en tenant compte de l’avis de la population ; « il y a eu beaucoup de consultations publiques », dit-il.

En savoir plus

  • 1928
    Ouverture de la carrière de Bedford par la Shawinigan Chemicals Ltd ; la vocation première était alors la fabrication du carbure et du noir à fumée

Source : Graymont

420 000 tonnes
Production annuelle de chaux vive de la carrière de Bedford

Source : Graymont

  • 160 000 tonnes
    Production annuelle d’agrégats spécialisés de la carrière de Bedford

Source : Graymont

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Le Festif! et Valaire nettoient les berges

Bénévoles de l’Organisation bleue, le groupe Valaire et des festivalier.ère.s ont uni leurs forces pour nettoyer les berges du quai de Baie-Saint-Paul durant Le Festif! vendredi en matinée. Photo: Maximilien Rolland

Caroline Bertrand

22 juillet 2023 à 5h00 8 minutes de lecture

Par la matinée grise de vendredi, imprégnée de l’air marin, arrivaient au compte-goutte des festivalier.ère.s de la 14e édition du Festif! désireux.euses de donner un coup de main à l’activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul, situé à la jonction de la rivière du Gouffre et de la baie Saint-Paul, qui s’ouvre sur le fleuve Saint-Laurent.

Une activité écologique qui s’inscrit résolument dans les valeurs du festival, qui bat son plein jusqu’à dimanche. Le développement durable, « c’est dans notre ADN », affirme la directrice à la production des spectacles et au développement durable du Festif!, Anne-Marie Dufour, en entrevue avec Métro.

L’on était donc convié à prêter main-forte au nettoyage aux côtés des gars du groupe Valaire, en prestation la nuit précédente, et de l’organisme à but non lucratif Organisation bleue, qui ont mis sur pied La Virée du Saint-Laurent, un projet ludico-environnemental que Le Festif! était ravi d’accueillir.

  • Un pneu a également fait partie des déchets étonnants trouvés durant l’activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Parmi les déchets insolites trouvés durant l’activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! : un chauffe-eau. Photo : Kilojules

  • Un pneu a également fait partie des déchets étonnants trouvés durant l’activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Parmi les déchets insolites trouvés durant l’activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! : un chauffe-eau. Photo : Kilojules

Parmi les déchets insolites trouvés durant l’activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! : un chauffe-eau. Photo : Kilojules

« Rien de bizarre ou de grano »

L’année passée, l’activité de nettoyage qui a eu cours durant Le Festif! avait attiré une cinquantaine de bénévoles, estime la biologiste marine et fondatrice de l’Organisation bleue, Anne-Marie Asselin. « Les gens arrivaient sur la plage en se disant : “c’est donc bien cool, je veux participer”. Et tu voyais des gens un peu lendemain de brosse partir avec leur petit sac à remplir de déchets », raconte-t-elle à Métro.

Quel message lancerait-elle pour tenter d’encourager à participer à une telle activité? « Le Festif! est très proactif dans le développement durable. Offrir une activité complémentaire à la programmation, ça dynamise non seulement le festival au-delà de son contexte culturel, mais ça décomplexifie le mouvement environnemental. Ça n’a rien de bizarre ou de grano. »

À son avis, puisque le site est « exceptionnellement beau » et que des festivalier.ère.s profitent d’emblée de la plage, « c’est facile de les attirer à joindre l’activité de mobilisation ».

Dans la foulée des inondations qui ont frappé Baie-Saint-Paul le printemps dernier, lorsque la rivière du Gouffre a sorti de son lit, des vestiges de la catastrophe avaient jonché les berges — meubles et électroménagers notamment s’y étaient échoués. Ces déchets ont depuis été nettoyés, « mais il reste toujours du travail de peaufinage à faire », souligne la fondatrice d’Organisation bleue.

À la fin du nettoyage vendredi au début de l’après-midi, mégots, bouchons, emballages de barre de chocolat et autres morceaux de polystyrène (du styromousse) formaient un amas de détritus sur une bâche. Un pneu et un chauffe-eau avaient été trouvés dans le sable du fleuve, alors à marée basse.

« Les déchets sont aussi à l’image de ce que le fleuve et les courants amènent », rappelle Anne-Marie.

  • France, membre de Valaire, durant l’activité de nettoyage. Photo : Kilojules

  • Luis Clavis, membre de Valaire, durant l’activité de nettoyage. Photo : Kilojules

  • France, membre de Valaire, durant l’activité de nettoyage. Photo : Kilojules

  • Luis Clavis, membre de Valaire, durant l’activité de nettoyage. Photo : Kilojules

Luis Clavis, membre de Valaire, durant l’activité de nettoyage. Photo : Kilojules

La tournée nautique de Valaire

L’implication de Valaire dans cette activité de nettoyage au Festif! n’était guère fortuite. Durant trois ans d’affilée, le quintette est parti en tournée écoresponsable le long du fleuve à bord d’un voilier, appelée La Virée du Saint-Laurent, dont il a précédemment été question.

