Les trains de l’ancienne ligne Deux-Montagnes seront mis à la ferraille
Les voitures MR-90, sur le terrain du transporteur exo à Pointe-Saint-Charles.
Photo : Radio-Canada / Philippe-Antoine Saulnier
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Philippe-Antoine Saulnier
Publié hier à 19 h 18
Les anciennes voitures de la ligne Montréal-Deux-Montagnes seront envoyées à la casse.
Depuis l’arrêt du service de train de banlieue vers Deux-Montagnes, à la fin de 2020, les 56 voitures électrifiées MR-90 dorment dans la cour du Centre de maintenance de Pointe-Saint-Charles.
Elles auraient pu continuer de rouler encore plusieurs années, mais la construction du REM, dont l’une des sections principales remplacera la ligne de Deux-Montagnes, a mis un terme à leur parcours.
C’est vraiment triste, déplore Caroline Nadeau, qui prenait le train de Deux-Montagnes depuis 1982. C’était la plus avantageuse de toutes les lignes de train de banlieue, avec les fréquences les plus régulières et les plus nombreuses. Tout cela est réduit en poussière.
Avant même la fin du service, l’exploitant exo avait l’espoir de trouver un acquéreur qui aurait pu prolonger la vie utile des 56 voitures MR-90, qui avaient été construites à l’usine de Bombardier à La Pocatière en 1995.
La vie utile d’un matériel roulant ferroviaire, en moyenne, c’est environ 30 ans, affirme Gaétan Turcotte, directeur des services techniques et de l’entretien du matériel roulant ferroviaire. Avec des travaux majeurs, on aurait pu les utiliser encore de cinq à dix ans.
L’intérieur de l’une des anciennes voitures MR-90.
Photo : Radio-Canada / Philippe-Antoine Saulnier
Une firme de consultants a cherché un nouvel exploitant pour les 56 voitures sur plusieurs continents, explique François Théault-Gauvin, chargé de projet en matériel roulant à exo.
Ces voitures ont toutefois des caractéristiques peu fréquentes sur les réseaux nord-américains. Elles sont électriques, autotractées et munies de caténaires à 25 000 volts.
Un acheteur potentiel, qui ne disposait pas des installations électriques nécessaires, est tout de même venu inspecter les voitures lorsqu’elles étaient encore en marche, avec l’espoir de les convertir et de les faire tirer par des locomotives. Malheureusement, explique M. Théault-Gauvin. Il s’est rendu compte que le risque technique et les frais de conversion étaient tellement significatifs pour un actif pour lequel il restait de cinq à dix ans, que ça ne valait pas la peine.
Les voitures seront vendues pour leurs matériaux
À la fin de juin, exo a donc lancé un appel d’offres dans le but de trouver une entreprise qui pourra racheter les voitures et en disposer.
Il y a beaucoup d’acier inoxydable, alors il y a une certaine valeur au niveau de la matière première, explique M. Théault-Gauvin. Le bénéfice en tant que tel, on le saura uniquement à la fin du processus. Tout produit de la vente des voitures sera retourné au ministère des Transports du Québec, puisqu’il en avait subventionné l’achat à 100 %, précise-t-il.
Étant donné que c’est un produit d’ici, il peut y avoir un certain niveau de déception, reconnaît Gaétan Turcotte.
« C’est une belle histoire, mais par la force des choses et en raison de leur vieillissement, c’est la fin pour ces voitures-là. »
— Une citation de Gaétan Turcotte, directeur des services techniques et de l’entretien du matériel roulant ferroviaire
Exo espère trouver un repreneur qui pourra faire sortir les 56 voitures de l’emplacement de Pointe-Saint-Charles d’ici la fin de l’année, car elles occupent environ 30 % de l’espace et l’exploitant a besoin des voies pour mener d’importants travaux d’entretien sur son matériel roulant.
De plus, 44 nouvelles voitures à deux étages, construites en Chine, devront faire l’objet de travaux de préparation lors de leur arrivée au début de 2023.
L’une des nouvelles voitures construites en Chine, qui seront mises en service en 2023 sur le réseau d’exo.
Photo : Radio-Canada
Si les voitures MR-90 sont encore sur le site, ça ralentit le processus, ça a des impacts sur les échéanciers, sur les coûts évidemment, indique Gaétan Turcotte.
Exo espère néanmoins pouvoir léguer un morceau d’histoire à la postérité. Deux voitures devraient être données au musée ferroviaire Exporail, à Saint-Constant, indique la porte-parole Catherine Maurice.
Les anciens usagers de la ligne Deux-Montagnes, quant à eux, doivent prendre leur mal en patience. Avec les nouveaux retards dans la construction du REM annoncés par CDPQ Infra, il se sera écoulé au moins quatre ans entre la fin du service de train de banlieue et l’avènement du nouveau réseau.
Des navettes par autobus ont été mises en place pour atténuer les effets de cette interruption. Mais pour bien des anciens utilisateurs, comme Caroline Nadeau, qui travaille près de l’Université de Montréal, cette offre est insuffisante. Cela occasionnerait un déplacement de plus d’une heure trente, estime-t-elle.
Le service de la ligne Deux-Montagnes permettait de se rendre au centre-ville de Montréal en moins de 45 minutes. Ce qui est un service assez exceptionnel, reconnaît Sarah Bensadoun, porte-parole de Transports Québec et de Mobilité Montréal, qui gère le service de navettes. Forcément, quand on met en place des mesures d’atténuation, rien ne sera comparable avec le confort et le temps de parcours qu’on connaissait auparavant.