Résumé
Des géants roses signés Philippe Katerine envahiront Montréal
PHOTO RENTINGART, FOURNIE PAR LE PARTENARIAT DU QUARTIER DES SPECTACLES
Philippe Katerine et quelques Monsieur rose
De grands personnages roses envahiront Montréal pendant l’été, gracieuseté de l’auteur-compositeur-interprète et sculpteur français Philippe Katerine.
Mis à jour le 10 avril
Du Quartier des spectacles à la Place Ville Marie en passant par le square Phillips ou le Centre Eaton, ces œuvres de résine couleur gomme balloune feront sourire les Montréalais et les touristes, du 7 mai au 29 septembre.
En tout, une quinzaine de sculptures, appelées Monsieur rose, seront exposées en différents lieux du centre-ville de Montréal, autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Celles-ci créeront un parcours original qui permettra aux passants de voir la vie en rose.
C’est pendant la pandémie que l’interprète de La banane a eu l’idée de sculpter ces sympathiques bonshommes. « Je jouais avec la pâte à modeler de mes enfants et j’ai créé ce personnage », a-t-il raconté à Tout le monde en parle en octobre dernier.
Jusqu’à maintenant, les œuvres ont notamment été exposées à Paris et à Shanghai.
Au cours de l’entrevue, Philippe Katerine a expliqué que ces sculptures géantes mesurant jusqu’à 2,7 m s’inscrivent dans le mignonisme, un courant artistique qu’il a inventé et qui fait l’éloge de l’émerveillement dans le quotidien. « Dans les périodes difficiles, il y a toujours quelque chose de mignon quand on regarde bien », avait-il soulevé sur le plateau de Guy A. Lepage.
Une conférence-concert
Le 7 mai prochain, Philippe Katerine convie d’ailleurs le public à découvrir sa vision du mignonisme lors d’une conférence-concert nommée Ce que je sais de la mort, ce que je sais de l’amour. Lors de ce spectacle gratuit présenté à la Cinquième Salle de la Place des Arts, à 20 h, il sera accompagné par le musicien Philippe Eveno.
Tout l’été, une vidéo donnant vie aux multiples personnages roses, réalisés par l’artiste montréalais Jérémy Fassio en collaboration avec Philippe Katerine, sera également présentée. On pourra la voir sur la façade de l’édifice Wilder, aux abords de la station de métro Saint-Laurent et à l’intérieur de la Place des Arts.
Les billets gratuits pour la conférence-concert Ce que je sais de la mort, ce que je sais de l’amour seront offerts dès le 22 avril sur le site de la Place des Arts.
Résumé
La ville en rose de Philippe Katerine
PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE
Les Monsieur rose de Philippe Katerine ont pris place au centre-ville.
Il y a toujours eu quelque chose de fuyant chez Philippe Katerine, chanteur de La banane et Louxor, j’adore. Même sa mère ne sait pas quand il dit la vérité ou pas, assure l’artiste, dont les Monsieur rose sont déployés depuis mardi à Montréal. Il dit qu’il aime jouer. Et s’il se jouait un peu de nous ?
Publié à 17h46
Feutre noir à la main, dans la salle de l’esplanade Tranquille appelée « réfectoire », Philippe Katerine dessine une cicatrice sous le sein gauche d’un de ses Monsieur rose. « Ils ont été repeints », explique-t-il, après avoir fait cet ajout qui apparaît sur la quinzaine de personnages de résine aux fesses bombées qu’on peut désormais croiser au centre-ville, de la Place Ville Marie à la Place des Arts.
Cette ligne barrée de traits a une résonance toute personnelle pour l’artiste. « J’ai été opéré au cœur quand j’étais petit, alors j’ai une cicatrice, dit-il d’un ton doux. D’un point de vue plus général, je pense que tout le monde a une cicatrice au cœur, quelque part. »
Les Monsieur rose au Quartier des spectacles
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La cicatrice, c’est la faille, la pointe d’humanité peut-être, de ce personnage d’une joliesse naïve qu’il a créé en manipulant de la pâte à modeler durant le premier confinement, en jouant avec ses enfants. Un bonhomme qu’il a décliné en plusieurs versions, positions et dimensions et qui incarne aujourd’hui une vision artistique, le « mignonisme ».
Le mignon, dans l’esprit de Philippe Katerine, n’est pas une version enfantine du beau, comme le kawaii japonais. Ce n’est pas non plus un chaton qui joue avec une pelote de laine. « Ça, je ne trouve pas ça forcément mignon », dit-il. Ce gentil mot renvoie chez lui à l’émerveillement : un détail qui rend « mignon » quelqu’un « d’un peu repoussant », explique-t-il, ou encore un personnage rose gomme balloune qui surprend dans un environnement gris.