Cette année, le groupe n’a littéralement pu lever les voiles faute de temps — il amorce entre autres les tournages de la nouvelle émission de variétés Plaza plaisir, diffusée l’automne prochain à Télé-Québec —, mais tenait tout de même à accomplir les nettoyages inhérents au projet, fait savoir à Métro Luis Clavis, membre du groupe.

Le nettoyage n’est pas une question de « performance » liée à la quantité de déchets ramassés, tient-il à souligner. « Ce n’est pas ce qui va changer la qualité de l’eau de notre fleuve, mais tant qu’à être sur le bord, on va prendre conscience des déchets qui s’y trouvent. »

Il y a de surcroît quelque chose de méditatif dans le fait de côtoyer le territoire, relève-t-il. C’est d’ailleurs l’une des visées de la Virée : changer de rythme, dit-il. « La tournée, ça va vite. Lorsqu’on a des heures lousses devant nous, autant les passer dans un beau spot. Et tant qu’à être dans un beau spot, autant demander aux gens de venir nous aider à ramasser des patentes. C’est le fun, pour vrai. »

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

  • Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

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Activité de nettoyage des berges au quai de Baie-Saint-Paul vendredi au Festif! Photo : Kilojules

Collaborations naturelles

« La participation de Valaire vient toucher directement à notre mission et à nos valeurs, affirme Anne-Marie Dufour. On peut mélanger le plaisir et les bonnes actions. Voir qu’un groupe profite de son pouvoir d’attraction pour créer ce genre de mouvement positif sur les territoires où il passe, c’est vraiment noble. »

Ç’a été tout aussi naturel pour l’Organisation bleue de se jumeler au groupe pour organiser ses activités de nettoyage de berges durant ses tournées nautiques.

« Le groupe voulait avoir une incidence positive environnementale et, nous, on voulait s’afficher avec des artistes pour rendre les nettoyages plus dynamiques, plus cool », fait savoir la fondatrice de l’OBNL qui se voue à la conservation de l’environnement en se mobilisant sur le fleuve.

« Ça fait découvrir d’autres parties des villes où le groupe passe, ajoute Anne-Marie du Festif! Au-delà des lieux touristiques de chaque ville au Québec, il y a le fleuve, que les touristes visitent parce que c’est beau. Mais s’impliquer concrètement, ça accorde de l’importance sur le fait d’en prendre soin et non seulement s’arrêter pour le regarder. »

Investi dans sa ville

Des activités de nettoyage, Le Festif!, qui est un organisme de diffusion culturelle impliqué dans toutes les facettes de la municipalité à longueur d’année, en effectue depuis ses débuts.

Chaque printemps, il organise de pair avec la Ville un grand nettoyage afin de préparer le village, grâce à l’appui de bénévoles, à accueillir l’été… et pas que les festivalier.ère.s le temps venu, fait savoir Anne-Marie Dufour.

« À la base, on est des citoyens et des citoyennes. La ville, on l’habite, on la vit », indique la directrice au développement durable.

« Le mot d’ordre, c’est la considération, ajoute-t-elle. Considérer le territoire sur lequel on est, considérer les gens qui l’habitent à longueur d’année et pas juste cette fin de semaine, considérer leurs terrains. On est conscients qu’on est un festival qui déplace de l’air, beaucoup de gens. Si on manque de respect envers le territoire, les résident.e.s ne voudront plus nous recevoir. »

La brigade verte du Festif! sillonne régulièrement les berges de la rivière du Gouffre, où l’on peut se baigner et flâner sur la plage. Nonobstant la sensibilisation qu’effectue le festival, de petits déchets épars demeurent.

Naissance de l’Organisation bleue

En sillonnant le monde en voilier, Anne-Marie Asselin a vu l’environnement changeant dans lequel on vit. Après avoir beaucoup travaillé en Amérique latine, où elle a constaté beaucoup de pollution, elle est revenue s’enraciner au Québec. Au cours d’une tournée de nettoyage qu’elle a effectuée avec un OBNL international des Grands Lacs à l’Atlantique en passant par le Saint-Laurent, elle a été choquée de constater à quel point c’était pollué. C’est ainsi qu’elle a fondé son organisation, afin de prendre soin du Saint-Laurent précisément.

On ne pouvait demander mieux. J’étais personnellement un peu découragé la semaine dernière quand les grandes pluies de juillet ont à nouveau fait monter dangereusement le niveau de la rivière du Gouffre, entrainant une quantité phénoménale de débris de toutes sortes dont la plupart ce sont échoués sur la plage de Baie-Saint-Paul.

J’en parlais avec les employés de la Ville qui me disaient que BSP n’avait pas vraiment de budget ni d’employés suffisants pour entreprendre cette énorme corvée. Il faut dire que les détritus s’étendaient sur plusieurs mètres de largeur et sur près d’un kilomètre à la grandeur de la baie.

Quel bonheur alors de voir que des groupes de musiques venus pour présenter des spectacles au Festif, se soient mis à l’oeuvre pour nettoyer un de nos plus beaux joyaux naturel: la plage et le boisé du quai.

