Centres de compostage Les chantiers paralysés devraient reprendre
PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE | En juillet 2022, la firme de construction québécoise EBC avait carrément déserté les deux chantiers de construction parce qu’elle estimait ne pas être payée adéquatement par Veolia.
Après 10 mois de paralysie, les chantiers des deux futures usines à compost de Montréal pourraient reprendre sous peu.
12 mai 2023 | Publié à 9h21 Mis à jour à 16h13 | PHILIPPE TEISCEIRA-LESSARD | LA PRESSE
La Ville de Montréal a conclu la nuit dernière une entente avec l’entreprise Veolia – chargée de la construction – qui prévoit la reprise des travaux sur les centres de traitement des matières organiques de Saint-Laurent et à Montréal-Est d’ici un mois, a appris La Presse.
« Il y a eu une entente pendant la nuit avec Veolia, ce qui nous amène à tenir un comité exécutif extraordinaire dès maintenant », a indiqué le cabinet de Valérie Plante en début d’avant-midi. Les élus ont approuvé l’entente et la réunion s’est terminée vers 9 h 30.
La Ville de Montréal avait déjà mis sur la table 13 millions supplémentaires, puis 32 millions supplémentaires le mois dernier dans l’espoir de satisfaire Veolia. Au total, le budget pour les deux installations atteignait 372 millions avant l’entente.
Selon nos informations, la Ville n’a pas à dégager de nouvelles sommes dans le cadre de l’entente. Elle renonce toutefois à 5,4 millions en frais de retard en acceptant d’effacer l’ardoise et de repartir les compteurs avec des nouvelles dates de livraison : 31 août 2024 pour le centre de compostage de Saint-Laurent, 26 mai 2025 pour le centre de biométhanisation de Montréal-Est.
En juillet 2022, la firme de construction québécoise EBC avait carrément déserté les deux chantiers de construction parce qu’elle estimait ne pas être payée adéquatement par Veolia. La semaine dernière, La Presse a révélé que de nombreux sous-traitants d’EBC et de Veolia se plaignent eux aussi de paiements importants en retard. Plusieurs d’entre eux ont carrément sorti leur roulotte et leur équipement des chantiers, risquant de créer des délais et des coûts lors de leur réactivation.
L’opposition officielle à l’hôtel de ville a critiqué le contenu de l’entente.
« L’administration Plante cède au chantage de Veolia en renonçant à un montant de 5,4 millions de dollars pour des pénalités de retard. Depuis l’an passé, c’est à coup de dizaines de millions de dollars que l’administration paie la position de faiblesse dans laquelle elle s’est mise face à Veolia », a fait valoir Alan DeSousa, maire de l’arrondissement de Saint-Laurent. « Malgré l’entente convenue entre la Ville et l’entreprise, je suis pessimiste sur l’échéancier de livraison des CTMO puisque les sous-traitants ont déserté les chantiers. »
EBC, qui a elle-même conclu une entente avec Veolia, n’a pas voulu commenter le dossier.
110 000 tonnes de résidus à traiter
Les deux projets de centre de traitement des matières organiques font couler de l’encre depuis des années.
L’installation de Saint-Laurent, située sur le boulevard Henri-Bourassa Ouest, devait coûter 175 millions à la métropole, somme qui inclut son exploitation pendant les cinq premières années. Le chantier est actuellement achevé à 90 %. L’usine devrait pouvoir traiter 50 000 tonnes de résidus de table par année pour en faire du compost utilisable en agriculture.
L’installation de Montréal-Est, un centre de biométhanisation, sera située sur le site de l’ancienne carrière Demix, à l’intersection de l’avenue Broadway Nord et de l’autoroute 40. Sa construction et son exploitation pendant les cinq premières années devaient coûter 167 millions à Montréal. L’installation avalera 60 000 tonnes de compost par année, selon la Ville.
Les deux projets ont souffert de retards et de dépassements de coûts importants. La Ville de Montréal doit maintenant exporter une partie de ses matières organiques vers l’Ontario en attenant la finalisation des deux installations.
Les contrats pour leur construction et leur exploitation avaient été accordés en 2019 à Suez, une entreprise française dont la filiale nord-américaine a été rachetée l’an dernier par sa compatriote Veolia. C’est ce qui explique que la Ville de Montréal doive maintenant traiter avec Veolia.
En 2021, la vérificatrice générale de Montréal évoquait un « constat global de dépassement de coûts et de non-respect du calendrier » dans le dossier des centres de traitement des matières organiques (CTMO). « Le projet de construction des CTMO ne s’est pas effectué en suivant un processus suffisamment rigoureux auquel on devrait s’attendre pour un projet d’une telle complexité et envergure », écrivait-elle.