« Il y a du soleil aujourd’hui, mais Montréal est parfois un peu grise », glisse-t-il en cherchant des yeux l’assentiment de son interlocuteur. « Alors l’idée de cette exposition, c’est de mettre une touche de couleur. Et le rose, c’est vrai, ressort très fort dans l’environnement urbain. »
Entrer dans la fiction
Ses Monsieur rose, Katerine les a d’abord exposés au Bon Marché, un grand magasin de Paris. Le plus imposant d’entre eux (six mètres de hauteur) y était suspendu au-dessus des rayons de parfumerie situés au rez-de-chaussée. « Comme s’il allait s’écraser dessus », précise l’artiste, sans pour autant dire qu’il s’agissait d’un attentat fantasmé contre la société de consommation.
Ils ont aussi été présentés dans une exposition à l’ambassade de France en Suède, un « environnement quand même bien rangé et assez bourgeois », décrit Philippe Katerine.
Les voir là-dedans bouscule un peu l’ordre et ça fait plaisir. Ça raconte une histoire. C’est toujours intéressant de les voir se déplacer.
Philippe Katerine
Katerine a aimé voir l’un de ses personnages suspendu à l’édifice du Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts (« On se demande pourquoi il est là, c’est comme une entrée dans la fiction », suggère-t-il), mais explique qu’il les expose au gré des propositions. Sans plan, sans intention profonde. À l’en croire, il crée sans vision à long terme.
« Je réponds à des besoins personnels, à des nécessités personnelles. J’ai besoin de faire des choses », insiste-t-il, en précisant que la réaction des gens est pour lui secondaire. « C’est une démarche purement égoïste pour sauver ma peau. »
Pas sans malice
Que Philippe Katerine dise fonctionner à l’instinct n’étonne guère. Or, si on le suit en chanson depuis plus de 25 ans, on a plus de mal à le croire lorsqu’il décrit une démarche presque naïve, dépourvue d’ironie. Il faut avouer qu’au fil du temps, on s’est demandé plus d’une fois s’il nous niaisait…
On le lui dit, en expliquant l’expression. Non, il ne teste pas nos limites, assure-t-il, ne cherche pas à savoir jusqu’où on le suivra dans ses folies. « Il y a un goût du jeu », convient toutefois l’artiste, revêtu ce matin-là d’un t-shirt à l’effigie de l’émission pour enfants Sesame Street.
Je suis comme ça dans la vie. J’aime bien jouer. Alors il y a de la malice, c’est sûr…
Philippe Katerine
Philippe Katerine dit beaucoup aimer Jeff Koons, le plasticien américain qui fait notamment des animaux géants ayant l’apparence de ballons gonflables. Un art qui, aux yeux de certains, passe pour une fumisterie. Pas pour lui. « J’ai vu son exposition à Versailles qui a provoqué un choc incompréhensible, d’ailleurs, se rappelle-t-il. Enfin, c’était inscrit dans le mobilier de l’époque, c’est vrai. J’imagine que ça a choqué les gens… »
Lui jure qu’il ne cherche pas à causer de tels chocs. Qu’il n’est pas un provocateur. « Ma mère m’a toujours dit : ce n’est pas ton genre de provoquer. Elle a dû comprendre que, parfois, je voulais provoquer, ce qui n’est pas forcément vrai. Une mère a toujours raison au sujet de son enfant », conclut-il néanmoins, en affichant un sourire énigmatique, comme pour brouiller les pistes.
Philippe Katerine dit tout et son contraire, sur le ton de l’évidence et parfois même de la confidence gênée. Souvent avec un sourire qui désamorce ou désavoue ce qu’il vient tout juste de dire. Il s’en défend mollement lorsqu’on le lui souligne, puis ajoute : « Ma mère m’a toujours dit : on ne sait jamais si tu dis la vérité ou pas. » Il prend une pause. « Et moi, est-ce que je le sais ? Non, conclut-il d’un ton doucereux. Je ne le sais pas du tout. »
Le parcours Le Mignonisme de Philippe Katerine est présenté jusqu’au 29 septembre au Quartier des spectacles et au centre-ville. Le chanteur est également en concert-conférence à la Cinquième Salle de la Place des Arts ce mardi, 20 h (gratuit), puis à La Nef, à Québec, jeudi, 20 h.
Philippe Katerine propose aussi une rencontre et une séance de signature ce mercredi, de 16 h à 18 h 30, au Salon urbain de la Place des Arts.
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