Photo prise avec mon iPhone le 17 juillet 2023

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PME innovation Bituméco : un asphalte plus vert

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

La Ville de Victoriaville a donné le feu vert à un projet d’asphalte vert.

Asphalter la MRC d’Arthabaska avec des matériaux réutilisés, c’est l’ambition de Bituméco. Ouverte en 2018, l’usine commencera à tester son revêtement composé de verre recyclé et d’asphalte dans les rues de Victoriaville dès cet été.

Publié à 0h45 Mis à jour à 8h00

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Fannie Arcand
Fannie Arcand La Presse

« La seule raison d’être de Bituméco, c’est de recycler de la matière », explique Claude Charland, président de l’entreprise, en entrevue avec La Presse.

Cinq ans après l’ouverture de son usine à Saint-Rosaire, l’entreprise s’apprête à tester son revêtement spécial sur trois tronçons de rue à Victoriaville.

Bituméco récupère le verre collecté, trié et granulé par Gaudreau Environnement Victoriaville, une entreprise qui gère les matières résiduelles de la municipalité.

D’ordinaire, l’asphalte est constitué d’agrégat (souvent du sable ou du gravier) lié avec du pétrole. Chez Bituméco, le verre recyclé granulé sert d’agrégat.

PHOTO FOURNIE PAR LA VILLE DE VICTORIAVILLE

Antoine Tardif, maire de Victoriaville, et Claude Charland, président de Bituméco

« C’est dans les projets d’intégrer d’autres matières », ajoute Claude Charland, qui considère l’ajout de plastique, de caoutchouc et d’asphalte recyclés à la recette de revêtement de Bituméco.

Faire de l’asphalte avec des matériaux résiduels se fait déjà ailleurs dans le monde, reconnaît Claude Charland, mais Bituméco est d’abord un projet d’économie circulaire.

On veut utiliser le verre local pour faire de l’asphalte localement. C’est ça, le secret de notre recette.

Claude Charland, président de Bituméco

Asphalter mieux

L’idée de Bituméco est née en 2017 avec Daniel Gaudreau, propriétaire de Gaudreau Environnement Victoriaville, une entreprise de gestion des matières résiduelles.

« Daniel s’est dit : “Ça n’a pas de bon sens qu’on ne réutilise pas nos matières résiduelles de verre, de plastique, de pétrole. […] Pourquoi on ne le fait pas chez nous ?” », relate Claude Charland.

Daniel Gaudreau, disparu en 2017, a choisi de collaborer avec Marchand Excavation, qui exploitait alors une usine d’asphalte dans le nord du Québec. « Marchand Excavation a descendu son usine d’asphalte à Victoriaville, et on a fondé Bituméco », raconte Claude Charland, qui siégeait alors comme directeur général de Gaudreau Environnement.

Aujourd’hui, l’entreprise travaille avec les laboratoires Solmatech pour tester ses recettes.

Un travail de longue haleine

Bituméco était prête à lancer son projet dès 2018, mais il manquait une chose : la volonté politique. L’étroite réglementation du ministère des Transports rendait « peu ou pas possible » l’usage du verre sur les routes québécoises, explique Claude Charland.

La pandémie de COVID-19 a davantage ralenti les affaires pour Bituméco, mais l’an dernier, la Ville de Victoriaville a donné le feu vert à l’entreprise.

Bituméco devait couler ses premiers tronçons de rue à Victoriaville la semaine du 16 juillet, mais l’alerte de tornade a forcé l’entreprise à repousser les travaux jusqu’au début du mois d’août.

Claude Charland a bon espoir que ce projet pilote portera ses fruits. Les résultats semblent probants : depuis trois ans, le terrain autour de l’usine Bituméco est recouvert d’un revêtement composé de verre. « Ça répond très bien, même sous le poids des camions lourds qui passent dessus tous les jours », assure le président.

Bituméco ne compte pas s’arrêter là. « D’autres municipalités ont cogné à notre porte », affirme Claude Charland, qui espère un jour desservir l’ensemble de la MRC d’Arthabaska grâce à l’emplacement central de l’usine dans la région.

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Les poursuites climatiques, une tendance qui s’accélère

PHOTO THOM BRIDGE, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Certains des jeunes plaignants du Montana dans l’affaire les opposant à l’État lors de leur arrivée au tribunal avant la dernière journée du procès, à Helena, le 20 juin dernier

Face à une crise climatique dont les effets sont de plus en plus visibles, le nombre de recours juridiques contre l’inaction des gouvernements a explosé depuis cinq ans. Partout sur la planète, ce sont surtout les jeunes qui mènent la bataille. Avec des résultats bien concrets dans plusieurs pays.

Publié à 0h40 Mis à jour à 5h00

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Éric-Pierre Champagne
Éric-Pierre Champagne La Presse

Le combat des jeunes

C’est le nouveau cheval de bataille de nombreux jeunes pour forcer gouvernements et entreprises à revoir à la hausse leurs engagements climatiques. Entre 2017 et 2022, le nombre d’actions en justice a plus que doublé, selon le plus récent rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), dévoilé jeudi. Si la majorité des poursuites sont toujours déposées aux États-Unis, le nombre de cas dans le reste du monde a presque triplé en cinq ans. Selon les données compilées pour l’Organisation des Nations unies (ONU) par le Sabin Center for Climate Change Law, le phénomène a aussi lieu dans des pays en développement, lesquels ont peu contribué historiquement aux émissions de gaz à effet de serre (GES).

De 884 cas à… 2180 en cinq ans

En 2017, le Sabin Center for Climate Change Law, affilié à l’Université Columbia, aux États-Unis, a répertorié 884 actions « climatiques » dans le monde. Cette année-là, la station de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) de Mauna Loa, à Hawaii, a enregistré une concentration de CO2 dans l’atmosphère de 407,56 parties par million (ppm), le 29 décembre 2017. Cinq ans plus tard, en 2022, 2180 poursuites ont été relevées dans 65 pays. Le 30 décembre 2022, la concentration de CO2 dans l’atmosphère pointait à 419,1 ppm. Les poursuites s’attaquent principalement à l’inaction des gouvernements face aux changements climatiques ou encore à leurs engagements qui ne sont pas respectés.

La majorité des poursuites dans les pays du Nord

PHOTO ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Militants prenant la pose le 29 juin dernier devant le tribunal administratif de Paris après que celui-ci eut rendu une décision donnant au gouvernement français jusqu’au 30 juin 2024 pour mieux respecter les cibles de réduction de l’utilisation des pesticides, notamment

Si les États-Unis remportent la palme du nombre de poursuites (1522 en 2022), la tendance s’accélère dans le reste du monde, où le nombre d’actions est passé de 230 à 658, entre 2017 et 2022. On retrouve l’Australie (127), le Royaume-Uni (79), l’Allemagne (38), le Canada (34) et le Brésil (30) en quintette de tête. La France est au septième rang avec 22 litiges, dont certains ont fait grand bruit ces dernières années. Neuf poursuites sur dix sont intentées dans des pays de l’hémisphère Nord, qui ont largement contribué aux émissions de GES depuis l’ère préindustrielle.

« Une ressource inestimable »

« Les citoyens se tournent de plus en plus vers les tribunaux pour lutter contre la crise climatique, en demandant des comptes aux gouvernements et au secteur privé et en faisant des recours juridiques un mécanisme clé pour garantir l’action climatique et promouvoir la justice climatique », a déclaré jeudi Inger Anderson, directrice exécutive du PNUE. Selon Michael Gerrard, directeur du Sabin Center, « ce rapport constituera une ressource inestimable pour tous ceux qui souhaitent obtenir le meilleur résultat possible dans les forums judiciaires et comprendre ce qui est possible et ce qui ne l’est pas ».

L’Allemagne forcée de revoir sa loi climat

PHOTO ODD ANDERSEN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Un militant du mouvement écologiste Extinction Rebellion qui s’est collé les mains à une vitrine du siège du parti de l’Union chrétienne-démocrate se fait interpeller par des policiers, à Berlin, en août 2021.

Parmi les cas les plus célèbres, on retrouve notamment cette décision de la Cour constitutionnelle allemande, en 2021, qui a statué que la loi sur le climat adoptée en 2019 ne prévoyait pas « d’exigences suffisantes pour la réduction ultérieure des émissions [de GES] à partir de 2031. Le tribunal allemand a aussi conclu que la loi portait préjudice aux jeunes. L’ancien gouvernement d’Angela Merkel s’était vu forcé de revoir sa loi après cette décision : Berlin avait annoncé que son objectif de réduction des GES passait de 55 % à 65 % d’ici 2030 et que le pays serait carboneutre en 2045, soit cinq ans plus tôt que prévu.

Une poursuite historique aux États-Unis

Aux États-Unis, l’affaire la plus célèbre implique une quinzaine de jeunes du Montana qui ont accusé l’État d’enfreindre la Constitution, qui leur garantit le droit à « un environnement propre et sain ». Dans un procès qui s’est déroulé en juin dernier, les 16 jeunes âgés de 5 à 22 ans ont cherché à démontrer que le soutien du Montana à l’industrie fossile nuit à leur qualité de vie et à leur avenir. Fait à noter, la Cour suprême de l’État avait préalablement autorisé la tenue du procès, malgré plusieurs tentatives des autorités pour faire annuler la poursuite.

Bientôt plus de poursuites au Canada ?

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La Cour suprême du Canada, à Ottawa

Au Canada, sept jeunes ont obtenu en 2021 l’autorisation de poursuivre le gouvernement de l’Ontario sur ses engagements climatiques. De jeunes Québécois ont eu moins de chance lorsque la Cour suprême du Canada a refusé en 2022 d’entendre l’organisation Environnement Jeunesse, qui souhaitait intenter une action collective contre le gouvernement canadien. Cependant, des modifications récentes à la Loi canadienne sur la protection de l’environnement garantissent maintenant le droit à un environnement sain. En entrevue avec La Presse, en juin dernier, l’avocat Merlin Voghel, du Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) avait indiqué que cette nouvelle disposition législative ouvrait la porte à d’autres recours juridiques au pays.

Consultez le rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (en anglais)

En savoir plus

  • 54 %
    Selon un récent rapport du Grantham Research Institute on Climate Change, dans les cas où une décision sur le fond a été rendue, 54 % des poursuites ont mené à un renforcement des actions contre les changements climatiques.

Source : Grantham Research Institute on Climate Change

45 %
En 2021, la justice néerlandaise a condamné le groupe Shell à réduire ses émissions de CO2 de 45 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2019.

Source : Le Monde

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Les incendies de forêt ont généré un record d’émissions de carbone

PHOTO PLANET LABS PBC

« Les émissions liées aux incendies de forêt dans les zones boréales atteignent habituellement leur pic fin juillet ou début août et le total devrait donc continuer à augmenter pendant quelques semaines », prévient Mark Parrington, scientifique du Service de surveillance de l’atmosphère de Copernicus.

(Paris) Les émissions de carbone générées par les incendies au Canada ont atteint des niveaux inédits et représentaient déjà à fin juillet plus du double du précédent record annuel de 2014, selon les données de l’observatoire européen Copernicus publiées jeudi.

Publié à 6h39

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Agence France-Presse

« Actuellement, les émissions totales des incendies de forêt au Canada se situent à environ 290 mégatonnes ( de carbone ), alors que le précédent record enregistré en 2014 était de 138 mégatonnes », indique Copernicus dans un bulletin.

Le chiffre pour 2023 ne reflète pour l’instant que les émissions depuis le début de l’année et même pour l’essentiel depuis début mai, quand les feux ont commencé à ravager le pays, alors que la saison des incendies de forêt n’est pas encore terminée.

« Nous avons surveillé les émissions des feux à travers le Canada sur les trois mois depuis le début mai et sur cette période elles ont continué à augmenter de manière quasi continue à un niveau qui est déjà considérablement plus haut que les précédentes émissions répertoriées dans notre base de données pour une année entière dans ce pays », a souligné Mark Parrington, scientifique du Service de surveillance de l’atmosphère de Copernicus. Les données remontent à début 2003.

« Les émissions liées aux incendies de forêt dans les zones boréales atteignent habituellement leur pic fin juillet ou début août et le total devrait donc continuer à augmenter pendant quelques semaines », prévient-il.

Le Canada, qui en raison de sa situation géographique se réchauffe plus vite que le reste de la planète, est confronté ces dernières années à des évènements météorologiques extrêmes dont l’intensité et la fréquence sont accrues par le changement climatique.

PHOTO HANDOUT, AGENCE FRANCE-PRESSE

Dans cette photo fournie par le British Columbia Wildfire Service, on voit l’incendie de forêt d’Horsethief Creek.

Au 30 juillet, le pays était ravagé par plus de 990 incendies, dont 613 jugés hors de contrôle. À cette date, plus de 12 millions d’hectares ont déjà brûlé cette année, un total bien supérieur à tout ce que le pays a déjà connu.

Quand les carapaces de crustacés viennent à la rescousse de l’énergie

PHOTO MOHAMMED ABED, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Une batterie nouveau genre à base de carapaces de crabes et de zinc serait 100 % biodégradable et recyclable, une avancée très importante qui pourrait changer la donne dans le milieu automobile.

Les tonnes de déchets que nous produisons chaque année ont relativement diminué au cours des dernières années, mais pourrions-nous en générer encore moins ? Est-ce que les industries pourraient trouver certaines solutions pour faire en sorte que les matériaux de nos voitures soient moins dommageables pour l’environnement ?

Mis à jour à 11h45

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Bertrand Godin
Bertrand Godin Collaboration spéciale

Sur cette question, l’évolution dans le domaine des batteries pour les véhicules automobiles est un bel exemple. On constate en effet que de nombreux procédés se développent continuellement au sein de cette industrie qui met tous les efforts en matière d’écoresponsabilité pour poursuivre l’amélioration sur cette voie.

À tout le moins, on peut dire que les chercheurs et les fabricants se cassent la tête pour trouver des solutions qui seront écologiquement viables pour les voitures de demain et pour s’assurer que les composants de ces véhicules ne se retrouvent pas ultimement dans les lieux d’enfouissement.

C’est pourquoi une batterie nouveau genre à base de carapaces de crabes et de zinc est si bien accueillie puisqu’elle serait 100 % biodégradable et recyclable, une avancée très importante qui pourrait changer la donne dans le milieu automobile, mais aussi dans le milieu énergétique en général.

À titre d’exemple, cette batterie, sans danger et respectueuse de l’environnement, pourrait être rechargée au minimum 1000 fois, ce qui la rendrait idéale pour stocker de l’énergie éolienne ou de l’énergie solaire pour le bien des réseaux électriques.

Chercheurs au travail

Ce sont des chercheurs de l’Université du Maryland et de l’Université de Houston qui se sont penchés sur le projet, avec l’ambition justement de développer une batterie plus durable qui permettrait de générer moins de déchets dans les lieux d’enfouissement.

Ils ont commencé par étudier la chimie des batteries zinc métal, que les différents scientifiques mettent au point depuis des années pour le stockage de l’énergie sur les réseaux électriques.

D’une part, le zinc qui se trouve à l’intérieur de la croûte terrestre est beaucoup plus abondant que le lithium peut l’être. D’autre part, les batteries ioniques au zinc sont moins coûteuses à produire que les batteries au lithium, donc financièrement plus accessibles pour les consommateurs.

Il faut savoir que les batteries dites traditionnelles sont constituées d’anodes de zinc, c’est-à-dire de cathodes d’oxyde métallique et d’électrolytes à base d’eau. Le tout génère un dépôt irrégulier de zinc sur la surface des électrodes, ce qui rend ces batteries parfois dangereuses. Et quant à la durée de vie de celles-ci, on peut assurément dire qu’elle est courte.

Ces chercheurs ont donc créé un nouvel électrolyte en gel biodégradable composé de chitosane, une protéine dérivée de la chitine, qui est l’un des composants principaux de la carapace d’insectes et de crustacés, que l’on pense aux crabes, aux homards et aux crevettes. Utiliser les rebuts alimentaires, voilà qui est tout de même fabuleux comme procédé !

En combinant le gel biodégradable de chitine et le zinc, les chercheurs ont créé une sorte de membrane constituée d’un autre gel, solide cette fois, qui serait utilisé comme électrolyte dans la batterie.

Ils ont donc utilisé du zinc pour l’anode, l’électrode positive de la batterie, comme c’est habituellement le cas sur d’autres types de batteries d’utilisation quotidienne. Sauf que les chercheurs ont remplacé la cathode classique, qui est l’électrode à partir de laquelle le courant sort, par une cathode en matière organique entièrement biodégradable.

Selon les informations fournies par l’équipe de recherche, cette batterie aurait maintenu un rendement de charge de 99,7 % sur plus de 1000 cycles de recharge lorsqu’elle fonctionnait à haute densité de courant. C’est tout à fait étonnant comme premiers résultats.

Hautement écoresponsables

De plus, les deux tiers de ces batteries seraient biodégradables, ce qui les rendrait hautement écoresponsables. Il apparaît que l’électrolyte de chitosane, une substance dérivée de la chitine, composant principal de la carapace des insectes et des crustacés, qui est le matériau cathodique, se biodégraderait dans le sol en quelques mois à peine. Pour ce qui est du zinc restant dans les batteries, il serait complètement recyclé aussi de son côté, car plusieurs industries le recyclent déjà depuis un bon moment.

Il sera donc intéressant de suivre de près comment cette technologie évoluera et de voir si elle trouvera un chemin vers nos voitures dans un avenir rapproché.

Le procédé de fabrication avec les carapaces de crabes est d’autant plus prometteur que, pour l’instant, bon nombre d’usines et d’entreprises de transformation alimentaire de crustacés déposeraient les carapaces aux ordures ou au compost.

Avec l’utilisation de ces carapaces, tout le monde en sortirait gagnant, sans compter que les batteries deviendraient de plus en plus écoresponsables et plus durables. Combiner le bien-être de la planète et la nécessité d’améliorer encore la durée de vie des batteries dans les véhicules automobiles semble une avenue bien heureuse.

La drêche, bien plus qu’un résidu de brassage

PHOTO FOURNIE PAR DOMINIC CHARBONNEAU, MAÎTRE BRASSEUR AUX BRASSEURS DU MONDE

À la fin du trempage d’un mélange de céréales (orge, blé, malt…) dans de l’eau, le jus est utilisé pour poursuivre le processus de brassage de la bière, et la drêche est retirée.

Comment ils sont passés de la parole aux actes

Publié à 1h08 Mis à jour à 6h00

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Mélissa Khadra
Mélissa Khadra La Presse

Le brassage de la bière génère un résidu céréalier, la drêche, qui se retrouve bien souvent à la poubelle. Mais pour Brasseurs du Monde et la Crème boulangerie pâtisserie, la drêche, c’est un trésor.

« La drêche est un produit unique et inégalable », lance le PDG et fondateur de la microbrasserie Brasseurs du Monde, Gilles Dubé.

Pour l’entrepreneur de Saint-Hyacinthe, l’environnement a toujours été une priorité. « Dès notre lancement en 2011, nous avons établi des partenariats avec des agriculteurs locaux, qui utilisent notre drêche pour nourrir leur bétail », explique-t-il.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Gilles Dubé est PDG des Brasseurs du Monde. Il est entouré de Marie-Eve Pinsonneault (à gauche) et de sa fille Karelle Canuel-Dubé (à droite), copropriétaires de la Crème boulangerie pâtisserie.

L’idée était de ne pas la traiter comme un déchet, de trouver un moyen de la valoriser.

La drêche est un mélange de céréales (orge, blé, malt…) et d’eau, qu’on récupère au début du processus de brassage de la bière. « C’est un peu comme du multigrain, c’est extrêmement nutritif », note Gilles Dubé. On y retrouve notamment des protéines, des fibres et des minéraux comme du fer.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La microbrasserie Brasseurs du Monde et la Crème boulangerie pâtisserie sont situées à Saint-Hyacinthe, à quelques pas l’une de l’autre.

Il n’en fallait pas plus pour que Marie-Eve Pinsonneault et Karelle Canuel-Dubé, copropriétaires de la Crème boulangerie pâtisserie, située à quelques pas de la microbrasserie, décident d’intégrer la drêche à leurs recettes.

Plusieurs tests plus tard, elles sont fières de pouvoir offrir plusieurs produits à base de drêche à leurs clients : pain, craquelins, boules d’énergie, granola, financiers et biscottis trônent sur leurs présentoirs.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Le trempage se fait dans une cuve, à température contrôlée.

Démystifier la drêche

Offrir des créations boulangères et pâtissières nutritives tout en favorisant l’économie circulaire, c’est une chose. Mais convaincre les gens de les acheter, c’en est une autre.

Les gens ne connaissent pas la drêche. Et lorsqu’on leur explique ce que c’est, ils craignent que ça goûte la bière, alors que ce n’est pas du tout le cas. Ça goûte les céréales, et c’est très bon pour la santé.

Marie-Eve Pinsonneault, copropriétaire de la Crème boulangerie pâtisserie

Selon Karelle Canuel-Dubé, il y a un important travail d’éducation à faire. Sur la drêche, d’une part, mais également sur la culture de l’entreprise. « Les clients se demandent souvent pourquoi nos présentoirs ne sont pas très garnis, dit-elle en montrant les pains et viennoiseries derrière le comptoir. C’est très important pour nous de privilégier de petites quantités, afin de limiter le gaspillage. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La drêche qui est retirée de la cuve est humide. Alors qu’on l’utilise telle quelle pour certaines recettes, d’autres nécessitent de la faire sécher. Pour ce faire, les boulangères la font sécher au four sur une plaque.

Les copropriétaires de la Crème boulangerie pâtisserie utilisent également des bières en fin de vie pour faire des sirops, du pain perdu et des croissants aux amandes. « Nous essayons vraiment de réduire les pertes au minimum », lance fièrement Karelle Canuel-Dubé.

« Grâce à l’ensemble de nos partenariats, nous générons à peine 1 % de déchets », note Gilles Dubé, qui est aussi le père de Karelle Canuel-Dubé. Tel père, telle fille.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La Crème boulangerie pâtisserie confectionne une panoplie de produits mettant la drêche en vedette. Parmi ceux-ci, on trouve du pain, des boules d’énergie, des craquelins, des financiers et du granola.

Une vaste initiative régionale

Le projet d’économie circulaire entre Brasseurs du Monde et la Crème boulangerie pâtisserie est chapeauté par le conseil régional de l’environnement (CRE) de la Montérégie, par l’entremise de son projet Symbiose agroalimentaire. La mission de ce projet ? Que les déchets des uns deviennent les trésors des autres.

L’économie circulaire, c’est éviter d’extraire de nouvelles ressources et de générer des déchets. L’idée est de réutiliser les matières en boucle.

Laurence Roger, chargée de projet en économie circulaire au CRE de la Montérégie

Par l’entremise de son projet Symbiose agroalimentaire, lancé en 2019, le CRE de la Montérégie offre un service d’accompagnement gratuit. « On fait du maillage entre les entreprises, on les met en relation s’il y a un potentiel de synergie », explique Laurence Roger.

Au total, plus de 110 synergies agroalimentaires ont été concrétisées grâce au projet du CRE de la Montérégie. Grâce à ces projets, d’innombrables matières résiduelles ont été échangées et de nombreuses ressources ont été valorisées, estime l’organisme.

En savoir plus

D’autres entreprises se sont donné comme mission la valorisation de la drêche. Par exemple, la Coopérative Boomerang récupère la drêche de microbrasseries montréalaises pour en faire de la farine qui est vendue à des boulangeries et des épiceries locales. Idem pour l’entreprise zéro déchet Still Good, qui vend de la farine de drêche moulue et de la préparation pour crêpes enrichie de drêche à des particuliers, sur sa boutique en ligne. Leur objectif ? Réduire le gaspillage alimentaire, un sac de farine à la fois.

Consultez le site de la Coopérative Boomerang

Consultez le site de Still Good

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Si c’était une ancienne sablière, ça veut dire que les dépots meubles sont du sable, dans lequel les contaminants migrent très facilement pour contaminer la nappe phréatique. En fait, c’est très semblable à la catastrophe des lagunes de Mercier.

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Tant qu’on donnera des amendes totalement ridicules aux entreprises fautives et que l’on n’obligera pas ces dernières à réparer leurs dégâts environnementaux. Ces abus continueront parce que les entreprises font de gros profits à contourner les lois et sont souvent associées au crime organisé. Tandis que le Ministère de l’Environnement n’en a souvent que le nom et tout cela est loin d’être une première. Ce qui fait que c’est clairement scandaleux. :-1:t2:

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Planète bleue, idées vertes Mouvement anti-gaspillage de poisson

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Transformation de restes de poisson en produits cuisinés à la Poissonnerie O

Après la lutte contre le gaspillage des fruits et légumes, un Breton brasse les habitudes des géants de l’alimentation en sauvant les poissons des poubelles. Son concept anti-gaspillage, appelé « Finistérestes », remporte un succès fou auprès des consommateurs de la France, mais également chez les pêcheurs qui en tirent des profits.

Publié à 0h56 Mis à jour à 5h00

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Sara Champagne
Sara Champagne La Presse

Carottes tordues, concombres courbés, poireaux un peu moches ; les paniers de légumes de Karim Vincent-Viry partent comme de petits pains chauds dans une soixantaine de points de vente de la Bretagne, en France. Et voilà que l’homme se lance dans une quête pour sauver de la poubelle les petits morceaux de poisson.

PHOTO FOURNIE PAR FINISTÉRESTES

Après s’être attaqué au gaspillage de fruits et légumes, Karim Vincent-Viry lutte maintenant contre le gaspillage de poisson.

C’est scandaleux, c’est à la limite criminel de jeter tout ça.

Karim Vincent-Viry, fondateur de Finistérestes

Ancien directeur d’approvisionnement en fruits et légumes, M. Vincent-Viry raconte qu’un jour, il était dans le port de pêche de Lorient, le deuxième en importance en France, quand un mareyeur lui a expliqué qu’un filet de poisson doit peser entre 125 et 150 grammes pour être au menu d’un restaurant ou vendu chez l’épicier. Pas plus ni moins. À l’état frais, à peine 50 % du poisson est consommé, dit-il. Le reste est jeté ou transformé en farine pour nourrir les animaux.

« On ne le réalise pas, mais le gaspillage des poissons est pire que celui des légumes. Chaque jour, 10 tonnes de poissons sont jetées en Bretagne. Avec ma fille, on a eu l’idée de récupérer les petits filets dans des sacs sous vide. Pour le moment, on arrive à récupérer 2 tonnes par semaine. Ils se vendent tous. Nous ne fournissons pas à la demande », dit-il lors d’un entretien en visioconférence avec La Presse.

Transformer la peau de turbot en os pour chiens

Au Québec, le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, André Lamontagne, a dit à La Presse que « l’autonomie alimentaire durable est une priorité », particulièrement dans le secteur des poissons.

Olivier Dupuis est directeur général des Pêcheries Gaspésiennes, situées à Gaspé. Son entreprise assure le débarquement des poissons quand les pêcheurs arrivent à quai. Les poissons sont transformés sur place.

Les poissons de fond sont la spécialité de l’usine, précise M. Dupuis. Le turbot est très populaire pour l’exportation en Asie. Il se vend en entier. Là-bas, on fait du fumet avec la carcasse du poisson.

« Dans nos usines, on s’est cassé la tête pour récupérer la peau très coriace du turbot. Au début, nos tests n’étaient pas concluants. Finalement, nous avons eu l’idée de la rouler pour en faire des os pour les chiens. Le reste va au compostage dans les installations de Chandler, il sert d’engrais naturel. »

Selon M. Dupuis, le Québec limite ses pertes poissonnières en raison du marché international. Mais il reste beaucoup à faire pour promouvoir la consommation sur place. « On n’a pas le choix d’exporter, dit-il. Il y a quelques années, la promotion autour du homard a bien fonctionné. Ça va mieux pour le crabe des neiges, mais le plus gros du turbot est fumé. Et la morue salée va aux États-Unis. »

Cuisiner une lasagne au poisson

La Poissonnerie O est située rue Ontario, dans Hochelaga-Maisonneuve. Le propriétaire, Sean Warren, ne garde pas ses poissons dans les présentoirs réfrigérés plus de deux jours. Avec l’aide d’un chef cuisinier, ils sont ensuite transformés. Ça va de la lasagne au pâté chinois, en passant par des plats prêts à manger de style créole. Il propose aussi des plats en fin de vie sur l’application alimentaire « Sauvegarde ».

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Sean Warren, propriétaire de la Poissonnerie O

On récupère même la peau pour en faire des miettes servant à confectionner du chocolat salé. C’est excellent. Il n’y a aucun aliment plus périssable que le poisson. Selon moi, c’est clair qu’il y a énormément de gaspillage chez les grands épiciers. Ça va à la poubelle quand ce n’est pas mariné ou fumé.

Sean Warren, propriétaire de la Poissonnerie O

M. Warren consacre une partie de son temps à promouvoir certaines espèces et parties du poisson, comme les bajoues de morue. Ça ressemble un peu à de gros pétoncles, précise-t-il. Au départ, il en commandait une dizaine de livres. Ses quantités ont doublé.

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En France, le fondateur de la coopérative « Finistérestes », M. Vincent-Viry, rêve de voir apparaître un millier de petites épiceries vendant des produits déclassés.

« On a appris à consommer avec les yeux. On a le réflexe de choisir les plus beaux fruits ou légumes. Notre planète est en perdition, les prix ont explosé. Et la pêche en mer devient de plus en plus rare. Les produits anti-gaspillage vont prendre de plus en plus de place. »